CAA de MARSEILLE, 3ème chambre, 30 décembre 2021, 21MA02661, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 3e ch., 30 déc. 2021, n° 21MA02661
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 21MA02661
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 12 avril 2021, N° 2009969
Identifiant Légifrance : CETATEXT000044826712

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E… B… a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler l’arrêté qui lui a été notifié le 3 décembre 2020 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d’éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d’une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2009969 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2021, Mme B…, représentée par Me Ant, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du 13 avril 2021 ;

2°) d’annuler l’arrêté préfectoral précité ;

3°) d’enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour d’un an portant la mention « vie privée et familiale » dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d’un mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, en lui délivrant, dans l’attente, une autorisation provisoire de séjour l’autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

— elle est insuffisamment motivée ;

 – elle est entachée d’un défaut d’examen particulier de sa situation ;

 – elle méconnaît les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 – elle peut se prévaloir de la circulaire n° NORINTK1229185C du 28 novembre 2012 ;

 – le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste quant à l’appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

Sur l’obligation de quitter le territoire français :

— elle est illégale par voie de conséquence de l’illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans :

— elle est illégale à raison de l’illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

 – elle viole les dispositions du III de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

 – elle méconnaît les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n’a pas produit d’observations en défense.

Mme B… a été admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 – le code des relations entre le public et l’administration ;

 – le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

 – la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

 – le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

 – le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de Mme Bernabeu a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E… B…, ressortissante comorienne née le 16 avril 1981, a sollicité, le 18 avril 2017, la délivrance d’un titre de séjour en qualité de parent d’enfant français, sur le fondement des dispositions du 6° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par un arrêté notifié le 3 décembre 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d’une durée de deux ans. L’intéressée relève appel du jugement du 13 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral précité.

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, les moyens tirés de l’insuffisante motivation de la décision portant refus de titre de séjour et du défaut d’examen réel et sérieux de la situation de Mme B…, qui sont repris en appel en des termes identiques et sans élément nouveau, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui. ".

4. Si Mme B… soutient être entrée en France le 26 février 2016 sous couvert d’un visa C et y résider de manière habituelle, il ressort des pièces du dossier que l’intéressée ne justifie d’un logement personnel que depuis le 1er septembre 2019. Par ailleurs, en dépit de son activité professionnelle d’agent de service ou de femme de chambre qu’elle a exercée, par intermittence, pour le compte de plusieurs employeurs durant les périodes du 24 juillet au 25 septembre 2017, du 28 mai au 12 novembre 2018 et du 1er au 31 décembre 2018, puis de manière continue depuis le 1er janvier 2019 sous couvert d’un contrat à durée indéterminée à temps partiel à hauteur de soixante-dix-huit heures mensuelles, conclu avec la société PLD Méditerranée pour une rémunération inférieure au salaire minimum de croissance, tout en travaillant également au profit de la société Beauregard entre le 8 février 2019 et le 10 mars 2019, la requérante ne démontre pas une insertion particulière au sein de la société française, sans qu’elle ne puisse se prévaloir de la circulaire n° NORINTK1229185C du 28 novembre 2012, dépourvue de tout caractère règlementaire. Il ressort en outre des pièces du dossier que le fils de A… B…, D…, né le 10 octobre 2016 à Marseille, a été reconnu le 23 septembre 2016 par M. F… C…, ressortissant français né le 5 décembre 1957, dont il n’est pas le père biologique, ainsi qu’en atteste la réalisation de tests ADN dans le cadre d’une enquête de police diligentée par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille. Par ailleurs, si la requérante fait valoir que cet enfant est né d’un viol qu’elle aurait subi en Arabie-Saoudite et qu’à son entrée en France, M. C… lui a porté assistance pour subvenir à ses besoins et ceux de son fils, elle n’apporte aucun élément pour en justifier. Il ressort en outre des procès-verbaux d’audition dressés le 5 décembre 2017 par les services de la police aux frontières que Mme B… et M. C… ont reconnu avoir menti sur la paternité de l’enfant afin que la requérante obtienne un titre de séjour. Par un jugement du 22 février 2018, le tribunal correctionnel de Marseille a d’ailleurs condamné Mme B… à une peine de six mois d’emprisonnement avec sursis pour les faits de complicité de reconnaissance d’enfant pour l’obtention d’un titre de séjour, d’une protection contre l’éloignement ou pour l’acquisition de la nationalité française. Enfin, si l’appelante se prévaut de la scolarisation en France de son fils en classe de moyenne section de maternelle à la date de la décision attaquée, il n’est pas établi, ni même allégué, que ce dernier ne pourrait pas poursuivre une scolarité normale dans son pays d’origine. L’intéressée n’établit pas davantage être dépourvue d’attaches sociales et familiales aux Comores, pays où elle a vécu au moins jusqu’à l’âge de trente-cinq ans. Dans ces conditions, et en dépit de ses efforts d’insertion professionnelle, la décision litigieuse n’a pas porté au droit de Mme B…, qui, au demeurant, a fait l’objet d’une condamnation pénale, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n’a pas, par suite, méconnu les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La décision attaquée n’est pas davantage entachée d’une erreur manifeste quant à l’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire national dans le délai de trente jours :

5. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que la décision de refus de titre de séjour n’est pas illégale. Par suite, le moyen tiré de l’exception d’illégalité du refus de titre de séjour ne peut qu’être écarté.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l’illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, invoquée par voie d’exception à l’encontre de la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d’une durée de deux ans, doit être écarté.

7. En second lieu, en application des quatrième et huitième alinéas du III de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, en vigueur à la date de la décision contestée, le préfet peut, dans le respect des principes constitutionnels et conventionnels et des principes généraux du droit, assortir une obligation de quitter le territoire français pour l’exécution de laquelle l’intéressé dispose d’un délai de départ volontaire, d’une interdiction de retour sur le territoire français d’une durée maximale de deux ans, en se fondant pour en justifier tant le principe que la durée, sur la durée de sa présence en France, sur la nature et l’ancienneté de ses liens avec la France, sur la circonstance qu’il a déjà fait l’objet ou non d’une mesure d’éloignement et sur la menace à l’ordre public que représenterait sa présence en France.

8. Il ressort des pièces du dossier que si Mme B… se maintient sur le sol français depuis l’année 2016, elle n’y justifie pas d’une insertion socioprofessionnelle particulière ni d’attaches personnelles et familiales fortes. A cet égard, par les quelques attestations de proches qu’elle produit, l’intéressée n’établit pas que son jeune fils entretiendrait des liens réguliers avec M. C…, qui n’est ni le père biologique de son enfant ni son compagnon. Ainsi qu’il a été précédemment énoncé au point 4 du présent arrêt, Mme B… a fait l’objet d’une condamnation pénale à une peine d’emprisonnement de six mois avec sursis prononcée le 22 février 2018 pour des faits de complicité de reconnaissance d’enfant pour l’obtention d’un titre de séjour. Par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône, qui s’est fondé sur les critères mentionnés au III de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pour prononcer la mesure d’interdiction de retour sur le territoire français, a pris en compte l’ensemble des éléments afférents à la situation personnelle de Mme B…. Eu égard à ces éléments, l’interdiction de retour pour une durée de deux ans dont elle fait l’objet ne présente pas de caractère disproportionné. Le préfet n’a ni entaché sa décision d’une erreur d’appréciation au regard des critères définis au III de l’article L. 511-1 précité ni d’une méconnaissance des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que Mme B… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté attaqué. Ses conclusions aux fins d’injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E… B…, à Me Ant et au ministre de l’intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l’audience du 16 décembre 2021, où siégeaient :

— Mme Paix, présidente,

 – Mme Bernabeu, présidente assesseure,

 – Mme Carotenuto première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 décembre 2021.

3

N° 21MA02661

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