CJCE, n° C-256/91, Conclusions de l'avocat général de la Cour, Emsland-Stärke GmbH contre Oberfinanzdirektion München, 16 décembre 1992

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 16 déc. 1992, Emsland-Stärke, C-256/91
Numéro(s) : C-256/91
Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 16 décembre 1992. # Emsland-Stärke GmbH contre Oberfinanzdirektion München. # Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. # Tarif douanier commun - Nomenclature combinée - Produit amylacé. # Affaire C-256/91.
Date de dépôt : 10 octobre 1991
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 61991CC0256
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1992:528
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

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61991C0256

Conclusions de l’avocat général Tesauro présentées le 16 décembre 1992. – Emsland-Stärke GmbH contre Oberfinanzdirektion München. – Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof – Allemagne. – Tarif douanier commun – Nomenclature combinée – Produit amylacé. – Affaire C-256/91.


Recueil de jurisprudence 1993 page I-01857


Conclusions de l’avocat général


++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1. Le Bundesfinanzhof pose à la Cour quatre questions préjudicielles qui tendent, en substance, à vérifier comment il convient de classer, aux fins de la nomenclature combinée, un produit amylacé (ayant une teneur en amidon de 99 % en poids et une teneur en acétyle de 0,65 % en poids, déterminées par la méthode Ewers) composé de fécule de pommes de terre native mélangée à un ester de fécule de pommes de terre neutralisé et exempt d’ aldéhyde acétique.

Ce produit est destiné à être utilisé dans l’ industrie du papier et dans l’ industrie textile et, par sa nature, il est également propre à la consommation humaine, bien que non autorisé par la législation nationale relative aux produits alimentaires.

2. Nous commencerons par rappeler que les amidons et les fécules relèvent en principe du chapitre 11 de la nomenclature combinée (produits de la minoterie, malt, amidons et fécules; inulines; gluten de froment) et que la fécule de pommes de terre, en tant que telle, fait plus particulièrement l’ objet de la sous-position 1108 1300.

Toutefois, la note 1, sous b), de ce chapitre précise qu’ il ne comprend pas les farines, semoules, amidons et fécules préparés de la position 1901. Il faut donc préalablement vérifier si le produit litigieux ne relève pas de cette autre position.

A cette fin, il est possible de s’ aider des notes explicatives du système harmonisé (1); celles-ci précisent que la position 1901, qui concerne en particulier les préparations alimentaires à base d’ amidons ou de fécules non dénommées ni comprises ailleurs, couvre un ensemble de préparations alimentaires à base de farines, de semoules, d’ amidons, de fécules ou d’ extraits de malt qui tirent leur caractère essentiel de ces constituants. Les notes explicatives ajoutent que ces préparations sont souvent destinées à la confection rapide de boissons, de bouillies, d’ aliments pour enfants, de mets de régime et qu’ elles peuvent également constituer des préparations intermédiaires destinées à l’ industrie alimentaire.

Or, s’ il est vrai que les caractéristiques physiques du produit litigieux ne font pas obstacle à ce qu’ il soit classé sous la position 1901, il y a néanmoins lieu d’ observer que cette position semble spécifiquement concerner les produits destinés à l’ industrie alimentaire, alors que le mélange amylacé en cause, bien que propre à la consommation humaine en principe, ne paraît pas y être destiné en réalité, et la réglementation nationale semble même en interdire la commercialisation à titre de produit alimentaire.

3. Avant d’ en venir à la conclusion que le produit litigieux, constitué d’ un mélange de fécule de pommes de terre et d’ ester de fécule de pommes de terre, peut être classé dans la sous-position 1108 1300, qui vise plus particulièrement la seule fécule de pommes de terre, il convient toutefois de vérifier si d’ autres positions de la nomenclature ne lui conviennent pas mieux.

La demanderesse au principal soutient en particulier qu’ un tel mélange amylacé trouverait plus adéquatement place dans la sous-position 3505 1050 relative aux amidons et fécules estérifiés ou éthérifiés.

Selon les notes explicatives du système harmonisé relatives à la position 3505, la dextrine et les autres amidons et fécules modifiés compris dans cette position sont les produits provenant de la transformation des amidons ou des fécules sous l’ action de la chaleur, de produits chimiques (acides, alcalis, etc.) ou de diastases, ainsi que les amidons et fécules modifiés, par exemple, par oxydation, éthérification ou estérification. Parmi les amidons et fécules estérifiés, les notes explicatives citent, à titre d’ exemples, les acétates d’ amidon utilisés dans l’ industrie textile ou l’ industrie du papier et les nitrates d’ amidon utilisés dans la fabrication d’ explosifs.

Toujours selon les notes explicatives, la position 3505 ne comprend pas les amidons et fécules non transformés (position 1108), ni les apprêts préparés à base d’ amidon ou de dextrine pour l’ industrie textile, l’ industrie du papier ou les industries similaires (position 3809).

4. Il y a donc lieu de vérifier si, aux fins du classement tarifaire, le produit litigieux peut être considéré comme fécule modifiée et plus particulièrement comme fécule modifiée par estérification.

A cet égard, il convient d’ abord de rappeler que, selon ce qui résulte de l’ ordonnance de renvoi, le procédé utilisé en l’ espèce n’ a pas donné lieu à une véritable estérification de la fécule, car l’ ester de fécule de pommes de terre, avant d’ être mélangé à la fécule native, a été débarrassé de l’ aldéhyde acétique et neutralisé.

En outre, pour ce qui concerne l’ objection de la demanderesse au principal selon laquelle le produit en question ne se distingue pas extérieurement d’ un ester de fécule de pommes de terre avec faible degré de substitution, il y a lieu d’ observer que, selon la jurisprudence de la Cour (2), le fait que deux marchandises ne possèdent pas de caractéristiques ou de propriétés objectives de nature à les distinguer l’ une de l’ autre n’ entraîne pas l’ impossibilité d’ un traitement différencié sur la base d’ autres éléments objectifs susceptibles d’ être prouvés.

5. Il est vrai que, selon la règle générale 3, sous b), pour l’ interprétation de la nomenclature combinée, les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l’ assemblage d’ articles différents peuvent être classés d’ après la matière ou l’ article qui leur confère leur caractère essentiel.

Toutefois, comme l’ a observé à juste titre la Commission, les proportions respectives d’ ester de fécule et de fécule native incitent à penser que c’ est plutôt cette dernière qui caractérise le produit litigieux. De plus, dans l’ ordonnance de renvoi, rien n’ indique que l’ ester de fécule de pommes de terre contenu dans le mélange en détermine le caractère essentiel, alors qu’ une expertise, citée dans l’ ordonnance de renvoi, effectuée par l’ Institut fédéral allemand de recherches sur le traitement des céréales et des pommes de terre indique que le caractère de la fécule native n’ est pas modifié par le mélange à sec avec de l’ ester de fécule de pommes de terre.

Compte tenu de ce qui précède, il ne nous semble pas non plus possible de retenir la sous-position 3505 1090, concernant les autres amidons et fécules modifiés, car cette sous-position suppose de toute façon, elle aussi, une modification substantielle du produit de base. En effet, les notes explicatives du système harmonisé citent, à titre d’ exemples, le dialdéhyde d’ amidon et l’ amidon traité au formaldéhyde ou à l’ épichlorhydrine.

6. Le juge de renvoi demande ensuite explicitement si le produit litigieux, dont la destination, précise-t-il, ne peut pas être déterminée en fonction de sa composition et de sa présentation, peut être classé dans la sous-position pertinente de la position 3809, en tant qu’ autre préparation à base de matières amylacées non dénommée ni comprise ailleurs et utilisée dans l’ industrie textile et l’ industrie du papier.

A cet égard, nous observerons que le libellé de la note 1, sous b), du chapitre 38 semble déjà exclure, par lui-même, cette classification, étant donné qu’ il précise que ce chapitre ne comprend pas les mélanges alimentaires ou autres mélanges ayant une valeur nutritive du type utilisé dans la préparation d’ aliments pour la consommation humaine.

Cependant, ce sont surtout les notes explicatives du système harmonisé qui nous conduisent à exclure cette possibilité. Selon ce qu’ elles indiquent, la position 3809 comprend une vaste gamme de produits et de préparations utilisés en général pendant les opérations de fabrication ou de finissage des fils textiles, tissus, feutres, papiers, cartons, cuirs ou matières analogues.

Lesdites notes précisent également que ces produits relèvent de cette position du fait de leur composition et de leur présentation qui leur confèrent une utilisation spécifique dans les industries citées dans le libellé de la position (textile, papier et cuir) ou les industries similaires.

Or, pareille caractérisation fondée sur la destination du produit, qui semble, par ailleurs, nécessaire aux fins du classement sous cette position tarifaire spécifique en raison précisément de la multiplicité des possibilités d’ utilisation des produits à base d’ amidon, fait défaut dans le cas du produit litigieux qui, comme le souligne le juge de renvoi lui-même, est au contraire un produit qui ne semble pas spécifiquement destiné, par sa nature et sa présentation, à être utilisé dans les industries chimiques précédemment citées.

7. Si nous excluons les positions 1901, 3505 et 3809, il ne reste donc qu’ à revenir au point de départ, c’ est-à-dire à la position 1108 et plus particulièrement à la sous-position 1108 1300 relative à la fécule de pommes de terre, et ce conformément à la règle générale 3, sous b), précitée, selon laquelle les produits mélangés peuvent être classés en fonction de la matière qui leur confère leur caractère essentiel.

Toutefois, selon la demanderesse au principal, ce classement se heurterait au dispositif du règlement de classement de la Commission (CEE) n 28/90, du 4 janvier 1990 (3).

Selon l’ article 1er de ce règlement et selon le point 3 de son annexe, doivent être classés dans la sous-position 1108 1300 les produits qui se présentent sous forme de poudre fine et blanche, constitués d’ un mélange de fécule de pommes de terre native et de faibles quantités de fécule de pommes de terre acétylée ou de fécule de pommes de terre très faiblement acétylée, et ayant une teneur en amidon de 95 % en poids ou plus et une teneur en acétyle inférieure à 0,5 % en poids. La motivation qui figure dans l’ annexe précise que, en raison de leurs caractéristiques (en particulier leur faible teneur en acétyle), ces produits doivent être considérés comme des amidons relevant du code NC 1108 1300 et non comme des amidons estérifiés relevant du code NC 3505 1050.

D’ après la demanderesse, ces dispositions confirmeraient que le produit amylacé en cause, dont la teneur en acétyle est de 0,65 %, doit plutôt être classé dans la sous-position 3505 1050.

8. Sur ce point, nous observerons néanmoins en premier lieu que, comme l’ a indiqué à juste titre la Commission, rien n’ incite à penser que le règlement précité vise à établir une distinction fondée sur la teneur en acétyle entre l’ amidon natif de la sous-position 1108 1300 et l’ amidon estérifié de la sous-position 3505 1050; il se contente de préciser qu’ un produit amylacé présentant les caractéristiques décrites dans son annexe doit toujours être classé dans la sous-position 1108 1300, sans cependant fournir d’ indications précises au sujet du classement d’ un produit amylacé ayant une teneur en acétyle légèrement supérieure à 0,5 %.

En second lieu, il convient de rappeler qu’ un règlement de la Commission relatif au classement ne saurait, en tout état de cause, modifier le libellé ou la portée de la nomenclature combinée et que, selon une jurisprudence constante, le critère déterminant aux fins du classement tarifaire des marchandises doit, en règle générale, être recherché dans leurs caractéristiques et propriétés objectives telles qu’ elles résultent du libellé de la position tarifaire et des notes concernant les sections ou chapitres du tarif douanier commun.

Or, s’ il est vrai que la teneur en acétyle de l’ amidon est un indicateur de son degré de substitution, en d’ autres termes, qu’ elle indique dans quelle mesure l’ amidon a été modifié, il est tout aussi vrai qu’ une teneur en acétyle légèrement supérieure à celle indiquée au point 3 de l’ annexe du règlement n 28/90 ne constitue pas, par elle-même, un élément suffisant pour classer le produit considéré en tant qu’ amidon estérifié.

9. A la lumière des considérations qui précèdent, nous concluons donc en proposant à la Cour de répondre comme suit aux questions du Bundesfinanzhof:

« La nomenclature combinée est à interpréter en ce sens qu’ il convient de classer dans la sous-position 1108 1300 un produit amylacé (ayant une teneur en amidon de 99 % en poids et une teneur en acétyle de 0,65 %, déterminées par la méthode Ewers) composé de fécule de pommes de terre native mélangée à un ester de fécule de pommes de terre neutralisé et exempt d’ aldéhyde acétique, destiné à être utilisé dans l’ industrie du papier et l’ industrie textile et également propre, par sa nature, à la consommation humaine, bien que non autorisé par la législation nationale sur les produits alimentaires. »

(*) Langue originale: l’ italien.

(1) – Selon la jurisprudence de la Cour, les notes explicatives, même si elles ne peuvent pas modifier le texte du tarif douanier, constituent un instrument d’ interprétation important, qui permet de préciser ou d’ expliciter le contenu des diverses positions et sous-positions tarifaires.

(2) – Voir arrêt du 12 décembre 1973, Witt (149/73, Rec. p. 1587).

(3) – JO L 3, p. 9.

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