CAA de MARSEILLE, 7ème chambre, 31 décembre 2021, 19MA05335, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 7e ch., 31 déc. 2021, n° 19MA05335
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 19MA05335
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 6 octobre 2019, N° 1703555, 1705637
Identifiant Légifrance : CETATEXT000044890319

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. Mme C… A… a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler l’arrêté du 28 février 2017 par lequel le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l’octroi d’un congé de longue maladie et d’enjoindre au ministre de la défense de réexaminer sa situation et de prendre un nouvel arrêté portant attribution d’un congé de longue maladie à compter du 8 juin 2015.

Par un jugement n° 1703555, 1705637 du 7 octobre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 décembre 2019 et 25 avril 2021, sous le n° 19MA05335, Mme A…, représentée par Me Bonnefoi, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du 7 octobre 2019 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d’annuler l’arrêté du 28 février 2017 en tant qu’il porte rejet d’attribution d’un congé de longue maladie ;

3°) d’enjoindre au ministre de la défense de reprendre un arrêté portant attribution d’un congé de longue maladie à compter du 8 juin 2015 ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – elle abandonne expressément les moyens de « forme » soutenus en première instance ;

 – elle soutient que le ministre de la défense reconnaît désormais clairement le lien entre sa maladie et ses « troubles psychologiques » ;

 – elle remplit les trois conditions d’un congé de longue maladie : traitement et soins prolongés, caractère invalidant, gravité confirmée et est atteinte d’une maladie rare ;

 – le tribunal administratif a commis une erreur de compréhension en indiquant qu’elle avait demandé à bénéficier d’un congé de longue durée et du 4° de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984 ;

 – les fins de non-recevoir opposées par l’administration doivent être écartées dès lors que la requête comporte des moyens de droit visant à l’annulation de la décision attaquée.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 avril 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que la requête d’appel est irrecevable et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Procédure contentieuse antérieure :

II. Mme C… A… a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler la décision du 14 juin 2017 par laquelle le bureau local des ressources humaines de Marseille du ministère des armées a refusé de faire droit à sa demande indemnitaire et de condamner l’Etat à lui payer la somme totale à parfaire de 29 600 euros au titre des préjudices patrimonial et moral subis, et des troubles dans ses conditions d’existence, assortie des intérêts légaux avec capitalisation.

Par un jugement n° 1703555, 1705637 du 7 octobre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 décembre 2019 et 25 avril 2021, sous le n° 19MA05355, Mme A…, représentée par Me Bonnefoi, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du 7 octobre 2019 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d’annuler la décision du 14 juin 2017 de la ministre des armées rejetant sa demande indemnitaire.

3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 9 600 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux, de 10 000 euros au titre des troubles dans les conditions d’existence et de 5 000 euros au titre de son préjudice moral.

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – le préjudice en termes de rémunération est de 800 euros par mois, soit 9 600 euros pour une année ;

 – les troubles subis dans les conditions d’existence sont évalués à 10 000 euros ;

 – le préjudice moral subi est évalué à 10 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 avril 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que la requête d’appel est irrecevable et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code des relations entre le public et l’administration ;

 – la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

 – le décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l’organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d’aptitude physique pour l’admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

 – l’arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l’octroi de congés de longue maladie ;

 – le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Virginie Ciréfice, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en application de l’article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Prieto,

 – les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

 – et les observations de Me Bonnefoi, représentant Mme A….

Considérant ce qui suit :

1. Mme A…, adjointe administrative principale de 2ème classe, exerce ses fonctions au sein de l’hôpital d’instruction des armées Lavéran à Marseille. Elle est atteinte du syndrome de Brugada et de troubles psychologiques en lien avec cette maladie. Elle a sollicité le 16 septembre 2015 l’octroi d’un congé de longue maladie à compter du 16 janvier 2015. A la suite de l’avis défavorable émis le 8 juin 2016 par le comité médical départemental des Bouches-du-Rhône, le ministre de la défense a rejeté sa demande par arrêté du 27 juin 2016 et l’a placée en congé de maladie ordinaire du 16 janvier 2015 au 15 janvier 2016. Elle a ensuite été placée en disponibilité d’office pour raison de santé à compter du 16 janvier 2016, renouvelée jusqu’au 15 octobre 2017. Par courrier du 30 septembre 2016, la requérante a contesté l’avis rendu par le comité médical. A la suite des avis défavorables émis le 6 février 2017 par le comité médical supérieur et le 15 février 2017 par le comité départemental des Bouches-du-Rhône, le ministre de la défense a rejeté sa demande par arrêté du 28 février 2017. Par courrier du 12 mai 2017, l’intéressée a formé un recours gracieux et indemnitaire contre cette décision. Par courrier du 14 juin 2017, le bureau local des ressources humaines de Marseille du ministère des armées a rejeté sa demande.

2. Mme A… relève appel du jugement n° 1703555, 1705637 du 7 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ces demandes. Elle demande également l’annulation de l’arrêté du 28 février 2017 en tant qu’il a refusé de lui accorder le bénéfice d’un congé de longue maladie, ainsi que l’annulation de la décision du 14 juin 2017 et la condamnation de l’Etat à réparer les préjudices qu’elle estime avoir subis.

Sur la jonction :

3. Les requêtes n° 19MA05335 et 19MA05355 présentent à juger des questions connexes et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : « Le fonctionnaire en activité a droit : (…). 3° A des congés de longue maladie d’une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l’intéressé dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu’elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. (…). 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis (…). ». Aux termes de l’article 28 du décret du 14 mars 1986 : « (…) le ministre chargé de la santé détermine, par arrêté, (…) une liste indicative de maladies qui, si elles répondent en outre, aux caractères définis à l’article 34-3° de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, peuvent ouvrir droit à un congé de longue maladie (…). ». Aux termes de l’article 1 de l’arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l’octroi de congés de longue maladie : «   » Un fonctionnaire est mis en congé de longue maladie lorsqu’il est dûment constaté qu’il est dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions au cours d’une des affections suivantes lorsqu’elle est devenue invalidante : (…). 5. Maladies cardiaques et vasculaires : – angine de poitrine invalidante ; – infarctus myocardique ; – suites immédiates de la chirurgie cardio-vasculaire ; – complications invalidantes des artériopathies chroniques ; – troubles du rythme et de la conduction invalidante ; – cœur pulmonaire postembolique ; – insuffisance cardiaque sévère (cardiomyopathies notamment). (…). « . Aux termes de l’article 2 de ce même arrêté : » Les affections suivantes peuvent donner droit à un congé de longue maladie dans les conditions prévues aux articles 29 et 30 des décrets susvisés : – tuberculose ; – maladies mentales ; – affections cancéreuses ; – poliomyélite antérieure aiguë ; – déficit immunitaire grave et acquis. ".

5. L’article 3 de ce même arrêté dispose que : « Un congé de longue maladie peut être attribué, à titre exceptionnel, pour une maladie non énumérée aux articles 1er et 2 du présent arrêté, après proposition du comité médical compétent à l’égard de l’agent et avis du comité médical supérieur. Dans ce cas, il doit être constaté que la maladie met l’intéressé dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu’elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée ».

6. Mme A… est atteinte du « syndrome de Brugada », maladie génétique rare diagnostiquée en 1999. Elle fait état de ce que les troubles liés à cette maladie se sont accentués depuis 2013, qu’ils sont devenus très invalidants depuis 2014, nécessitant la pose d’un défibrillateur le 3 octobre 2016. Elle soutient qu’elle est soignée pour des troubles psychologiques en lien avec cette maladie, notamment pour des troubles anxieux majeurs de type « attaques de panique », et que ces pathologies ne lui permettent ni d’exercer son activité professionnelle ni de conduire ou de prendre les transports en commun. Elle estime que sa maladie cardiaque, par ses effets, peut être assimilée à un trouble du rythme et de la conduction invalidante, et à une insuffisance cardiaque sévère, listés dans l’arrêté du 14 mars 1986. Elle se prévaut d’un contrôle du défibrillateur implanté réalisé le 21 novembre 2016, d’un compte-rendu d’hospitalisation du 2 au 4 octobre 2016 pour le changement du boitier de son défibrillateur et de certificats médicaux du docteur B…, médecin psychiatre, qui la suit pour ses troubles psychologiques, des 29 août 2015, 15 et 20 septembre 2016, 21 décembre 2016 et 17 janvier 2017 qui attestent que son état de santé ne lui permet pas de reprendre une activité professionnelle en raison de ses troubles psychiques, notamment de troubles de panique, qui sont invalidants puisqu’ils induisent une incapacité à la conduite automobile de son véhicule et à la prise des transports en commun ainsi que la présence de troubles de paniques quasi quotidiens, et qui justifient l’octroi d’un congé de longue maladie.

7. En premier lieu, ainsi que l’ont relevé les premiers juges, ces documents, s’ils permettent d’établir que l’appelante subit des épisodes d’anxiété majeure, ne suffisent pas à démontrer que les pathologies dont souffre la requérante présentent un caractère invalidant et de gravité confirmée justifiant l’obtention d’un congé de longue maladie. Ils ne fournissent aucune précision concrète sur la nature de sa pathologie cardiaque et se bornent, pour l’essentiel, à révéler son incapacité à reprendre le travail en raison d’un état anxieux réactionnel.

8. En deuxième lieu, le rapport d’expertise établi par le docteur D… le 8 février 2016 s’il atteste de ce que la requérante présente « un état anxieux, réactionnel à une problématique somatique invalidante et survenant dans un conteste personnel et familial anxiogène », conclut que « l’examen clinique ne permet pas de retrouver d’élément d’endogénicité ou de symptôme de sévérité pouvant justifier l’attribution d’un congé de longue maladie » et que, dans ces conditions, l’attribution d’un tel congé n’est pas justifié.

9. En troisième lieu, le comité médical puis le comité médical supérieur ont émis deux avis défavorables les 8 juin 2016 et 6 février 2017, puis le 15 février suivant de nouveau par le comité médical supérieur, par lesquels ils ont estimé que les critères requis pour un congé de longue maladie n’étaient pas remplis. La circonstance que l’intéressée n’a jamais repris son activité professionnelle, qu’elle a sollicité le renouvellement de sa disponibilité pour raisons de santé et, qu’ayant épuisé la période de disponibilité autorisée, elle a demandé sa mise en retraite pour invalidité qui est en cours d’examen par son administration, est sans incidence sur l’appréciation portée par son employeur sur son état de santé.

10. En dernier lieu, la requérante se prévaut de documents médicaux plus récents tels que des certificats médicaux du docteur B… des 16 avril 2018, 30 mai 2018, 21 juin 2018, 5 novembre 2018 et 19 février 2019, d’un compte-rendu d’hospitalisation du 19 septembre 2018 et d’une prise en charge par sa mutuelle pour une longue durée à compter du 18 septembre 2018 mais ces éléments ne suffisent pas à établir que son état de santé serait susceptible de remettre en cause l’avis du comité médical supérieur s’étant prononcé à deux reprises en défaveur de l’octroi d’un congé de longue maladie. Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la ministre des armées a refusé de placer Mme A… en congé de longue maladie.

11. Par suite, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre des armées, Mme A… n’est pas fondée à soutenir que l’arrêté attaqué, en tant qu’il a refusé de lui accorder le bénéfice d’un congé de longue maladie, est entaché d’erreur de droit ou d’erreur d’appréciation.

12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de procéder à la mesure d’instruction sollicitée, que Mme A… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

13. La présente décision, qui confirme le rejet des conclusions de Mme A… tendant à l’annulation de la décision contestée du 28 février 2017, n’appelle aucune mesure d’exécution. Par suite, les conclusions à fin d’injonction doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin d’annulation de la décision du 14 juin 2017 et indemnitaires :

14. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d’annulation de l’arrêté du 28 février 2017, entraîne, par voie de conséquence, le rejet des conclusions à fin d’annulation de la décision du 14 juin 2017 et des conclusions indemnitaires dès lors que l’employeur de Mme A… n’a commis aucune faute en lui refusant le bénéfice d’un congé de longue maladie.

Sur les frais du litige :

15. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme A… sur ce fondement.


D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme A… sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C… A… et à la ministre des armées.

Délibéré après l’audience du 17 décembre 2021, où siégeaient :

— Mme Ciréfice, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l’article R. 222-26 du code de justice administrative,

 – M. Prieto, premier conseiller,

 – Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 décembre 2021.

N° 19MA05335, 19MA05355 2

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