Cour de Cassation, Chambre mixte, du 10 avril 1998, 97-16.970 97-17.097 97-17.272 97-17.323, Publié au bulletin

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  • Dissolution·
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  • Action·
  • Ministère public·
  • Liberté syndicale·
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  • Qualités

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Toute personne justifiant d’un intérêt à agir est recevable à contester la qualité de syndicat professionnel d’un groupement dont l’objet ne satisfait pas aux exigences des articles L. 411-1 et L. 411-2 du Code du travail, et à en demander la nullité, indépendamment du droit, pour le procureur de la République, d’en requérir la dissolution dans les conditions prévues par l’article L. 481-1 du même Code en cas d’infractions commises par ses dirigeants ou administrateurs (arrêts n°s 1 et 2).

Par suite, est encourue la nullité d’un syndicat d’organisation de la profession d’ostéopathes diplômés d’Etat en kinésithérapie dont l’objet est illicite en ce qu’il regroupe des masseurs-kinésithérapeutes qui entendent pratiquer l’ostéopathie de manière indépendante, sans diagnostic médical préalable (arrêt n° 1).

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Sur la décision

Référence :
Cass. ch. mixte, 10 avr. 1998, n° 97-16.970, Bull. 1998 CH. M. N° 1 p. 1
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 97-16970 97-17097 97-17272 97-17323
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin 1998 CH. M. N° 1 p. 1
Décision précédente : Cour d'appel de Montpellier, 8 juillet 1997
Précédents jurisprudentiels : A rapprocher :
Chambre civile 1, 29/06/1994, Bulletin 1994, I, n° 230, p. 167 (cassation), et l'arrêt cité.
: Chambre sociale, 06/04/1994, Bulletin 1994, V, n° 137, p. 92 (cassation)
Textes appliqués :
Code du travail L411-1, L411-2, L481-1
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007041078
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Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N° 2

Vu leur connexité, joint les pourvois nos 97-16.970,97-17.097, 97-17.272 et 97-17.323 ;

Sur le moyen unique des pourvois, pris en leurs diverses branches :

Vu les articles L. 411-1, L. 411-2 et L. 481-1 du Code du travail, ensemble l’article 31 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu’il résulte de ces textes qu’indépendamment du droit pour le procureur de la République de demander la dissolution d’un syndicat dans les conditions prévues par l’article L. 481-1 du Code du travail en cas d’infractions commises par ses dirigeants ou administrateurs, toute personne, qui justifie d’un intérêt à agir, est recevable à contester la qualité de syndicat professionnel d’une organisation dont l’objet ne satisfait pas aux exigences des articles L. 411-1 et L. 411-2 du Code du travail ;

Attendu qu’a été déclaré le 10 septembre 1996 un groupement se prévalant de la qualité de syndicat professionnel, dénommé Front national pénitentiaire (FNP), ayant pour objet de regrouper les fonctionnaires en civil ou en tenue ainsi que les contractuels sous statut de droit public dépendant du ministère de la Justice et de procéder à l’étude et à la défense des droits ainsi que des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu’individuels, des personnes visées par les statuts ; que l’Etat, représenté par le directeur de l’administration pénitentiaire, ainsi que la Fédération justice CFDT, l’Union générale des syndicats pénitentiaires CGT l’ont assigné aux fins de faire juger qu’il n’avait pas un objet conforme à l’article L. 411-1 du Code du travail et de lui interdire le droit de se prévaloir de la qualité de syndicat professionnel ; que le Syndicat de la magistrature, le Syndicat national des personnels de l’éducation surveillée Protection judiciaire de la jeunesse Fédération syndicale unitaire (SNPES-PJJ-FSU) et la Confédération générale du travail (CGT) sont intervenus volontairement dans l’instance ;

Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes des syndicats et de l’employeur, la cour d’appel énonce que l’interdiction de se prévaloir de la qualité de syndicat professionnel ne saurait être prononcée dans d’autres conditions que celles expressément autorisées par l’article L. 481-1 du Code du travail et que les dirigeants du FNP n’ayant pas été condamnés pour la commission de l’infraction prévue à l’article L. 411-1 du Code du travail et le ministère public n’ayant pas requis la dissolution, la demande est irrecevable en application de l’article 31 du nouveau Code de procédure civile ; qu’elle ajoute que le juge civil ne peut contrôler ab initio le bien-fondé de la mise en oeuvre d’une liberté publique, que le principe de la légalité des délits et des peines a pour effet de délimiter strictement l’intervention du juge et que la demande, qui ne s’analyse pas seulement en une opération de qualification mais en une atteinte à l’existence même du syndicat professionnel, est irrecevable, le ministère public étant le seul titulaire de l’action dans le cadre d’une procédure pénale ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’article L. 481-1 du Code du travail était étranger au litige et que l’intérêt à agir des syndicats et de l’employeur n’était pas contesté, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 9 juillet 1997, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Toulouse ;

MOYENS ANNEXES

Pourvoi n° 97-16.970.

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour l’Etat français représenté par le directeur de l’administration pénitentiaire.

MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré irrecevables les actions et notamment l’action de l’Etat français tendant à voir constater que le Front national pénitentiaire FNP n’a pas un objet conforme aux prescriptions légales applicables en matière de syndicat, et à lui interdire de se prévaloir de la qualité de syndicat ;

AUX MOTIFS QUE selon l’article L. 481-1 du Code du travail, en cas d’infraction aux dispositions de l’article L. 411-1 du même Code, la dissolution du syndicat ou de l’Union de syndicats peut être prononcée à la diligence du ministère public ; qu’il ne peut être porté atteinte à la liberté syndicale que dans les cas et conditions prévus par la loi, sans que cette atteinte puisse avoir pour résultat d’altérer la substance même du syndicat ; que la demande en interdiction de se prévaloir de la qualité de syndicat est irrecevable en application de l’article 31 du Nouveau Code de procédure civile, les dirigeants n’ayant pas été condamnés pour la commission de l’infraction, et le ministère public n’ayant jamais requis la peine complémentaire de la dissolution ; que la demande de constat de ce que l’organisation n’a pas la qualité de syndicat s’analyse en une atteinte à l’existence même du syndicat et est irrecevable, le ministère public étant le seul titulaire d’une telle action en justice, et dans le seul cadre de la procédure pénale ;

ALORS, D’UNE PART, que l’article L. 481-1 du Code du travail, à le supposer applicable, ne déroge pas au principe général selon lequel l’action civile peut être exercée devant la juridiction civile, laquelle reste compétente pour faire cesser le préjudice résultant d’une éventuelle infraction pénale, en en ordonnant la cessation à la demande de toute partie… qui y a intérêt ; qu’ainsi, l’arrêt attaqué a violé l’article L. 481-1 du Code du travail par fausse application, les articles 2 et 4 du Code de procédure pénale, l’article 31 du nouveau Code de procédure civile, l’article 1382 du Code civil, et l’article 5 du Code civil ;

ALORS, D’AUTRE PART, que l’action tendant à voir dire qu’une personne morale ne peut prétendre à la qualité de syndicat, faute pour ses statuts de correspondre à la définition légale qu’en donne l’article L. 411-1 du Code du travail, ne tend nullement à la dissolution de cette personne morale, mais à sa seule qualification, et à la détermination des droits qu’elle peut exercer en fonction de la qualification qui lui sera reconnue ou déniée ; qu’une telle action est ouverte à toute personne qui y a intérêt, en l’occurrence, à l’Etat employeur des personnels regroupés dans l’organisation litigieuse ; qu’ainsi, la cour d’appel a violé les articles L. 411-1 du Code du travail, L. 481-1 du même Code par fausse application, 31 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN, qu’a un intérêt légitime justifiant la recevabilité de son action, l’employeur qui apprend la constitution d’un groupement revendiquant la qualité de syndicat et l’exercice, dans l’entreprise, des prérogatives attachées à cette qualité, notamment par la présentation de candidats aux élections professionnelles ; qu’en affirmant qu’une telle action reviendrait à contester l’exercice ab initio de la liberté syndicale, et qu’elle serait irrecevable, la cour d’appel a violé les articles 30 et 31 du nouveau Code de procédure civile, L. 132-18 et L. 411-1 du Code du travail.

Pourvoi n° 97-17.097.

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour l’Union générale des syndicats pénitentiaires CGT et la Confédération générale du travail (CGT).

MOYEN UNIQUE DE CASSATION :

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir déclaré irrecevables les actions tendant à constater que le syndicat Front national pénitentiaire n’a pas un objet conforme aux prescriptions auxquelles la loi subordonne la qualité de syndicat et à lui interdire en conséquence de se prévaloir de cette qualité ;

AUX MOTIFS QUE la demande d’interdiction de se prévaloir de la qualité de syndicat porte directement atteinte à la possibilité offerte au regroupement de personnes, visées par les statuts, d’exercer librement une expression distincte de ses membres, qu’une telle interdiction ne saurait donc être prononcée dans d’autres conditions que celles expressément autorisées par la loi ; que les dirigeants du syndicat FNP n’ayant pas été condamnés pour la commission de l’infraction, dont l’incrimination est prévue à l’article L. 481-1, et le ministère public n’ayant jamais requis la peine complémentaire de la dissolution, la demande est irrecevable en application de l’article 31 du nouveau Code de procédure civile ; que, selon les intimés, le syndicat FNP n’est pas conforme car il s’agit d’un groupement indistinct d’un parti politique, en sorte que le principe de spécialité tel que défini à l’article L. 411-1 du Code du travail n’est pas respecté ; que, cependant, et même si la matérialité des faits retracés par le jugement n’est pas contestée par le syndicat FNP, d’une part, les attributions du juge civil ne lui permettent pas le contrôler ab initio le bien-fondé de la mise en oeuvre d’une liberté publique, d’autre part, la convention n° 87 de l’OIT, norme internationale protégeant l’exercice de la liberté syndicale, ne mentionne aucune définition précise du principe de spécialité, et enfin, la légalité interne ne saurait être interprétée plus restrictivement que cette convention au point de porter atteinte aux garanties qu’elle consacre, notamment la possibilité pour les travailleurs et les employeurs de formuler leur programme d’action au sein de leurs organisations ; qu’également, le principe de la légalité des délits et des peines, norme supérieure, a pour effet de délimiter strictement l’intervention du juge en cette matière, ce qui exclut toute dissociation de l’incrimination et de la sanction pénale au point d’ériger la première en un principe autonome créant ainsi, à côté de la seconde, une sanction spécifique, à savoir la mort civile d’une personnalité morale juridiquement protégée ; qu’en outre, cette nouvelle sanction, non connue antérieurement par les fondateurs du syndicat et non prévisible, ne saurait être assimilée à une restriction légitime quant à la libre constitution d’un syndicat ; qu’ainsi, la demande de constat, qui ne s’analyse pas seulement en une opération de qualification mais en une atteinte à l’existence même du syndicat professionnel, est irrecevable, le ministère public étant le seul titulaire d’une telle action en justice et dans le seul cadre de la procédure pénale ;

ALORS, D’UNE PART, QUE l’action tendant à faire juger que le Front national pénitentiaire ne constitue pas un syndicat au sens de l’article L. 411-1 du Code du travail, et à lui faire interdire de se prévaloir de la qualité de syndicat professionnel, n’a ni pour objet ni pour effet la dissolution du prétendu syndicat, mais sa requalification en association de droit commun, sans qu’il soit privé de sa personnalité morale ni des prérogatives liées à son exacte qualification ; qu’en estimant irrecevable une telle action, la cour d’appel a violé les articles L. 411-1 et L. 481-1 du Code du travail ;

ET ALORS, D’AUTRE PART, SUBSIDIAIREMENT, QU’en estimant que les dispositions de l’article L. 481-1 du Code du travail permettant au juge répressif, à l’occasion de poursuites engagées à l’encontre de directeurs ou administrateurs de syndicats ou d’unions de syndicats pour infractions aux dispositions de l’article L. 411-1 du Code du travail, de prononcer la dissolution du syndicat ou de l’union syndicale à la diligence du procureur de la République, interdisaient à tout intéressé de demander la dissolution ou la nullité de syndicats professionnels devant la juridiction civile, la cour d’appel a : en premier lieu, violé les articles L. 481-1, L. 411-1 du Code du travail et 31 et 32 du nouveau Code de procédure civile ; en second lieu, violé l’article 131-39 du Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994 qui prive la juridiction répressive de la faculté de prononcer la peine de dissolution d’un syndicat professionnel.

Pourvoi n° 97-17.272

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour la Fédération justice CFDT.

MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR déclaré irrecevables les actions, dont celle de l’organisation syndicale exposante, tendant à voir constater que le prétendu syndicat Front national pénitentiaire n’a pas la qualité de syndicat et à lui interdire de se prévaloir de ladite qualité ;

AUX MOTIFS QUE la demande tendant à l’interdiction de se prévaloir de la qualité de syndicat porte directement atteinte à la possibilité offerte au regroupement des personnes, visées par les statuts, d’exercer librement une expression distincte de ses membres ; qu’une telle interdiction ne saurait donc être prononcée dans d’autres conditions que celles expressément autorisées par la loi ; que les dirigeants du syndicat FNP n’ayant pas été condamnés pour la commission de l’infraction, dont l’incrimination est prévue à l’article L. 411-1, et le ministère public n’ayant jamais requis la peine complémentaire de la dissolution, la demande est irrecevable en application de l’article 31 du nouveau Code de procédure civile ; que, sur le constat que le syndicat n’a pas un objet conforme aux prescriptions légales, selon les intimés, le syndicat FNP n’est pas conforme car il s’agit d’un groupement indistinct d’un parti politique en sorte que le principe de spécialité tel que défini à l’article L. 411-1 du Code du travail n’est pas respecté ; que cependant, et même si la matérialité des faits retracés par le jugement n’est pas contestée par le syndicat FNP, d’une part, les attributions du juge civil ne lui permettent pas de contrôler ab initio le bien-fondé de la mise en oeuvre d’une liberté publique, d’autre part, la convention n° 87, norme internationale protégeant l’exercice de la liberté syndicale, ne mentionne aucune définition précise du principe de spécialité, et enfin la légalité interne ne saurait être interprétée plus restrictivement que cette convention au point de porter atteinte aux garanties qu’elle consacre, notamment la possibilité pour les travailleurs de formuler leur programme d’action au sein de leurs organisations ; qu’également le principe de la légalité des délits et des peines, norme supérieure, a pour effet de délimiter strictement l’intervention du juge en cette matière, ce qui exclut toute dissociation de l’incrimination et de la sanction pénale au point d’ériger la première en un principe autonome créant ainsi, à côté de la seconde, une sanction spécifique, à savoir la mort civile d’une personnalité morale juridiquement protégée ; qu’en outre, cette nouvelle sanction, non connue antérieurement par les fondateurs du syndicat et non prévisible, ne saurait être assimilée à une restriction légitime quant à la libre constitution d’un syndicat ; qu’ainsi, la demande de constat, qui ne s’analyse pas seulement en une opération de qualification mais en une atteinte à l’existence même du syndicat professionnel, est irrecevable, le ministère public étant le seul titulaire d’une telle action en justice et dans le seul cadre de la procédure pénale ;

ALORS QUE lorsque n’est pas constitué conformément aux dispositions de l’article L. 411-1 du Code du travail un prétendu syndicat, s’il ne peut recevoir cette qualification, n’est pas pour autant privé d’existence légale ; qu’il appartient au juge de la requalifier ; qu’en estimant que l’action tendant à sa requalification et, partant, à lui faire injonction de ne pas se prévaloir de la qualité de syndicat, tendait en réalité à sa dissolution, ce dont elle a déduit qu’elle était irrecevable, la cour d’appel a violé les articles L. 411-1 et L. 481-1 du Code du travail, 10 de la convention n° 87 de l’Organisation internationale du travail, 3 et 7 de la loi du 1er juillet 1901, ensemble l’article 12 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS, subsidiairement et en toute hypothèse, QUE si l’article L. 481-1 du Code du travail confie au ministère public le pouvoir de requérir la dissolution d’un syndicat, dont les dirigeants se sont rendus coupables d’infraction à l’article L. 411-1 dudit Code, il n’en résulte pas que cette action soit exclusive de celle de tout intéressé, singulièrement d’une autre organisation syndicale, de demander à la juridiction civile de dissoudre ou de constater la nullité de ladite organisation ; qu’en statuant autrement, la cour d’appel a violé les articles L. 481-1 et L. 411-1 du Code du travail, 31 et 32 du nouveau Code de procédure civile, 3 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 ;

Et ALORS surtout QU’il résulte de l’article 131-39 du Code pénal que la dissolution d’un syndicat ne peut être prononcée à titre de sanction pénale ; que le ministère public est donc désormais privé des droits qu’il tenait de l’article L. 481-1 du Code du travail ; que dès lors, en disant réservée au ministère public une action dont celui-ci ne dispose plus, la cour d’appel a de plus fort violé ledit article 131-39 du Code pénal et l’article 31 du nouveau Code de procédure civile.

Pourvoi n° 97-17.323.

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour le syndicat de la magistrature et le syndicat national des personnels de l’éducation surveillée Protection judiciaire de la jeunesse Fédération syndicale unitaire (SNPES-PJJ-FSU).

MOYEN UNIQUE DE CASSATION :

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir déclaré irrecevables les actions tendant à constater que le syndicat Front national pénitentiaire n’a pas un objet conforme aux prescriptions auxquelles la loi subordonne la qualité de syndicat et à lui interdire en conséquence de se prévaloir de cette qualité ;

AUX MOTIFS QUE la demande d’interdiction de se prévaloir de la qualité de syndicat porte directement atteinte à la possibilité offerte au regroupement de personnes, visées par les statuts, d’exercer librement une expression distincte de ses membres, qu’une telle interdiction ne saurait donc être prononcée dans d’autres conditions que celles expressément autorisées par la loi ; que les dirigeants du syndicat FNP n’ayant pas été condamnés pour la commission de l’infraction, dont l’incrimination est prévue à l’article L. 481-1, et le ministère public n’ayant jamais requis la peine complémentaire de la dissolution, la demande est irrecevable en application de l’article 31 du nouveau Code de procédure civile ; que, selon les intimés, le syndicat FNP n’est pas conforme car il s’agit d’un groupement indistinct d’un parti politique, en sorte que le principe de spécialité tel que défini à l’article L. 411-1 du Code du travail n’est pas respecté ; que, cependant, et même si la matérialité des faits retracés par le jugement n’est pas contestée par le syndicat FNP, d’une part, les attributions du juge civil ne lui permettent pas de contrôler ab initio le bien-fondé de la mise en oeuvre d’une liberté publique, d’autre part, la convention n° 87 de l’OIT, norme internationale protégeant l’exercice de la liberté syndicale, ne mentionne aucune définition précise du principe de spécialité, et enfin, la légalité interne ne saurait être interprétée plus restrictivement que cette convention au point de porter atteinte aux garanties qu’elle consacre, notamment la possibilité pour les travailleurs et les employeurs de formuler leur programme d’action au sein de leurs organisations ; qu’également, le principe de la légalité des délits et des peines, norme supérieure, a pour effet de délimiter strictement l’intervention du juge en cette matière, ce qui exclut toute dissociation de l’incrimination et de la sanction pénale au point d’ériger la première en un principe autonome créant ainsi, à côté de la seconde, une sanction spécifique, à savoir la mort civile d’une personnalité morale juridiquement protégée ; qu’en outre, cette nouvelle sanction, non connue antérieurement par les fondateurs du syndicat et non prévisible, ne saurait être assimilée à une restriction légitime quant à la libre constitution d’un syndicat ; qu’ainsi, la demande de constat, qui ne s’analyse pas seulement en une opération de qualification mais en une atteinte à l’existence même du syndicat professionnel, est irrecevable, le ministère public étant le seul titulaire d’une telle action en justice et dans le seul cadre de la procédure pénale ;

ALORS, D’UNE PART, QUE l’action tendant à faire juger que le Front national pénitentiaire ne constitue pas un syndicat au sens de l’article L. 411-1 du Code du travail, et à lui faire interdire de se prévaloir de la qualité de syndicat professionnel, n’a ni pour objet ni pour effet la dissolution du prétendu syndicat, mais sa requalification en association de droit commun, sans qu’il soit privé de sa personnalité morale ni des prérogatives liées à son exacte qualification ; qu’en estimant irrecevable une telle action, la cour d’appel a violé les articles L. 411-1 et L. 481-1 du Code du travail ;

ET ALORS, D’AUTRE PART, SUBSIDIAIREMENT, QU’en estimant que les dispositions de l’article L. 481-1 du Code du travail permettant au juge répressif, à l’occasion de poursuites engagées à l’encontre de directeurs ou administrateurs de syndicats ou d’unions de syndicats pour infractions aux dispositions de l’article L. 411-1 du Code du travail, de prononcer la dissolution du syndicat ou de l’union syndicale à la diligence du procureur de la République, interdisaient à tout intéressé de demander la dissolution ou la nullité de syndicats professionnels devant la juridiction civile, la cour d’appel a : en premier lieu, violé les articles L. 481-1, L. 411-1 du Code du travail et 31 et 32 du nouveau Code de procédure civile ; en second lieu, violé l’article 131-39 du Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994 qui prive la juridiction répressive de la faculté de prononcer la peine de dissolution d’un syndicat professionnel.

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