Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 13 décembre 1989, 88-15.655, Publié au bulletin
Chronologie de l’affaire
Résumé de la juridiction
° Est nulle, en raison de l’illicéité de son objet, l’association qui a pour objet de faciliter la solution des problèmes qui se posent aux couples, dont la femme est stérile, désireux d’accueillir un enfant à leur foyer et aux " mères porteuses " volontaires, dès lors que, d’une part, cette association favorise la conclusion et l’exécution de conventions qui, fussent-elles verbales, portent tout à la fois sur la mise à la disposition des demandeurs des fonctions reproductrices de la mère et sur l’enfant à naître et sont donc nulles en application de l’article 1128 du Code civil ; que d’autre part de telles conventions contrevenant au principe d’ordre public de l’indisponibilité de l’état des personnes en ce qu’elles ont pour but de faire venir au monde un enfant dont l’état ne correspondra pas à sa filiation réelle au moyen d’une renonciation et d’une cession, également prohibées, des droits reconnus par la loi à la future mère ; qu’enfin, l’activité de l’association, qui tend délibérément à créer une situation d’abandon, aboutit à détourner l’institution de l’adoption de son véritable objet qui est, en principe, de donner une famille à un enfant qui en est dépourvu. ° La reconnaissance du caractère illicite de la maternité pour autrui et des associations qui s’efforcent de la promouvoir, qui se déduit des principes généraux du Code civil et de règles qui sont communes à toutes les filiations, n’est pas de nature à instaurer une discrimination fondée sur la naissance. ° Le droit de se marier et de fonder une famille, reconnu par l’article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et par l’article 23 du pacte international de New York relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 à l’homme et à la femme en âge nubile, n’implique pas le droit de conclure avec un tiers des conventions portant sur le sort d’un enfant à naître.
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La modération est fatale. Rien ne réussit comme l'excès. Oscar Wilde Troisième et avant-dernier billet de ma trilogie en quatre billets sur le mariage pour tous, officiellement connu sous le nom de mariage entre personnes de même sexe. Un dernier volet sera consacré à la décision à venir du Conseil constitutionnel. Des raisons professionnelles m'ont empêché de consacrer à mon blog le temps nécessaire pour le nourrir, d'où un long silence, qui aura au moins la vertu d'avoir laissé du temps au temps, au tumulte de s'apaiser, et à présent que le texte définitif a été adopté, de nous …
Ns° 365779, 366710, 366989, 367317, 367324, 368861 Association juristes pour l'enfance et autres 2ème et 7ème sous-sections réunies Séance du 28 novembre 2014 Lecture du 12 décembre 2014 CONCLUSIONS M. Xavier DOMINO, rapporteur public Les requêtes qui viennent d'être appelées sont toutes dirigées contre la circulaire de la garde des sceaux, ministre de la justice du 25 janvier 2013 relative à la délivrance des certificats de nationalité pour les enfants nés à l'étranger dont il apparaît que leur naissance est le résultat d'une convention de gestation pour autrui. …
Sur la décision
Référence : | Cass. 1re civ., 13 déc. 1989, n° 88-15.655, Bull. 1989 I N° 387 p. 260 |
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Juridiction : | Cour de cassation |
Numéro(s) de pourvoi : | 88-15655 |
Importance : | Publié au bulletin |
Publication : | Bulletin 1989 I N° 387 p. 260 |
Décision précédente : | Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 avril 1988 |
Dispositif : | Rejet. |
Date de dernière mise à jour : | 4 novembre 2021 |
Identifiant Légifrance : | JURITEXT000007023438 |
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Sur les parties
- Président : Président :M. Jouhaud
- Rapporteur : Rapporteur :M. Massip
- Avocat général : Avocat général :M. Dontenwille
- Parties : Association " Alma Mater "
Texte intégral
Attendu, selon les juges du fond, que l’association « Alma Mater » a pour objet de faciliter la solution des problèmes qui se posent aux couples dont la femme est stérile, désireux d’accueillir un enfant à leur foyer et aux « mères porteuses » volontaires ; qu’il est proposé à la « mère porteuse » d’être inséminée artificiellement par la semence du mari ou du concubin, de porter et de mettre au monde l’enfant qui sera déclaré sur les registres de l’état civil sans indication du nom de la mère, reconnu par le père et accueilli au foyer de celui-ci en vue de son adoption par l’épouse ou la compagne ; que l’association intervient tout au long de ce processus qualifié de « prêt d’utérus » ou de « don d’enfant » ; qu’ainsi après avoir contrôlé la réalité de la stérilité du couple demandeur et des facultés de fécondation de la « mère porteuse », généralement recrutée par elle, l’association fait procéder à l’insémination, surveille la grossesse et l’accouchement, s’occupe de faire diligenter la procédure d’adoption ; qu’elle verse ensuite à la mère une somme forfaitaire – qui, en 1987, était fixée à 60 000 francs – remise par le couple demandeur dès le début de la grossesse ; que l’arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 29 avril 1988) estimant que cette association avait un objet illicite, contraire aux lois et aux bonnes moeurs, en a prononcé la nullité sur le fondement de l’article 3 de la loi du 1er juillet 1901 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que l’association « Alma Mater » fait grief à la cour d’appel d’avoir ainsi statué alors que, selon le moyen, n’est ni illicite ni contraire aux bonnes moeurs l’association qui, dans un but humanitaire non lucratif, met en relation un couple demandeur dont la femme est stérile et une femme qui accepte d’être inséminée artificiellement par le mari, de porter l’enfant et de le remettre à la naissance à ce couple qui l’indemnisera des contraintes et de la gêne occasionnée par la grossesse, de sorte que la juridiction du second degré aurait violé les articles 3 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 ;
Mais attendu qu’il résulte des constatations des juges du fond que l’objet même de l’association est de favoriser la conclusion et l’exécution de conventions qui, fussent-elles verbales, portent tout à la fois sur la mise à la disposition des demandeurs des fonctions reproductrices de la mère et sur l’enfant à naître et sont donc nulles en application de l’article 1128 du Code civil ; que ces conventions contreviennent au principe d’ordre public de l’indisponibilité de l’état des personnes en ce qu’elles ont pour but de faire venir au monde un enfant dont l’état ne correspondra pas à sa filiation réelle au moyen d’une renonciation et d’une cession, également prohibées, des droits reconnus par la loi à la future mère ; que l’activité de l’association, qui tend délibérément à créer une situation d’abandon, aboutit à détourner l’institution de l’adoption de son véritable objet qui est, en principe, de donner une famille à un enfant qui en est dépourvu ; que c’est dès lors à bon droit que l’arrêt attaqué a décidé, sur le fondement de l’article 3 de la loi du 1er juillet 1901, que cette association était nulle en raison de l’illicéité de son objet ; que la première branche du moyen est donc sans fondement ;
Et sur les deuxième et troisième branches du moyen :
Attendu qu’il est fait grief à la cour d’appel de n’avoir pas répondu aux conclusions faisant valoir, d’une part, que l’interdiction du « don de gestation » constituait une discrimination fondée sur la naissance contraire aux dispositions de l’article 24 du pacte international relatif aux droits civils et politiques signé à New York le 19 décembre 1966 et, d’autre part, que ce « don de gestation » reposait sur le droit légitime de fonder une famille qui implique le droit d’engendrer reconnu tant par l’article 12 de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 que par l’article 23 du pacte international précité ;
Mais attendu que la reconnaissance du caractère illicite de la maternité pour autrui et des associations qui s’efforcent de la promouvoir, qui se déduit des principes généraux du Code civil et de règles qui sont communes à toutes les filiations, n’est pas de nature à instaurer une discrimination fondée sur la naissance ; que le droit de se marier et de fonder une famille, reconnu par l’article 12 de la convention du 4 novembre 1950 et par l’article 23 du pacte international du 19 décembre 1966 à l’homme et à la femme en âge nubile, n’implique pas le droit de conclure avec un tiers des conventions portant sur le sort d’un enfant à naître ; que par ces motifs de droit répondant aux conclusions invoquées l’arrêt se trouve légalement justifié et que les deuxième et troisième branches du moyen ne peuvent être accueillies ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi
Textes cités dans la décision
N° 411984 M. W... 2e et 7e chambres réunies Séance du 8 juillet 2019 Lecture du 31 juillet 2019 CONCLUSIONS M. Guillaume Odinet, rapporteur public Il y a un peu plus de cent trente ans, la loi du 26 juin 1889, premier texte transversal du droit de la nationalité en France, rompait avec le principe du caractère personnel de la naturalisation1, pour épouser le principe de son effet collectif. Elle insérait alors un nouvel article 12 dans le code civil, dont le dernier alinéa énonçait : « Deviennent Français les enfants mineurs d'un père ou d'une mère survivant qui se font naturaliser …