Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 12 décembre 1989, 88-83.417, Publié au bulletin

  • Constatation suffisante·
  • Éléments constitutifs·
  • Trafic d'influence·
  • Action publique·
  • Point de départ·
  • Sollicitation·
  • Prescription·
  • Corruption·
  • Extinction·
  • Marches

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

° La simple " sollicitation " de dons suffit à consommer l’infraction ; dès lors, il n’importe que la " perception " de ces dons ait été postérieure à l’obtention de l’avantage recherché ° Lorsque le délit est caractérisé par la perception illicite de dons, c’est seulement à compter du jour de cette perception que court le délai de prescription (1).

Commentaire1

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consultation.avocat.fr · 18 janvier 2019

Article juridique - Droit public Au-delà des risques d'annulation des contrats de la commande consécutifs à des vices affectant la procédure de passation, les personnes responsables de ces marchés peuvent aussi voir leurs responsabilités pénales engagées par les candidats évincés. Qu'elles soient volontaires ou fruit d'une négligence, les infractions en lien avec les marchés publics sont sévèrement réprimées par le code pénal. Toutes qualifiées de manquement à la probité, ce ne sont pas moins de cinq infractions qui sont directement visées par le code pénal : A) le favoritisme ou …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 12 déc. 1989, n° 88-83.417, Bull. crim., 1989 N° 474 p. 1156
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 88-83417
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin criminel 1989 N° 474 p. 1156
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 10 février 1988
Précédents jurisprudentiels : Confère :
(2°). (1)
A rapprocher :
Chambre criminelle, 13/12/1972, Bulletin criminel 1972, n° 391, p. 982 (cassation).
Textes appliqués :
Code pénal 178
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007064532
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

REJET du pourvoi formé par :

— X… Robert,

contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, 11e chambre, en date du 11 février 1988, qui, pour trafic d’influence, l’a condamné à 3 années d’emprisonnement avec sursis et à 597 868 francs d’amende, et a débouté le Trésor public de sa demande en réparation.

LA COUR,

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l’article 178 du Code pénal et des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :

«  en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable de trafic d’influence, notamment pour avoir reçu, par l’intermédiaire de l’agence Sembat-Tourisme des sommes, l’une de 4 380 francs et l’autre de 13 320 francs, cependant que les sociétés dont il s’agit auraient bénéficié d’un marché à la date du 1er août 1978, marché qui aurait été obtenu grâce à l’influence que X… exerçait en contrepartie des avantages reçus ;

«  au motif adopté des premiers juges selon lequel les sociétés Gachet et Revalpa auraient déposé à l’agence Sembat-Tourisme de novembre 1977 à fin 1978 les sommes de 4 380 francs et de 13 360 francs ;

«  alors, d’une part, que le demandeur avait fait valoir dans un chef péremptoire des conclusions prises par lui devant la Cour (p. 8 des conclusions) que la somme de 4 380 francs a fait l’objet d’une facture du 9 septembre 1978 et a été payée par Gachet le 31 octobre 1978 et que la somme de 13 360 francs a fait l’objet de 2 factures, lesquelles datent de fin 1978 et sont donc postérieures aux précédentes, de telle sorte que toutes les libéralités sont postérieures au marché qui est du 1er août 1978 et n’ont pas eu pour but de les obtenir ; qu’en adoptant purement et simplement le motif des premiers juges, sans indiquer les raisons pour lesquelles elle se prononçait ainsi, et sans répondre aux éléments de fait précis avancés par le demandeur, la cour d’appel a omis de répondre à un chef péremptoire des conclusions du demandeur ;

«  alors, d’autre part, que le demandeur avait encore fait valoir dans ses conclusions (p. 9) que le marché du 1er août 1978 ne concernait pas les établissements Gachet mais des applicateurs de produits étanches, les sociétés Fumana-Fontoni et Gourgne qui n’étaient pas les auteurs des libéralités ; qu’en ne précisant pas pourquoi les sociétés Fumana-Fontoni et Gourgne auraient pu bénéficier des libéralités faites par les établissements Gachet et Revalpa et quel était le lien de causalité entre ces libéralités et le marché, la Cour a omis de répondre à un chef essentiel des conclusions du demandeur » ;

Attendu qu’à la suite d’une enquête ordonnée le 5 novembre 1980, une information a été ouverte du chef de trafic d’influence ; qu’à l’issue de cette information, Robert X… a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir, « du 5 novembre 1977 à fin 1979 », étant fonctionnaire public, sollicité ou reçu des dons ou présents, des sommes en espèces, avoirs bancaires ou prestations diverses, des sociétés TSS Masair, Gachet-Revalpa et Arbel industrie, pour faire obtenir ou tenter de faire obtenir des marchés résultant de traités conclus avec l’autorité publique et d’avoir ainsi usé d’influence réelle ou supposée ;

Attendu que, pour déclarer l’infraction établie en ce qui concerne les sociétés Gachet-Revalpa, les premiers juges, dont l’arrêt adopte les motifs, énoncent qu’au regard de « l’antériorité des moyens utilisés par rapport à l’obtention des marchés », la date du versement effectif des sommes importe peu puisque la sollicitation de ces sommes suffit à caractériser le délit ; qu’ils relèvent, par ailleurs, que le marché du 1er août 1978 portait sur l’utilisation exclusive d’un produit fabriqué par les sociétés Gachet-Revalpa, lesquelles étaient donc les véritables bénéficiaires du marché ;

Attendu qu’en cet état, l’arrêt n’a pas encouru les griefs du moyen, lequel, dès lors, ne saurait être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l’article 178 du Code pénal :

«  le pourvoi reproche à l’arrêt attaqué d’avoir retenu comme constitutif de trafic d’influence le versement par une société Arbel industrie d’une somme de 25 481 francs au motif adopté des premiers juges que cette société, courant 1977, versa au compte de l’agence Sembat-Tourisme une somme de 25 842 francs et fut bénéficiaire d’un marché n° 19 / 78 de fournitures d’arches métalliques en qualité de sous-traitante de la société SGE avec paiement direct ;

«  alors, d’une part, que le demandeur avait fait valoir que c’est courant 1977, donc à une période prescrite que la société Arbel aurait versé une somme de 25 842 francs ; qu’en n’indiquant pas à quelle date précise de 1977 la société Arbel industrie aurait versé la somme litigieuse et en ne mettant pas la Cour de Cassation à même d’exercer son contrôle sur l’existence de la prescription, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale » ;

Attendu qu’il résulte des énonciations du jugement, adoptées par la cour d’appel, que la somme versée par la société Arbel industrie l’a été sur un compte ouvert « à la fin de 1978 » ; que c’est donc seulement à partir de cette date qu’a pu avoir lieu la perception des fonds par le prévenu, perception qui marque le point de départ du délai de prescription ;

Attendu qu’en cet état, les juges ont justifié leur décision ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l’article 178 du Code pénal, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :

«  en ce que la décision attaquée a condamné le demandeur coupable de trafic d’influence pour avoir reçu une somme de 67 673 francs de la société TSS Masair au motif adopté des premiers juges que l’information aurait révélé que celle-ci avait versé, du 5 novembre 1977 au 10 janvier 1978, sur les comptes clients de l’agence Sembat-Tourisme et bancaires de Colette Y… les sommes de 24 156 francs, 18 765 francs, 686 francs, 8 478 francs, 5 778 francs et 9 900 francs avant que n’interviennent, malgré les protestations de Mme Z…, président-directeur général de la société STCT, caractérisées par une lettre à elle adressée le 24 novembre 1978 au ministre de la Défense, le marché de clôtures qui lui imposa comme sous-traitant la société Rouméas, dont la sous-traitante n’était autre que la société Masair ;

«  et au motif propre que les dirigeants des sociétés en cause avaient admis que les avantages consentis par eux à X… ne l’avaient été qu’en considération de son statut et de son influence au sein de la DIA et auprès de la SDTA, et qu’il résulte de l’information que des marchés qui ont comporté souvent des irrégularités ont profité aux sociétés qui avaient consenti des avantages au prévenu, et qu’il s’agit en particulier pour TSS Masair du marché de 1977-78 ;

«  alors, d’une part, que le demandeur avait fait valoir de façon précise que les faits ayant pu conduire à l’obtention d’un marché par la TSS Masair étaient atteints par la prescription puisque ce marché est en date des 8 juin et 4 juillet 1977 ; qu’en ne s’expliquant (pas) sur ce problème de prescription, et sur la date du marché obtenu par la société TSS Masair, et en se contentant d’indiquer qu’il s’agissait d’un marché de 1977-78, la cour d’appel n’a pas répondu à un chef péremptoire des conclusions du demandeur ;

«  alors, d’autre part, que le délit de trafic d’influence n’est constitué que pour autant que les dons, présents ou autres avaient pour but d’obtenir des marchés de l’autorité publique ou une décision favorable d’une Autorité ou Administration ; qu’en l’espèce actuelle, le demandeur avait fait valoir que le marché litigieux était un marché de sous-traitance passé entre Roumeas et Masair, entre deux particuliers qui ne pouvait constituer un avantage obtenu de l’autorité publique ; qu’en ne s’expliquant pas sur ce point, la cour d’appel a omis de répondre à un chef clair et précis des conclusions du demandeur » ;

Attendu que pour déclarer l’infraction établie en ce qui concerne les sociétés TSS Masair, les juges énoncent notamment que les sommes ont été versées par ces sociétés, « du 5 novembre 1977 au 10 janvier 1978 », et « avant que n’intervienne… le marché de clôture » ;

Attendu qu’en cet état, les juges qui n’avaient à s’expliquer que sur la date des versements, ont justifié leur décision au regard de la prescription ; qu’il n’importe que le marché se présentât sous forme de sous-traitance dès lors qu’il nécessitait l’agrément de l’autorité publique ;

D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation de l’article 178 du Code pénal, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :

«  en ce que la décision attaquée a condamné le demandeur à 597 868 francs d’amende au motif qu’il avait reçu de diverses sociétés un certain nombre d’argent pour un montant de 298 934 francs ;

«  alors que l’amende susceptible d’être infligée aux cas de trafic d’influence est égale au double de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées ; que, lorsque le prévenu a reçu des sommes à titre de prêts, l’amende ne peut être égale qu’à l’avantage procuré par lesdits prêts ; qu’en l’espèce actuelle, le demandeur avait soutenu que la plupart des sommes qui lui ont été versées l’avaient été à titre de prêts ; que, si les juges du fond ont considéré que le prêt d’argent pouvait constituer un procédé utilisé dans le trafic d’influence, ils n’ont pas recherché quel était le montant de l’avantage procuré par des prêts, dont ils n’ont pas contesté la réalité, même s’ils ont observé qu’ils étaient consentis sans intérêt et sans reconnaissance de dette ; qu’ainsi la condamnation à une amende de 597 868 francs n’est pas justifiée par les constatations de l’arrêt » ;

Attendu qu’en prononçant une amende correspondant au double de la valeur des sommes qu’ils estimaient avoir été entièrement perçues, à quelque titre que ce soit, les juges du second degré ont fait l’exacte application de l’article 178 du Code pénal ;

Qu’ainsi le moyen ne peut qu’être écarté ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.

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  1. CODE PENAL
  2. Code de procédure pénale
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