Cour de discipline budgétaire et financière, Direction des travaux du génie de Marseille, 30 juin 1954
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CDBF, 30 juin 1954, n° 16 |
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Numéro(s) : | 16 |
Publication : | Recueil Lebon, 1961, p. 887 (extraits anonymisés) Cahiers de comptabilité publique, n°2. - Centre de publications de l'université de Caen, 1990, p. 4 |
Date d’introduction : | 30 juin 1954 |
Date(s) de séances : | 30 juin 1954 |
Identifiant Cour des comptes : | JF00077535 |
Sur les parties
- Rapporteur : M. DU PONTAVICE, Conseiller référendaire
- Parties : MM Maurin, Coulomb et Bonnaud
Texte intégral
LA COUR,
Vu la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948 tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l’égard de l’Etat et de diverses collectivités et portant création d’une Cour de discipline budgétaire ;
Vu la loi du 6 août 1953 portant amnistie ;
Vu les lois et règlements relatifs à l’exécution des recettes et des dépenses de l’Etat et notamment les articles 10 et 15 du décret du 31 mai 1862 ;
Vu la lettre du ministre de la défense nationale du 24 juin 1953 déférant le lieutenant-colonel MAURIN devant la Cour de discipline budgétaire ;
Vu les conclusions du Procureur général de la République du 8 juillet 1953 transmettant le dossier au président de la Cour de discipline budgétaire ;
Vu la lettre du président du 18 juillet 1953 désignant comme rapporteur M du PONTAVICE, conseiller référendaire à la Cour des comptes ;
Vu les avis de réception des lettres recommandées du Procureur général de la République des 27 octobre et 20 novembre 1953 avisant le lieutenant-colonel MAURIN ainsi que les commandants COULOMB et BONNAUD qu’ils étaient prévenus d’irrégularités commises à l’occasion des travaux de construction d’une villa, qui, bien qu’étrangers au service, ont bénéficié de moyens militaires, et les informant qu’ils étaient autorisés à se faire assister soit par un mandataire, soit par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ;
Vu les avis émis le 20 janvier 1954 par le secrétaire d’Etat à la guerre et le 13 mars 1954 par le secrétaire d’Etat au budget après communication du dossier ;
Vu les conclusions du Procureur général de la République du 30 mars 1954 prononçant le classement de l’affaire en ce qui concerne les commandants COULOMB et BONNAUD et renvoyant le lieutenant-colonel MAURIN devant la Cour de discipline budgétaire ;
Vu l’avis de réception de la lettre recommandée du 23 avril 1954 avisant le lieutenant-colonel MAURIN qu’il pouvait, dans un délai de quinze jours, prendre connaissance du dossier de l’affaire au secrétariat de la Cour soit par lui-même, soit par mandataire, soit par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ;
Vu le mémoire écrit en date du 4 juin 1954 produit par le lieutenant-colonel MAURIN ;
Vu l’ensemble des pièces qui figurent au dossier de la procédure, et notamment les procès-verbaux d’interrogatoire ;
Ouï le Procureur général de la République en ses conclusions ;
Ouï, en son rapport, M du PONTAVICE, conseiller référendaire à la Cour des comptes, rapporteur ;
Ouï le Procureur général de la République en ses réquisitions ;
Ouï le lieutenant-colonel MAURIN en ses observations celui-ci ayant eu la parole le dernier ;
Considérant qu’il est établi par l’instruction que le lieutenant- colonel MAURIN, alors qu’il exerçait, par intérim, les fonctions de directeur des travaux du génie de Marseille, a utilisé pendant plus d’un an, au cours des années 1951 et 1952, une main-d’oeuvre civile et militaire, ainsi que des véhicules militaires, à des fins étrangères au service, à savoir la construction d’une villa privée pour le compte d’une tierce personne ;Considérant qu’ainsi des crédits afférents, d’une part à la subsistance du personnel militaire et à la rémunération du personnel civil du génie, d’autre part à l’entretien et au fonctionnement de véhicules militaires, ont été détournés de leur affectation ; qu’en outre, exception faite des prestations fournies par le personnel militaire, de fausses certifications ont été délivrées attestant comme ayant été exécutées au profit de l’Etat les prestations dont il s’agit ; que ces faits constituent des violations des articles 10 et 15 du décret du 31 mai 1862 et ainsi, au sens de l’article 5 de la loi du 25 septembre 1948, des infractions aux règles d’exécution des dépenses de l’Etat ;
Considérant que ces agissements ont causé à l’Etat un préjudice certain ;
Considérant que le lieutenant-colonel MAURIN doit être tenu pour l’auteur responsable des irrégularités commises ; que sa responsabilité apparaît d’autant plus lourde qu’il a usé de son autorité pour obtenir, en la matière, certaines facilités de la part d’autres officiers dont certains étaient placés sous son autorité ;
Considérant qu’en vertu de l’article 33 de la loi du 6 août 1953 sont amnistiés quelle qu’en soit la nature, les faits commis antérieurement au 1er janvier 1953 : « ayant donné lieu, ou pouvant donner lieu, uniquement ou conjointement, à une sanction pénale amnistiée, à des sanctions disciplinaires contre les fonctionnaires de l’Etat, les agents civils ou militaires… à l’exception de ceux constituant des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l’honneur » ;
Mais considérant que les agissements du lieutenant-colonel MAURIN constituent bien des manquements à la probité qu’en tout état de cause, la disposition qui précède doit être combinée avec celle de l’article 37, alinéa 2, de ladite loi du 6 août 1953 aux termes de laquelle l’amnistie prévue par ce texte ne sera acquise qu’après le paiement par le bénéficiaire éventuel de l’amende à laquelle il a été ou sera personnellement et définitivement condamné ; qu’il est établi que les procédures doivent être menées jusqu’à leur terme lorsqu’elles sont susceptibles d’aboutir à l’application d’une amende ; que les pénalités encourues devant la Cour de discipline budgétaire sont expressément qualifiées d’amendes par la loi du 25 septembre 1948 ;
Considérant que par suite la loi du 6 août 1953 ne peut, en l’espèce, être valablement invoquée pour motiver l’arrêt des poursuites à l’égard du lieutenant-colonel MAURIN ;
Considérant toutefois qu’il y a lieu de tenir compte des services antérieurs de l’intéressé ;
CONDAMNE le lieutenant-colonel MAURIN à une amende de deux cent cinquante mille francs.
Textes cités dans la décision