CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 09PA00776

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Précédents jurisprudentiels : 21 mars 2002, APBP c/ France, req n° 38439/47
27 février 2004, PREFET DES PYRENEES ORIENTALES, req. n° 252988 et rappelé cette exigence le 11 août 2009, Mme X, req. n° 303711
CAA Bordeaux, 16 février 2010, SNC LIDL, req. n° 09BX00932 – 09BX01495
CE, 10 février 2002, M. Z, req. n° 229665
CE, 13 mars 1985, SARL Barlocher – France – Production, req. n° 16173
CE, 17 juillet 2009, VILLE DE BREST, req. n° 295653
CE, 22 juillet 1977, Ministre de l' équipement c. Société nouvelle du Palais des sports Vélodrome d'hiver, req. n° 95443
CE 7 janvier 1976 Ville d'Amiens, req n° 92-888
CE, 7 novembre 1974, B C, req. n° 83517
CE Ass. 29 juin 1962, Société Manufacturière des machines du Haut-Rhin, Rec. p. 432

Texte intégral

09PA00776
Société CLIMADEF c/ Syndicat mixte de chauffage urbain de la Défense (SICUDEF)
Audience du 26 avril 2011
Lecture du 23 mai 2011
CONCLUSIONS de M. Stéphane Dewailly, Rapporteur public
Faits :
Par une convention du 22 février 1968, approuvée par le Préfet des Hauts-de-Seine, le SICUDEF a concédé à la société CLIMADEF l’exploitation en exclusivité « de la production et de la distribution de la chaleur et du froid à l’intérieur des secteurs du périmètre de l’EPAD».
Le 30 mars 1994 se produit explosion résultant d’une fuite de gaz au sein de l’usine détruisant une partie importante de la centrale thermique et causant le décès de deux personnes. Toutefois, afin d’assurer la continuité du service public le SICUDEF et la société CLIMADEF ont décidé de déterminer en commun les modalités d’une chaufferie provisoire.
C’est dans ce contexte qu’est conclue le 22 novembre 1995, une nouvelle convention portant sur les conditions de rétablissement définitif de la production et de la distribution de la chaleur et du froid. Elle prévoyait, notamment, que l’amortissement des nouveaux investissements, nécessités par la restructuration des équipements existants et l’acquisition d’un site secondaire pour l’implantation de moyens de production de chaleur d’appoint, devait être assuré par une prorogation de la concession, sans extension du périmètre initial.
Cette convention sera transmise aux services du contrôle de légalité de la préfecture des Hauts-de-Seine. Le 20 février 1996, le Préfet des Hauts-de-Seine demandera que la convention soit rapportée, dans la mesure où elle comporte une extension implicite de la concession.
Le 28 février 1996, le SICUDEF accepte de modifier la convention mais par voie d’avenant et sans la rapporter. Cette décision sera acceptée par le préfet.
Par conséquent, le 7 juin 1996, la convention sera signée par le SICUDEF et la société CLIMADEF.
Enfin, par délibération du 30 juin 1998, le SICUDEF constatant que la réalisation des conditions suspensives prévues à l’avenant faisant obstacle à la prorogation de la concession a décidé de lancer une mise en concurrence pour l’attribution d’une nouvelle concession à l’expiration de celle le liant à la société CLIMADEF le 31 août 2002.
La société CLIMADEF estime que cette délibération porte atteinte à ses droits puisqu’elle n’a pas obtenu le remboursement des frais d’études et de travaux provisoires engagés pour la réalisation de la convention conclue en 1995, ainsi qu’une indemnisation au titre du manque à gagner puisque le refus de proroger la concession pour une période de vingt-cinq années était nécessaire à l’amortissement des travaux prévus par ce même avenant.
Le TAP a rejeté cette requête par un jugement du 9 décembre 2008 dont la société CLIMADEF interjette appel.
Discussion :
1 – La société CLIMADEF conteste tout d’abord la régularité du jugement :
A – La société CLIMADEF estime que le caractère contradictoire de la procédure précisé à l’article L. 5 du code de justice administrative, n’a pas été respecté puisque le SIDUCEF a déposé ses dernières écritures le 30 novembre 2005, jour de la clôture de l’instruction, ne permettant pas à l’intéressée de présenter ses observations.
Toutefois, vous le savez la circonstance que le mémoire n’a été produit que le jour de la clôture de l’instruction au greffe d’un tribunal administratif est sans incidence sur la régularité du jugement, tant que ce mémoire ne comportait ni conclusions, ni moyens nouveaux (CAA Bordeaux, 16 février 2010, SNC LIDL, req. n°09BX00932 – 09BX01495).
La lecture de ce mémoire ne fait apparaître ni moyen, ni conclusions nouveaux.
Vous pourrez donc écarter le moyen.
B – La société SIDUCEF fait valoir que le jugement déféré méconnaît le principe général selon lequel tout justiciable a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable. En effet, le clôture de l’instruction a été fixée le 30.11.2005. Or, le jugement n’a été rendu que le 9 décembre 2008.
La société SIDUCEF fait valoir que le jugement déféré méconnaît le principe au terme duquel tout justiciable a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable, puisque la clôture de l’instruction a été fixée le 30 novembre 2005 et que le jugement n’a été lu que le 9 décembre 2008.
Vous savez cependant que si le délai peut être considéré comme n’étant pas raisonnable, cette reconnaissance n’a toutefois aucune incidence sur la régularité du jugement (CE, 17 juillet 2009, VILLE DE BREST, req. n° 295653).
Ce second moyen pourra donc être écarté.
C – Enfin, elle fait valoir que le jugement ne comporte pas l’ensemble des écritures échangées, puisqu’il ne vise pas la note en délibéré déposée par l’intéressée, le 2 décembre 2008 au greffe du Tribunal administratif, soit avant à la lecture du jugement. Ceci étant contraire aux exigences de l’article R. 741-2 du code de justice administrative.
La cour européenne de sauvegarde des droits de l’homme a depuis 2002 (21 mars 2002, APBP c/ France, req n° 38439/47) estimé que les notes en délibéré devaient être visées. Le CE a fait sienne ces exigences depuis une décision du 27 février 2004, PREFET DES PYRENEES ORIENTALES, req. n° 252988 et rappelé cette exigence le 11 août 2009, Mme X, req. n° 303711.
Or, il ressort en effet des pièces du dossier qu’une telle note en délibéré a été produite avant la lecture du jugement le 9 décembre 2008, sans avoir été mentionnée dans les visas du jugement. Par conséquent, vous pourrez juger que le jugement était irrégulier et l’annuler.
Dès lors, vous pourrez évoquer l’affaire.
2 – A ce stade, vous devrez examiner si la prescription quadriennale soulevée par le SICUDEF peut prospérer.
La loi du 31 décembre 1968 précise que sont prescrites, au profit des personnes publiques, toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis, sauf interruption ou suspension de cette prescription par un acte exprès (TC, 2 mars 1934, Y frères, Rec. p. 1238 ; CE, 4 février 1938, NOUVELLE-CALEDONIE, Rec. p. 129).
En l’espèce, il n’est pas contesté que la créance a pour origine l’avenant conclu entre les parties le 7 juin 1996 (CE, 10 février 2002, M. Z, req. n° 229665 ; CE, 7 novembre 1974, B C, req. n° 83517). Par conséquent, le délai de prescription a commencé de courir le 1er janvier 1997 pour prendre effet le 31 décembre 2000.
Or, à la date du 7 juin 1996 et à celle du début de la prescription le 1er janvier de l’année suivante, la société CLIMADEF était en mesure d’apprécier la nature et les conséquences de son engagement contractuel. Le 6 mars 1998, elle a fait état de son refus d’accepter une substitution dans la promesse de vente du terrain appartenant à M. A. Elle n’a accompli aucun acte susceptible d’être interruptif ou suspensif de cette prescription. Par conséquent, la date ultime pour faire valoir sa créance s’est achevée le 31 décembre 2000.
Toutefois, vous ne trouvez pas trace d’un document émanant de l’autorité pouvant valablement l’opposer dans ce dossier. La délibération dont fait état la SICUDEF ne pouvant en tenir lieu. Dès lors, vous ne pourrez la retenir.
3 – En ce qui concerne les frais d’étude :
La société CLIMADEF fait valoir qu’elle a engagé un certain nombre de frais correspondant aux frais d’études et de travaux réalisés en exécution de l’avenant du 7 juin 1996.
Toutefois, vous noterez que l’avenant conclu avec le SICUDEF ne présente pas de caractère utile, puisque la délibération du 30 juin 1998 a préféré la remise en concurrence et qu’il n’est pas démontré que ces dépenses ont réellement été engagées.
La lecture des stipulations de l’article 20 du cahier des charges de la concession du 22 février 1968 modifiée, montre qu’il appartient au concessionnaire d’effectuer toutes les réparations et remplacements exigés par une usure accidentelle des installations : «quelle qu’en soit la cause de telle sorte qu’aucune dépense ne reste à la charge de l’autorité concédante».
De même, l’article 11 de l’avenant signé le 7 juin 1996, stipule que : «Le concédant n’apportera aucune contribution financière au financement du projet. Le financement du projet dans sa totalité incombe exclusivement à CLIMADEF».
Ces clauses sont suffisamment claires et sans ambiguïté. La commune intention des parties était donc de faire peser sur CLIMADEF la charge de ce projet. Elle en assumait à la fois les risques financiers et les coûts d’exploitation, comme dans toute concession.
Dans ces conditions, c’est à bon droit que le Tribunal administratif de Paris a considéré que la société CLIMADEF n’était pas fondée à se prévaloir de stipulations de l’article 11 de l’avenant litigieux, laissant à sa charge le coût du projet, notamment s’agissant des travaux et études, pour en demander le remboursement.
Ce moyen sera écarté 4 – La société CLIMADEF estime encore qu’elle a subi un préjudice du fait de la résiliation abusive de la concession.
La société CLIMADEF estime en effet que le SICUDEF n’a pas exécuté ses obligations de bonne foi, notamment en ne levant pas les conditions suspensives. Elle estime ainsi qu’en signant l’avenant du 7 juin 1996, le SICUDEF avait fait le choix d’une prolongation de la concession avant de se rétracter et de remettre en concurrence le projet.
Toutefois, force est de rappeler que l’avenant litigieux contient des conditions suspensives, dont la société CLIMADEF avait nécessairement connaissance. Elle ne peut non plus soutenir ignorer que ce type de contrat comporte nécessairement des aléas puisque la durée des contrats doit respecter le cadre de la loi SAPIN de 1993.
Cette autorisation pouvait donc lui être refusée, y compris lorsqu’il s’agit de construire et de rentabiliser l’investissement, même lorsque sont invoquées des ruptures d’égalité devant les charges publiques (CE Ass. 29 juin 1962, Société Manufacturière des machines du Haut-Rhin, Rec. p. 432 ; CE, 22 juillet 1977, Ministre de l’équipement c. Société nouvelle du Palais des sports Vélodrome d’hiver, req. n° 95443 ; CE, 13 mars 1985, SARL Barlocher – France – Production, req. n° 16173).
Dans ces conditions, ayant connaissance de ces conditions et ayant signé la convention, la société requérante aurait du envisager la possibilité que le SICUDEF ne lève pas les conditions suspensives.
La société CLIMADEF ne pouvait donc prétendre qu’un droit était né et n’est pas fondée à soutenir que le SICUDEF aurait commis une faute de nature à la rembourser des frais engagés (Voir en sens contraire : CE, 28 décembre 1988, EPA Ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines c/ Sté des Établ. Nattey et Cie, LPA, 7 juillet 1989).
Ce moyen sera écarté 5 – Sur l’indemnisation du manque à gagner
La société CLIMADEF soutient qu’en raison de l’absence de prorogation de la concession, et compte tenu du rapport d’expertise, elle est en droit de réclamer le versement d’une somme de 10.4 millions d’euros.
Le pouvoir de résiliation unilatérale a pour contrepartie l’obligation d’indemniser intégralement le préjudice causé (Voir en ce sens CE 7 janvier 1976 Ville d’Amiens, req n° 92-888).
Toutefois, dans la mesure où nous vous avons proposé de ne pas reconnaître la responsabilité du syndicat, vous ne pourrez qu’écarter cette demande indemnitaire.
PCMNC au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société CLIMADEF une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.
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