CAA de BORDEAUX, 1ère chambre - formation à 3, 28 décembre 2017, 15BX02913, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 1re ch. - formation à 3, 28 déc. 2017, n° 15BX02913
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 15BX02913
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Bordeaux, 30 juin 2015, N° 1202166
Identifiant Légifrance : CETATEXT000036314913

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Travaux Aquitains a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer l’annulation ou la résiliation du contrat conclu entre la commune du Bouscat et la société Dunes Construction dans le cadre de la reconstruction du complexe sportif Jean Jaurès et de condamner la commune à lui verser la somme de 276 232,52 euros.

Par un jugement n° 1202166 du 1er juillet 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 août 2015, et un mémoire complémentaire, enregistré le 4 juillet 2017, la SAS Travaux Aquitains, représentée par Me D…, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 1er juillet 2015 ;

2°) de constater la nullité du contrat conclu entre la commune du Bouscat et la société Dune Constructions le 30 janvier 2012, portant sur le lot numéro 3 de l’opération de reconstruction du complexe sportif Jean Jaurès ;

3°) d’annuler la décision du 20 avril 2012 par laquelle la commune du Bouscat a rejeté son recours gracieux ;

4°) de condamner la commune du Bouscat à lui verser la somme de 276 232,52 € au titre de la réparation du préjudice subi du fait de l’irrégularité de la procédure de dévolution du marché de travaux et de son attribution à la société Dune constructions ;

5°) de mettre à la charge de la commune du Bouscat la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – sa requête devant le tribunal était recevable ; le recours gracieux exercé le 6 mars 2012 à l’encontre de la décision du 6 janvier 2012 portant rejet de son offre a eu pour effet d’interrompre le délai de recours contentieux jusqu’à la notification de son rejet le 20 avril 2012 ;

 – le marché de travaux conclu entre la commune du Bouscat et la société Dune Constructions ayant d’ores et déjà été exécuté, elle n’en sollicite plus l’annulation ;

 – contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, l’absence de note ne signifie pas qu’elle a reçu la notation zéro ; une notation zéro suppose que l’offre remise par le candidat a fait l’objet d’une évaluation au regard du critère d’appréciation et que le critère n’est absolument pas respecté, tandis qu’une absence de notation implique que l’offre n’a pas été évaluée au regard dudit critère ;

 – la commune du Bouscat s’est à tort abstenue de noter son offre sur deux des critères définis dans le règlement de consultation : celui des délais d’exécution et celui du développement durable ; s’agissant du délai, il ne lui a pas été demandé de faire figurer sur son offre les mentions relatives à la durée prévisible des travaux relevant de son lot ; la rubrique B5 en particulier ne porte pas sur la durée des prestations du lot n° 3 : elle s’est engagée à respecter l’ensemble des clauses du CCAP, dont son article 6 qui permettait de la noter sur le critère du délai d’exécution ; elle avait également, dans le cadre de son mémoire technique, effectué des propositions de nature à réduire la durée globale d’exécution de travaux ; s’agissant du critère du développement durable, il devait être apprécié au regard des modes opératoires décrits, ainsi qu’il ressort du règlement d’appel d’offres ; le dossier de consultation, et en particulier le CCTP, comportait une description précise des modes opératoires à mettre en oeuvre et des prescriptions de nature environnementale qu’elle s’était engagée à respecter ; le mémoire technique comportait également des précisions relatives aux modes opératoires que l’entreprise s’engageait à mettre en oeuvre ; la commune du Bouscat n’a pas précisé le critère du développement durable ainsi que les modalités selon lesquelles il serait apprécié dans le cadre des travaux litigieux ; son offre n’ayant pas été écartée comme irrecevable, il appartenait à la commune du Bouscat de solliciter sa mise en conformité dans le cadre de la phase de négociation ;

 – la commune du Bouscat a par ailleurs porté une appréciation erronée sur les mérites de l’offre de la société Dune Constructions s’agissant des critères de la valeur technique ; son offre aurait dû avoir une note supérieure à celle de la société Dune Constructions sur le critère de la valeur technique dans la mesure où la variante de fondations par inclusions rigides n’était pas réalisable et était même interdite par les conclusions du rapport de sol ; à défaut de validation par le contrôleur technique, cette solution de fondation, soumise aux aléas que le contrôleur technique a pour mission de prévenir, ne pouvait aucunement donner lieu à une notation maximum sur le critère de la valeur technique ; en l’absence de plans de récolement, il était prévisible que l’enlèvement des fondations puisse conduire à des excavations importantes de nature à modifier les caractéristiques du terrain ;

 – c’est à tort que la commune du Bouscat a alloué la note maximale de 10 à la société Dune Constructions au titre du prix du marché ; le montant de la solution de base proposé par celle-ci était supérieur à l’offre de la société Travaux Aquitains, et la société Dune constructions a bénéficié d’un avenant augmentant le prix suite à l’abandon de la variante proposée, qui s’était avérée irréalisable ;

 – en raison de l’irrégularité de la procédure de passation, la cour ne pourra que constater la nullité du contrat conclu entre la commune du Bouscat et la société Dune Constructions et faire usage des pouvoirs qu’elle tient de la jurisprudence Tropic Travaux ; elle a subi un préjudice correspondant à la perte de chance de remporter le contrat litigieux ; ce préjudice peut être apprécié en fonction d’une part des dépenses qu’elle a exposées pour soumissionner et d’autre part de la marge qu’elle aurait réalisée si elle avait obtenu le contrat ; le montant de cette marge peut être évalué à la somme de 276 232,52 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2015, la SAS Dune Constructions, représentée par Me A…, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Travaux Aquitains de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

 – en l’absence de production de l’accusé réception, il n’est pas possible de s’assurer de ce que la juridiction a bien été saisie dans le délai contentieux de 2 mois suivant la notification des décisions des 9 janvier 2012 et 20 avril 2012 ; il appartient à la requérante de justifier de la recevabilité de ses demandes en annulation de ces décisions ;

 – la jurisprudence relative à 1'absence d’effet interruptif du recours administratif préalable lors de l’introduction, par une partie au contrat, d’un recours en contestation de validité de l’une de ses mesures d’exécution peut être transposée au recours en contestation de validité des mesures d’exécution du contrat formé par un concurrent évincé ; un délai de deux mois courrait à compter du 19 janvier 2012, date à laquelle la décision du maire autorisant l’attribution du MAPA restructuration du complexe sportif a été transmise au contrôle de légalité, publiée et reprise au recueil des actes administratifs de la commune ; la requête du 20 juin 2012 était donc tardive ;

 – ce n’était pas l’offre économiquement la plus avantageuse mais l’offre la plus intéressante qui était requise, laissant à la commune du Bouscat une grande latitude d’appréciation des offres ; le choix de fixer une multiplicité de critères était légitime en présence de prestations complexes portant sur la restructuration du complexe sportif ; les critères liés à l’objet du marché étaient objectifs et opérationnels ; la commune a en outre opéré une pondération entre les différents critères ; le pouvoir adjudicateur s’est tenu à la disposition des candidats pour leur permettre d’affiner leurs offres ;

 – l’appelante savait dès l’origine que les critères relatifs aux délais d’exécution du marché et de développement durable pondérés à 20 % et 10 % constituaient une part non négligeable de l’offre finale ;

 – si effectivement la requérante a fait une proposition pour réduire la durée d’exécution du marché, elle n’a cependant annoncé aucune durée d’exécution de son lot ; la référence au règlement de consultation ne peut suffire à fixer une durée d’exécution ;

 – la référence à la législation applicable ne suffisait pas à satisfaire au critère du développement durable évalué en fonction de la description des modes opératoires employés ;

 – l’appelante n’a obtenu aucun point sur les critères non évaluables et il ressort des documents produits au dossier que la commune a opéré les calculs de pondération en attribuant la note zéro ;

 – aucune illégalité n’entache le critère du prix ; la variante qu’elle a proposée s’est révélée irréalisable seulement au cours des travaux de démolition ; le prix est celui de la variante auquel on a ajouté un avenant ;

 – l’ensemble des critères énoncés aurait conduit au rejet de l’offre de la société Travaux Aquitains ; la société Dune Constructions a présenté l’offre la moins-disante et la plus adaptée aux critères fixés pris dans leur ensemble ;

 – la SAS Travaux Aquitains ayant été traitée comme tous les autres candidats, elle n’a pas été privée d’une chance sérieuse d’emporter le marché de nature à lui permettre de solliciter une indemnisation correspondant à l’intégralité de son manque à gagner.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 10 mai et 26 juillet 2017, la commune du Bouscat, représentée par le cabinet Noyer-C…, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Travaux Aquitains de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

 – en retenant parmi les critères de jugement des offres le critère relatif aux délais d’exécution pondéré à hauteur de 20 %, le pouvoir adjudicateur a nécessairement demandé aux entreprises soumissionnaires de se prononcer sur les délais d’exécution qu’elles entendaient mettre en oeuvre pour exécuter les prestations objets dudit lot et, par suite, d’indiquer expressément dans leur offre la durée d’exécution envisagée ; à la différence de ses concurrents, la requérante n’a pas pris la peine d’indiquer la durée d’exécution du lot n° 3 dans aucune des pièces composant son offre, et notamment la rubrique B5 ; l’absence de cette information essentielle emportait l’irrégularité de l’offre de la requérante, qui aurait pu être écartée sans être classée ; la signature des documents composant le dossier de consultation ne suffit pas à pallier cette lacune dès lors que le délai fixé par l’article 11 du règlement de consultation est un délai d’exécution de l’ensemble des 22 lots ; de même, si dans son mémoire technique, la société Travaux Aquitains a proposé une variante planning, la réduction de temps proposé ne se rapportait à aucun délai d’exécution ;

 – la commune du Bouscat a respecté les dispositions de l’article 53 du code des marchés publics ; la pondération affectée au critère « développement durable » a été communiquée aux candidats intéressés ; ce critère a été énoncé avec suffisamment de précisions puisqu’il devait être évalué « en fonction des modes opératoires décrits par les opérateurs » ; les documents composant le dossier de consultation des entreprises comportaient également de nombreuses informations sur les éléments à prendre en compte au titre du développement durable ; faute d’éléments soumis à son appréciation quant aux éventuelles incidences de la réduction du phasage du planning en matière de développement durable, le pouvoir adjudicateur n’a commis aucune erreur d’appréciation en ne notant pas l’offre de la société sur ce critère ; de même, le rappel de la réglementation sur l’évacuation des déchets ne permettait pas d’apprécier le critère à l’aune de la pratique de l’entreprise ;

 – le contrôleur technique n’a pas à intervenir au stade de la sélection des offres ; au demeurant, la variante proposée par l’entreprise attributaire était conforme à l’étude préliminaire de faisabilité géotechnique réalisée par la société Alios ;

 – le pouvoir adjudicateur n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation sur ce point ;

 – l’augmentation du coût des prestations est intervenue au stade de l’exécution des travaux, soit après l’examen des offres remises par les entreprises concurrentes à l’attribution du lot n° 3 ; une sujétion imprévue est susceptible d’ouvrir droit à rémunération du surcoût en résultant ; l’offre avec variante est la seule offre retenue par la commune du Bouscat ;

 – pour les motifs exposés ci-dessus, les conclusions indemnitaires ne peuvent être accueillies ; en tout état de cause, les conditions d’engagement de la responsabilité de la commune du Bouscat ne sont pas réunies ; aucun comportement fautif ne saurait être retenu à son encontre ; la requérante ne démontre pas avoir eu une chance sérieuse de se voir attribuer le marché litigieux ; son offre était irrégulière et une différence de trente points la séparait de l’entreprise classée en troisième place ; elle ne justifie pas le montant qu’elle sollicite.

Par ordonnance du 4 juillet 2017 la clôture d’instruction a été fixée au 31 juillet 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code des marchés publics ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Cécile Cabanne ;

 – les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

 – et les observations de Me B…, représentant la société Travaux Aquitains et de Me C…, représentant la commune du Bouscat.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d’une procédure adaptée en application de l’article 28 du code des marchés publics, la commune du Bouscat a lancé un appel à la concurrence en vue d’une opération de restructuration du complexe sportif Jean Jaurès comportant 22 lots, publié au bulletin officiel des annonces de marchés publics le 13 septembre 2011. La société Travaux Aquitains a remis une offre correspondant au lot n° 3 « fondations, gros-oeuvre ». Le 10 janvier 2012, la commune du Bouscat a notifié par télécopie à la société Travaux Aquitains que son offre n’avait pas été retenue, au bénéfice de la société Dune Constructions. Après avoir reçu communication des motifs de rejet de son offre le 2 février 2012, la société Travaux Aquitains a exercé un recours gracieux le 6 mars 2012 tendant au retrait de la décision par laquelle la commune a attribué à la société Dune Constructions le lot n°3. Par décision du 20 avril 2012, le maire du Bouscat a refusé de faire droit à cette demande. Le 20 juin 2012, la société Travaux Aquitains a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d’une demande tendant à l’annulation ou la résiliation du contrat conclu entre la commune du Bouscat et la société Dune Constructions dans le cadre de la reconstruction du complexe sportif Jean Jaurès et à la condamnation de la commune à lui verser une somme de 276 232,52 euros en réparation du préjudice subi du fait de son éviction du marché. Par jugement du 1er juillet 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes. La société Travaux Aquitains relève appel du jugement en tant qu’il a rejeté ses conclusions indemnitaires et les conclusions en annulation dirigées contre la décision du 20 avril 2012 portant rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions indemnitaires :

2. En vue d’obtenir réparation de ses droits lésés, un concurrent évincé de la conclusion d’un contrat administratif a la possibilité de présenter devant le juge du contrat des conclusions indemnitaires, à titre accessoire ou complémentaire à des conclusions à fin de résiliation ou d’annulation du contrat. Il peut également engager un recours de pleine juridiction distinct, tendant exclusivement à une indemnisation du préjudice subi à raison de l’illégalité de la conclusion du contrat dont il a été évincé.

3. Lorsqu’un candidat à l’attribution d’un contrat public demande la réparation du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de l’irrégularité ayant, selon lui, affecté la procédure ayant conduit à son éviction, il appartient au juge, si cette irrégularité est établie, de vérifier qu’il existe un lien direct de causalité entre la faute en résultant et les préjudices dont le candidat demande l’indemnisation. Il s’en suit que lorsque l’irrégularité ayant affecté la procédure de passation n’a pas été la cause directe de l’éviction du candidat, il n’y a pas de lien direct de causalité entre la faute résultant de l’irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à raison de son éviction. Sa demande de réparation des préjudices allégués ne peut alors qu’être rejetée.

4. Aux termes du I de l’article 53 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable : " Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur se fonde :1° Soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l’objet du marché, notamment la qualité, le prix, la valeur technique, le caractère esthétique et fonctionnel, les performances en matière de protection de l’environnement, les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l’agriculture, les performances en matière d’insertion professionnelle des publics en difficulté, le coût global d’utilisation, les coûts tout au long du cycle de vie, la rentabilité, le caractère innovant, le service après-vente et l’assistance technique, la date de livraison, le délai de livraison ou d’exécution, la sécurité d’approvisionnement, l’interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles. D’autres critères peuvent être pris en compte s’ils sont justifiés par l’objet du marché ; 2° Soit, compte tenu de l’objet du marché, sur un seul critère, qui est celui du prix.". Ces dispositions laissent à la collectivité publique le choix des critères d’attribution qu’elle entend retenir dès lors que ces critères sont justifiés par l’objet du marché et permettent d’identifier l’offre économiquement la plus avantageuse. Toutefois, pour assurer le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l’information appropriée des candidats sur les critères d’attribution d’un marché public est nécessaire, dès l’engagement de la procédure d’attribution du marché, dans l’avis d’appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats. Dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d’autres critères que celui du prix, l’information appropriée des candidats doit alors porter également sur les conditions de mise en oeuvre de ces critères. Il appartient au pouvoir adjudicateur d’indiquer les critères d’attribution du marché et les conditions de leur mise en oeuvre selon les modalités appropriées à l’objet, aux caractéristiques et au montant du marché concerné.

5. Aux termes de l’article 10 du règlement de consultation relatif aux critères d’attribution du marché en litige: « Offre économiquement la plus avantageuse appréciée en fonction : des critères énoncés ci-dessous avec leur pondération (%) : 1. Valeur technique et moyens mis en oeuvre par l’entreprise pour assurer la prestation (40%), 2. Prix des prestations (30%), 3. Délais d’exécution (20%), 4. Développement durable évalué en fonction des modes opératoires décrits par l’entreprise (10%) ».

6. Si les dispositions du III de l’article 53 du code des marchés publics, qui sont applicables tant aux procédures formalisées qu’aux procédures adaptées, prévoient l’élimination des offres inappropriées, irrégulières et inacceptables avant le classement des autres offres par ordre décroissant, les dispositions de l’article 28 du même code relatives à la procédure adaptée prévoient que le pouvoir adjudicateur peut négocier avec les candidats ayant présenté une offre et que cette négociation peut porter sur tous les éléments de l’offre, notamment sur le prix. Il résulte de ces dispositions que le pouvoir adjudicateur qui, dans le cadre d’une procédure adaptée, décide de recourir à une négociation, peut librement choisir les candidats avec lesquels il souhaite négocier et peut en conséquence, dans le respect du principe d’égalité de traitement entre les candidats, admettre à la négociation les candidats ayant remis des offres inappropriées, irrégulières ou inacceptables et ne pas les éliminer d’emblée. Il doit cependant, à l’issue de la négociation, rejeter sans les classer les offres qui sont demeurées inappropriées, irrégulières ou inacceptables. Aux termes de l’article 35-I-1° du code des marchés publics : « (…) Une offre irrégulière est une offre qui, tout en apportant une réponse au besoin du pouvoir adjudicateur, est incomplète ou ne respecte pas les exigences formulées dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation ». .

7. D’une part, il ressort du rapport d’analyse des offres que la société Travaux Aquitains a obtenu la note globale de 69,74 contre 100 pour la société Dune Constructions. S’il ressort du tableau de notation des offres que les notes sur 10 et les valeurs en % des critères « Délais d’exécution » et « Développement durable » ne sont pas renseignées pour l’offre de la société requérante, compte tenu de la note finale attribuée, c’est à bon droit que le tribunal, qui a suffisamment motivé sa position sur ce point, a estimé que cette absence de note a nécessairement été regardée par le pouvoir adjudicateur comme équivalente à la note zéro. La société requérante ne saurait sérieusement faire valoir que cette absence de note révèlerait un défaut d’examen de son offre alors que la commission d’appel d’offres a expressément mentionné dans son rapport d’analyse que les délais d’exécution et les éléments d’appréciation sur le développement durable n’avaient pas été précisés.

8. D’autre part, il résulte de l’instruction que la société Travaux Aquitains n’a pas renseigné la rubrique B5 contenue dans le formulaire portant acte d’engagement en ce qui concerne la durée d’exécution du lot n° 3, et n’a pas davantage précisé dans aucun autre élément de son offre le délai qu’elle envisageait, alors que cet élément était affiché comme un critère d’appréciation. Si elle fait valoir qu’elle s’est engagée à respecter l’ensemble des clauses du CCAG, ces dernières ne faisaient référence qu’à un calendrier prévisionnel d’exécution globale des 22 lots. La référence dans son mémoire technique à une variante résultant de l’intervention en une seule phase, qui aurait permis de gagner quatre mois environ, ne permettait pas au pouvoir adjudicateur, en l’absence de mention du délai initial, de se prononcer sur la consistance de son offre sur les délais d’exécution des travaux objets du lot n°3. Et, contrairement aux allégations de la requérante, le pouvoir adjudicateur n’était pas tenu de l’inviter à compléter son dossier sur ce point. Dans ces conditions, l’offre de la société Travaux Aquitains n’a pas apporté de réponse au critère du « délai d’exécution » et, en dépit de son classement, cette offre était irrégulière, au sens des dispositions précitées de l’article 35 du code des marchés publics. Par suite, la société Travaux Aquitains était dépourvue de toute chance de remporter le marché et n’est pas fondée à obtenir réparation d’un tel préjudice. Dès lors, les conclusions indemnitaires ne peuvent qu’être rejetées.

9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Dune Constructions, et en l’absence de moyens dirigés contre la décision portant rejet de son recours gracieux, la société Travaux Aquitains n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les frais exposés par les parties à l’occasion du litige :

10. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Bouscat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la société requérante sur leur fondement. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Travaux Aquitains une somme de 1 500 euros à verser respectivement à la commune du Bouscat et à la société Dune Constructions.


DECIDE :


Article 1er : La requête de la société Travaux Aquitains est rejetée.

Article 2 : La société Travaux Aquitains versera respectivement à la société Dune Constructions et à la commune du Bouscat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Travaux Aquitains, à la commune du Bouscat et à la société Dune Constructions


Délibéré après l’audience du 14 décembre 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.


Lu en audience publique, le 28 décembre 2017.


Le rapporteur,

Cécile CABANNELe président,

Catherine GIRAULTLe greffier,

Virginie MARTYLa République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

8

No 15BX02913

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