Cour de cassation, Chambre sociale, 14 novembre 2019, 18-11.125, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Vincent Orif · Bulletin Joly Travail · 1er janvier 2020
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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 14 nov. 2019, n° 18-11.125
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-11.125
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Papeete, 2 août 2017
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000039419214
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:SO01565
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

LM

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 14 novembre 2019

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 1565 FS-D

Pourvoi n° Q 18-11.125

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Acor Pacifique, dont le siège est […] ,

2°/ M. C… K…, domicilié […] , agissant en qualité de commissaire à l’exécution du plan de la société Acor Pacifique,

contre l’arrêt rendu le 3 août 2017 par la cour d’appel de Papeete (chambre sociale), dans le litige les opposant à M. B… M…, domicilié […] ,

défendeur à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 8 octobre 2019, où étaient présents : M. Cathala, président, Mme Duvallet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, MM. Maron, Pietton, Mme Richard, conseillers, Mmes Depelley, Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Duvallet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Acor Pacifique et M. K…, ès qualités, l’avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Papeete, 3 août 2017), que M. M… a été engagé par la société Acor Pacifique en qualité de manoeuvre par contrat du 19 mai 1995 contenant une clause de conciliation préalable en ces termes « Toute contestation née de l’exécution du présent contrat de travail sera portée devant l’Inspection du Travail et des lois sociales pour tentative de conciliation. En cas d’échec, celle-ci sera portée devant le Tribunal du Travail » ; que M. M… a été licencié pour faute lourde le 9 mai 2014 et a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes ; que par jugement du 14 mars 2016, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l’égard de la société, M. K… étant désigné commissaire à l’exécution du plan ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de déclarer l’action du salarié recevable et de fixer au passif de la procédure collective de la société des créances d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, au titre de la mise à pied et congés payés afférents, de rappel de salaire et congés payés afférents et d’indemnité de licenciement, alors, selon le moyen :

1°/ que la clause contractuelle subordonnant la saisine du tribunal du travail au préalable de tentative de conciliation, toute contestation née de l’exécution du contrat de travail devant être portée devant l’inspection du travail préalablement à la saisine de la juridiction, ne subordonne pas l’exercice par l’employeur de son pouvoir disciplinaire à la saisine préalable de l’inspection du travail ; qu’en jugeant que l’employeur avait l’obligation, sur le fondement d’une telle clause, de saisir l’inspecteur du travail avant la mise en oeuvre d’une procédure de licenciement et que, faute de l’avoir fait, il ne pouvait imposer au salarié le préalable de tentative de conciliation, la cour d’appel a dénaturé ladite clause et partant a violé l’article 1134 ancien, devenu l’article 1103 du code civil applicable en Polynésie française ;

2°/ qu’en refusant de faire produire ses effets à la clause contractuelle subordonnant la saisine du tribunal du travail au préalable de tentative de conciliation, en considération du fait que l’employeur aurait agi de mauvaise foi et en jugeant, par conséquent recevable l’action du salarié, la cour d’appel a violé l’article 1134 ancien, devenu l’article 1103 du code civil applicable en Polynésie française ;

3°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en opposant à l’exception d’irrecevabilité un moyen tiré de la mauvaise foi contractuelle dont nul ne se prévalait, sans inviter les parties à discuter ce moyen soulevé d’office, la cour d’appel a violé l’article 6 du code de procédure civile de Polynésie Française ;

Mais attendu qu’abstraction faite de motifs surabondants relatifs à la mauvaise foi, la cour d’appel, ayant constaté que l’employeur avait pris l’initiative de rompre le contrat et retenu, hors toute dénaturation, qu’en application de la clause contractuelle, il lui appartenait de mettre en oeuvre, au préalable, la procédure de conciliation, n’encourt pas les griefs du moyen ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen annexé qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Acor Pacifique et M. K…, ès qualités, aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour la société Acor Pacifique et M. K…, en qualité de commissaire à l’exécution du plan de la société Acor Pacifique

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR déclaré l’action du salarié recevable et d’avoir fixé au passif de la société Acor Pacifique des créances d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, au titre de la mise à pied, les congés payés y afférents, de rappel de salaire, congés payés y afférents et d’indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE l’article 10 du contrat de travail du 19 mai 1995 liant les parties dispose que : « Toute contestation née de l’exécution du présent contrat de travail sera portée devant l’Inspection du Travail et des lois sociales pour tentative de conciliation » ; qu’en cas d’échec, celle-ci sera portée devant le Tribunal du Travail » ; qu’il institue ainsi une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge et constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si une partie l’invoque, ce qui est le cas de la SA Acor Pacifique ; que cette procédure de conciliation ne peut être défavorable au salarié puisqu’elle est aussi imposée à l’employeur ; qu’une négociation menée par l’inspecteur du travail qui assure une mission de service public en matière de législation sociale permet à chaque partie de connaître ses droits et d’éviter erreurs et malentendus et quelle est susceptible de régler rapidement un litige ; que toutefois, si l’employeur a pris l’initiative d’engager une procédure de licenciement disciplinaire à l’encontre d’B… M…, c’est qu’il se trouvait en profond désaccord sur la façon de travailler du salarié et qu’il existait donc une contestation née de l’exécution du contrat de travail ; qu’il avait donc l’obligation, sur le fondement de l’article 10 dudit contrat de saisir l’inspecteur du travail, la tentative de conciliation possédant un caractère d’autant plus protecteur qu’elle était susceptible d’éviter au salarié de pendre son emploi ; qu’il se prévaut ainsi d’une règle qu’il n’a pas respectée et a privé l’intimé de la possibilité d’un accord sur son maintien dans l’entreprise ; que dans ces conditions, sa mauvaise foi lui interdit d’imposer à B… M… une saisine de l’inspection du travail à laquelle elle s’est dispensée de procéder.

1/ ALORS QUE la clause contractuelle subordonnant la saisine du tribunal du travail au préalable de tentative de conciliation, toute contestation née de l’exécution du contrat de travail devant être portée devant l’inspection du travail préalablement à la saisine de la juridiction, ne subordonne pas l’exercice par l’employeur de son pouvoir disciplinaire à la saisine préalable de l’inspection du travail ; qu’en jugeant que l’employeur avait l’obligation, sur le fondement d’une telle clause, de saisir l’inspecteur du travail avant la mise en oeuvre d’une procédure de licenciement et que, faute de l’avoir fait, il ne pouvait imposer au salarié le préalable de tentative de conciliation, la cour d’appel a dénaturé ladite clause et partant a violé l’article 1134 ancien, devenu l’article 1103 du code civil applicable en Polynésie française.

2/ ET ALORS QU’en refusant de faire produire ses effets à la clause contractuelle subordonnant la saisine du tribunal du travail au préalable de tentative de conciliation, en considération du fait que l’employeur aurait agi de mauvaise foi et en jugeant, par conséquent recevable l’action du salarié, la cour d’appel a violé l’article 1134 ancien, devenu l’article 1103 du code civil applicable en Polynésie française.

3/ ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en opposant à l’exception d’irrecevabilité un moyen tiré de la mauvaise foi contractuelle dont nul ne se prévalait, sans inviter les parties à discuter ce moyen soulevé d’office, la cour d’appel a violé l’article 6 du code de procédure civile de Polynésie Française.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR fixé au passif de la société Acor Pacifique des créances d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, au titre de la mise à pied, les congés payés y afférents, de rappel de salaire, les congés payés y afférents et d’indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QU’B… M… a été licencié pour faute lourde par lettre du 9 mai 2014 qui fixe les limites du litige et qui est ainsi rédigée : « Malgré la note de service qui vous a été remise le 11 mars 2014, noué avons été alertés par votre service pour le non-respect de cette dite note relative à la consommation d’alcool ou de drogue « paka ». A plusieurs reprises et pendant les heures de travail, vous avez été vif en allant vous cacher derrière la machine « FORMAT S » pour aller vous asseoir sur un banc en bois, il y a un grillage et des cartons qui ont été installés pour cacher là où il y a le banc. Quand vous reveniez à votre poste de travail, il a été constaté que vous aviez les yeux rouges. Votre service en a conclu que vous aviez consommé et fumé du « paka » pendant les heures de travail. Votre service vous a fait rappeler la note de service que vous avez signée et vous a invité à la respecter. Vous n’avez pas répondu et vous avez simplement rigolé. Le 28 avril 2014, vous avez été convoqué par lettre remise en main propre contre décharge à un entretien préalable à une sanction pouvant aller jusqu’à un éventuel licenciement pour faute lourde. Eu égard à la gravité des faits reprochés, nous vous avons également notifié dans cette lettre votre mise à pied à titre conservatoire dans l’attente de notre décision. Vous avez quitté votre poste de travail le jour-même. Votre entretien s’est tenu le vendredi 2 mai 2014 à 7h00 dans le bureau de direction de notre société ZI Punaruu afin d’entendre vos explications sur les faits qui vous sont reprochés. A l’occasion de cet entretien, vous vous êtes présenté seul. Au cours de votre entretien, vous avez admis avoir consommé et fumé du « paka » avant, mais que vous ne reconnaissez pas avoir consommé et fumé du « paka » maintenant alors que nous avons été alertés par votre service à plusieurs reprises et pendant les heures de travail. D’autre part, nous tenons à ajouter que vous avez volé une caisse à outils dans l’atelier vous faisant aider par Monsieur L… I… pour la charger dans votre voiture. Les explications que vous avez données pour tenter de justifier votre comportement ne constituent pas des excuses acceptables par notre entreprise. Eu égard aux faits précités, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute lourde « non-respect de la note de service du 11 mars 2014 relative à la consommation d’alcool ou de drogue « paka », lequel prendra effet pour compter de la présente lettre. S’agissant d’un licenciement pour faute lourde, nous vous confirmons par ailleurs que vous êtes dispensés d’effectuer votre préavis. Vous trouverez ci-joint votre certificat de travail ainsi que votre solde pour tout compte dont nous vous demandons de nous retourner un exemplaire signé. Les journées d’absences suite à votre mise à pied à titre conservatoire sont également décomptées de votre dernier salaire

» ; qu’il appartient à l’employeur qui se prévaut d’une faute lourde d’en rapporter la preuve et, si un doute subsiste, il profite au salarié ; que les griefs relatifs à la consommation de cannabis sont uniquement fondés sur les témoignages de 4 salariés de l’entreprise, A… X…, U… O…. Y… P… et U… H… ; que toutefois, leurs attestations datées d’avril et mai 2014 sont particulièrement imprécises et reposent soit sur des suppositions ou déductions, soit sur des rumeurs ; qu’en effet, A… X… et U… O… se contentent d’affirmer qu’ils ont vu B… M… se cacher derrière une machine et revenir avec les yeux rouges ; que Y… P… reconnaît n’avoir « jamais pris sur le fait » l’intimé et U… H… indique seulement avoir entendu dire que l’intimé consommer du « paka » ; que par ailleurs, il convient de sa montrer prudent sur la valeur probante des sommations interpellatives que l’employeur a fait délivrer le 6 février 2015 aux 4 mêmes salariés dans la mesure où elles font été sur leur lieu de travail, qui n’est pas celui où ils vont s’exprimer avec la plus grande liberté et sous forme de questionnaire dichotomique, donc réducteur ; qu’en tout état de cause, Y… P… et U… H… confirment qu’ils n’ont jamais vu B… M… consommer du cannabis pendant ses heures de travail ; que si A… X… et U… O… se contredisent en répondant l’avoir vu, c’est sans préciser la date, l’heure, l’endroit, ni les circonstances ; que dans ces conditions, il existe un doute sérieux quant au défaut de respect de sa note de service du 11 mars 2014 relative à la consommation d’alcool ou de drogue sur les lieux de travail qui est reproché à B… M… ; qu’enfin, l’article Lp. 1323-1 du code du travail de la Polynésie française dispose que : « Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales » ; que le vol de la caisse à outils que l’employeur reproche à B… M… d’avoir commis aurait eu lieu en 2013 et a fait l’objet, en octobre 2013, d’une procédure disciplinaire qui n’a pas abouti à une sanction ;

1° ALORS QUE la société Acor Pacifique soutenait dans ses écritures d’appel que le salarié reconnaissait avoir une consommation régulière de cannabis, ce qui résultait expressément de la pièce n° 3 qu’il avait produite ; qu’en affirmant que les griefs relatifs à la consommation de cannabis étaient uniquement fondés sur les témoignages de quatre salariés de l’entreprise, sans examiner ce moyen décisif à même d’écarter tout doute sur la matérialité des faits, la cour d’appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance des exigences de l’article 455 du code de procédure civile, ensemble l’article 268 du code de procédure civile de Polynésie française.

2° ALORS QUE le juge doit préciser les pièces sur lesquelles il se fonde ; qu’en affirmant que le vol de la caisse à outils reproché au salarié avait déjà fait l’objet d’une procédure disciplinaire en 2013 sans préciser sur quelle pièce elle s’est fondée pour procéder à un tel constat, la cour d’appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance des exigences de l’article 455 du code de procédure civile, ensemble l’article 268 du code de procédure civile de Polynésie française.

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