CJUE, n° C-163/18, Arrêt de la Cour, HQ e.a. contre Aegean Airlines SA, 10 juillet 2019

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Chronologie de l’affaire

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www.exprime-avocat.fr · 23 octobre 2022

Rendez-vous perdus, correspondances manquées ou vacances reportées, l'annulation ou le retard d'un vol entraine souvent un préjudice pour le passager. Cela se traduit notamment par de nombreuses heures d´attente à l'aéroport, des frais ou des avances sur réservation perdues. Voilà pourquoi un système d'indemnisation a été mis sur pied au niveau européen par le Règlement n°261/2004. Celui-ci permet d'obtenir une indemnisation forfaitaire sur certains vols et sous certaines conditions. Comment faire pour obtenir réparation en cas de vol annulé ou retardé ? Nous vous expliquons tout. …

 

Droit Aérien Et Indemnisation · LegaVox · 3 avril 2020
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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 10 juill. 2019, C-163/18
Numéro(s) : C-163/18
Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 10 juillet 2019.#HQ e.a. contre Aegean Airlines SA.#Demande de décision préjudicielle, introduite par le Rechtbank Noord-Nederland.#Renvoi préjudiciel – Transports aériens – Règlement (CE) no 261/2004 – Règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol – Annulation du vol – Assistance – Droit au remboursement du billet d’avion par le transporteur aérien – Article 8, paragraphe 2 – Voyage à forfait – Directive 90/314/CEE – Faillite de l’organisateur de voyages.#Affaire C-163/18.
Date de dépôt : 1 mars 2018
Précédents jurisprudentiels : 15 juin 1999, Rechberger e.a., C-140/97, EU:C:1999:306
Baradics e.a., C-430/13, EU:C:2014:32
Fuß, C-429/09, EU:C:2010:717
Harms, C-601/17, EU:C:2018:702
Rechberger e.a., C-140/97, EU:C:1999:306
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 62018CJ0163
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2019:585
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Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

10 juillet 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Transports aériens – Règlement (CE) no 261/2004 – Règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol – Annulation du vol – Assistance – Droit au remboursement du billet d’avion par le transporteur aérien – Article 8, paragraphe 2 – Voyage à forfait – Directive 90/314/CEE – Faillite de l’organisateur de voyages »

Dans l’affaire C-163/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Rechtbank Noord-Nederland (tribunal de Noord-Nederland, Pays-Bas), par décision du 21 février 2018, parvenue à la Cour le 1er mars 2018, dans la procédure

HQ,

IP, représenté légalement par HQ,

JO

contre

Aegean Airlines SA,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme A. Prechal, présidente de chambre, MM. F. Biltgen, J. Malenovský (rapporteur), C. G. Fernlund et Mme L.S. Rossi, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : Mme M. Ferreira, administratrice principale,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 janvier 2019,

considérant les observations présentées :

pour HQ, IP, représenté légalement par HQ, et JO, par Me I. Maertzdorff, advocaat, ainsi que par M. M. Duinkerke et Mme M. J. R. Hannink,

pour Aegean Airlines SA, par Mes J. Croon et D. van Genderen, advocaten,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil ainsi que par Mme A. Kasalická, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, initialement par M. T. Henze, puis par M. M. Hellmann et Mme A. Berg, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. A. Nijenhuis ainsi que par Mmes C. Valero et N. Yerrell, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 mars 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 8, paragraphe 2, du règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91 (JO 2004, L 46, p. 1), à la lumière de la directive 90/314/CEE du Conseil, du 13 juin 1990, concernant les voyages, vacances et circuits à forfait (JO 1990, L 158, p. 59).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant HQ, IP, représenté légalement par HQ, et JO (ci-après « HQ e.a. ») à la compagnie de transport aérien Aegean Airlines SA au sujet du remboursement de billets d’avion que HQ e.a. ont sollicité à la suite de l’annulation d’un vol faisant partie d’un voyage à forfait.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement no 261/2004

3

Les considérants 1, 2 et 16 du règlement no 261/2004 énoncent :

« (1)

L’action de la Communauté dans le domaine des transports aériens devrait notamment viser à garantir un niveau élevé de protection des passagers. Il convient en outre de tenir pleinement compte des exigences de protection des consommateurs en général.

(2)

Le refus d’embarquement et l’annulation ou le retard important d’un vol entraînent des difficultés et des désagréments sérieux pour les passagers.

[…]

(16)

En cas d’annulation d’un voyage à forfait pour des raisons autres que l’annulation d’un vol, le présent règlement ne devrait pas s’appliquer. »

4

L’article 1er de ce règlement, intitulé « Objet », dispose, à son paragraphe 1 :

« Le présent règlement reconnaît, dans les conditions qui y sont spécifiées, des droits minimums aux passagers dans les situations suivantes :

a)

en cas de refus d’embarquement contre leur volonté ;

b)

en cas d’annulation de leur vol ;

c)

en cas de vol retardé. »

5

L’article 3 dudit règlement, intitulé « Champ d’application », prévoit, à son paragraphe 6 :

« Le présent règlement ne porte pas atteinte aux droits des passagers établis par la directive 90/314/CEE. Le présent règlement ne s’applique pas lorsqu’un voyage à forfait est annulé pour des raisons autres que l’annulation du vol. »

6

L’article 5 de ce même règlement, intitulé « Annulations », est ainsi libellé, à son paragraphe 1 :

« En cas d’annulation d’un vol, les passagers concernés :

a)

se voient offrir par le transporteur aérien effectif une assistance conformément à l’article 8 ;

b)

se voient offrir par le transporteur aérien effectif une assistance conformément à l’article 9, paragraphe 1, point a), et paragraphe 2, de même que, dans le cas d’un réacheminement lorsque l’heure de départ raisonnablement attendue du nouveau vol est au moins le jour suivant le départ planifié pour le vol annulé, l’assistance prévue à l’article 9, paragraphe 1, points b) et c), et

c)

ont droit à une indemnisation du transporteur aérien effectif conformément à l’article 7, à moins qu’ils soient informés de l’annulation du vol :

i)

au moins deux semaines avant l’heure de départ prévue, ou

ii)

de deux semaines à sept jours avant l’heure de départ prévue si on leur offre un réacheminement leur permettant de partir au plus tôt deux heures avant l’heure de départ prévue et d’atteindre leur destination finale moins de quatre heures après l’heure d’arrivée prévue, ou

iii)

moins de sept jours avant l’heure de départ prévue si on leur offre un réacheminement leur permettant de partir au plus tôt une heure avant l’heure de départ prévue et d’atteindre leur destination finale moins de deux heures après l’heure prévue d’arrivée. »

7

L’article 8 du règlement no 261/2004, intitulé « Assistance : droit au remboursement ou au réacheminement », prévoit, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1. Lorsqu’il est fait référence au présent article, les passagers se voient proposer le choix entre :

a)

le remboursement du billet, dans un délai de sept jours, selon les modalités visées à l’article 7, paragraphe 3, au prix auquel il a été acheté, pour la ou les parties du voyage non effectuées et pour la ou les parties du voyage déjà effectuées et devenues inutiles par rapport à leur plan de voyage initial, ainsi que, le cas échéant,

un vol retour vers leur point de départ initial dans les meilleurs délais ;

b)

un réacheminement vers leur destination finale, dans des conditions de transport comparables et dans les meilleurs délais, ou

c)

un réacheminement vers leur destination finale dans des conditions de transport comparables à une date ultérieure, à leur convenance, sous réserve de la disponibilité de sièges.

2. Le paragraphe 1, point a), s’applique également aux passagers dont le vol fait partie d’un voyage à forfait hormis en ce qui concerne le droit au remboursement si un tel droit découle de la directive 90/314/CEE. »

La directive 90/314

8

Le considérant 21 de la directive 90/314 énonce :

« considérant qu’il serait avantageux, pour les consommateurs et les professionnels du forfait, que l’organisateur et/ou le détaillant soient tenus de justifier de garanties en cas d’insolvabilité ou de faillite ».

9

L’article 1er de cette directive dispose :

« La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les voyages à forfait, les vacances et circuits à forfait, vendus ou offerts à la vente sur le territoire de la Communauté. »

10

L’article 4, paragraphe 6, de ladite directive prévoit :

« Lorsque le consommateur résilie le contrat conformément au paragraphe 5 ou que, pour quelque cause que ce soit, à l’exclusion d’une faute du consommateur, l’organisateur annule le forfait avant la date de départ convenue, le consommateur a droit :

a)

soit à un autre forfait de qualité équivalente ou supérieure au cas où l’organisateur et/ou le détaillant peuvent le lui proposer. Si le forfait offert en substitution est de qualité inférieure, l’organisateur doit rembourser au consommateur la différence de prix ;

b)

soit au remboursement dans les meilleurs délais de toutes les sommes versées par lui en vertu du contrat.

[…] »

11

En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette même directive :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que l’organisateur et/ou le détaillant partie au contrat soient responsables à l’égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant de ce contrat, que ces obligations soient à exécuter par eux-mêmes ou par d’autres prestataires de services et ceci sans préjudice du droit de l’organisateur et/ou du détaillant d’agir contre ces autres prestataires de services. »

12

L’article 7 de la directive 90/314 prévoit :

« L’organisateur et/ou le détaillant partie au contrat justifient des garanties suffisantes propres à assurer, en cas d’insolvabilité ou de faillite, le remboursement des fonds déposés et le rapatriement du consommateur. »

Le droit néerlandais

13

À la date des faits au principal, la directive 90/314 a été transposée en droit néerlandais par le titre 7A, intitulé « Contrat de voyage », du livre 7 du Burgerlijk Wetboek (code civil).

14

L’article 7:504, paragraphe 3, du code civil permet à un passager, en cas de résiliation du contrat de voyage par l’organisateur de voyages, de lui demander, notamment, le remboursement du prix des billets d’avion.

15

L’article 7:512, paragraphe 1, dudit code prévoit l’obligation pour un organisateur de voyages de prendre à l’avance les mesures nécessaires pour s’assurer que, s’il ne peut plus remplir ses obligations vis-à-vis du voyageur en cas d’insolvabilité financière, celles-ci soient reprises par un tiers ou que le prix du voyage soit remboursé.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

16

Aegean Airlines, société établie en Grèce, a conclu un contrat d’affrètement avec G. S. Charter Aviation Services Ltd (ci-après « G. S. Charter »), société établie à Chypre, en vertu duquel elle devait mettre à la disposition de cette dernière un certain nombre de sièges, moyennant le paiement d’un prix d’affrètement. G. S. Charter a ensuite revendu ces sièges à des tiers, dont, notamment, Hellas Travel BV (ci-après « Hellas »), agence de voyages établie aux Pays-Bas.

17

G. S. Charter et Hellas ont conclu un accord en vertu duquel, du 1er mai au 24 septembre 2015, un vol aller-retour, entre Eelde (Pays-Bas) et Corfou (Grèce), devait être opéré chaque vendredi, une caution devait être payée à Aegean Airlines et le paiement du vol retour, prévu le vendredi suivant, devait être réglé chaque lundi.

18

Le 19 mars 2015, HQ e.a. ont réservé auprès de Hellas des vols aller-retour entre Eelde et Corfou. Ces vols faisaient partie d’un « voyage à forfait », au sens de la directive 90/314, dont le prix a été payé à Hellas.

19

HQ e.a. ont reçu des billets électroniques portant le logo d’Aegean Airlines pour ces vols prévus les 17 et 24 juillet 2015 ainsi que des documents mentionnant Hellas en tant qu’affréteur.

20

Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, quelques jours avant la date de départ convenue, Hellas a adressé à HQ e.a. une lettre ainsi qu’un courriel dans lesquels elle les informait que, en raison tant de la stagnation du nombre des réservations que des annulations de réservations existantes, dues aux « incertitudes quant à la situation de la Grèce » à cette époque, elle était dans l’obligation d’annuler les vols convenus avec Aegean Airlines, cette dernière ayant décidé, en raison de l’impossibilité d’obtenir le prix préalablement fixé avec Hellas, de ne plus assurer de vols à destination et en provenance de Corfou à compter du 17 juillet 2015. Dans ces circonstances, Hellas a annoncé à HQ e.a. que leur voyage à forfait était annulé.

21

Le 3 août 2016, Hellas a été déclarée en faillite. Elle n’a pas remboursé le prix des billets d’avion à HQ e.a.

22

HQ e.a. ont saisi le Rechtbank Noord-Nederland (tribunal de Noord-Nederland) afin d’obtenir qu’Aegean Airlines soit condamnée à leur verser une indemnisation pour l’annulation du vol du 17 juillet 2015 ainsi qu’à leur rembourser les billets y afférents, en vertu respectivement, d’une part, de l’article 5, paragraphe 1, sous c), du règlement no 261/2004 et, d’autre part, de l’article 8, paragraphe 1, sous a), de ce règlement.

23

Aegean Airlines a contesté, à titre principal, l’applicabilité du règlement no 261/2004, notamment eu égard à l’article 3, paragraphe 6, de celui-ci.

24

Toutefois, par décision interlocutoire du 14 novembre 2017, le Rechtbank Noord-Nederland (tribunal de Noord-Nederland) a rejeté ce moyen de défense au motif que l’applicabilité du règlement no 261/2004 au profit des passagers détenteurs d’un voyage à forfait n’est exclue, en vertu de ladite disposition, que si l’annulation est indépendante de la volonté du transporteur aérien d’assurer ou non le ou les vols faisant partie de ce voyage, alors que tel n’est pas le cas en l’espèce. En effet, ce tribunal a considéré, d’une part, que la décision d’annuler le vol avait été prise par Aegean Airlines, laquelle n’était manifestement disposée à assurer le vol que si Hellas lui en payait préalablement le prix fixé, et, d’autre part, qu’il n’était ni soutenu ni démontré que Hellas avait annoncé l’annulation du voyage à forfait pour des raisons autres que cette décision d’Aegean Airlines.

25

Partant, en vertu du règlement no 261/2004, HQ e.a. ont bénéficié d’une indemnisation forfaitaire de la part d’Aegean Airlines en raison de l’annulation du vol en cause. En revanche, ce tribunal ne s’est pas prononcé sur la demande tendant au remboursement des billets d’avion.

26

À cet égard, Aegean Airlines a fait valoir, à titre subsidiaire, que, dans la mesure où il s’agissait, en l’espèce, d’un voyage à forfait, il ressortait de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 261/2004 qu’elle ne serait pas tenue de rembourser à HQ e.a. le montant que ceux-ci avaient payé à Hellas pour l’achat de leurs billets d’avion.

27

Dans ces conditions, le Rechtbank Noord-Nederland (tribunal de Noord-Nederland, Pays-Bas) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 8, paragraphe 2, du règlement no 261/2004 doit-il être interprété en ce sens qu’un passager qui dispose, au titre de la directive 90/[314]/CEE sur les voyages à forfait (transposée en droit national), du droit de s’adresser à son organisateur de voyages pour obtenir le remboursement de son billet ne peut plus réclamer aucun remboursement au transporteur aérien ?

2)

En cas de réponse affirmative à la première question, un passager peut-il toutefois réclamer au transporteur aérien le remboursement de son billet s’il est plausible que son organisateur de voyages, au cas où il serait tenu responsable, soit dans l’incapacité financière de rembourser le billet et que l’organisateur de voyages n’a pris aucune mesure de garantie pour garantir le remboursement ? »

Sur les questions préjudicielles

28

Par ses deux questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 261/2004 doit être interprété en ce sens qu’un passager qui dispose, au titre de la directive 90/314, du droit de s’adresser à son organisateur de voyages pour obtenir le remboursement de son billet d’avion n’a, dès lors, plus la possibilité de demander le remboursement de ce billet auprès du transporteur aérien sur le fondement dudit règlement, y compris lorsque l’organisateur de voyages est dans l’incapacité financière d’effectuer le remboursement du billet et n’a pris aucune mesure afin de le garantir.

29

S’agissant de la question de savoir si les passagers qui disposent du droit de s’adresser à leur organisateur de voyages pour obtenir le remboursement de leurs billets d’avion ont la possibilité de demander également le remboursement de leurs billets auprès du transporteur aérien, il convient, d’emblée, de rappeler, d’une part, que, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement no 261/2004, lu en combinaison avec l’article 5, paragraphe 1, sous a), de ce règlement, il incombe au transporteur aérien, en cas d’annulation d’un vol, d’offrir aux passagers concernés une assistance consistant à leur proposer, notamment, le remboursement de leur billet (voir arrêt du 12 septembre 2018, Harms, C-601/17, EU:C:2018:702, point 12).

30

D’autre part, l’article 8, paragraphe 2, dudit règlement énonce que le droit au remboursement du billet s’applique également aux passagers dont le vol fait partie d’un voyage à forfait, hormis le cas où un tel droit découle de la directive 90/314.

31

Il découle de ce libellé clair dudit article 8, paragraphe 2, que la simple existence d’un droit au remboursement, découlant de la directive 90/314, suffit pour exclure qu’un passager, dont le vol fait partie d’un voyage à forfait, puisse réclamer le remboursement de son billet, en vertu du règlement no 261/2004, auprès du transporteur aérien effectif.

32

Cette interprétation est corroborée par les travaux préparatoires du règlement no 261/2004. En effet, ainsi qu’il a été relevé par M. l’avocat général aux points 43 et 44 de ses conclusions, il ressort de ces travaux préparatoires que, si le législateur de l’Union n’a pas souhaité exclure totalement les passagers dont le vol fait partie d’un voyage à forfait du champ d’application de ce règlement, il a, toutefois, entendu maintenir à leur égard les effets du système jugé suffisamment protecteur qui avait été mis en place antérieurement par la directive 90/314.

33

Ainsi qu’il découle, à cet égard, de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 261/2004, ledit règlement ne porte pas atteinte aux droits que les passagers, ayant acheté un voyage à forfait, tirent de cette directive.

34

L’article 8, paragraphe 2, du règlement no 261/2004 implique ainsi que les droits au remboursement du billet, en vertu, respectivement, de ce règlement et de la directive 90/314, ne sont pas cumulables, un tel cumul étant au demeurant, et ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 64 de ses conclusions, de nature à conduire à une surprotection injustifiée du passager concerné, cela au détriment du transporteur aérien effectif, ce dernier risquant en effet, en ce cas, de devoir assumer en partie la responsabilité qui incombe à l’organisateur de voyages à l’égard de ses clients, en vertu du contrat que celui-ci a conclu avec ces derniers.

35

Il découle des considérations qui précèdent que les passagers qui disposent, au titre de la directive 90/314, du droit de s’adresser à leur organisateur de voyages pour obtenir le remboursement de leurs billets d’avion n’ont pas la possibilité de demander un remboursement auprès du transporteur aérien, sur le fondement du règlement no 261/2004.

36

Cette conclusion s’impose également dans l’hypothèse où l’organisateur de voyages serait dans l’incapacité financière d’effectuer le remboursement du billet et n’aurait pris aucune mesure afin de garantir ce remboursement.

37

Au regard du libellé clair de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 261/2004, il n’est, en effet, pas pertinent de savoir si l’organisateur de voyages est dans l’incapacité financière d’effectuer le remboursement du billet, s’il a pris ou non une mesure afin de garantir ce remboursement, ou encore si ces circonstances mettent en péril l’exécution de son obligation de rembourser les passagers concernés.

38

Une telle interprétation de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 261/2004 n’est pas infirmée par l’objectif principal poursuivi par ce règlement qui vise, ainsi qu’il ressort de son considérant 1, à garantir un niveau élevé de protection des passagers.

39

En effet, ainsi qu’il ressort du point 32 du présent arrêt, le législateur de l’Union a précisément pris en considération le système suffisamment protecteur qui avait été mis en place antérieurement par la directive 90/314.

40

Plus particulièrement, l’article 7 de cette directive, lu à la lumière du considérant 21 de celle-ci, prévoit, notamment, que l’organisateur de voyages doit justifier de garanties suffisantes propres à assurer, en cas d’insolvabilité ou de faillite, le remboursement des fonds déposés.

41

La Cour a jugé que l’article 7 de la directive 90/314 comporte l’obligation de résultat de conférer aux voyageurs à forfait un droit aux garanties de remboursement des fonds déposés en cas de faillite de l’organisateur de voyages et que cette garantie est précisément destinée à prémunir le consommateur contre les conséquences de la faillite, quelles qu’en soient les causes (voir, en ce sens, arrêt du 15 juin 1999, Rechberger e.a., C-140/97, EU:C:1999:306, point 74, ainsi que ordonnance du 16 janvier 2014, Baradics e.a., C-430/13, EU:C:2014:32, point 35).

42

La Cour a, par ailleurs, considéré qu’une réglementation nationale ne transpose correctement les obligations prévues à cette disposition que si, quelles que soient ses modalités, elle a pour résultat de garantir effectivement aux passagers le remboursement de tous les fonds qu’ils ont déposés en cas d’insolvabilité de l’organisateur de voyages (voir, en ce sens, arrêt du 15 juin 1999, Rechberger e.a., C-140/97, EU:C:1999:306, point 64, ainsi que ordonnance du 16 janvier 2014, Baradics e.a., C-430/13, EU:C:2014:32, point 38).

43

À défaut, ainsi qu’il découle d’une jurisprudence constante de la Cour, le voyageur concerné bénéficie, en tout état de cause, de la faculté d’introduire une action en responsabilité contre l’État membre concerné pour les dommages qui lui sont causés en raison d’une violation du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 25 novembre 2010, Fuß, C-429/09, EU:C:2010:717, points 45 à 48 et jurisprudence citée).

44

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 261/2004 doit être interprété en ce sens qu’un passager qui dispose, au titre de la directive 90/314, du droit de s’adresser à son organisateur de voyages pour obtenir le remboursement de son billet d’avion n’a, dès lors, plus la possibilité de demander le remboursement de ce billet auprès du transporteur aérien sur le fondement dudit règlement, y compris lorsque l’organisateur de voyages est dans l’incapacité financière d’effectuer le remboursement du billet et n’a pris aucune mesure afin de le garantir.

Sur les dépens

45

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

L’article 8, paragraphe 2, du règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91, doit être interprété en ce sens qu’un passager qui dispose, au titre de la directive 90/314/CEE du Conseil, du 13 juin 1990, concernant les voyages, vacances et circuits à forfait, du droit de s’adresser à son organisateur de voyages pour obtenir le remboursement de son billet d’avion n’a, dès lors, plus la possibilité de demander le remboursement de ce billet auprès du transporteur aérien sur le fondement dudit règlement, y compris lorsque l’organisateur de voyages est dans l’incapacité financière d’effectuer le remboursement du billet et n’a pris aucune mesure afin de le garantir.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le néerlandais.

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