Cour d'appel de Versailles, 20e chambre, 31 décembre 2023, n° 23/08588

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 20e ch., 31 déc. 2023, n° 23/08588
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 23/08588
Importance : Inédit
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 15 janvier 2024
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

20e chambre

Code nac : 14G

N° RG 23/08588 – N° Portalis DBV3-V-B7H-WIKC

Du 31 DECEMBRE 2023

ORDONNANCE

LE TRENTE ET UN DECEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS

A notre audience publique,

Nous, Caroline DERYCKERE, Conseiller à la cour d’appel de Versailles, délégué par ordonnance de monsieur le premier président afin de statuer dans les termes de l’article L 743-21 et suivants du code de l’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Valérie BOST, greffier, avons rendu l’ordonnance suivante :

ENTRE :

Monsieur [F] [X] ou autrement identifié [D] [X], [F] [X], ou [E] [X],

né le 17 Janvier 1995 à [Localité 3], Pologne

de nationalité Polonaise

CENTRE DE RETENTION ADMINISTRATIVE DE [Localité 1]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparant par visioconférence assisté de Me David AUERBACH, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 745 et de Monsieur [V] [R] mandaté par la société STI, interprète en langue polonaise, assermenté à l’audience.

DEMANDEUR

ET :

Monsieur le préfet de l’Essonne, absent.

DEFENDEURS

Et comme partie jointe le ministère public absent

Vu les dispositions des articles L. 742-1 et suivants et R743-10 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’extrait individualisé du registre prévu par l’article L.744-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’obligation de quitter le territoire français du préfet de l’Essonne en date du 13 décembre 2023 notifiée le 19 décembre 2023 à M. [E] [X], ressortissant polonais né le 17 janvier 1995 à [Localité 3] ;

Vu la décision en date du 28 décembre 2023 portant placement de l’intéressé en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 48 heures, notifiée le jour même à 10h37 ;

Vu la requête en contestation de la décision de placement en rétention du 28 décembre 2023 par M. [M] [X] transmise à 14h35 ;

Vu la requête de l’autorité administrative en date du 29 décembre 2023 tendant à la prolongation de la rétention de M. [E] [X] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 28 jours ;

Par ordonnance du 30 décembre 2023 a :

— ordonné la jonction des deux requêtes,

— rejeté le moyen d’irrecevabilité et d’irrégularité de la décision de placement en rétention et la requête en contestation de cette décision,

— déclaré la requête en prolongation de la rétention administrative recevable,

— déclaré la procédure diligentée à l’encontre de M. [M] [X] régulière,

— et ordonné la prolongation de la rétention de M.[X] pour une durée de vingt-huit jours à compter du 30 décembre 2023 à 10h37.

Le 30 décembre 2023 à 13h29, M [M] [X] a relevé appel de cette ordonnance prononcée à distance avec l’utilisation d’un moyen de télécommunication audiovisuelle, qui lui a été notifiée le même jour à 11h55

Il sollicite, dans sa déclaration d’appel, l’infirmation de l’ordonnance et la fin de la rétention. A cette fin, il soulève :

— le fait qu’il justifie de garanties de représentation, puisqu’il a remis son passeport en cours de validité et qu’il réside à [Localité 4] depuis de nombreuses années chez un ami, qu’aucun trouble à l’ordre public ne peut lui être reproché dès lors qu’il a purgé sa peine.

Les parties ont été convoquées en vue de l’audience qui s’est tenue le 31 décembre 2023 à partir de 10h00.

A l’audience, le conseil de M. [X] a soutenu les moyens développés dans la déclaration d’appel, et oppose en outre une déloyauté de l’autorité administrative associée à une violation du principe de séparation des pouvoirs dès lors que la fiche de levée d’écrou mentionne qu’il bénéficie d’une libération conditionnelle, ce qui suppose qu’un juge de l’application des peines a estimé au nom du peuple français qu’il pouvait demeurer libre en France.

Le préfet n’a pas comparu ni adressé d’observations écrites.

M. [X], qui revendique l’identité de [F] [X] selon l’orthographe portée sur la copie de son passeport jointe au dossier, a indiqué que ce qu’il ne comprend pas c’est l’obligation qui lui a été faite de quitter la France, dans la mesure du peu de gravité qu’il prête aux faits délictueux pour lesquels il a été condamné, mais n’a pas d’observation sur la prolongation de son séjour au centre de rétention.

SUR CE :

Sur la recevabilité de l’appel

En vertu de l’article R 743-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d’appel devant le premier président dans les 24 heures de son prononcé, ce délai courant à compter de sa notification à l’étranger lorsque celui-ci n’assiste pas à l’audience. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

L’article R 743-11 du même code prévoit qu’à peine d’irrecevabilité, la déclaration d’appel est motivée.

En l’espèce, l’appel a été interjeté dans les délais légaux et il est motivé. Il doit être déclaré recevable.

Sur l’atteinte au principe de séparation des pouvoirs :

Le juge des libertés et de la détention n’a pas le pouvoir d’apprécier la légalité de l’arrêté à l’origine de l’éloignement de l’étranger, même par voie d’exception.

Il ne peut que contrôler la régularité de la décision de retenir l’étranger dans un lieu ne dépendant pas de l’administration pénitentiaire, le temps strictement nécessaire à la mise à exécution de la mesure d’éloignement.

En vertu de l’article L.741-6 du CESEDA, la décision de placement en rétention est prise par l’autorité administrative, après l’interpellation de l’étranger ou, le cas échéant, lors de sa retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour, à l’expiration de sa garde à vue, ou à l’issue de sa période d’incarcération en cas de détention. Elle ne se confond pas avec une peine et ne porte par conséquent pas atteinte au principe de séparation des pouvoirs lorsqu’elle est prise à la levée d’écrou de l’étranger.

En l’espèce, si la fiche de levée d’écrou de M. [X], mentionne comme motif « libération conditionnelle JAP », il ressort de sa fiche pénale à jour au 18 décembre 2023, que l’intéressé, incarcéré depuis le 18 août 2023, exécutait deux peines respectivement de 4 mois d’emprisonnement, et qu’étant libérable le 18 avril 2024, il a, par décision du juge de l’application des peines du 4 décembre 2023, bénéficié d’une réduction de peine de 112 jours, reportant sa date de libération au 28 décembre 2023, sans notion de libération conditionnelle. M. [X] a d’ailleurs lui-même confirmé que le juge ne lui avait assigné aucune obligation ni de logement ni de travail au titre d’une libération conditionnelle, et qu’il n’avait pas présenté de projet de sortie et de réinsertion. Etant rappelé que le bien-fondé de la mesure d’éloignement échappe à la connaissance du juge judiciaire, il n’apparaît donc pas que la décision de placement en rétention administrative en vue de l’exécution de la mesure d’éloignement porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs. Ce moyen doit donc être écarté.

Sur les garanties de représentation

Aux termes de l’article L 741-1 du CESEDA, l’autorité administrative peut placer en rétention l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus par l’article L731-1 soit, qui ne peut pas quitter immédiatement la France mais dont l’éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir effectivement cette exécution.

Si l’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes de représentation, et ne remplit donc pas les conditions préalables à une assignation à résidence, il importe de permettre à l’autorité administrative d’effectuer toutes démarches utiles auprès des autorités consulaires compétentes de façon à mettre en 'uvre la décision de reconduite à la frontière qui a été prise, étant rappelé que l’article L741-3 du CESEDA, commande de ne placer ou maintenir en rétention l’étranger que pour le temps strictement nécessaire à son départ.

En l’espèce, M. [X] se contredit puisque contrairement à son moyen exposé dans sa déclaration d’appel, il a déclaré qu’il ne résidait chez cet ami à [Localité 4], dont il ne donne d’ailleurs pas l’adresse, pas même lors de sa levée d’écrou, qu’occasionnellement, ne voulant pas être trop envahissant pour sa famille. Par ailleurs, il a clairement manifesté son refus d’exécuter volontairement l’OQTF dont il est l’objet, son intention étant de trouver du travail en France pour être capable d’y louer un logement à son nom. Il est par ailleurs sans emploi et sans ressources.

Les conditions d’une assignation à résidence ne sont donc pas remplies.

Sur la prolongation de la rétention

L’autorité administrative justifie avoir dès le 20 décembre 2023, saisi l’autorité consulaire de Pologne aux fins de délivrance des documents officiels lui permettant de rejoindre son pays d’origine, la demande de routing mentionnant une première date disponible au 6 janvier 2024, et ainsi, démontre qu’elle a accompli les diligences utiles afin de d’assurer l’exécution de l’OQTF dans les meilleurs délais.

En conséquence, il y a lieu de confirmer l’ordonnance entreprise, sauf à la compléter en ce sens qu’elle s’applique à M [M] [X], ou autrement identifié [D] [X], [F] [X], ou [E] [X].

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare le recours recevable en la forme,

Rejette les moyens,

Confirme l’ordonnance entreprise,

Y ajoutant,

Précise qu’elle s’applique à M [M] [X], ou autrement identifié [D] [X], [F] [X], ou [E] [X],

Fait à VERSAILLES le 31 décembre 2023 à 16 h 55

Et ont signé la présente ordonnance, Caroline DERYCKERE, Conseiller à lz cour d’appel de Versailles, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président et Valérie BOST, greffier

LE GREFFIER LE CONSEILLER

Valérie BOST Caroline DERYCKERE

Reçu copie de la présente décision et notification de ce qu’elle est susceptible de pourvoi en cassation dans un délai de 2 mois selon les modalités laissée ci-dessous.

l’intéressé, l’interprète, l’avocat

POUR INFORMATION : le délai de pourvoi en cassation est de DEUX MOIS à compter de la présente notification.

Article R 743-20 du CESEDA :

' L’ordonnance du premier président de la cour d’appel ou de son délégué n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui l’a placé en rétention et au ministère public. '.

Articles 973 à 976 du code de procédure civile :

Le pourvoi en cassation est formé par déclaration au greffe de la Cour de Cassation, qui est signée par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation ;

La déclaration est remise au secrétariat-greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de défendeurs, plus deux ;

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