CJCE, n° C-180/96, Arrêt de la Cour, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord contre Commission des Communautés européennes, 5 mai 1998

  • Actes destinés à produire des effets juridiques·
  • Objectifs de la politique agricole commune·
  • Cee/ce - contentieux * contentieux·
  • Conformité avec les directives·
  • Harmonisation des législations·
  • Rapprochement des législations·
  • Actes susceptibles de recours·
  • Directives 89/662 et 90/425·
  • 1. recours en annulation·
  • Obligation de motivation

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 5 mai 1998, Royaume-Uni / Commission, C-180/96
Numéro(s) : C-180/96
Arrêt de la Cour du 5 mai 1998. # Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord contre Commission des Communautés européennes. # Agriculture - Police sanitaire - Mesures d'urgence contre l'encéphalopathie spongiforme bovine - Maladie dite 'de la vache folle'. # Affaire C-180/96.
Date de dépôt : 24 mai 1996
Précédents jurisprudentiels : 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C-350/88
15 avril 1997, Bakers of Nailsea ( C-27/95, Rec. p. I-1847
arrêts du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C-331/88
Commission/Conseil, C-11/88
Conseil, C-131/87, Rec. p. 3743, point 28, et Fedesa e.a.
Cour du 12 juillet 1996, Royaume-Uni/Commission, C-180/96
Crispoltoni e.a., C-133/93, C-300/93 et C-362/93
Solution : Recours en annulation : rejet sur le fond, Recours en annulation : rejet pour irrecevabilité
Identifiant CELEX : 61996CJ0180
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1998:192
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Sur les parties

Texte intégral

Affaire C-180/96

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord
contre
Commission des Communautés européennes

«Agriculture – Police sanitaire – Mesures d’urgence contre l’encéphalopathie spongiforme bovine – Maladie dite de la vache folle»

Conclusions de l’avocat général M. G. Tesauro, présentées le 30 septembre 1997
Arrêt de la Cour du 5 mai 1998

Sommaire de l’arrêt

1.. Recours en annulation – Actes susceptibles de recours – Actes destinés à produire des effets juridiques – Acte traduisant l’intention de la Commission d’adopter une certaine ligne de conduite ou confirmant un acte antérieur – Exclusion
(Traité CE, art. 173, al. 1)

2.. Agriculture – Rapprochement des législations en matière de police sanitaire – Contrôles vétérinaires et zootechniques dans les échanges intracommunautaires d’animaux vivants et de produits d’origine animale – Directives 89/662 et 90/425 – Mesures d’urgence de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine – Interdiction d’exporter des bovins, de la viande bovine et des produits dérivés à partir du territoire du Royaume-Uni – Conformité avec les directives
(Directives du Conseil 89/662 et 90/425; décision de la Commission 96/239)

3.. Agriculture – Rapprochement des législations en matière de police sanitaire – Contrôles vétérinaires et zootechniques dans les échanges intracommunautaires d’animaux vivants et de produits d’origine animale – Directives 89/662 et 90/425 – Mesures d’urgence de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine – Interdiction d’exporter des bovins, de la viande bovine et des produits dérivés à partir du territoire du Royaume-Uni – Obligation de motivation – Principes de proportionnalité, de non-discrimination et de sécurité juridique – Violation – Absence – Objectifs de la politique agricole commune – Conformité
(Traité CE, art. 39, § 1, 40, § 3, et 190; directives du Conseil 89/662 et 90/425; décision de la Commission 96/239)

4.. Agriculture – Rapprochement des législations – Directives 89/662 et 90/425 – Base juridique
(Traité CE, art. 39, § 1, et 43; directives du Conseil 89/662 et 90/425)

1. Pour qu’un acte du Conseil ou de la Commission puisse faire l’objet d’un recours en annulation, il faut qu’il soit destiné à produire des effets juridiques. Tel n’est pas le cas d’un acte de la Commission traduisant l’intention de celle-ci, ou de l’un de ses services, de suivre une certaine ligne de conduite ou encore d’un acte qui a un caractère purement confirmatif d’un acte antérieur de sorte que l’annulation de l’acte confirmatif se confondrait avec celle de l’acte antérieur. 2. En adoptant la décision 96/239, relative à certaines mesures d’urgence en matière de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine, qui édicte l’interdiction d’exporter, à titre transitoire, tout bovin, toute viande bovine et tout produit dérivé du territoire du Royaume-Uni vers les autres États membres et les pays tiers, la Commission a agi dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par les directives 90/425 et 89/662, relatives aux contrôles vétérinaires et zootechniques applicables dans les échanges intracommunautaires. D’une part, en effet, les conditions d’adoption des mesures de sauvegarde au sens de ces deux directives étaient remplies, étant donné, notamment, que c’est le fait qu’une zoonose, une maladie ou une cause soit perçue comme étant susceptible de constituer un danger grave qui justifie le pouvoir d’adopter de telles mesures. D’autre part, compte tenu notamment de ce que les directives sont rédigées de manière très large, sans que soient prévues des limites quant au champ d’application des mesures dans le temps ou dans l’espace, il n’apparaît pas que la Commission, en s’efforcant de confiner la maladie au territoire du Royaume-Uni par l’interdiction des exportations en provenance de ce territoire et à destination tant des autres États membres que des pays tiers, ait manifestement dépassé les limites de son large pouvoir d’appréciation. Enfin, la décision n’est pas entachée d’un détournement de pouvoir, la Commission ayant agi par souci des risques de transmissibilité de l’encéphalopathie spongiforme bovine à l’homme, après examen des mesures adoptées par le Royaume-Uni et consultation du comité scientifique vétérinaire et du comité vétérinaire permanent, sans que son but exclusif ou déterminant ait été de défendre des intérêts économiques, plutôt que d’assurer la protection de la santé. 3. La décision 96/239, relative à certaines mesures d’urgence en matière de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine, qui édicte l’interdiction d’exporter, à titre transitoire, tout bovin, toute viande bovine et tout produit dérivé du territoire du Royaume-Uni vers les autres États membres et les pays tiers, satisfait aux exigences de motivation, ne viole pas les principes de proportionnalité, de non-discrimination ou de sécurité juridique et est conforme aux objectifs de la politique agricole commune visés à l’article 39, paragraphe 1, du traité. S’agissant, plus particulièrement, du principe de proportionnalité, la Commission pouvait prendre, compte tenu de la grande incertitude quant aux risques présentés par les animaux et les produits en cause, lesdites mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées. S’agissant du principe de non-discrimination énoncé à l’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité, il y a lieu de considérer, étant donné qu’à l’époque de la décision, la presque totalité des cas d’encéphalopathie spongiforme bovine en Europe était repertoriée au Royaume-Uni, que la situation dans cet État membre n’était pas comparable à celle des autres États membres. 4. L’article 43 du traité constitue la base juridique appropriée pour toute réglementation concernant la production et la commercialisation des produits agricoles énumérés à l’annexe II du traité, qui contribue à la réalisation d’un ou de plusieurs objectifs de la politique agricole commune énoncés à l’article 39, paragraphe 1, du traité. A cet égard, et compte tenu de l’importance de la libre circulation des animaux, des produits animaux et des produits d’origine animale pour la réalisation desdits objectifs, l’article 43 constituait la base juridique appropriée pour l’adoption des directives 90/425 et 89/662, relatives aux contrôles vétérinaires et zootechniques applicables dans les échanges intracommunautaires, même si, de façon accessoire, ces directives autorisent la Commission à adopter des mesures de sauvegarde s’étendant à des produits d’origine animale, produits dérivés de ces produits et produits dérivés des animaux qui ne seraient pas compris dans l’annexe II du traité.

ARRÊT DE LA COUR
5 mai 1998 (1)

«Agriculture – Police sanitaire – Mesures d’urgence contre l’encéphalopathie spongiforme bovine – Maladie dite de la vache folle»

Dans l’affaire C-180/96,

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord , représenté par M me Lindsey Nicoll, du Treasury Solicitor’s Department, en qualité d’agent, assistée de MM. Nicholas Lyell, QC, Paul Lasok, QC, et David Anderson, barrister, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l’ambassade du Royaume-Uni, 14, boulevard Roosevelt,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes , représentée par MM. Dierk Booß, conseiller juridique principal, et James Macdonald Flett, membre du service juridique, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

soutenue par Conseil de l’Union européenne , représenté par M. Arthur Brautigam et M me Moyra Sims, conseillers juridiques, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Alessandro Morbilli, directeur général de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d’investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 96/239/CE de la Commission, du 27 mars 1996, relative à certaines mesures d’urgence en matière de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine (JO L 78, p. 47), et de certains autres actes de la Commission,

LA COUR,,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, C. Gulmann, H. Ragnemalm, M. Wathelet et R. Schintgen, présidents de chambre, G. F. Mancini, J. C. Moitinho de Almeida, J. L. Murray, D. A. O. Edward, J.-P. Puissochet, G. Hirsch, P. Jann et L. Sevón (rapporteur), juges, avocat général: M. G. Tesauro,
greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

vu le rapport d’audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l’audience du 2 juillet 1997,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 30 septembre 1997,

rend le présent

Arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 24 mai 1996, le Royaume-Uni a, en vertu de l’article 173 du traité CE, demandé l’annulation de la décision 96/239/CE de la Commission, du 27 mars 1996, relative à certaines mesures d’urgence en matière de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine (JO L 78, p. 47, ci-après la décision attaquée), et de certains autres actes de la Commission. 2 Par acte séparé du même jour, il a également demandé le sursis à l’exécution de la décision attaquée et/ou l’octroi de certaines mesures provisoires. Cette demande en référé a été rejetée par ordonnance de la Cour du 12 juillet 1996, Royaume-Uni/Commission, C-180/96 R, Rec. p. I-3903). 3 Par ordonnance du président de la Cour du 12 septembre 1996, le Conseil a été autorisé à intervenir à l’appui des conclusions de la Commission. 4 Il résulte du dossier que l’encéphalopathie spongiforme bovine (ci-après l’ ESB), maladie dite de la vache folle, a été détectée pour la première fois au Royaume-Uni en 1986. Elle fait partie d’un groupe de maladies appelées encéphalopathies spongiformes transmissibles, qui se caractérisent par une dégénérescence du cerveau et l’aspect spongieux de ses cellules nerveuses à l’analyse microscopique. Ces différentes maladies affectent tant l’être humain (maladie de kuru en Nouvelle-Guinée et maladie de Creutzfeldt-Jakob qui frappe généralement des personnes âgées) que diverses espèces animales dont les bovins, les ovins (la tremblante du mouton), le chat domestique et le vison d’élevage. 5 L’origine probable de l’ESB serait une modification de la préparation des aliments destinés aux bovins, et contenant des protéines provenant de moutons atteints de la maladie dite tremblante du mouton. La maladie se caractérise par une période d’incubation de plusieurs années pendant laquelle elle ne peut être détectée tant que l’animal est en vie. 6 Pour lutter contre cette maladie, le Royaume-Uni a, depuis juillet 1988, adopté diverses mesures parmi lesquelles l’interdiction de vendre des aliments destinés aux ruminants contenant des protéines de ruminants et l’interdiction de nourrir les ruminants avec de tels aliments ( Ruminant Feed Ban, contenu dans le Bovine Spongiform Encephalopathy Order 1988, SI 1988/1039, modifié ultérieurement). Vu l’origine supposée de la maladie, à savoir l’ingestion de nourriture contaminée, une telle interdiction aurait dû, selon les scientifiques, prévenir tout nouveau cas d’ESB chez les animaux nés après sa mise en oeuvre. 7 Afin de réduire les risques pour la santé de l’homme, le Royaume-Uni a également pris un certain nombre de mesures, parmi lesquelles l’interdiction de la vente et de l’utilisation de certains abats de viande bovine spécifiés, supposés contenir les éléments infectés [The Bovine Offal (Prohibition) Regulations 1989, SI 1989/2061, modifiées ultérieurement]. Les parties ainsi écartées sont, notamment, la tête et la moelle épinière. 8 La Commission a, elle aussi, adopté un certain nombre de décisions relatives à l’ESB au Royaume-Uni, parmi lesquelles figure la décision 90/200/CEE de la Commission, du 9 avril 1990, établissant des exigences supplémentaires pour certains tissus et organes en ce qui concerne l’encéphalopathie spongiforme bovine (JO L 105, p. 24), remplacée par la décision 94/474/CE de la Commission, du 27 juillet 1994, concernant certaines mesures de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine et abrogeant les décisions 89/469/CEE et 90/200/CEE (JO L 194, p. 96), elle-même modifiée par la décision 95/287/CE de la Commission, du 18 juillet 1995 (JO L 181, p. 40). Ces différentes mesures concernent l’enlèvement des tissus de viande bovine susceptibles de contenir l’agent infectant ainsi que l’alimentation des ruminants. La décision 92/290/CEE de la Commission, du 14 mai 1992, relative à certaines mesures de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) en ce qui concerne les embryons de bovins dans le Royaume-Uni (JO L 152, p. 37), a, par ailleurs, soumis l’exportation des embryons à des conditions très strictes. 9 Par un communiqué du 20 mars 1996, le Spongiform Encephalopathy Advisory Committee (ci-après le SEAC), organisme scientifique indépendant chargé de conseiller le gouvernement du Royaume-Uni, a fait état de dix cas d’une variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob identifiés chez des personnes âgées de 42 ans au plus. Ce communiqué était ainsi rédigé:
Bien qu’il n’existe aucune preuve directe d’un lien, compte tenu des données actuelles et en l’absence de toute alternative crédible, l’explication actuellement la plus probable ( the most likely explanation) est que ces cas sont liés à une exposition à l’encéphalopathie spongiforme bovine avant l’instauration, en 1989, de l’interdiction de certains abats de viande bovine spécifiés. Il s’agit là d’un motif de grande inquiétude.
10 Dans le même communiqué, le SEAC soulignait qu’il était impératif que les mesures adoptées en matière de protection de la santé publique soient mises en oeuvre correctement et recommandait un contrôle constant de l’enlèvement complet de la moelle épinière. Il préconisait en outre que les carcasses de bovins âgés de plus de 30 mois soient désossées dans des établissements agréés sous le contrôle du Meat Hygiene Service, que les déchets de parage soient classés dans les abats de viande bovine spécifiés et que l’utilisation de farines de viande et d’os provenant de mammifères soit interdite dans l’alimentation de tous les animaux d’élevage. 11 Le même jour, le ministre de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation a pris la décision d’interdire, d’une part, la vente et la fourniture de farines de viande et d’os provenant de mammifères, ainsi que leur utilisation dans l’alimentation destinée à tous les animaux d’élevage, y compris la volaille, les chevaux et les poissons d’élevage et, d’autre part, la vente de viandes provenant de bovins âgés de plus de 30 mois pour la consommation humaine. 12 Au même moment, un certain nombre d’États membres et de pays tiers ont adopté des mesures interdisant l’importation de bovins ou de viande bovine en provenance du Royaume-Uni ou, s’agissant des mesures prises par certains pays tiers, de l’Union européenne.
13 Le 22 mars 1996, le comité scientifique vétérinaire de l’Union européenne (ci-après le comité scientifique vétérinaire) a conclu que les données disponibles ne permettaient pas de prouver la transmissibilité de l’ESB à l’homme. Cependant, compte tenu de l’existence d’un risque à cet égard, lequel avait d’ailleurs toujours été pris en considération par le comité, celui-ci a préconisé que les mesures récemment adoptées par le Royaume-Uni relatives au désossage des carcasses de bovins âgés de plus de 30 mois dans des établissements agréés soient mises en oeuvre pour ce qui concerne les échanges intracommunautaires et que la Communauté adopte les mesures appropriées relatives à l’interdiction de l’utilisation de farines de viande et d’os dans l’alimentation des animaux. Le comité estimait en outre que tout contact entre la moelle épinière, d’une part, et le gras, les os et la viande, d’autre part, devait être exclu, à défaut de quoi la carcasse devait être traitée comme abats de viande bovine spécifiés. Enfin, le comité recommandait la poursuite des recherches relatives à la question de la transmissibilité de l’ESB à l’être humain. En annexe à cet avis figure la déclaration de l’un des membres du comité: sur la base de données scientifiques limitées qui ne se fondent que sur l’évaluation réalisée à partir de matériels provenant de neuf bovins, nous ne pouvons pas être certains que la viande bovine sous forme de muscle ne constitue pas un danger en ce qui concerne la transmission de l’affection de l’ESB. 14 Le 24 mars 1996, le SEAC a confirmé ses premières recommandations relatives au désossage des carcasses dans des établissements agréés, au traitement en tant qu’abats de viande bovine spécifiés des déchets de parage comprenant les tissus nerveux et lymphatiques, la colonne vertébrale et la tête (à l’exception de la langue, si elle est enlevée sans contamination), ainsi qu’à l’interdiction d’utiliser les farines de viande et d’os de mammifères dans l’alimentation des ruminants, des animaux de ferme (y compris les poissons et les chevaux) ou même comme engrais sur des terres auxquelles des ruminants peuvent avoir accès. Le SEAC soulignait toutefois qu’il n’était pas en mesure de confirmer s’il existait ou non un lien causal entre l’ESB et la variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob découverte récemment et que cette question requerrait de plus amples études scientifiques. 15 Le 27 mars 1996, la Commission a adopté la décision attaquée, qui est fondée sur le traité CE, sur la directive 90/425/CEE du Conseil, du 26 juin 1990, relative aux contrôles vétérinaires et zootechniques applicables dans les échanges intracommunautaires de certains animaux vivants et produits dans la perspective de la réalisation du marché intérieur (JO L 224, p. 29), modifiée par la directive 92/118/CEE du Conseil, du 17 décembre 1992, définissant les conditions de police sanitaire ainsi que les conditions sanitaires régissant les échanges et les importations dans la Communauté de produits non soumis, en ce qui concerne lesdites conditions, aux réglementations communautaires spécifiques visées à l’annexe A, chapitre I er , de la directive 89/662/CEE, et, en ce qui concerne les pathogènes, de la directive 90/425/CEE (JO 1993, L 62, p. 49), et notamment son article 10, paragraphe 4, ainsi que sur la directive 89/662/CEE du Conseil, du 11 décembre 1989, relative aux contrôles vétérinaires applicables dans les échanges intracommunautaires dans la perspective de la réalisation du marché intérieur (JO L 395, p. 13), modifiée par la directive 92/118 et notamment son article 9. 16 L’article 10, paragraphe 1, premier alinéa, et paragraphe 4, de la directive 90/425 dispose: 1. Chaque État membre signale immédiatement aux autres États membres et à la Commission, outre l’apparition sur son territoire des maladies prévues par la directive 82/894/CEE, l’apparition de toute zoonose, maladie ou cause susceptible de constituer un danger grave pour les animaux ou la santé humaine….4. Dans tous les cas, la Commission procède au sein du comité vétérinaire permanent, dans les meilleurs délais, à un examen de la situation. Elle arrête, selon la procédure prévue à l’article 17, les mesures nécessaires pour les animaux et les produits visés à l’article 1 er et, si la situation l’exige, pour les produits dérivés de ces animaux. Elle suit l’évolution de la situation et, selon la même procédure, modifie ou abroge, en fonction de cette évolution, les décisions prises.
17 L’article 1 er de la directive 90/425 vise les animaux vivants et les produits qui sont couverts par les directives énumérées à l’annexe A, ainsi que ceux visés à l’article 21, premier alinéa, de la directive, c’est-à-dire les animaux et les produits visés à l’annexe B de la directive 90/425. 18 L’article 9, paragraphe 1, premier alinéa, et paragraphe 4, de la directive 89/662 prévoit: 1. Chaque État membre signale immédiatement aux autres États membres et à la Commission, outre l’apparition sur son territoire des maladies prévues par la directive 82/894/CEE, l’apparition de toute zoonose, maladie ou cause susceptible de constituer un danger grave pour les animaux ou la santé humaine….4. Dans tous les cas, la Commission procède au sein du comité vétérinaire permanent, dans les meilleurs délais, à un examen de la situation. Elle arrête, selon la procédure prévue à l’article 17, les mesures nécessaires pour les produits visés à l’article 1 er et, si la situation l’exige, pour les produits d’origine ou les produits dérivés de ces produits. Elle suit l’évolution de la situation et, selon la même procédure, modifie ou abroge, en fonction de cette évolution, les décisions prises.
19 L’article 1 er de la directive 89/662 vise les produits d’origine animale qui sont couverts par les directives énumérées à l’annexe A ou par l’article 14 de la directive, c’est-à-dire les produits visés à l’annexe B de cette même directive. 20 Le préambule de la décision attaquée évoque la publication des nouvelles informations scientifiques, l’annonce des mesures supplémentaires adoptées par le gouvernement du Royaume-Uni (désossage des carcasses provenant de bovins âgés de plus de 30 mois dans des établissements agréés surveillés par le Meat Hygiene Service, classification des déchets de parage comme abats de viande bovine spécifiés et interdiction de l’usage de la farine de viande osseuse provenant de mammifères dans l’alimentation de tous les animaux de ferme), les mesures d’interdiction des importations adoptées par différents États membres et l’avis du comité scientifique vétérinaire. Ses cinquième, sixième et septième considérants sont libellés comme suit: considérant que, dans la situation actuelle, une prise de position définitive sur le risque de la transmissibilité de l’ESB à l’homme n’est pas possible; que l’existence du risque ne peut être exclue; que l’incertitude qui en résulte a créé de grandes préoccupations auprès des consommateurs; que, dans ces conditions et à titre de mesure d’urgence, il paraît approprié d’interdire de façon transitoire l’expédition de tout bovin et de toute viande bovine ou produit obtenu à partir de celle-ci, du territoire du Royaume-Uni vers les autres États membres; que les mêmes interdictions doivent s’appliquer concernant les exportations vers les pays tiers, afin d’éviter des détournements de trafic;considérant que la Commission effectuera dans les prochaines semaines une inspection communautaire au Royaume-Uni pour apprécier l’application des mesures prises; qu’il convient, en outre, d’approfondir sur le plan scientifique la portée des nouvelles informations et les mesures à prendre;considérant que, par conséquent, la présente décision devra être revue après un examen de l’ensemble des éléments précités.
21 L’article 1 er de la décision attaquée prévoit: Dans l’attente d’un examen global de la situation et nonobstant les dispositions communautaires adoptées en matière de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine, le Royaume-Uni n’expédie pas de son territoire vers les autres États membres et les pays tiers:
─ de bovins vivants, de leurs spermes et embryons, ─ des viandes de l’espèce bovine abattus au Royaume-Uni, ─ des produits obtenus à partir d’animaux de l’espèce bovine abattus au Royaume-Uni, qui sont susceptibles d’entrer dans la chaîne alimentaire humaine ou animale, et les produits destinés à usage médical, cosmétique ou pharmaceutique, ─ des farines de viande et d’os provenant de mammifères.
22 Conformément à l’article 3 de la décision attaquée, le Royaume-Uni adresse toutes les deux semaines un rapport à la Commission sur l’application des mesures prises en matière de protection contre l’ESB et, conformément à l’article 4, présente de nouvelles propositions pour contrôler l’encéphalopathie spongiforme bovine au Royaume-Uni. 23 Le Royaume-Uni demande, à titre principal, l’annulation de la décision attaquée de la Commission et, à titre subsidiaire, l’annulation de son article 1 er dans la mesure où il s’applique: a) aux bovins vivants dont l’exportation du Royaume-Uni est autorisée par la décision 94/474, et/ou b) aux spermes et/ou embryons de bovins vivants, et/ou c) à la viande provenant de bovins âgés de moins de 30 mois abattus au Royaume-Uni ou à la viande provenant de bovins dont il est certifié qu’ils proviennent eux-mêmes de troupeaux n’ayant jamais connu un cas d’ESB et n’ayant été exposés à aucune source réelle ou potentielle de nourriture contaminée par l’agent de l’ESB, et/ou d) aux produits obtenus à partir de bovins abattus au Royaume-Uni qui sont susceptibles d’entrer dans la chaîne alimentaire animale ou humaine et aux matériels destinés à un usage médicinal, cosmétique ou pharmaceutique, et/ou e) à la gélatine et/ou au suif, et/ou f) aux exportations vers les pays tiers (sauf s’il existe un risque réel de détournement de trafic, le cas échéant). Il demande également l’annulation de chacun des autres actes attaqués et la condamnation de la Commission aux dépens.
24 La Commission et le Conseil demandent le rejet du recours et la condamnation du Royaume-Uni aux dépens. Sur la recevabilité du recours en ce qu’il vise les autres actes attaqués 25 Outre l’annulation de la décision attaquée, le Royaume-Uni demande également l’annulation de certaines prises de position de la Commission, à savoir de l’annonce du 10 avril 1996 par laquelle la Commission a indiqué qu’elle ne proposerait pas une levée de l’embargo, de la déclaration du 13 avril 1996 du commissaire Fischler par laquelle celui-ci a expliqué que la levée de l’interdiction d’exporter dépendait de la rapidité de l’Angleterre à mettre en oeuvre des mesures garantissant que le bétail potentiellement contaminé par l’ESB soit écarté de la chaîne alimentaire, ainsi que de l’annonce du 8 mai 1996 par laquelle la Commission a indiqué qu’elle allait proposer la levée de l’interdiction d’exportation de certains produits, reconnaissant ainsi implicitement que l’interdiction ne serait pas levée pour les autres produits. Selon le Royaume-Uni, ces prises de position peuvent faire l’objet d’un recours au titre de l’article 173 du traité en ce qu’elles constituent ou révèlent l’exercice de pouvoirs, prétendus ou réels, de la Commission en vertu des directives 90/425 et 89/662. Par ailleurs, lorsque la Commission a l’obligation de procéder à l’examen permanent d’une situation, de telles prises de position seraient des actes attaquables au sens de l’article 173 du traité, dès lors qu’elles ne constitueraient pas de simples confirmations d’une décision arrêtée antérieurement, mais des actes distincts, pris en vertu des pouvoirs dont dispose la Commission, produisant des effets juridiques à l’égard de la personne concernée par le maintien de la situation existante. 26 La Commission considère, en revanche, que ces événements ne constituent pas des actes attaquables au sens de l’article 173 du traité, car ils n’ont aucun effet juridique sur la situation qui prévaut au Royaume-Uni. Si ce dernier estimait que, à un moment donné, les faits établis obligeaient la Commission à agir, il pouvait introduire le recours selon la procédure prévue à l’article 175 du traité CE. 27 Il résulte d’une jurisprudence constante que, pour qu’un acte du Conseil ou de la Commission puisse faire l’objet d’un recours en annulation, il faut qu’il soit destiné à produire des effets juridiques (arrêt du 27 septembre 1988, Royaume-Uni/Commission, 114/86, Rec. p. 5289, point 12). 28 Tel n’est pas le cas d’un acte de la Commission traduisant l’intention de celle-ci, ou de l’un de ses services, de suivre une certaine ligne de conduite (arrêt Royaume-Uni/Commission, précité, point 13) ou encore d’un acte qui a un caractère purement confirmatif d’un acte antérieur de sorte que l’annulation de l’acte confirmatif se confondrait avec celle de l’acte antérieur (arrêt du 25 octobre 1977, Metro/Commission, 26/76, Rec. p. 1875, point 4). 29 Les prises de position de la Commission visées par le Royaume-Uni dans son recours n’étaient que de simples déclarations d’intention dépourvues d’effet juridique qui n’attestaient, au surplus, que d’une intention de confirmer la décision attaquée. 30 Il s’ensuit que le recours du Royaume-Uni n’est pas recevable en ce qu’il vise les prises de position de la Commission des 10 avril, 13 avril et 8 mai 1996. Sur le fond du recours 31 Le Royaume-Uni invoque un grand nombre de moyens au soutien de sa demande d’annulation de la décision attaquée. Les trois premiers sont tirés, le premier, du non-respect, par la Commission, des limites des pouvoirs qui lui sont reconnus par les directives 90/425 et 89/662, le deuxième, de la méconnaissance du principe de la libre circulation des marchandises et le troisième, du détournement de pouvoir. Le quatrième moyen du Royaume-Uni est tiré du défaut de motivation de la décision attaquée.
Le Royaume-Uni invoque, en cinquième lieu, la violation du principe de proportionnalité, en sixième lieu, la violation des articles 6 et 40, paragraphe 3, du traité CE et, en septième lieu, la violation de l’article 39, paragraphe 1, dudit traité.
Le huitième moyen est tiré de l’irrégularité de l’article 1 er , troisième tiret, de la décision attaquée, notamment en ce qu’il viole le principe de la sécurité juridique. Le neuvième moyen est tiré de l’illégalité des directives 90/425 et 89/662, en ce qu’elles seraient fondées sur une base juridique inappropriée, à savoir l’article 43 du traité CE. Sur les trois premiers moyens tirés de l’inobservation des conditions régissant l’exercice des pouvoirs de la Commission, de la violation du principe de libre circulation des marchandises et du détournement de pouvoir 32 Le Royaume-Uni conteste qu’il y ait eu apparition d’une zoonose, maladie, ou cause susceptible de constituer un danger grave pour les animaux ou la santé humaine au sens des articles 10, paragraphe 1, de la directive 90/425 et 9, paragraphe 1, de la directive 89/662, dispositions qui habilitent la Commission à adopter la décision attaquée à titre de mesure de sauvegarde, conformément au paragraphe 4 des mêmes articles. Selon le gouvernement du Royaume-Uni, l’ESB existait plusieurs années avant l’adoption de la décision attaquée et faisait déjà l’objet de mesures prises par le Royaume-Uni et la Commission. La décision attaquée ne serait pas non plus justifiée par des informations faisant présumer que les mesures déjà prises contre l’ESB étaient inefficaces, ou par des informations indiquant une menace non considérée auparavant (puisque les mesures antérieures étaient déjà fondées sur l’idée que l’ESB était une zoonose). Il n’existerait que des conjectures quant à la transmissibilité de l’ESB entre animaux. S’agissant du risque pour la santé humaine (à supposer qu’il existe), il ne saurait justifier la décision attaquée dès lors qu’il était négligeable, compte tenu des mesures déjà adoptées, ou qu’il concernait la période antérieure à la prise de mesures de contrôle de l’ESB. 33 Selon le Royaume-Uni, dès lors que les pouvoirs conférés à la Commission par les directives 90/425 et 89/662 doivent être exercés en vue, notamment, de l’établissement et du maintien du marché intérieur, la Commission n’a pas le pouvoir d’interdire les exportations vers les pays tiers. S’agissant du risque de réimportation des produits, le Royaume-Uni souligne que l’existence d’une législation communautaire applicable aux importations dans la Communauté rend inutile, voire contraire aux principes, d’interpréter la législation communautaire relative aux échanges intracommunautaires de manière à la rendre également applicable aux importations dans la Communauté. Le Royaume-Uni précise en outre que les pays tiers ont leurs propres priorités et leurs propres normes de protection de la santé et de la sécurité, qui sont souvent fondées sur des normes internationales reconnues.
34 Les pouvoirs conférés par les directives 90/425 et 89/662 devraient également être exercés en vue de la sauvegarde de la santé publique et animale. Le Royaume-Uni déduit de cette référence à l’article 36 du traité CE et des termes utilisés dans les directives 90/425 et 89/662 que les motifs pouvant être invoqués pour justifier une entrave à la libre circulation des marchandises sont limités. Des raisons économiques ne seraient pas suffisantes pour autoriser la Commission à agir. 35 Le Royaume-Uni soutient enfin qu’il y aurait eu un détournement de pouvoir dans la mesure où la Commission aurait exercé le pouvoir qui lui est reconnu par les directives 90/425 et 89/662 à d’autres fins que celles y prévues. Il résulterait notamment du cinquième considérant de la décision attaquée ainsi que des déclarations de la Commission à l’époque de l’adoption de cette décision que celle-ci a été présentée comme une mesure économique, visant à stabiliser la situation, à rassurer les consommateurs et à sauvegarder l’industrie bovine. 36 La Commission répond que, si l’ESB existait déjà, les communiqués du SEAC ont entraîné une nouvelle classification de cette maladie qui n’a plus été considérée seulement comme affectant le bétail, mais comme un danger pour la santé humaine. Ces nouvelles informations modifiaient l’évaluation du risque et justifiaient l’intervention de la Commission au titre des directives 90/425 et 89/662. La Commission souligne en outre que rien n’indique que les nouveaux cas de maladie de Creutzfeldt-Jakob seraient dus à une exposition antérieure à l’interdiction des abats de viande bovine spécifiés, mais que, au contraire, le SEAC a recommandé l’adoption de mesures supplémentaires. Par ailleurs, les aliments infectés ne seraient pas nécessairement le principal mode de transmission. Enfin, l’interdiction de 1988 sur les aliments a tardé à produire ses effets, celle de 1989 relative aux abats de viande bovine spécifiés était inefficace et le système de contrôle des bovins était inadéquat puisque, dans plus de 11 000 cas, il a été impossible de retrouver le troupeau d’origine des animaux atteints d’ESB. 37 S’agissant des mesures qu’elle avait le pouvoir d’adopter au titre des directives 90/425 et 89/662, la Commission rappelle, en premier lieu, que, en matière de politique agricole commune, le législateur communautaire dispose d’un large pouvoir d’appréciation.
Le Conseil peut être amené à conférer à la Commission de larges pouvoirs d’exécution dans la mesure où elle est la seule à même de suivre de manière constante et attentive l’évolution des marchés agricoles et d’agir avec l’urgence que requiert la situation. Ces pouvoirs sont d’autant plus justifiés qu’ils doivent être exercés selon une procédure qui permet au Conseil de réserver sa propre intervention. Enfin, les articles 10, paragraphe 4, de la directive 90/425 et 9, paragraphe 4, de la directive 89/662 sont libellés en termes généraux et autoriseraient la Commission à agir dans tous les cas et à adopter les mesures nécessaires. S’agissant d’une interdiction de circulation des animaux et produits à l’extérieur d’une zone spécifiée de la Communauté, c’est-à-dire d’une mesure de confinement, la décision attaquée serait appropriée. 38 La Commission considère par ailleurs que le requérant tente de procéder à une distinction artificielle entre la santé publique et le bon fonctionnement du marché intérieur. Examinées dans une perspective de long terme, les mesures prises étaient nécessaires à la réalisation des objectifs des directives 90/425 et 89/662, à savoir la protection de la santé publique et animale dans le contexte du bon fonctionnement du marché intérieur. 39 Elle souligne ensuite qu’une lecture attentive des articles 10, paragraphe 4, de la directive 90/425 et 9, paragraphe 4, de la directive 89/662 ne lui interdit pas de prendre des mesures à l’égard de pays tiers lorsqu’elles sont nécessaires. En raison de l’urgence de la situation et eu égard au fait que l’ESB était essentiellement un problème sévissant au Royaume-Uni, il eût été manifestement inapproprié et inefficace de se fonder sur la réglementation ayant trait aux animaux et aux produits provenant de pays tiers, car cela nécessitait la modification des directives relatives aux importations dans la Communauté ou des négociations avec les pays tiers. 40 Réfutant l’accusation de détournement de pouvoir, la Commission relève que les motifs de la décision attaquée ressortent clairement de ses considérants, lesquels sont en relation logique avec les mesures adoptées. Elle soutient que le cinquième considérant de la décision doit être considéré dans son ensemble, et non en ne se référant qu’à la phrase relative aux préoccupations des consommateurs. 41 Le Conseil expose que les directives 90/425 et 89/662 font partie d’un ensemble législatif cohérent et complet qui a été mis en place pour se substituer, par un ensemble de règles communes, aux initiatives unilatérales prises par chaque État membre en application de l’article 36 du traité. S’agissant des pouvoirs d’exécution conférés à la Commission, il résulterait de l’économie du traité lui-même, dans laquelle les articles 145 et 155 du traité CE doivent être replacés, ainsi que des exigences de la pratique, que la notion d’exécution doit être interprétée largement, en particulier dans le cadre de la politique agricole commune, a fortiori dans les cas d’urgence. En l’espèce, le Conseil conserverait, en tout état de cause, un certain contrôle en raison de la composition de fait du comité vétérinaire permanent et pourrait intervenir grâce à l’application de la procédure III, variante b), de la décision 87/373/CEE du Conseil, du 13 juillet 1987, fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 197, p. 33, dite décision comitologie). 42 Le Conseil considère que, en l’espèce, la Commission a fondé sa décision sur les meilleurs avis techniques et scientifiques disponibles; elle a procédé à la consultation obligatoire du comité vétérinaire permanent, mais également à la consultation facultative du comité scientifique vétérinaire. En tout état de cause, elle ne pouvait ignorer les données qui avaient été rendues publiques par le SEAC. Dans ces circonstances, elle n’aurait pas commis d’erreur manifeste dans son appréciation initiale du risque pour la santé animale ou humaine. 43 Selon le Conseil, les textes des directives 90/425 et 89/662 relatifs aux mesures de sauvegarde n’imposent à la Commission aucune limite ni quant au choix des mesures, ni quant à la méthode à suivre pour agir sur la situation, ni quant à la durée des mesures adoptées. Le confinement serait prévu par ces deux directives et aurait d’ailleurs été décidé en matière de fièvre aphteuse ou de peste équine. L’ESB différerait de ces maladies contagieuses, mais des mesures d’isolement auraient néanmoins été justifiées par le fait que la maladie était largement répandue sur une grande partie du territoire du Royaume-Uni et qu’il y avait des difficultés résultant des déficiences dans l’identification des animaux et dans le contrôle de leurs mouvements ainsi que du nombre insuffisant de déclarations de cas avant l’année 1988. 44 Le Conseil considère donc que c’est à juste titre que les mesures d’urgence ont été appliquées aux exportations communautaires vers les pays tiers. L’article 43 du traité constituerait une base juridique appropriée et suffisante pour ce qui est des échanges de produits agricoles avec les pays tiers et aucun élément dans les directives 90/425 et 89/662 ne permettrait de conclure que le Conseil aurait expressément limité les pouvoirs que la Commission exerce en vertu de la clause de sauvegarde en excluant explicitement les exportations vers les pays tiers. Par ailleurs, les exigences en matière de santé publique seraient indivisibles et universelles, en sorte qu’il n’était pas envisageable que deux catégories de normes s’appliquent, selon que les produits étaient destinés à la Communauté ou aux pays tiers. En tout état de cause, l’extension d’une interdiction des exportations aux pays tiers aurait déjà été justifiée par le seul souci de prévenir des détournements de trafic. 45 Selon le Conseil, non seulement la compétence de la Commission couvrirait tous les produits définis dans les directives 90/425 et 89/662, mais elle s’étendrait également aux produits d’origine ou aux produits dérivés qui peuvent ne pas y être précisés.
46 S’agissant de l’argument relatif au détournement de pouvoir au motif que la décision aurait été adoptée pour rassurer les consommateurs, le Conseil fait valoir qu’il s’agit d’une distinction erronée et cite à cet égard le point 4 des conclusions de M. l’avocat général sous l’arrêt du 15 avril 1997, Bakers of Nailsea (C-27/95, Rec. p. I-1847), selon lesquelles la mise en place d’un système approprié de contrôle hygiénique et sanitaire des viandes contribue, en outre, et de manière décisive, à augmenter la confiance du marché dans la qualité et la salubrité du produit. 47 Afin de déterminer si, en adoptant la décision attaquée, la Commission agissait dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par les directives 90/425 et 89/662, il y a lieu de vérifier si les conditions d’adoption des mesures de sauvegarde au sens de ces deux directives étaient remplies, si la Commission pouvait interdire les exportations, si cette interdiction pouvait s’étendre aux pays tiers et, enfin, si la Commission n’a pas agi dans un but autre que celui indiqué, commettant ainsi un détournement de pouvoir. 48 Les articles 10, paragraphe 1, de la directive 90/425 et 9, paragraphe 1, de la directive 89/662 prévoient que l’ apparition de toute zoonose, maladie ou cause susceptible de constituer un danger grave pour les animaux ou la santé humaine permet l’adoption de mesures de sauvegarde. 49 Il convient en l’espèce de vérifier plus particulièrement si les communiqués du SEAC, déclarant que l’ESB était l’explication la plus probable ( the most likely explanation) de l’apparition de la nouvelle variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, ont permis l’adoption de mesures de sauvegarde alors que l’ESB existait déjà depuis plusieurs années, que des mesures étaient adoptées tant par le Royaume-Uni que par la Communauté et que le risque de cette maladie pour l’être humain était déjà pris en considération. 50 A cet égard, il y a lieu de relever que, au sens des directives 90/425 et 89/662, c’est le fait qu’une zoonose, maladie ou cause soit perçue comme étant susceptible de constituer un danger grave qui justifie le pouvoir de la Commission d’adopter des mesures de sauvegarde. 51 En effet, l’objectif des directives 90/425 et 89/662 est de permettre à la Commission d’intervenir rapidement pour éviter la propagation d’une maladie parmi les animaux ou une atteinte à la santé humaine. Il serait contraire à cet objectif de ne pas lui reconnaître la possibilité d’adopter les mesures nécessaires à la suite de la publication d’informations nouvelles modifiant de façon importante la connaissance d’une maladie, notamment quant à sa transmissibilité ou à ses conséquences, au motif que la maladie existerait depuis longtemps. 52 En l’espèce, la nouvelle information contenue dans les communiqués du SEAC était le passage d’une hypothèse théorique à la possibilité d’un lien entre l’ESB et la maladie de Creutzfeldt-Jakob. En effet, selon l’ explication la plus probable ( the most likely explanation), les cas de maladie de Creutzfeldt-Jakob étaient liés à une exposition à l’ESB avant l’instauration, en 1989, de l’interdiction de certains abats de viande bovine spécifiés. 53 Même si l’ESB existait auparavant, les nouvelles informations communiquées par le SEAC modifiaient de façon sensible la perception du danger que cette maladie représentait pour la santé humaine, autorisant ainsi la Commission à adopter des mesures de sauvegarde au sens des directives 90/425 et 89/662. 54 S’agissant des pouvoirs de la Commission, les directives 90/425 et 89/662 sont rédigées de manière très large en ce qu’elles autorisent la Commission à adopter les mesures nécessaires en ce qui concerne les animaux vivants, les produits dérivés de ces animaux, les produits d’origine animale et les produits dérivés de ces produits, sans que soient prévues des limites quant au champ d’application des mesures dans le temps ou dans l’espace. 55 Il résulte des dispositions des directives 90/425 et 89/662 que seuls peuvent être destinés aux échanges les animaux et produits d’origine animale qui répondent aux conditions prévues par ces directives. Il incombe aux autorités des États membres d’expédition de contrôler que ces conditions soient remplies avant de délivrer les autorisations d’exportation (articles 3 et 4 de la directive 90/425, et articles 3 et 4 de la directive 89/662). 56 En cas de découverte, au lieu de destination d’un envoi ou en cours de transport, de la présence d’une zoonose, d’une maladie ou de toute cause susceptible de constituer un danger grave pour les animaux ou pour l’homme, les directives 90/425 et 89/662 prévoient que les autorités compétentes de l’État membre de destination peuvent ordonner la mise en quarantaine de l’animal ou du lot d’animaux dans la station de quarantaine la plus proche ou leur mise à mort et/ou leur destruction [article 8, paragraphe 1, sous a), premier alinéa, de la directive 90/425], ou la destruction du lot des produits d’origine animale ou toute autre utilisation prévue par la réglementation communautaire [article 7, paragraphe 1, sous a), premier alinéa, de la directive 89/662]. 57 Ces dispositions montrent à suffisance que, en cas de zoonose, maladie ou toute cause susceptible de constituer un danger grave pour les animaux ou pour l’homme, l’immobilisation des animaux et des produits et leur confinement à un territoire déterminé est une mesure appropriée, puisqu’elle peut résulter tant des décisions des autorités de l’État membre d’exportation que de celles de l’État membre d’importation. 58 Il y a lieu d’admettre que, le cas échéant, l’efficacité d’un tel confinement rend nécessaire une interdiction totale de la circulation des animaux et des produits au-delà des frontières de l’État membre concerné, affectant ainsi l’exportation à destination des pays tiers. 59 A cet égard, il y a lieu de relever que les directives 90/425 et 89/662 n’excluent pas explicitement la compétence de la Commission pour interdire l’exportation vers les pays tiers. De même, ainsi que l’a souligné M. l’avocat général au point 23 de ses conclusions, une telle limitation ne peut se déduire de la circonstance que lesdites directives font référence aux contrôles applicables dans les échanges intracommunautaires, puisque les pouvoirs de la Commission ne sont subordonnés qu’à la condition que les mesures adoptées soient nécessaires aux fins de la protection de la santé dans un marché unifié. 60 Enfin, il y a lieu de rappeler que, dès lors que la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation, notamment quant à la nature et à l’étendue des mesures qu’elle adopte, le contrôle du juge communautaire doit se limiter à examiner si l’exercice d’un tel pouvoir n’est pas entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou encore si la Commission n’a pas manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation (voir arrêt du 25 janvier 1979, Racke, 98/78, Rec. p. 69, point 5). 61 En l’espèce, les nouvelles publications scientifiques avaient établi la probabilité d’un lien entre une maladie affectant le cheptel bovin du Royaume-Uni et une maladie mortelle affectant l’être humain et pour laquelle aucun remède n’est actuellement connu. 62 Eu égard, d’une part, à l’incertitude quant au caractère suffisant et à l’efficacité des mesures adoptées antérieurement par le Royaume-Uni et par la Communauté et, d’autre part, aux risques considérés comme graves pour la santé publique (voir ordonnance du 12 juillet 1996, Royaume-Uni/Commission, précitée, point 63), la Commission n’a pas manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation en s’efforçant de confiner la maladie au territoire du Royaume-Uni par l’interdiction des exportations de bovins, viande bovine et produits dérivés en provenance de ce territoire et à destination tant des autres États membres que des pays tiers. 63 Si une telle mesure a un effet sur la libre circulation des marchandises, il ne s’ensuit pas qu’elle soit contraire au droit communautaire dès lors qu’elle est adoptée conformément à des directives visant précisément à assurer la libre circulation des produits agricoles (voir, en ce sens, arrêt du 29 février 1984, Rewe-Zentrale, 37/83, Rec. p. 1229, point 19), à condition qu’elle respecte les principes généraux du droit communautaire dont, notamment, le principe de proportionnalité, ce qui sera examiné dans le cadre du cinquième moyen. 64 S’agissant du moyen tiré de l’existence d’un détournement de pouvoir, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, constitue un détournement de pouvoir l’adoption, par une institution communautaire, d’un acte dans le but exclusif ou, tout au moins, déterminant d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir, notamment, arrêt du 12 novembre 1996, Royaume-Uni/Conseil, C-84/94, Rec. p. I-5755, point 69). 65 Ainsi que l’a souligné M. l’avocat général au point 21 de ses conclusions, il ne serait pas correct de ne retenir de l’ensemble des considérants de la décision attaquée que la phrase relative aux préoccupations des consommateurs pour décrire l’objectif de la décision. 66 En effet, si l’objectif d’une décision doit être recherché dans l’analyse de ses considérants, cette analyse doit porter sur le texte dans son ensemble et non sur un élément isolé. En l’espèce, il résulte de l’ensemble des considérants de la décision attaquée que la Commission a adopté les mesures provisoires par souci des risques de transmissibilité de l’ESB à l’homme, après examen des mesures adoptées par le Royaume-Uni et consultation du comité scientifique vétérinaire et du comité vétérinaire permanent. 67 Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permet d’étayer la thèse selon laquelle le but exclusif ou déterminant de la Commission aurait été de nature économique, plutôt que la protection de la santé. 68 Par conséquent, les trois premiers moyens tirés de l’inobservation des conditions régissant l’exercice des pouvoirs de la Commission, de la violation du principe de libre circulation des marchandises et du détournement de pouvoir doivent être rejetés.
Sur le quatrième moyen tiré du défaut de motivation 69 Le Royaume-Uni considère que la décision attaquée ne précise pas, en violation de l’article 190 du traité CE, les raisons justifiant l’interdiction des exportations et, notamment, celles pour lesquelles la Commission a estimé que les mesures précédemment adoptées pour protéger la santé humaine et animale contre l’ESB étaient insuffisantes ou inappropriées. 70 A cet égard, il y a lieu de relever que, s’il est vrai que, selon la jurisprudence de la Cour, la motivation exigée par l’article 190 du traité doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’autorité communautaire, auteur de l’acte incriminé, de façon à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et à la Cour d’exercer son contrôle, il n’est toutefois pas exigé qu’elle spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents. En effet, la question de savoir si la motivation d’une décision satisfait aux exigences de l’article 190 doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. De plus, le degré de précision de la motivation d’une décision doit être proportionné aux possibilités matérielles et aux conditions techniques ou de délai dans lesquelles elle doit intervenir (voir, notamment, arrêt du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C-350/88, Rec. p. I-395, points 15 et 16). 71 En l’espèce, il résulte du deuxième considérant de la décision attaquée, dont il convient de rappeler qu’elle a été adoptée dans des conditions d’urgence, que la Commission a notamment motivé celle-ci par la constatation que le Royaume-Uni avait, à la suite des communiqués du SEAC, adopté des mesures supplémentaires visant à mieux protéger les consommateurs contre l’ESB.
Cette référence aux mesures adoptées par l’État membre ayant le plus d’expérience en matière d’ESB suffisait, en soi, à motiver la décision de la Commission d’adopter, elle aussi, des mesures supplémentaires. 72 La formulation du cinquième considérant de la décision attaquée fait cependant apparaître, de façon encore plus claire, la nécessité des mesures d’urgence en ce qu’elle vise spécifiquement le risque de transmissibilité de l’ESB à l’homme. 73 S’agissant de la motivation de l’interdiction des exportations en provenance du Royaume-Uni, il y a lieu de considérer que la décision attaquée se situe dans le contexte de la problématique de l’ESB et qu’il n’était plus nécessaire de préciser les raisons pour lesquelles le Royaume-Uni était particulièrement concerné. L’interdiction des exportations était en outre suffisamment motivée par l’incertitude quant au risque, par l’urgence et par le caractère provisoire de la mesure, l’application de cette interdiction aux exportations vers les pays tiers étant au surplus motivée par le risque de détournement de trafic (cinquième considérant). 74 Une telle motivation permettait assurément au Royaume-Uni de connaître les justifications des mesures adoptées et à la Cour d’exercer son contrôle sur la légalité de ces mesures. 75 Par conséquent, le moyen concernant le défaut de motivation doit être rejeté. Sur le cinquième moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité 76 Dans le cadre du moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité, le Royaume-Uni expose que la décision attaquée était inappropriée au regard de l’objectif de protection de la santé publique ou animale dès lors qu’il avait déjà adopté les mesures adéquates, lesquelles avaient également été prises au niveau communautaire, mesures dont l’efficacité a été démontrée par la diminution rapide de l’incidence de l’ESB au Royaume-Uni. 77 L’interdiction d’exporter les animaux vivants n’aurait pas non plus été nécessaire. En effet, depuis l’adoption de la décision 94/474, les seuls animaux vivants pouvant encore être exportés étaient les bovins âgés de moins de six mois issus de vaches pour lesquelles l’ESB n’était ni suspectée ni confirmée, c’est-à-dire des animaux n’ayant jamais été nourris avec des farines de viandes animales et n’ayant jamais été en contact avec des foyers d’ESB. 78 Le comité scientifique vétérinaire avait déjà conclu que le sperme ne présentait pas de risque de transmission de l’ESB. Pour les embryons, il existait déjà une décision interdisant l’exportation d’embryons provenant de femelles nées avant le 18 juillet 1988 ou descendant de femelles chez lesquelles l’ESB était confirmée ou suspectée. 79 En ce qui concerne la viande fraîche, l’article 4 de la décision 94/474, telle que modifiée par la décision 95/287, interdit déjà au Royaume-Uni d’expédier vers les autres États membres de la viande fraîche autre que: i) celle provenant d’animaux âgés de moins de deux ans et demi au moment de l’abattage, ou ii) celle provenant de bovins qui, étant au Royaume-Uni, ont séjourné uniquement dans des exploitations dans lesquelles aucun cas d’ESB n’avait été confirmé au cours des six années précédentes, ou iii) de la viande désossée provenant de bovins âgés de plus de deux ans et demi au moment de l’abattage ayant séjourné constamment dans une exploitation dans laquelle un ou plusieurs cas d’ESB avaient été confirmés au cours des six années précédentes, mais débarrassée des tissus adhérents, y compris les tissus nerveux et lymphatiques apparents. Aucun élément n’indiquerait que de telles mesures n’étaient pas appropriées et qu’il était nécessaire de prendre des mesures supplémentaires. Par ailleurs, des travaux de recherche indépendants montreraient que la viande prise dans les muscles, même lorsqu’elle provient d’animaux cliniquement atteints, ne présente pas d’infectivité décelable. 80 S’agissant de produits obtenus à partir de bovins abattus au Royaume-Uni et susceptibles d’entrer dans la chaîne alimentaire humaine ou animale et de matériels destinés à un usage médicinal, cosmétique ou pharmaceutique, le Royaume-Uni considère qu’il n’est pas justifié d’en interdire l’exportation lorsqu’il peut être garanti qu’ils proviennent de troupeaux qui n’ont pas eu de cas d’ESB et qui n’ont pas été en contact avec des sources d’exposition à l’agent de l’ESB. 81 S’agissant de l’interdiction d’exporter vers les pays tiers, le Royaume-Uni considère que le risque de réimportation dans les États membres est inexistant pour une série de raisons pratiques, à savoir la limitation du nombre de pays tiers autorisés à exporter des bovins, de la viande bovine fraîche ou des produits à base de viande vers les États membres de la Communauté, les conditions strictes d’exportation, les contrôles exercés en application des dispositions relatives aux restitutions à l’exportation et l’existence de droits de douane à l’importation. Quant aux conditions applicables au sperme et aux embryons de bovins, elles rendraient impossible toute importation, dans un État membre, de produits provenant du Royaume-Uni, via un pays tiers. 82 Le Royaume-Uni considère en outre que la décision attaquée est discriminatoire puisqu’elle n’impose une telle interdiction d’exporter qu’à l’égard de la viande bovine originaire du Royaume-Uni, sans imposer la moindre mesure de sauvegarde aux autres États membres qui connaissent des cas d’ESB et dans lesquels, en outre, les mesures relatives à la séparation des abats ne sont pas aussi développées qu’au Royaume-Uni. Elle le serait également en ce qu’elle ne pourrait restaurer la confiance du consommateur que dans les États membres autres que le Royaume-Uni, et ce aux dépens de la confiance du consommateur britannique.
83 Enfin, le Royaume-Uni souligne que l’interdiction adoptée était excessive et que la Commission disposait de nombreuses solutions alternatives, notamment celles d’édicter au niveau communautaire une interdiction générale d’utilisation des tissus bovins les plus susceptibles de contenir l’agent infectieux de l’ESB, d’instaurer, au niveau communautaire, l’interdiction (déjà adoptée par le Royaume-Uni) de la vente, en vue de la consommation humaine, de viande bovine provenant de bétail britannique âgé de plus de 30 mois ou encore de compléter cette dernière option par l’imposition de conditions plus sévères pour l’exportation, vers les autres États membres, de viande bovine provenant d’animaux plus jeunes. 84 La Commission présente sa décision comme une mesure de confinement, destinée à éradiquer la maladie, combinée à des mesures de soutien du marché et à d’autres mesures d’appui. Elle considère que le confinement est universellement reconnu comme une réponse légitime à un problème tel que celui en l’espèce afin d’éviter l’extension de la maladie. La détermination du Royaume-Uni comme zone de confinement serait due au fait que, en raison de divers facteurs, il n’aurait pas été adéquat de créer des zones d’isolation locales et que 99,7 % des cas confirmés d’ESB seraient survenus au Royaume-Uni. La Commission indique également que les directives relatives à des maladies spécifiques prévoient que les zones de confinement doivent être définies en fonction des barrières naturelles et des contrôles administratifs. 85 La Commission considère que la décision attaquée est justifiée en ce qu’elle concerne les animaux vivants en raison de la réévaluation de l’importance des doutes existants, notamment quant à la présence de l’agent de l’ESB chez des animaux jeunes, aux incertitudes du système permettant de suivre les animaux et d’identifier ceux qui ont été exposés au risque, à l’incertitude quant à l’âge d’abattage de l’animal ou encore au risque d’une transmission verticale ou horizontale. 86 S’agissant du sperme, l’interdiction a été levée à la suite d’un avis du comité scientifique vétérinaire. Cela n’affecterait toutefois pas la validité de la décision attaquée qui, en tant que mesure d’urgence, était justifiée par le risque d’une transmission verticale, par les recherches toujours en cours relatives à la transmission par transfert d’embryons chez des vaches inséminées avec du sperme de taureaux malades de l’ESB, ou encore par l’absence d’avis récent du comité scientifique vétérinaire à ce sujet. 87 Les mêmes justifications devraient être prises en considération en ce qui concerne les embryons, de même que l’avis du comité scientifique vétérinaire selon lequel il existe des preuves d’une transmission de la maladie de la tremblante du mouton par le transfert d’embryons. 88 La Commission rappelle par ailleurs les doutes relatifs à la viande, notamment quant au fonctionnement du système d’identification et de repérage des animaux au Royaume-Uni et à l’efficacité de la mise en oeuvre des mesures de contrôle de l’élimination des abats de viande bovine spécifiés. Elle précise également que tous les morceaux de viande contiennent des petites quantités de tissu lymphatique et que l’un des membres du comité scientifique vétérinaire n’avait pas exclu le risque présenté par la viande sous forme de muscle. 89 Des considérations similaires s’appliqueraient aux produits dérivés tels le suif et la gélatine. Quant aux farines de viande et d’os provenant de mammifères, elles seraient la principale cause de l’épidémie d’ESB. 90 La Commission considère également que la décision était nécessaire en ce qu’elle vise les exportations vers les pays tiers.
Ces exportations ne représenteraient que 5 % environ de la production britannique de boeuf, ce qui signifierait que le prix payé pour une efficacité absolue des mesures de confinement serait relativement faible. Par ailleurs, il existerait un risque de réimportation des animaux, de la viande ou des produits dérivés, éventuellement sous une autre forme et, dans certaines circonstances, sous une autre origine. Enfin, le risque de fraude serait réel si les données disponibles en matière de fraude aux restitutions à l’exportation étaient prises en considération. Selon la Commission, l’efficacité des mesures adoptées aurait été mise en péril si elles n’avaient pas inclus les exportations vers les pays tiers et, en ce sens, l’interdiction des exportations vers les pays tiers est une partie intégrante et nécessaire de la décision attaquée et, dès lors, conforme au principe de proportionnalité. En outre, une inaction en ce qui concerne les exportations vers les pays tiers n’aurait sans doute pas été compatible ni avec les obligations que le traité impose au Conseil et à la Commission, notamment celle de tenir compte de la position de la production agricole communautaire sur les marchés mondiaux, ni avec les obligations internationales bilatérales et multilatérales de la Communauté. 91 La Commission conteste ensuite l’argument selon lequel la décision serait discriminatoire. Elle rappelle que 99,7 % des cas d’ESB sont survenus au Royaume-Uni et que les autres États membres dans lesquels ont été recensés quelques cas ont adopté une politique d’abattage du troupeau entier. 92 La Commission considère qu’il n’était pas possible d’adopter d’autre solution. Une interdiction de certains abats de viande bovine spécifiés à l’échelle communautaire n’aurait pas contribué à l’éradication de l’ESB et aurait eu une utilité très limitée étant donné l’incidence négligeable de l’ESB dans les autres États membres. Par ailleurs, rendre une telle mesure effective aurait requis beaucoup de temps, ce qui n’était pas adéquat compte tenu de l’urgence de la situation. S’agissant de l’amélioration du contrôle et de la certification de certains types de viandes, il se serait agi de réponses inadéquates étant donné l’urgence et le doute quant à l’efficacité des systèmes de contrôle britanniques. 93 La Commission souligne enfin que, pour apprécier la proportionnalité de la décision attaquée, il convient de l’examiner au regard de l’ensemble des mesures prises, pour un montant d’environ 2,5 milliards d’écus (notamment, modification des seuils d’intervention, mesures de soutien exceptionnelles au Royaume-Uni et à d’autres États membres, primes à la transformation des veaux, soutien au revenu des producteurs de viande bovine, mesures en faveur des exportateurs, aide au stockage privé de la viande de veau, restitutions à l’exportation, actions de promotion en faveur de la viande bovine de qualité, aide à la recherche). 94 Dans sa réplique, le Royaume-Uni indique que, si une mesure de confinement est adaptée à une maladie très contagieuse, telle la fièvre aphteuse, transmissible par voie aérienne, avec une courte période d’incubation, elle n’est pas utile pour juguler une maladie non contagieuse, transmissible par l’alimentation et présentant une longue période d’incubation. Par ailleurs, le confinement ne contribuerait pas plus à l’éradication de l’ESB que les solutions alternatives proposées par le Royaume-Uni.
95 Dans sa duplique, la Commission insiste sur le fait que la décision attaquée n’était qu’une première étape d’une stratégie globale. Il s’agissait d’une mesure transitoire (cinquième considérant) et d’urgence (intitulé), sujette à réexamen (sixième et septième considérants, articles 1 er et 3), devant être suivie d’autres mesures destinées à contrôler et à éradiquer la maladie (article 4). 96 Il convient de rappeler que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit communautaire, exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante, et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêts du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C-331/88, Rec. p. I-4023, point 13, et du 5 octobre 1994, Crispoltoni e.a., C-133/93, C-300/93 et C-362/93, Rec. p. I-4863, point 41). 97 En ce qui concerne le contrôle judiciaire des conditions précitées, le législateur communautaire dispose en matière de politique agricole commune d’un pouvoir discrétionnaire qui correspond aux responsabilités politiques que les articles 40 à 43 du traité lui attribuent. Par conséquent, seul le caractère manifestement inapproprié d’une mesure arrêtée en ce domaine, par rapport à l’objectif que l’institution compétente entend poursuivre, peut affecter la légalité d’une telle mesure (voir arrêts précités Fedesa e.a., point 14, et Crispoltoni e.a., point 42). 98 A l’époque de l’adoption de la décision attaquée, il existait une grande incertitude quant aux risques présentés par les animaux vivants, la viande bovine ou les produits dérivés. 99 Or, il doit être admis que, lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à la portée de risques pour la santé des personnes, les institutions peuvent prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées. 100 Cette approche est corroborée par l’article 130 R, paragraphe 1, du traité CE, selon lequel la protection de la santé des personnes relève des objectifs de la politique de la Communauté dans le domaine de l’environnement. Le paragraphe 2 du même article prévoit que cette politique, visant un niveau de protection élevé, se fonde notamment sur les principes de précaution et d’action préventive et que les exigences en matière de protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en oeuvre des autres politiques de la Communauté. 101 La décision attaquée a été adoptée à titre de mesure d’urgence, édictant une interdiction d’exportation de façon transitoire (cinquième considérant). Par ailleurs, la Commission y reconnaît la nécessité d’approfondir sur le plan scientifique la portée des nouvelles informations et les mesures à prendre et, par conséquent, la nécessité de revoir la décision attaquée après un examen de l’ensemble de la situation (septième considérant). 102 S’agissant des animaux vivants, eu égard à l’interdiction d’exportation déjà édictée par la décision 94/474, l’interdiction d’exportation résultant de la décision attaquée ne vise que les bovins âgés de moins de six mois issus de vaches pour lesquelles l’ESB n’était ni suspectée ni confirmée. Toutefois, les incertitudes scientifiques quant aux modes de transmission de l’ESB, notamment en ce qui concerne la transmissibilité par la mère, associées à l’absence de marquage des animaux et de contrôle de leurs mouvements ont eu pour résultat qu’il n’est pas possible d’avoir la certitude qu’un veau soit issu d’une vache totalement exempte d’ESB ou, même si tel était le cas, qu’il soit lui-même totalement exempt de la maladie. 103 L’interdiction de l’exportation des bovins vivants ne saurait dès lors être considérée comme étant une mesure manifestement inappropriée. 104 S’agissant de la viande bovine, il suffit de rappeler que, en raison de la longue période d’incubation de la maladie, tout animal âgé de six mois ou plus devait être traité comme potentiellement infecté par l’ESB, même s’il n’en présentait pas les signes. Des mesures particulières avaient été adoptées au Royaume-Uni, qui étaient relatives à l’abattage des animaux et au découpage des viandes. Toutefois, ce n’est qu’à partir du mois de mai 1995 que des contrôles inopinés ont été effectués dans les entreprises du Royaume-Uni afin de vérifier l’application de ces mesures ( Bovine Spongiform Encephalopathy in Great Britain, A Progress Report , novembre 1995, point 16), contrôles qui ont révélé qu’un pourcentage important des abattoirs ne respectaient pas les prescriptions légales. 105 Par ailleurs, il ressort du rapport du 11 juillet 1994 du comité scientifique vétérinaire que la viande comprenait toujours des résidus de tissus nerveux et lymphatiques. De même, selon la déclaration d’un membre de ce comité, jointe à l’avis du comité scientifique vétérinaire du 22 mars 1996, le danger de transmission de l’infection par la viande sous forme de muscle n’était pas scientifiquement exclu (voir point 13 du présent arrêt). 106 Il s’ensuit que l’interdiction de l’exportation de la viande bovine ne saurait donc également être considérée comme étant une mesure manifestement inappropriée. 107 En ce qui concerne le sperme et les embryons, il suffit à cet égard de rappeler que le risque de transmission verticale n’était pas définitivement exclu au moment de l’adoption de la décision attaquée. 108 S’agissant des autres produits tels le suif et la gélatine, il convient de considérer que la Commission a fait preuve d’une prudence adéquate en interdisant leur exportation jusqu’à ce qu’un réexamen global de la situation ait lieu. 109 Quant à l’interdiction d’exportation en ce qu’elle vise les pays tiers, il s’agissait d’une mesure appropriée puisqu’elle permettait de garantir l’efficacité de la mesure en confinant tous les éléments susceptibles d’être infectés par l’ESB au territoire du Royaume-Uni. En effet, la limitation du nombre de pays tiers à partir desquels les importations sont autorisées et les contrôles à l’importation ne permettent toutefois pas d’exclure toute possibilité de réimportation de la viande sous une autre forme ou de détournement de trafic. 110 Le Royaume-Uni a fait état de mesures alternatives qui étaient envisageables. Toutefois, compte tenu de la gravité du danger et de l’urgence, la Commission n’a pas réagi de façon manifestement inappropriée en adoptant, à titre transitoire et en attendant de plus amples informations scientifiques, une interdiction globale d’exportation des bovins, de la viande bovine et des produits dérivés. 111 Par conséquent, le moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité n’est pas fondé. Sur le sixième moyen tiré de la violation des articles 6 et 40, paragraphe 3, du traité 112 Selon le Royaume-Uni, la Commission a violé les articles 6 et 40, paragraphe 3, du traité, car elle a agi de manière discriminatoire à l’encontre des producteurs britanniques par rapport à ceux des autres États membres, mais également à l’encontre des consommateurs britanniques par rapport à ceux des autres États membres, alors qu’aucune raison objective ne justifiait cette différence de traitement. 113 La Commission rétorque que les mesures adoptées sont indépendantes de la nationalité, mais se fondent sur la situation géographique.
Par ailleurs, la décision attaquée aurait affecté des particuliers et des opérateurs d’autres États membres et dans d’autres États membres. En tout état de cause, compte tenu de la situation, même s’il y avait eu une différence de traitement, il est incontestable qu’elle aurait été objectivement justifiée par les circonstances. 114 A cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe de non-discrimination entre producteurs et consommateurs de la Communauté, consacré à l’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité, veut que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale à moins qu’un tel traitement soit objectivement justifié (voir, notamment, arrêt du 20 septembre 1988, Espagne/Conseil, 203/86, Rec. p. 4563, point 25). 115 En l’espèce, il n’a jamais été contesté que, à l’époque de la décision attaquée, la presque totalité des cas d’ESB en Europe était répertoriée au Royaume-Uni. 116 Eu égard à cette circonstance, il y a lieu de considérer que, selon le critère objectif de l’incidence de l’ESB, la situation du Royaume-Uni n’était pas comparable à celle des autres États membres, en sorte que la Commission n’a pas, en adoptant une décision de confinement des animaux et produits au territoire du Royaume-Uni, violé l’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité. 117 Par conséquent, le moyen tiré de la violation du principe de non-discrimination n’est pas fondé. Sur le septième moyen tiré de la violation de l’article 39, paragraphe 1, du traité 118 Le Royaume-Uni considère que la décision n’est justifiée par aucun des objectifs de la politique agricole commune énoncés à l’article 39, paragraphe 1. En effet, loin de contribuer à l’accroissement de la productivité de l’agriculture ou à assurer un niveau de vie équitable à la population agricole, la décision a créé un dommage au détriment des opérateurs du secteur du boeuf et des secteurs connexes au Royaume-Uni, a déstabilisé le marché de la Communauté et, puisqu’il est impossible de fournir les produits visés dans les autres États membres, a empêché d’assurer des prix raisonnables aux consommateurs. 119 La Commission rappelle que la protection de la santé animale et publique fait partie intégrante de la politique agricole commune et que la santé publique est une question d’importance majeure. D’ailleurs, aucun des objectifs énoncés à l’article 39, paragraphe 1, ne peut être atteint sans le degré nécessaire de confiance du consommateur et sans les contrôles nécessaires de la santé publique. 120 A cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 129, paragraphe 1, troisième alinéa, du traité CE, les exigences en matière de protection de la santé sont une composante des autres politiques de la Communauté et que, selon la jurisprudence de la Cour, la poursuite des objectifs de la politique agricole commune ne saurait faire abstraction d’exigences d’intérêt général telles que la protection des consommateurs ou de la santé et de la vie des personnes et des animaux, exigences dont les institutions communautaires doivent tenir compte en exerçant leurs pouvoirs (arrêt du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil, 68/86, Rec. p. 855, point 12). 121 Au demeurant, la protection de la santé contribue à la réalisation des objectifs de la politique agricole commune visés à l’article 39, paragraphe 1, du traité, notamment lorsque la production agricole est immédiatement dépendante de son écoulement auprès de consommateurs de plus en plus soucieux de leur santé. 122 Il s’ensuit que, en adoptant la décision attaquée, la Commission n’a pas violé l’article 39, paragraphe 1, du traité. Sur le huitième moyen tiré de l’irrégularité de l’article 1 er , troisième tiret, de la décision attaquée notamment en ce qu’il viole le principe de la sécurité juridique 123 Selon le Royaume-Uni, la décision attaquée viole le principe de la sécurité juridique en ce que la portée de l’interdiction n’est pas définie de manière suffisamment claire. En effet, les limites du champ d’application de l’article 1 er , troisième tiret, de la décision (qui interdit l’exportation des produits obtenus à partir d’animaux de l’espèce bovine abattus au Royaume-Uni, qui sont susceptibles d’entrer dans la chaîne alimentaire humaine ou animale, et les produits destinés à usage médical, cosmétique ou pharmaceutique) ne pourraient être définies que par référence aux produits visés par les directives 90/425 et 89/662. L’article 1 er de ces deux directives renvoie aux annexes A et B, lesquelles ont été modifiées après l’adoption de ces deux directives par la directive 92/118. Par ailleurs, les articles 10, paragraphe 4, de la directive 90/425 et 9, paragraphe 4, de la directive 89/662 visent également, si la situation l’exige, respectivement les produits dérivés des animaux et les produits d’origine ou les produits dérivés de ces produits. En outre, le champ d’application de ces deux directives doit être déterminé par référence à l’article 43 du traité, ce qui impliquerait la prise en considération des produits agricoles énumérés à l’annexe II du traité. 124 De même, le défaut de clarté du champ d’application de l’article 1 er , troisième tiret, de la décision attaquée ne permettrait pratiquement pas à la Cour d’exercer son contrôle sur la légalité de ladite décision dès lors que, en raison d’une violation de l’obligation de motivation, il serait impossible d’établir un lien entre le troisième tiret et le raisonnement exposé dans les considérants. 125 Enfin, le Royaume-Uni relève que la Commission n’était pas compétente pour imposer une interdiction d’exportation sur certains produits qui n’entrent pas dans le champ de l’annexe II du traité ni, partant, dans celui des directives 90/425 et 89/662 sur lesquelles est fondée la décision attaquée. Tel serait le cas de la gélatine, des acides aminés, du phosphate dicalcique, des peptides dérivés des peptones, du glycérol, de l’acide stéarique et de ses sels. 126 La Commission considère que, compte tenu de l’urgence et de la nécessité d’assurer un contrôle effectif et complet de la situation, l’article 1 er , troisième tiret, de la décision attaquée respecte le principe de la sécurité juridique. Eu égard à la gravité de la menace pour la santé humaine, à la nature de l’agent de l’ESB et aux objectifs de la décision attaquée, il serait incontestable qu’elle couvre des produits comme le suif et la gélatine, qui sont des produits dérivés de bovins. Par ailleurs, la décision attaquée serait correctement motivée en ce qu’elle viserait l’agent de l’ESB et, partant, tous les produits susceptibles d’être contaminés par celui-ci, c’est-à-dire les produits dérivés. Enfin, les directives 90/425 et 89/662 feraient explicitement référence à tous les produits couverts par la décision attaquée. 127 A cet égard, il n’apparaît pas que l’article 1 er , troisième tiret, de la décision attaquée manque de clarté quant à son champ d’application lorsqu’il vise les produits obtenus à partir d’animaux de l’espèce bovine abattus au Royaume-Uni, qui sont susceptibles d’entrer dans la chaîne alimentaire humaine ou animale, et les produits destinés à l’usage médical, cosmétique ou pharmaceutique. 128 S’agissant du respect de l’obligation de motivation, il convient, ainsi que l’a souligné M. l’avocat général au point 38 de ses conclusions, de tenir compte du fait que le Royaume-Uni, destinataire de la décision attaquée, avait une profonde connaissance de la situation et ne pouvait se méprendre sur les produits couverts par la décision. 129 Enfin, les directives 90/425 et 89/662 prévoient que les mesures de sauvegarde adoptées par la Commission peuvent couvrir les produits d’origine animale, les produits dérivés de ces produits et les produits dérivés des animaux. La Commission n’a dès lors pas violé ces directives en adoptant la décision attaquée en ce qu’elle vise les produits obtenus à partir d’animaux de l’espèce bovine. 130 Il s’ensuit que le moyen tiré de l’irrégularité de l’article 1 er , troisième tiret, de la décision attaquée doit être rejeté. Sur le neuvième moyen tiré de l’illégalité des directives 90/425 et 89/662 131 Pour le cas où la Cour déciderait que la directive 90/425 ou la directive 89/662 s’applique ou doit s’appliquer à des produits ne relevant pas de l’annexe II du traité, le Royaume-Uni fait valoir que l’article 43 du traité ne conférait pas au Conseil le pouvoir d’adopter ces directives à cet effet. En conséquence, ces deux directives seraient inapplicables dans cette mesure et ne pourraient constituer la base légale de la décision attaquée. 132 La Commission et le Conseil estiment en revanche que c’est à juste titre que les directives 90/425 et 89/662 sont fondées sur l’article 43 du traité, dès lors qu’elles étaient destinées à réaliser les objectifs de l’article 39 et que les produits dérivés visés à ces directives relèvent à tout le moins de la rubrique résiduelle de l’annexe II couvrant les produits d’origine animale, non dénommés ni compris ailleurs. De toute manière, le fait qu’elles aient trait, de manière accessoire, à certains autres produits non compris dans l’annexe II n’affecterait en rien leur validité. 133 A cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante que l’article 43 du traité constitue la base juridique appropriée pour toute réglementation concernant la production et la commercialisation des produits agricoles énumérés à l’annexe II du traité, qui contribue à la réalisation d’un ou de plusieurs objectifs de la politique agricole commune énoncés à l’article 39 du traité (voir arrêts du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil, précité, point 14; du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil, 131/86, Rec. p. 905, point 19; du 16 novembre 1989, Commission/Conseil, C-131/87, Rec. p. 3743, point 28, et Fedesa e.a., précité, point 23). 134 La Cour a également jugé qu’une directive représentait un facteur essentiel pour accroître la productivité de l’agriculture, objectif visé à l’article 39, paragraphe 1, sous a), du traité, qu’elle devait être adoptée sur le fondement de l’article 43 du traité, même si, s’appliquant essentiellement à des produits relevant de l’annexe II, elle vise cependant de façon accessoire certains produits qui n’y sont pas compris (arrêt du 16 novembre 1989, Commission/Conseil, C-11/88, Rec. p. 3799, point 15, publication sommaire). 135 Eu égard à l’importance de la libre circulation des animaux, des produits des animaux et des produits d’origine animale pour la réalisation des objectifs visés à l’article 39, paragraphe 1, du traité, il y a lieu de considérer que l’article 43 du traité constituait la base juridique appropriée pour l’adoption des directives 90/425 et 89/662 même si, de façon accessoire, ces directives autorisent la Commission à adopter des mesures des sauvegarde s’étendant à des produits d’origine animale, produits dérivés de ces produits et produits dérivés des animaux qui ne seraient pas compris dans l’annexe II du traité. 136 Par conséquent, le moyen tiré de l’illégalité des directives 90/425 et 89/662 doit être rejeté. 137 Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
138 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. Le Royaume-Uni ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de le condamner aux dépens. Aux termes de l’article 69, paragraphe 4, de ce règlement, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Le Conseil supportera donc ses propres dépens.

Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête: 1) Le recours du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord est irrecevable en ce qu’il vise les prises de position de la Commission des 10 avril, 13 avril et 8 mai 1996. 2) Le recours du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord est rejeté en ce qu’il vise l’annulation de la décision 96/239/CE de la Commission, du 27 mars 1996, relative à certaines mesures d’urgence en matière de protection contre l’encéphalopathie spongiforme bovine. 3) Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord est condamné aux dépens. 4) Le Conseil de l’Union européenne supportera ses propres dépens.

Rodríguez Iglesias

Gulmann

Ragnemalm

Wathelet

Schintgen

Mancini

Moitinho de Almeida

Murray

Edward

Puissochet

Hirsch

Jann

Sevón

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 mai 1998.

Le greffier

Le président

R. Grass

G. C. Rodríguez Iglesias


1 – Langue de procédure: l’anglais.

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CJCE, n° C-180/96, Arrêt de la Cour, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord contre Commission des Communautés européennes, 5 mai 1998