CAA de PARIS, 4ème chambre, 31 décembre 2019, 18PA03079, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 4e ch., 31 déc. 2019, n° 18PA03079
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 18PA03079
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 11 juillet 2018, N° 1700522/2-2
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000039788072

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F… C… a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) à titre principal, d’annuler la décision du directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris en date du 14 novembre 2016 et le titre de recettes exécutoire émis le 1er décembre 2016 par lui pour assurer le recouvrement de la somme de 149 531 euros et de prononcer la décharge de cette créance ;

2°) à titre subsidiaire, de ramener le montant de la créance soit à la somme de 140 344,44 euros si la période retenue court du 17 novembre 2011 au 12 novembre 2013, soit à la somme de 143 916,95 euros, si la période retenue court du 14 octobre 2011 au 12 novembre 2013.

Par un jugement n° 1700522/2-2 du 12 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 1er décembre 2016 par le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris en tant qu’il porte sur une somme supérieure à 148 934 euros, a déchargé Mme C… de la créance en tant qu’elle porte sur une somme supérieure à 148 934 euros, a rejeté le surplus des conclusions de la requête de Mme C… et a rejeté les conclusions présentées par le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 septembre et 21 décembre 2018, Mme C…, représentée par Me B… et Me D…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1700522/2-2 du 12 juillet 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, le tribunal a limité l’annulation du titre exécutoire émis le 1er décembre 2016 en tant qu’il porte sur une somme supérieure à 148 934 euros ;

2°) d’annuler la décision du 14 novembre 2016 par laquelle le directeur de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris a décidé d’émettre un titre exécutoire ainsi que le titre exécutoire émis par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris le 1er décembre 2016 pour le recouvrement d’une somme de 149 531 euros ;

3°) de mettre à la charge de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris le versement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – le jugement attaqué est insuffisamment motivé sur l’absence d’assimilation des rémunérations prétendument indûment perçues à des rémunérations effectuées par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris à l’intéressée ;

 – les rémunérations indûment perçues par Mme C… pouvant être assimilées à des rémunérations effectuées par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, la prescription prévue à l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 est applicable ;

 – la décision fixant sa rémunération en dépit de ses mandats d’administrateurs constitue une décision créatrice de droits lui accordant un avantage financier que l’administration ne pouvait retirer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2018, l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, représentée par la SCP Hélène Didier et François Pinet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C… une somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris a retiré le titre du 1er décembre 2016 par décision du 17 août 2018 et a émis le même jour un nouveau titre d’un montant de 148 934 euros ; lorsque la décision du 17 août 2018 aura acquis un caractère définitif, il n’y aura plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre le jugement du 12 juillet 2018 et contre le titre du 1er décembre 2016 ;

 – les moyens soulevés par Mme C… ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 octobre 2019, la clôture de l’instruction a été fixée au

4 novembre 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Mach, premier conseiller,

 – les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

 – les observations de Me B…, avocat de Mme C…,

 – et les observations de Me Pinet, avocat de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C… a occupé, de septembre 2010 à novembre 2013, les fonctions de directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, en qualité d’agent contractuel de droit public. L’intéressée disposait pendant cette période d’un mandat d’administrateur dans les sociétés Electricité de France et Essilor. Par courriers des 11 octobre et 14 novembre 2016, le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris l’a informée de l’émission d’un ordre de reversement pour les sommes perçues en qualité d’administrateur des sociétés Electricité des France et Essilor, pour la période du 14 octobre 2011 au 12 novembre 2013, à concurrence d’un montant de 149 531 euros sur le fondement de l’article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983. Un titre exécutoire a été émis le 1er décembre 2016 mettant à la charge de Mme C… une somme de 149 531 euros. Par jugement du 12 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 1er décembre 2016 en tant qu’il porte sur une somme supérieure à 148 934 euros et a déchargé Mme C… de la créance en tant qu’elle porte sur une somme supérieure à 148 934 euros. Mme C… relève appel de ce jugement en tant que le Tribunal administratif de Paris n’a que partiellement fait droit à sa demande.

Sur l’exception de non-lieu opposée par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris :

2. Lorsque l’autorité administrative, en exécution d’un jugement d’annulation, prend une nouvelle décision qui n’est motivée que par le souci de se conformer à ce jugement d’annulation, cette délivrance ne prive pas d’objet l’appel dirigé contre ce jugement.

3. Pour assurer l’exécution du jugement du 12 juillet 2018 du Tribunal administratif de Paris annulant le titre exécutoire émis le 1er décembre 2016 en tant qu’il porte sur une somme supérieure à 148 934 euros, le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris a, par une décision du 17 août 2018, retiré le titre exécutoire émis le 1er décembre 2016 et émis un nouveau titre exécutoire d’un montant de 148 934 euros. Une telle décision, qui fait au demeurant l’objet d’un recours pendant devant le Tribunal administratif de Paris, ne prive pas d’objet l’appel dirigé contre le jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 juillet 2018 et contre le titre exécutoire émis le 1er décembre 2016. Par suite, les conclusions aux fins de non-lieu présentées par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris ne peuvent être accueillies.


Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Mme C… soutient que le jugement attaqué est dépourvu de motivation quant au raisonnement ayant conduit le tribunal à écarter son argumentation sur l’assimilation des sommes dont le remboursement est demandé avec des sommes indûment versées par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris. Il résulte toutefois des motifs mêmes du jugement attaqué, et notamment du considérant 8, que pour écarter le moyen tiré de la prescription de la créance litigieuse en application de l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, le tribunal a relevé que les rémunérations indûment perçues par Mme C… au titre d’activités privées prohibées au sens des dispositions de la loi du 13 juillet 1983 ne pouvaient être assimilées à des rémunérations effectuées par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris à l’intéressée en sa qualité d’agent public et n’étaient pas constitutives de créances résultant de paiement indus effectués par une personne publique en matière de rémunération. Par suite, le tribunal administratif, qui n’était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par Mme C…, n’a pas entaché son jugement d’une insuffisance de motivation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. Aux termes de l’article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable à la période d’exercice par Mme C… des fonctions de directrice générale de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris: " I.- Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public consacrent l’intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. / Sont interdites, y compris si elles sont à but non lucratif, les activités privées suivantes : / 1° La participation aux organes de direction de sociétés ou d’associations ne satisfaisant pas aux conditions fixées au b du 1° du 7 de l’article 261 du code général des impôts ; (…) / V.- Sans préjudice de l’application de l’article 432-12 du code pénal, la violation du présent article donne lieu au reversement des sommes indûment perçues, par voie de retenue sur le traitement. « . Aux termes de l’article 25 septies de la même loi, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, applicable à la date du titre exécutoire contesté : » I.- Le fonctionnaire consacre l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit, sous réserve des II à V du présent article. / Il est interdit au fonctionnaire : (…) / 2° De participer aux organes de direction de sociétés ou d’associations à but lucratif ; (…) / VI.- Sans préjudice de l’engagement de poursuites disciplinaires, la violation du présent article donne lieu au reversement des sommes perçues au titre des activités interdites, par voie de retenue sur le traitement. (…) ". Il résulte de ces dispositions que l’exercice par un agent public d’une activité privée interdite donne lieu au reversement des sommes perçues au titre de cette activité interdite.

6. Aux termes de l’article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : « Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. (…) ».

7. En premier lieu, il est constant que Mme C…, alors qu’elle exerçait les fonctions de directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, a disposé de deux mandats d’administrateur des sociétés Electricité de France et Essilor, ce qui constituait l’exercice d’activités privées interdites au sens des dispositions de la loi du 13 juillet 1983 citées au point 5. Mme C… soutient que l’obligation de reversement prévue par ces dispositions ne porte que sur la rémunération indûment versée à l’agent public par son employeur public en raison de l’absence présumée de service fait et non sur les sommes légalement versées par les sociétés privées, qui correspondent à la rémunération d’un travail effectif, ces dernières sommes permettant uniquement de calculer le montant des paiements indus. Si les dispositions citées au point 5 n’interdisaient pas aux sociétés Electricité de France et Essilor de verser à Mme C… une rémunération correspondant aux missions effectivement exercées, il ressort des termes mêmes de ces dispositions que les sommes ainsi versées par ces deux sociétés sont constitutives de sommes indûment perçues par Mme C… au titre d’activités interdites, dont il appartenait à l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris de solliciter le reversement et ce, alors même que l’Assistance Publique -Hôpitaux de Paris ne les aurait pas initialement versées à l’intéressée. Les sommes indûment perçues ayant été versées par deux sociétés privées, elles ne constituent ni ne sauraient être assimilées à des paiements indus effectués par une personne publique en matière de rémunération au sens et pour l’application des dispositions de l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000. Par suite, Mme C… n’est pas fondée à invoquer le bénéfice de la prescription de deux ans prévue par l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 pour contester la créance en litige.

8. En second lieu, la décision fixant la rémunération de Mme C… constitue une décision créatrice de droits lui accordant un avantage financier, qui ne saurait toutefois, alors même que l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris aurait eu connaissance de l’existence de ses deux mandats, avoir ni pour objet ni pour effet de lui allouer un avantage financier équivalant aux sommes versées par les sociétés Electricité de France et Essilor. Par ailleurs, la décision portant obligation de reversement des sommes indûment perçues au titre des activités privées illégales, qui ne correspondent pas à un trop-perçu de la rémunération effectuée par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris pour absence de service fait, ne peut être regardée comme procédant au retrait partiel de la décision fixant sa rémunération. Par suite, Mme C… ne peut utilement soutenir que le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris a, par le titre exécutoire émis le 1er décembre 2016, procédé au retrait illégal d’une décision créatrice de droits lui accordant un avantage financier.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 1er décembre 2016 en tant qu’il porte sur une somme supérieure à 148 934 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme C… demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme C… le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris et non compris dans les dépens.

DECIDE :


Article 1er : La requête de Mme C… est rejetée.

Article 2 : Mme C… versera à l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F… C… et à l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris.


Délibéré après l’audience du 3 décembre 2019, à laquelle siégeaient :


- Mme A…, président de chambre,

- Mme E…, présidente assesseure,

- Mme Mach, premier conseiller.


Lu en audience publique, le 31 décembre 2019.


Le rapporteur,

A-S MACHLe président,
M. A… Le greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 18PA03079

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