CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 29 décembre 2020, 18BX04206, Inédit au recueil Lebon

  • Urbanisme et aménagement du territoire·
  • Aménagement du territoire·
  • Développement urbain·
  • Commune·
  • Plan de prévention·
  • Construction·
  • Prévention des risques·
  • Risque technologique·
  • Habitation·
  • Logement social

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 5e ch., 29 déc. 2020, n° 18BX04206
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 18BX04206
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulouse, 4 octobre 2018, N° 1603249-1704068
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042844560

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Fenouillet a demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler l’arrêté du 25 février 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a fixé, au titre de l’année 2016, le montant du prélèvement visé à l’article L. 302-7 du code de la construction et de l’habitat à la somme de 66 934,1759 euros et a affecté ce montant à Toulouse Métropole. Elle a aussi demandé au tribunal d’annuler la décision préfectorale du 24 mai 2016 portant rejet du recours gracieux.

La commune de Fenouillet a également demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler l’arrêté préfectoral du 2 mars 2017 fixant, au titre de l’année 2017, le montant du prélèvement visé à l’article L. 302-7 du code de la construction et de l’habitat à la somme de 78 119,7380 euros et affectant cette somme à Toulouse Métropole. Elle a aussi demandé au tribunal d’annuler la décision du 5 juillet 2017 portant rejet du recours gracieux.

Par un jugement n° 1603249-1704068 du 5 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2018, la commune de Fenouillet, représentée par Me A…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 octobre 2018 ;

2°) de prononcer l’annulation des arrêtés du 25 février 2016 et du 2 mai 2017 susmentionnés ainsi que les décisions rejetant ses recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— Sur la régularité du jugement :

 – le considérant n°3 du jugement vise un article « R. 302-33 » du code de la construction et de l’habitat qui n’existe pas ;

— Sur le bien-fondé du jugement :

 – les arrêtés sont insuffisamment motivés ;

 – le préfet a méconnu l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitat qui permet de dispenser du prélèvement les communes dont 50 % du territoire urbanisé sont inconstructibles ; : la fraction inconstructible de la zone urbanisée de la commune résultant de son plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) varie, selon la méthode de calcul utilisée, de 30 % à 48 % ; à 2 % prés, le préfet aurait dû considérer en application de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation que la commune pouvait être dispensée de ce prélèvement obligatoire ; le préfet aurait dû prendre en compte l’importance de la zone urbanisée inconstructible proche à tout le moins du taux de 50 % ;

 – la cartographie produite par la commune, élaborée par un géomètre expert, montre que le seuil de 50 % des surfaces inconstructibles a été dépassé ;

 – le plan de prévention des risques technologiques, qui crée de nouvelles surfaces inconstructibles, devait également être pris en compte quand bien même il n’a été approuvé que le 26 juin 2017, soit postérieurement aux décisions attaquées dès lors qu’à la date de ces dernières son contenu était suffisamment défini ;

 – en outre le préfet a fait à tort application de l’article L. 302-7 du même code alors que la commune a été confrontée à des annulations de permis de construire ; dans le cadre de la création de la ZAC de Piquepeyre, il a été nécessaire de procéder à des fouilles archéologiques ce qui a retardé la réalisation des programmes de construction ; par une lettre du 10 avril 2017, le préfet a d’ailleurs reconnu le caractère satisfaisant des bilans des trois dernières années au titre de la création de logements sociaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 août 2019, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu’aucun des moyens de la requête n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de la construction et de l’habitation ;

 – la loi n° 2017 -86 du 27 janvier 2017 ;

 – le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme B… C…,

 – et les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier du 5 juin 2014, le préfet de la Haute-Garonne a informé la commune de Fenouillet de l’état de son bilan triennal 2011-2013 en matière de réalisation de logements sociaux et de son intention d’engager la procédure de constat de carence prévue par l’article L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation. Le maire de la commune de Fenouillet a été invité à présenter, dans un délai de deux mois, des éléments permettant d’apprécier la situation de la commune au regard de son obligation de construction de logements sociaux.

2. Par un arrêté préfectoral du 25 février 2016, le montant du prélèvement sur les ressources fiscales de la commune, prévu par l’article L. 302-7 du code de la construction et de l’habitation, a été établi à 66 934,1759 euros au titre de l’année 2016. Puis par un arrêté préfectoral du 2 mars 2017, le montant du prélèvement a été établi à 78 119,7380 euros au titre de l’année 2017. Le maire de Fenouillet a présenté le 26 avril 2016 et le 28 avril 2017 un recours gracieux contre ces arrêtés que le préfet de la Haute-Garonne a rejetés par deux décision du 24 mai 2016 et du 5 juillet 2017, prises au motif que la commune ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier de la dispense du prélèvement prévue par l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation.

3. La commune de Fenouillet relève appel du jugement rendu le 5 octobre 2018 par lequel le tribunal a rejeté sa demande d’annulation des arrêtés du 25 février 2016 et du 2 mars 2017.

Sur la régularité du jugement :

4. La circonstance que le tribunal a cité dans son jugement l’article R. 302-33 du code de la construction et de l’habitation au lieu de l’article R. 302-19 de ce code est à elle seule sans incidence sur la régularité du jugement, à supposer que la commune de Fenouillet ait entendu, pour ce motif, contester celle-ci.

Sur les conclusions dirigées contre les arrêtés du préfet de la Haute-Garonne des 25 février 2016 et 2 mars 2017 ;

5. Aux termes de l’article L. 3025 du code de la construction et de l’habitation : « Les dispositions de la présente section s’appliquent aux communes dont la population est au moins égale à (…) 3 500 habitants (…) qui sont comprises (…) dans une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre total de logements locatifs sociaux représente, au 1er janvier de l’année précédente, moins de 25 % des résidences principales (…) Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé est soumis à une inconstructibilité résultant d’une zone A, B ou C d’un plan d’exposition au bruit approuvé en application de l’article L. 112-6 du code de l’urbanisme ou d’une servitude de protection instituée en application des articles L. 515-8 à L. 515-11 du code de l’environnement, ou à une inconstructibilité de bâtiment à usage d’habitation résultant de l’application du règlement d’un plan de prévention des risques technologiques ou d’un plan de prévention des risques naturels définis, respectivement, aux articles L. 515-15 et L. 562-1 du code de l’environnement (…). ». Aux termes de l’article L. 3027 du même code : « (…) il est effectué chaque année un prélèvement sur les ressources fiscales des communes visées à l’article L. 3025 (…) ». Aux termes de l’article L. 302-8 du même code : « I. – Pour atteindre le taux mentionné, selon le cas, au premier, au deuxième ou au septième alinéa de l’article L. 302-5, le conseil municipal définit un objectif de réalisation de logements locatifs sociaux par période triennale. (…) ». Pour la période triennale 2011-2013, l’objectif de réalisation des logements sociaux de la commune de Fenouillet a été fixé à 15 % des logements sociaux manquants.

6. Il résulte de ces dispositions que les communes entrant dans le champ d’application du premier alinéa de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation sont soumises de plein droit au prélèvement annuel institué à l’article L. 302-7 du même code si le nombre de logements locatifs sociaux dont elles disposent est inférieur à 25 % du nombre de leurs résidences principales, sauf à ce établir que plus de la moitié de leur territoire urbanisé est rendu inconstructible, notamment par le règlement d’un plan de prévention des risques technologiques ou d’un plan de prévention des risques naturels.

En ce qui concerne la motivation des arrêtés du préfet de la Haute-Garonne :

7. En vertu des dispositions de l’article L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation, le préfet peut, outre le montant du prélèvement dû par une commune au titre de l’article L. 302-7 du même code, fixer, à titre de sanction, une majoration de ce prélèvement après avoir constaté la carence de la commune à remplir ses obligations dans les conditions déterminées par l’article L. 301-9-1.

8. Il ressort des pièces du dossier que le préfet n’a pas mis en oeuvre à l’encontre de la commune de Fenouillet la procédure de carence qui peut déboucher sur une sanction. Par les arrêtés en litige du 25 février 2016 et du 2 mars 2017, le préfet de la Haute-Garonne a seulement fait application de l’article L. 302-7 du code de la construction et de l’habitation en fixant le montant du prélèvement dû par la commune pour le financement des logements sociaux. Ces arrêtés n’ont pas le caractère de sanction et n’avaient, dès lors, pas à être motivés. En tout état de cause, les arrêtés visent les textes applicables et il n’est pas contesté qu’ils ont été notifiés avec les courriers du même jour qui indiquaient avec précision les bases de liquidation des prélèvements.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation :

9. En application du cinquième alinéa de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, une commune est exemptée du prélèvement institué par l’article L. 307-2 du même code lorsque plus de la moitié de son territoire urbanisé est soumis à une inconstructibilité résultant de l’application d’un plan de prévention des risques naturels ou du règlement d’un plan de prévention des risques technologiques.

10. Il ressort des pièces du dossier qu’en 2014, le maire de Fenouillet a sollicité la direction départementale des territoires afin que la situation de la commune soit étudiée « au regard de ses contraintes en matière d’inondabilité et des pénalités qui lui sont actuellement appliquées au titre de la loi solidarité et renouvellement urbain ». En août 2014, les services préfectoraux ont considéré que les surfaces inconstructibles de la commune représentaient 48 % de son territoire urbanisé à la suite d’une approche reconnue comme sommaire car résultant d’un simple rapport entre les territoires classés en « aléa fort » par le plan de prévention des risques d’inondation et la superficie des zones urbanisées existantes. Ce calcul a ultérieurement été affiné par la direction départementale des territoires au moyen d’un outil cartographique, encore affiné ensuite, ce qui a permis de considérer que 41,83 % du territoire urbanisé de la commune est inconstructible.

11. L’étude cartographique produite par la commune de Fenouillet ne contredit pas cette analyse dès lors que le seuil de 57 % de surfaces inconstructibles de son territoire urbanisé auquel aboutit cette étude prend en compte les surfaces de voirie, les espaces boisés classés et les bâtiments publics, autant d’espaces qui ne doivent pas être retenus comme des fractions inconstructibles en vertu des articles L. 302-5 et L. 302-7 du code de la construction et de l’habitation. La commune de Fenouillait ne produit aucun autre élément permettant de mettre en doute les résultats auxquels sont parvenus les services préfectoraux à la suite de l’étude mentionnée ci-dessus.

12. La commune de Fenouillet soutient par ailleurs que les conclusions du plan de prévention des risques technologiques en cours d’élaboration à la date des décisions attaquées auraient dû être pris en considération pour l’appréciation du seuil d’inconstructibilité de 50 % mentionné à l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation. Toutefois, à la date des arrêtés attaqués, le règlement du plan de prévention des risques technologiques n’était pas encore en vigueur et, par suite, opposable. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que le seuil de 50 % de l’article L. 302-5 n’aurait pas été franchi même en tenant compte des surfaces rendues inconstructibles par le plan de prévention des risques technologiques.

13. Dès lors que les surfaces inconstructibles représentaient ainsi moins de la moitié de son territoire urbanisé, la commune de Fenouillet ne pouvait prétendre à être exemptée du prélèvement en litige.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation :

14. La procédure de fixation du prélèvement, instituée par les dispositions précitées de l’article L. 302-7 du code de la construction et de l’habitation est indépendante de la procédure de carence, prévue à l’article L. 302-9-1-1 de ce même code, au cours de laquelle la commune intéressée peut faire valoir les difficultés qu’elle a rencontrées pour satisfaire ses obligations en matière de logements sociaux. Il est constant que la commune de Fenouillet n’a pas fait l’objet de cette dernière procédure dès lors que, si le préfet de la Haute-Garonne a informé, en 2014, le maire de son « intention de mettre en oeuvre la procédure de carence » prévue par l’article L. 302-9-1, il n’a en définitive pris aucun arrêté imposant une majoration du prélèvement. Par suite, la commune de Fenouillet, qui n’a pas été sanctionnée, n’est pas fondée à se prévaloir à l’encontre de la fixation du prélèvement dont elle est redevable, en vertu de l’article L. 302-7 du code de la construction et de l’habitation, des difficultés « matérielles et juridiques » qu’elle soutient rencontrer dans la réalisation de ses objectifs triennaux et qui résultent notamment d’annulations contentieuses de permis de construire ou de retards pris par certains chantiers pour cause de fouilles archéologiques.

En ce qui concerne le moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction :

15. Ce moyen est inopérant dès lors que, ainsi qu’il a été dit, les prélèvements forfaitaires imposés par les arrêtés en litige ne sont pas des sanctions.

16. Il résulte de ce qui précède que la commune de Fenouillet n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse, a rejeté ses demandes.

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la commune de Fenouillet demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :


Article 1er : La requête de la commune de Fenouillet est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fenouillet et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités locales. Copie en sera délivrée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l’audience du 15 décembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme B… C…, premier conseiller,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2020.


Le président,

Frédéric Faïck

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités locales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

7

N° 18BX04206

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 29 décembre 2020, 18BX04206, Inédit au recueil Lebon