Cour d'appel de Rouen, 4 décembre 2008, 07/03025

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ct0548, 4 déc. 2008, n° 07/03025
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 07/03025
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Rouen, 26 juin 2007
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000020269998
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Sur les parties

Texte intégral

R. G. : 07 / 03025

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ

ARRÊT DU 04 DÉCEMBRE 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE ROUEN du 27 Juin 2007

APPELANTE :

Société FLEXI FRANCE

Rue Jean Huré

76580 LE TRAIT

représentée par Me Alain MENARD, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Monsieur Charles X…

76480 ANNEVILLE AMBOURVILLE

et autres

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré :

Madame PLANCHON, Président

Madame AUBLIN-MICHEL, Conseiller

Madame BERTOUX, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Mme NOEL-DAZY, Greffier

DÉBATS :

A l’audience publique du 23 Octobre 2008, où l’affaire a été mise en délibéré au 04 Décembre 2008

ARRÊT :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 04 Décembre 2008, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame PLANCHON, Président et par Mme NOEL-DAZY, Greffier présent à cette audience.

La Sté FLEXI FRANCE a prélevé sur les salaires de juin 2005 de ses salariés ou sur la prime d’intéressement 2004 pour les salariés retraités les sommes qu’elle estimait avoir trop versées à la suite d’un jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 21 mars 2000. Elle se prévalait du dispositif de l’arrêt du 27 janvier 2005 partiellement infirmatif de la cour d’appel de Paris ainsi rédigé : « Ordonne si nécessaire le remboursement du trop versé de la prime par les salariés aux sociétés TECHNIP et FLEXI FRANCE venant aux droits de la société COFLEXIP ».

Le Bureau de Conciliation du Conseil de Prud’hommes de ROUEN saisi à la suite de l’action en remboursement diligentée par les salariés et anciens salariés de la Sté FLEXI FRANCE des sommes prélevées a, dans sa décision du 1er février 2006, en a ordonné la restitution en considérant que les salariés n’étaient pas parties à l’instance qui a donné lieu à l’arrêt du 27 janvier 2005 mais seulement les organisations syndicales et le Comité D’Entreprise contre l’employeur.

En l’absence de conciliation, le Conseil de Prud’hommes de ROUEN a été saisi et a par jugement du 27 juin 2007 :

— prononcé la disjonction de la procédure relative aux prétentions concernant les heures de nuit non payées et le paiement des demandes de majoration pour heures travaillées un jour férié,

— dit que l’action en remboursement du trop versé diligentée par la Sté FLEXI FRANCE est prescrite, considérant que la saisine le 1er février 2006 du bureau de conciliation marquait le point de départ de l’action menée contre les salariés,

— confirmé l’ordonnance du bureau de conciliation du conseil de prud’hommes de ROUEN du 1er février 2006,

— condamné en conséquence la Sté FLEXI FRANCE à rembourser les sommes prélevées sans titre du mois de juin 2005,

— condamné la Sté FLEXI FRANCE à payer à chaque salarié la somme de 250 € de dommages intérêts en réparation du préjudice moral et financier résultant de la privation de la possibilité de placer leur argent.

Ce jugement du 27 juin 2007 a ordonné en outre l’exécution provisoire et son affichage pendant trois mois et a condamné la Sté FLEXI FRANCE au paiement de 40 € à chacun des salariés sur le fondement de l’article 700 ainsi qu’aux dépens.

La Sté FLEXI FRANCE a relevé appel le 19 janvier 2007.

Par conclusions déposées le 2 juin 2008 reprises oralement à l’audience, la Sté FLEXI FRANCE poursuit l’infirmation du jugement et en conséquence, sollicite :

— la condamnation de chaque salarié et ancien salarié à lui restituer le montant indu de la prime de motivation pour l’exercice 1995, y compris les intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2005 selon décompte joint,

— le débouté des salariés et anciens salariés de leurs demandes,

— leur condamnation au paiement de 100 € en application de l’article 700 ainsi que aux entiers dépens.

Au soutien de son appel, la Sté FLEXI FRANCE expose que :

— Un Accord d’Intéressement intitulé « Prime de Motivation et de Performance » a été conclu le 14 décembre 1992 entre les sociétés COFLEXIP, CINT et les Représentants du Comité Central Commun d’Entreprise,

— un avenant en date du 29 juin 1995 a modifié les paramètres de calcul de cette prime. En exécution de cet avenant, des sommes d’argent ont été versées mais un débat s’est instauré au Comité Central sur l’interprétation de cet accord.

— c’est ainsi que le tribunal de grande instance de PARIS a été saisi par le Comité Central et différents syndicats pour voir ordonner l’exécution de l’accord de 1995 et le versement du solde de prime dû et non versé.

— Par jugement du 21 mars 2000, le tribunal de grande instance de PARIS a condamné la Sté FLEXI FRANCE à verser la somme complémentaire de 7. 067 F (1. 077, 36 €) sous astreinte de 10. 000 F par jour de retard portant ainsi le total de la prime à 16. 546 F (2. 522, 10 €).

— la Sté FLEXI FRANCE menacée de liquidation de l’astreinte, a versé à chaque salarié courant juillet ou août 2000 la somme complémentaire sans acquiescement au jugement.

— Statuant sur appel de la Sté FLEXI FRANCE et après expertise, la cour d’appel de PARIS, par arrêt du 27 janvier 2005, a fixé le montant de la prime de motivation au titre de l’année 1995 à la somme de 13. 776 F (2. 098, 99 €) et « ordonné si nécessaire, le remboursement du trop-perçu de la prime par les salariés ». Cet arrêt est devenu définitif. La Sté FLEXI FRANCE a proposé à chaque salarié trois options combinables pour le remboursement du trop-perçu de prime, l’option 1 (retenue sur salaires à partir de mai 2005 et pendant 24 mois) étant applicable en l’absence de réponse du salarié.

— Un certain nombre de salariés qui n’avaient pas répondu ont saisi le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes pour voir dire que la Sté FLEXI FRANCE n’était pas fondée à exiger ce remboursement et voir ordonner la restitution des sommes abusivement prélevées en vertu d’un arrêt qui n’avait pas l’autorité de chose jugée à leur égard, n’étant pas parties, et ne pouvait constituer un titre exécutoire.

L’ordonnance du 1er février 2006 a fait droit à leurs demandes en remboursement et a renvoyé l’affaire devant le bureau de jugement.

La Sté FLEXI FRANCE, après avoir exécuté l’ordonnance du 1er février 2006, a diligenté une procédure de référé-provision.

Par ordonnance du 4 avril 2006, le Juge des référés du conseil de prud’hommes a déclaré la demande de la Sté FLEXI FRANCE recevable et a dit qu’il n’y avait ni litispendance ni prescription mais, retenant l’existence d’une contestation sérieuse, a dit qu’il n’y avait pas lieu à référé.

Statuant sur appel de cette ordonnance, la cour d’appel de ROUEN chambre sociale l’a confirmée mais uniquement en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé.

Le jugement du 27 juin 2007 présentement déféré a été rendu.

Sur la répétition de l’indu :

Appelante, la Sté FLEXI FRANCE se défend d’avoir procédé à une exécution forcée de l’arrêt de la cour d’appel de Paris mais souligne la mauvaise foi des salariés qui ne peuvent contester être redevables d’un trop-perçu. Elle considère que le défaut de réponse à sa proposition valait accord du salarié sur les modalités de remboursement.

La Sté FLEXI FRANCE invoque l’article 1235 du code civil sur la répétition de l’indu et l’article 1376.

Sur la prescription :

La Sté FLEXI FRANCE critique le jugement en ce qu’il a retenu la prescription de son action en remboursement en soutenant que seule la prescription trentenaire est applicable et que le point de départ ne peut qu’être le 27 janvier 2005, date de l’arrêt de la cour d’appel de Paris fixant des inutilement le montant dû.

Selon elle :

* les primes d’intéressement n’ont pas la nature de salaires (article L. 3312-4 ou L. 441-4 de l’ancien code du travail), leur traitement fiscal comme des salaires s’ils ne sont pas affectés dans les 15 jours à un PEE étant indifférent,

* FLEXI FRANCE invoque la prescription de l’article 2262 du Code civil trentenaire de droit commun conforme à la jurisprudence de la cour de cassation deuxième chambre du 10 juin 2004 : l’action en recouvrement des condamnations résultant d’une décision de justice se prescrit par 30 ans.

La répétition de l’indu peut être effectuée même en matière de trop-perçu d’allocations chômage.

C’est le régime du quasi contrat qui est applicable à l’action en répétition des sommes indûment versées au titre des charges locatives.

En conséquence, selon la Sté FLEXI FRANCE, la prescription quinquennale n’est pas applicable.

* la prescription quinquennale de l’article 2277 du Code civil est d’autant plus inapplicable que la créance est indéterminée et faisait l’objet d’un litige devant la juridiction parisienne.

* le point de départ de la prescription se situe au jour de l’arrêt de la cour d’appel de Paris-- le 27 janvier 2005-- déterminant le montant de la prime d’intéressement et par conséquent, le montant de l’indu, le trop versé devenant en conséquence sans cause à cette date et exigible.

La Sté FLEXI FRANCE critique aussi les dommages-intérêts alloués par les premiers juges de manière contradictoire et s’oppose à toute condamnation au paiement de dommages-intérêts en l’absence de faute, ayant versé les sommes complémentaires à la suite du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 12 juillet 2000 et informé les salariés qu’ils pouvaient affecter cette somme au PEE permettant son exonération de l’impôt sur le revenu.

La Sté FLEXI FRANCE sollicite enfin la condamnation des intimés au paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Aux termes de leurs conclusions déposées le 10 octobre 2008 et oralement développées, les salariés intimés demandent à la cour de :

— de déclarer recevable mais mal fondée la Sté FLEXI FRANCE en son appel, la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,

— de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

*dit et jugé que les demandes de restitution d’un prétendu trop versé sur les primes de motivation et performance sollicitées par la Sté FLEXI FRANCE sont prescrites,

* en ce qu’il a confirmé l’ordonnance du bureau de conciliation du 1er février 2006 et condamné en conséquence la Sté FLEXI FRANCE à rembourser : «… À ceux qui ne l’auraient pas été à ce jour, salariés ou anciens salariés et requérants, les sommes prélevées sans titre au mois de juin 2005 ».

— réformant le jugement entrepris, de condamner la Sté FLEXI FRANCE qui vient aux droits de la société COFLEXIP, à payer à chacun des concluants, à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices subis résultant d’une part, de la perte de gain consécutive à l’impossibilité pour chacun des concluants concernés d’avoir pu procéder au placement des sommes versées au titre de l’intéressement 1995 sur le Plan Épargne Entreprise (FCPE COFLEXIP), ceci à compter du mois d’avril 1996, les sommes détaillées en annexe des présentes conclusions,

— réformant le jugement entrepris, de condamner la Sté FLEXI FRANCE qui vient aux droits de la Sté COFLEXIP, à payer à chacun des concluants, à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices moral et financier subis résultant de l’imposition que les concluants ont dû acquitter sur le solde de la prime de motivation et de performance 1995 qui devait être versée en 1996 et qui ne l’a été qu’à partir de juillet 2000, avec leur impôt sur le revenu 2000, outre les intérêts au taux légal à compter d’avril 1996 jusqu’au règlement au mois de juillet 2000 sur lesdites sommes, soit pour chacun 2. 000 € à titre de dommages-intérêts.

— dire et juger que la Sté FLEXI FRANCE a commis un abus de droit en prélevant abusivement, à partir du mois de juin 2005, des sommes prétendument indues, sur leurs salaires ou leur participation ou intéressement, et ce sans le moindre titre exécutoire l’y autorisant ; condamner en conséquence la Sté FLEXI FRANCE à payer, à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice causé au concluant à raison de cet abus de droit, à chacun la somme de 700 €.

— de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la Sté FLEXI FRANCE à verser à chaque demandeur la somme de 40 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— de condamner la Sté FLEXI FRANCE venant aux droits de la COFLEXIP, à payer à chacun des concluants, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile la somme de 300 € pour les frais irrépétibles qu’ils ont été contraints d’exposer devant la cour sur appel de la Sté FLEXI FRANCE pour faire valoir leurs droits,

— enfin de condamner la Sté FLEXI FRANCE aux entiers dépens qui comprendront les éventuels frais et honoraires d’exécution de l’arrêt à intervenir.

Les salariés Sté FLEXI FRANCE invoquent en premier lieu :

— la prescription de l’action de la Sté FLEXI FRANCE en répétition de l’indu par application de l’article 2277 ancien du Code civil aux termes duquel se prescrivent par cinq ans les actions en paiement des salaires, précisant que la loi du 17 juin 2008 prévoit que les demandes en paiement de salaires et les demandes à caractère indemnitaire sont désormais soumises à un seul et même délai de cinq ans : article 3245-1 du Code du Travail et article 2224 et 2254 nouveaux du Code Civil.

Ils soutiennent aussi que la prescription quinquennale s’applique à l’intéressement, se référant à l’évolution de la jurisprudence et de la doctrine selon lesquelles la prescription quinquennale s’applique à toute action afférente aux salaires sans qu’il y ait lieu de distinguer selon qu’il s’agit d’une action en paiement ou en restitution de ce paiement.

Ils soulignent la spécificité et l’autonomie totale de la prescription en droit du travail et se réfèrent aussi à la jurisprudence communautaire selon laquelle la notion de rémunération comprend tous les avantages, en espèces ou en nature, actuels ou futurs, pourvu qu’ils soient payés par l’employeur aux travailleurs en raison de l’emploi de ce dernier.

Les salariés concluent à l’acquisition de la prescription de l’action en répétition de l’indu dès lors que les sommes ont été versées au mois de juillet 2000.

La Sté FLEXI FRANCE a toujours traité cet intéressement comme un complément de salaire et non comme un intéressement à proprement parler, lequel aurait été non imposable et aurait pu être placé sur le compte épargne entreprise.

Selon la jurisprudence nationale et communautaire, il est incontestable que l’intéressement constitue une somme afférente au titre du contrat de travail et constitue un avantage octroyé en relation avec l’emploi, de sorte que seule la prescription quinquennale lui est applicable.

Les salariés soutiennent aussi que la novation opérée par la Sté FLEXI FRANCE lors du paiement du solde de l’intéressement 1995 emporte l’application de la prescription quinquennale.

En effet, la Sté FLEXI FRANCE a fait figurer la somme correspondant à l’intéressement en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 21 mars 2000 sur les bulletins de salaire, la soumettant à cotisations sociales et à impôt sur le revenu, la traitant comme un complément de rémunération.

Selon eux, l’article L. 441-4 ancien du Code du Travail ne se prononce pas sur la nature des sommes attribuées au titre de l’intéressement, se bornant à préciser qu’elles n’ont pas le caractère de rémunération au sens de l’article L. 242-1 ni de revenu professionnel au sens de l’article L. 131-6.

Le point de départ de la prescription se situe au jour du paiement, soit en juillet 2000.

S’agissant des préjudices subis :

Les salariés intimés estiment les prélèvements effectués sans titre par la Sté FLEXI FRANCE abusifs dès lors que l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 27 janvier 2005 ne leur était pas opposable, n’étant pas parties à cette instance et n’ayant pas à leur égard autorité de chose jugée.

Leur préjudice consiste dans le gain manqué, alors qu’ils n’ont pu placer cet intéressement sur le plan épargne-entreprise ni bénéficier de l’exonération fiscale, la Sté FLEXI FRANCE leur ayant signifié qu’elle avait interjeté appel du jugement du tribunal de Paris, ce qui leur interdisait d’effectuer ledit placement. Au contraire, les sommes versées ont été imposées.

SUR CE,

Vu les conclusions développées par les parties :

Sur la prescription :

Attendu qu’à titre liminaire, il sera relevé que si les intimés n’étaient pas parties au litige qui a donné lieu au jugement du tribunal de grande instance de PARIS en date du 21 mars 2000 condamnant la Sté COFLEXIP au paiement de la somme complémentaire de 7. 067 F par salarié au titre de la prime de motivation et de performance et à l’arrêt de la Cour d’Appel de PARIS en date du 27 janvier 2005 qui n’a pas l’autorité de chose jugée à leur égard, c’est en exécution de ce jugement et pour éviter l’application de l’astreinte qu’elle a versé le montant de ces condamnations ;

Attendu que la Sté FLEXI FRANCE invoque la prescription trentenaire de l’action en répétition de l’indu et les intimés la prescription quinquennale dont le point de départ se situe selon eux au jour du versement des sommes fixées par le jugement du 21 mars 2000 ;

Attendu que si la loi du 17 juin 2008 tend à unifier la prescription applicable en matière de litiges trouvant leur origine dans le contrat de travail, leur conférant sauf exceptions, une prescription quinquennale, il n’est pas discuté que le présent litige est régi par les anciennes règles en matière de prescription ;

Attendu que l’action de la Sté FLEXI FRANCE tend au remboursement d’un trop perçu au sens de l’article 1235 du Code Civil ;

Attendu que selon l’article L. 441-4 du Code du Travail devenu L. 3312-4, les sommes attribuées aux salariés en application d’un accord d’intéressement n’ont pas le caractère de rémunération au sens de l’article L. 241-1 du Code de la Sécurité Sociale et ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération au sens du même article ; …. ; les sommes mentionnées au premier alinéa n’ont pas le caractère d’élément de salaire pour l’application de la législation du travail ;

Attendu que cette disposition n’a pas pour finalité d’exclure toute substitution de la prime d’intéressement à un élément de rémunération au sens du code de la Sécurité Sociale mais tend aussi à définir la nature de ces primes, leur refusant la nature d’élément de salaire ;

Qu’en conséquence, la prescription quinquennale de l’action en répétition ne saurait être induite de ces dispositions ;

Attendu que la circonstance que les sommes versées en exécution du jugement du tribunal de grande instance de PARIS aient figuré sur les fiches de paie des salariés et intégrées au brut fiscal n’est pas de nature à opérer novation et à conférer auxdites sommes le caractère d’élément de salaire ; qu’elles n’ont pas été intégrées dans l’assiette des cotisations sociales et ont été versées par la Sté FLEXI FRANCE avec toutes les réserves exprimées quant à la reconnaissance du bien-fondé des dispositions du jugement de condamnation à leur versement ; que le sort fiscal donné à ces sommes dépendaient de leur affectation ou non par les salariés à ces plans d’épargne d’entreprise leur ouvrant droit à des exonérations fiscales conformément aux dispositions des articles L. 3315-2 et suivants du Code du Travail ; que le fait que de fait, ils n’aient pas exercé cette faculté dans une perspective de précaution ne saurait ipso facto conférer la nature d’élément de salaire à ces sommes ;

Attendu qu’en outre, pour que la prescription quinquennale pût être applicable, encore fallait-il qu’elle portât sur une créance certaine et déterminée ; qu’or, le jugement fondant la condamnation de la Sté FLEXI FRANCE au paiement de ces sommes avait été frappé d’appel et une expertise avait été ordonnée pour déterminer le montant de la prime de motivation et de performance telle qu’elle résultait de l’avenant de 1995 ; que ce n’est qu’à la suite de l’arrêt du 27 mars 2005 que la Sté FLEXI FRANCE a pu connaître le montant de cette prime et la réalité d’un trop versé constituant l’indu ; que le point de départ du délai quinquennal se situait dans cette perspective à compter de l’arrêt de la Cour d’Appel de PARIS et non point de la date du versement des sommes versées en trop, peu important à cet égard que l’arrêt de la Cour d’Appel de PARIS n’eût pas l’autorité de chose jugée à l’égard des intimés ;

Qu’en matière de trop perçu, la prescription est trentenaire, la loi du 18 janvier 2005 ayant introduit une exception pour la répétition des loyers, des fermages et des charges locatives ;

Attendu qu’en conséquence, s’agissant d’une action en répétition de l’indu, il convient de dire que la prescription trentenaire était applicable ; qu’en conséquence, infirmant de ce chef, le jugement entrepris, il convient de dire que l’action de la Sté FLEXI FRANCE est non prescrite et recevable ;

Sur le montant des sommes dues :

Attendu que selon l’article 31 de la loi du 9 juillet 1991, l’exécution est poursuivie aux risques du créancier qui, si le titre est ultérieurement modifié, devra restituer le débiteur dans ses droits en nature ou par équivalent ;

Attendu que la Sté FLEXI FRANCE a exécuté le jugement du 21 mars 2000 en ses dispositions bénéficiant à ses salariés ; que si l’arrêt infirmatif du 27 janvier 2005 ne leur est pas opposable, il convient de relever toutefois que la discussion n’a pas été installée sur le montant des sommes versées en trop ; que les salariés intimés n’apportent pas d’éléments de preuve de nature à démontrer le caractère erronée du principe d’évaluation de la prime de motivation et de performance dégagé par l’arrêt de la Cour d’Appel de PARIS et qui sera retenu dans le présent arrêt pour la détermination du trop versé ;

Attendu que les pièces versées aux débats par la Sté FLEXI FRANCE relatives à chacun des salariés et anciens salariés intimés permettent de fixer aux sommes qui seront énoncées dans le dispositif le montant du trop versé ;

Sur les demandes de dommages intérêts des intimés :

Les pertes de gain :

Attendu que les salariés et ex-salariés de la Sté FLEXI FRANCE intimés, formant appel incident de ce chef, sollicitent l’indemnisation du préjudice résultant selon eux de la perte de gain subie consécutive à l’impossibilité pour chacun d’eux d’avoir pu placer les fonds versés au titre de l’intéressement de l’exercice 1995 sur le Plan Epargne Entreprise à compter d’avril 1996 ;

Que cette demande ne pourrait être reçue que sur la fraction de prime non remise en cause ;

Attendu que la décision, certes risquée, de placer ou non les fonds sur le PEP appartenait à chacun ; qu’en outre, l’indemnisation sollicitée ne se justifierait qu’à la condition de démontrer une faute de la Sté FLEXI FRANCE à l’origine de ce préjudice, condition non remplie ;

Attendu qu’ils seront en conséquence déboutés de leur appel et de leurs prétentions de ce chef ;

Sur l’imposition :

Attendu que formant aussi appel incident de ce chef, les intimés sollicitent l’indemnisation du préjudice résultant de l’imposition de leurs revenus subie du fait de l’intégration des primes de motivation et de performance dans leurs revenus et de la privation des bénéfices d’exonération fiscales liées à la possibilité de placement des fonds en Plan Epargne Entreprise (PEP) ;

Mais attendu que la fiscalisation des sommes perçues résulte d’une part de l’abstention à placer les fonds sur les PEP, la Sté FLEXI FRANCE ne pouvant assumer les conséquences de l’application de dispositions fiscales et alors qu’aucune faute en relation avec le préjudice invoqué n’est caractérisée à son encontre ; qu’il appartient à chacun des salariés de solliciter des services fiscaux des rectifications de leurs impositions consécutives à la modification de leurs revenus ;

Que le préjudice moral qu’ils invoquent ne peut être relié à une faute de la Sté FLEXI FRANCE génératrice de responsabilité ;

Sur l’abus de droit reproché à la Sté FLEXI FRANCE :

Attendu que les intimés imputent à la Sté FLEXI FRANCE d’avoir commis un abus de droit en prélevant les sommes versées en trop sur leurs salaires ;

Attendu qu’il convient de rappeler que par lettres du 31 mars 2005, la Sté FLEXI FRANCE a avisé chacun de ses salariés de ce qu’il résultait de l’arrêt de la Cour d’Appel de PARIS statuant sur appel du jugement du tribunal de grande instance de PARIS en date du 21 mars 2000 l’ayant condamnée au paiement de sommes d’argent au titre des primes de motivation et de performance, que des sommes avaient été versées en trop que les salariés devaient rembourser ; que la Sté FLEXI FRANCE a formé trois propositions de remboursement, la première, consistant dans le prélèvement du trop versé sur les 24 mois de salaires à venir, étant appliquée en cas de non-réponse du salarié ; que ces lettres précisaient les sommes dont le remboursement était réclamé et que le service du DRH restait à la disposition du salarié pour toute information complémentaire utile en matière de fiscalité ou autre et pour leur assistance dans les démarches ;

Que la Sté FLEXI FRANCE en l’absence de réponse, a pratiqué sur les salaires les retenues sur salaire ;

Attendu que si en droit du travail, le silence ne vaut pas consentement, les retenues opérées ne peuvent néanmoins être considérées comme abusives ;

Que la demande de dommages intérêts de ce chef n’est pas fondée ;

Sur la demande de dommages intérêts de la Sté FLEXI FRANCE :

Attendu que la Sté FLEXI FRANCE argue de la mauvaise foi dont ont fait preuve selon elle les intimés pour réclamer la condamnation de chacun d’eux au paiement de 50 € de dommages intérêts pour résistance abusive ;

Attendu que la privation des sommes versées en trop par la Sté FLEXI FRANCE sera compensée par les intérêts de retard ; que la Sté FLEXI FRANCE ne peut se prévaloir du préjudice subi par les salariés qui n’ont pas bénéficié de ce versement ;

Attendu que la résistance opposée par les intimés à la récupération des sommes indument versées a entraîné un préjudice pour la Sté FLEXI FRANCE qui sera réparé par la condamnation de chacun des intimés au paiement de la somme de 1 € de dommages intérêts, à l’exception de M. Y… et de M. Z… pour lesquels la société FLEXI FRANCE n’a pas produit de justificatifs de ses demandes ;

Sur les frais et dépens :

Attendu que les intimés qui succombent en leurs prétentions en cause d’appel seront condamnés aux dépens de première instance et d’appel ;

Qu’il convient de condamner chacun des salariés au paiement de la somme de 30 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles que la Sté FLEXI FRANCE a exposés ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 juin 2007 par le conseil de prud’hommes de ROUEN.

Statuant à nouveau :

Déclare l’action de la Sté FLEXI FRANCE en remboursement du trop perçu de prime de motivation et de performance non prescrite, recevable et bien fondée.

En conséquence :

Condamne les salariés ou anciens salariés suivants au paiement au titre du trop perçu de prime de motivation et de performance pour l’exercice 1995 à rembourser :

TITREPRÉNOMNOMMONTANT NET DU TROP PERÇU (€)

Arrêt du 25 / 01 / 2005

1. MonsieurCharles X… 790, 67

et autres

Dit que lesdites sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2005.

Condamne chacun des intimés à verser à la société FLEXI FRANCE la somme de 1 € de dommages et intérêts pour résistance abusive, à l’exception de Messieurs Y… et Z….

Déboute les intimés de l’ensemble de leurs demandes.

Condamne les intimés aux dépens de première instance et d’appel.

Condamne en outre chacun d’entre eux à payer à la société FLEXI FRANCE la somme de 30 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

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