Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 février 2019, 18-83.055, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 20 févr. 2019, n° 18-83.055
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-83.055
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel d'Angers, 18 octobre 2017
Textes appliqués :
Article 132-19 du code pénal.
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038194419
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CR00079
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Sur les parties

Texte intégral

N° Z 18-83.055 FS-D

N° 79

SM12

20 FÉVRIER 2019

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

— M. U… T…,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 19 octobre 2017, qui, pour menaces de mort réitérées et violences aggravées, l’a condamné à trois mois d’emprisonnement et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 9 janvier 2019 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Guéry, conseiller rapporteur, MM. Castel, Moreau, Mme Drai, M. de Larosière de Champfeu, Mme Slove, M. Stephan, conseillers de la chambre, Mme Carbonaro, conseiller référendaire ;

Avocat général : Mme Moracchini ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de M. le conseiller GUÉRY, les observations de la société civile professionnelle GARREAU, BAUER-VIOLAS et FESCHOTTE-DESBOIS, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l’avocat général MORACCHINI ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, 111-3, 111-4, 222-17 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi ;

« en ce que l’arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. T… coupable de menace de mort réitérée ;

« aux motifs que sur la culpabilité Mme T… X… a déclaré de façon constante que la situation était conflictuelle avec son père ; que le 14 février 2015, entre 10 heures 30 et 11 heures, alors qu’elle faisait la vaisselle, son père lui a reproché de ne pas avoir bien nettoyé l’évier, l’a menacée dans les termes de la prévention, puis dans sa chambre, a exercé des violences sur elle consistant à lui appliquer un couteau de cuisine sur la gorge en la menaçant ; qu’après avoir minimisé les faits, M. U… T… en a reconnu la réalité dans les termes décrits par sa fille lors de la mise en présence réalisée par les policiers ; qu’à l’audience d’appel, il déclare vouloir s’expliquer sur les faits qui lui sont reprochés dont il reconnaît la réalité et qui auraient été commis par lui dans un accès de colère ; qu’il apparaît dès lors que les éléments constitutifs des infractions reprochées sont caractérisés. Il conviendra donc d’en déclarer M. T… coupable et de confirmer de ce chef le jugement déféré (arrêt p. 3) ;

« alors que la loi pénale est d’interprétation stricte ; que le délit de menace de l’article 222-17 du code pénal suppose que la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes dont la tentative est punissable ait été soit réitérée soit matérialisée par un écrit, une image ou tout autre objet ; que si l’article 222-17 du code pénal ne prévoit pas de délai avant la réitération, il n’y a réitération que si le prévenu a manifesté, par un second propos menaçant, la volonté persistante de menacer la victime ; que la répétition d’un propos menaçant identique, dans une même phrase, est insuffisant à caractériser la réitération ; qu’en déclarant M. T… coupable de menace de mort réitérée sur sa fille pour avoir déclaré « Je vais te crever, tu me pourris la vie, je vais te crever » lorsque la tenue de l’unique propos menaçant « je vais te crever », répété dans une même phrase, ne caractérisait pas une menace réitérée, la cour d’appel a violé les articles 111-4 et 222-17 du code pénal" ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. T… a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir, au Mans, le 14 février 2015, de manière réitérée, menacé sa fille Mme T… X… de mort, en lui disant : « je vais te crever, tu me pourris la vie, je vais te crever »; qu’il a également été poursuivi pour violences avec arme, faits commis sur la même personne dans les mêmes conditions de temps et de lieu, que le tribunal correctionnel a déclaré M. T… coupable, a prononcé la peine et a statué sur les intérêts civils ; que le prévenu et le ministère public ont interjeté appel ;

Attendu que, pour confirmer la déclaration de culpabilité la cour d’appel relève que Mme T… a déclaré de façon constante que, le 14 février 2015, entre 10 heures 30 et 11 heures, son père lui a reproché de ne pas avoir nettoyé l’évier et l’a menacée dans les termes de la prévention, puis a exercé des violences sur elle consistant à lui appliquer un couteau de cuisine sur la gorge en la menaçant ; qu’après avoir voulu minimiser les faits, le prévenu les a reconnus et a expliqué les avoir commis dans un accès de colère ; que les juges concluent que les éléments constitutifs des infractions sont caractérisés ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que la répétition des propos traduisant la détermination persistante de leur auteur caractérise l’infraction de menaces de mort réitérées, l’arrêt n’encourt pas les griefs visés au moyen ;

D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 132-19, 222-13, 222-17 du code pénal, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi ;

« en ce que l’arrêt confirmatif attaqué a condamné M. T… à une peine d’emprisonnement de trois mois sans sursis ;

« aux motifs que sur la peine M. T… est âgé de 51 ans pour être né le […] ; qu’il est séparé de son épouse, père de deux enfants âgés respectivement de 28 et 18 ans dont aucun n’est à sa charge ; qu’il déclare être sans profession et sans ressource ; que son casier judiciaire porte mention de cinq condamnations de 2004 à 2013, dont quatre pour des faits constitutifs d’infractions à la législation sur les stupéfiants et une condamnation pour des faits de circulation sans assurance ; qu’au vu de la nature des faits, et de la situation de M. T…, la condamnation à une amende ou à des jours-amende ne serait pas adaptée, pas davantage qu’une peine d’emprisonnement assortie d’un sursis avec mise à l’épreuve, le prononcé d’une peine d’emprisonnement assortie d’un sursis simple étant exclu , dès lors que M. T… a déjà été condamné, dans les cinq ans précédant les faits objets de la présente procédure, à une peine d’emprisonnement ; qu’ une peine comportant un travail d’intérêt général ne peut être envisagée dès lors que le prévenu n’a pas donné son consentement ; que la persistance de M. T… à commettre des faits délictueux malgré ses précédentes condamnations et ses mises à l’épreuve traduit son incapacité à se contrôler et à intégrer les normes sociales ; que dans ces conditions, seule une peine d’emprisonnement ferme, à l’exclusion de toute autre, apparaît adaptée à la situation de M. T…, à la gravité des faits commis et à leur perpétuation sur la durée ; qu’il conviendra dès lors de confirmer le jugement du tribunal correctionnel qui a fait une juste appréciation de la peine dans sa nature et sa durée (arrêt p. 3-4) ;

« 1°) alors qu’en matière correctionnelle, le juge qui prononce une peine d’emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l’infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère inadéquat de toute autre sanction ; qu’en relevant, pour condamner M. T… à une peine d’emprisonnement sans sursis de trois mois, que le casier judiciaire de M. T… portait mention de cinq condamnations de 2004 à 2013 et que la persistance du prévenu à commettre des faits délictueux malgré ses précédentes condamnations et ses mises à l’épreuve traduisait son incapacité à se contrôler et à intégrer les normes sociales sans s’expliquer, autrement que par le rappel des mentions de son casier judiciaire, sur les éléments de la personnalité du prévenu qu’elle a pris en considération pour fonder sa décision, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

« 2°) alors qu’en matière correctionnelle, si la peine prononcée n’est pas supérieure à deux ans ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge qui décide de ne pas l’aménager doit soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l’espèce, de la personnalité du prévenu et de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu’en prononçant à l’encontre de M. T… une peine d’emprisonnement sans sursis de trois mois sans se prononcer sur l’aménagement de la peine, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

« 3°) alors qu’en matière correctionnelle, si la peine prononcée n’est pas supérieure à deux ans ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge qui décide de ne pas l’aménager doit soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l’espèce, de la personnalité du prévenu et de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu’en prononçant une peine d’emprisonnement sans sursis de trois mois sans apprécier les éléments produits par le prévenu devant la cour relatifs à sa situation matérielle, familiale et sociale permettant aux juges de prononcer sur l’aménagement de la peine d’emprisonnement et, plus précisément, le certificat médical et les factures d’hospitalisation du prévenu attestant que son état de santé nécessitait un suivi constant et qu’il était incompatible avec une incarcération, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé" ;

Vu l’article 132-19 du code pénal ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que le juge qui prononce une peine d’ emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l’espèce, de la gravité de l’infraction, de la personnalité de son auteur, ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; que, dans le cas où la peine n’est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, s’il décide de ne pas l’aménager, doit en outre motiver spécialement cette décision, soit en établissant que la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale du condamné ne permettent pas un tel aménagement, soit en constatant une impossibilité matérielle ;

Attendu que, pour condamner le prévenu à une peine de trois mois d’emprisonnement sans sursis, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel, qui n’a pas spécialement motivé sa décision de ne pas aménager la partie sans sursis de la peine d’emprisonnement prononcée, a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel d’Angers, en date du 19 octobre 2017, mais en ses seules dispositions relatives à la peine, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel d’Angers, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel d’Angers et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt février deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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