Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 11 mai 2021, n° 19NC00739

  • Palestine·
  • Délibération·
  • Tribunaux administratifs·
  • Commune·
  • Conseil municipal·
  • Collectivités territoriales·
  • Solidarité·
  • Justice administrative·
  • Associations·
  • Intervention

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 3e ch., 11 mai 2021, n° 19NC00739
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 19NC00739
Décision précédente : Tribunal administratif de Nancy, 27 décembre 2018, N° 1802037
Dispositif : Satisfaction partielle

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de Meurthe-et-Moselle a demandé au tribunal administratif de Nancy d’annuler la délibération du 9 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Villerupt a décerné la citoyenneté d’honneur de la commune à M. B D.

Par un jugement n° 1802037 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Nancy a annulé la délibération contestée.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mars 2019, la commune de Villerupt, représentée par Me C, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1802037 du tribunal administratif de Nancy du 28 décembre 2018 ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de Meurthe-et-Moselle ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros à lui verser en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— c’est à tort que le tribunal a admis la recevabilité du déféré préfectoral, qui était tardif et dirigé contre un acte non décisoire ;

— le jugement est insuffisamment motivé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2019, le préfet de

Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu’aucun des moyens soulevés par la requérante n’est fondé.

Par un mémoire, enregistré le 12 septembre 2019, l’association France Palestine Solidarité, représentée par Me E, déclare intervenir volontairement au soutien des conclusions de la requête de la commune de Villerupt.

Elle soutient que :

— son intervention est recevable ;

— le déféré du préfet est discriminatoire ;

— la délibération, qui ne menace pas l’ordre public et accorde une distinction justifiée par la personnalité de son récipiendaire, n’est pas illégale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général des collectivités territoriales ;

— le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. A,

— les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

— et les observations de Me C pour la commune de Villerupt et de Me E pour l’association France Palestine Solidarité.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 9 octobre 2017, le conseil municipal de Villerupt a décerné le titre de citoyen d’honneur de la commune à M. B D. La commune de Villerupt relève appel du jugement du 28 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy, faisant droit à un déféré du préfet de Meurthe-et-Moselle, a annulé cette délibération.

Sur l’intervention de l’association France Palestine Solidarité :

2. Eu égard à son objet social et à l’objet de la délibération en litige, l’association France Palestine Solidarité justifie d’un intérêt suffisant pour intervenir à la présente instance au soutien des conclusions de la commune de Villerupt. Par suite, il y a lieu d’admettre son intervention.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. D’une part, aux termes de l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : « Le représentant de l’Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l’article L. 2131-2 qu’il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. ». L’article L. 2131-3 du même code dispose que « Les actes pris au nom de la commune autres que ceux mentionnés à l’article L. 2131-2 sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés. / Le représentant de l’Etat peut en demander communication à tout moment. Il ne peut les déférer au tribunal administratif, dans un délai de deux mois à compter de leur communication, que si sa demande a été présentée dans le délai de deux mois à compter de la date à laquelle les actes sont devenus exécutoires ».

4. Il est constant que la lettre du préfet de Meurthe-et-Moselle du 25 juin 2018 demandant au maire de la commune de Villerupt de procéder au retrait de la délibération en litige et, par voie de conséquence, le déféré du préfet, enregistré par le greffe du tribunal administratif de Nancy le 24 juillet 2018, sont intervenus postérieurement à l’expiration du délai de recours prévu par les dispositions précitées. Pour faire droit au déféré du préfet de Meurthe-et-Moselle malgré l’expiration du délai de deux mois cité au point 3, le tribunal administratif a estimé que l’illégalité dont était entachée la délibération litigieuse était d’une gravité telle que l’acte attaqué devait être qualifié d’inexistant et pouvait donc être contesté sans condition de délai.

5. Aux termes de l’article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : « Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. () ». La délibération en litige rend un hommage public à M. D et énonce qu’il « continue de prôner la résolution pacifique de la question israélo-palestinienne sur la base du droit international depuis la prison où il est incarcéré », et que c’est parce que le conseil municipal voit en lui un « homme de paix » qu’il lui a décerné le titre de citoyen d’honneur de la ville de Villerupt. Le conflit international sur lequel le conseil municipal a ainsi pris parti, compte tenu des termes employés par la délibération litigieuse, se rapporte à la politique internationale de la France dont le gouvernement, et non les collectivités territoriales, a la charge. En conséquence, cette délibération ne peut être regardée comme présentant un intérêt communal au sens des dispositions du code général des collectivités territoriales. En outre, cette prise de position du conseil municipal de la commune de Villerupt est, eu égard au caractère controversé de la personnalité de M. D et de la question israélo-palestinienne, de nature à provoquer des atteintes à l’ordre public.

6. Toutefois, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, ces illégalités ne permettent pas de regarder la délibération litigieuse comme étant nulle et de nul effet. Par suite, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, le déféré du préfet était tardif et devait être rejeté comme irrecevable.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Villerupt est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Nancy a annulé la délibération litigieuse. Il y a lieu, en conséquence, sans qu’il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, d’annuler ce dernier et de rejeter le déféré dont il est fait appel.

Sur les frais de l’instance :

8. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de l’Etat une somme à verser à la commune de Villerupt en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1 : L’intervention de l’association France Palestine Solidarité est admise.

Article 2 : Le jugement n° 1802037 du tribunal administratif de Nancy du 28 décembre 2018 est annulé.

Article 3 : Le déféré du préfet de Meurthe-et-Moselle présenté devant le tribunal administratif de Nancy est rejeté.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Villerupt est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Villerupt, à Me E pour l’association France Palestine Solidarité en application des dispositions de l’article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l’intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Extraits similaires à la sélection
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 11 mai 2021, n° 19NC00739