Conseil national de l'ordre des médecins, 28 décembre 2017, n° 2016-4802

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CNOM, 28 déc. 2017, n° 2016-4802
Numéro(s) : 2016-4802

Texte intégral

j

CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIÈRE INSTANCE D’ÎLE-DE-FRANCE

DE L’ORDRE DES MÉDECINS

[…]

N° C.2016-4802

Dr B Y & la SELARL Dr B Y

c/ Dr C X

[…]

Audience du 14 novembre 2017

Décision rendue publique par affichage le 28 décembre 2017

LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIERE INSTANCE,

Vu, enregistrés au greffe de la chambre disciplinaire le 28 décembre 2016, sous le n° C.2016-4802, la plainte, en date du 4 juillet 2016, présentée par Me Joly, avocat, pour le Dr B Y & la Selarl Dr B Y, exerçant […], […] transmise, sans s’y associer, par le conseil départemental de la ville de Paris de

l’Ordre des médecins et le procès-verbal de la séance du 16 novembre 2016 dudit conseil ; le Dr B Y & la Selarl Dr B Y demandent à la chambre de prononcer une sanction à l’encontre du Dr C X, qualifiée en médecine générale, exerçant, […], […] ;

Le Dr B Y & la Selarl Dr B Y reproche au Dr X

d'exercer galement son activité dans les locaux de la SAS Epilium à Paris sans que cette activité ait été déclarée au conseil départemental de l’Ordre; cette société est une société commerciale qui se livre à de la publicité sur son site internet ou sa page Facebook, publicité qui bénéficie directement au Dr X; les actes d’épilation au laser y sont en fait exécutés par des techniciens qui orientent la clientèle vers le Dr X et les honoraires correspondants sont perçus par la société commerciale; le Dr X qui a aliéné son indépendance professionnelle s’est ainsi rendue coupable de compérage et de complicité d’exercice illégal de la médecine; ce praticien a donc contrevenu aux règles posées par les articles R. 4127-3, 5, 19, 23, 25, 30 à 32, 83, 85 et 111 du code de la santé publique ;

Vu, enregistré au greffe de la chambre disciplinaire le 28 avril 2017, le mémoire en défense présenté pour le Dr X par Me Lacoeuilhe, avocat ; le Dr X demande le rejet de la plainte aux motifs que si elle réalise des actes d’épilation au laser dans le seul centre

[…], c’est parce qu’elle ne dispose pas du matériel approprié dans son cabinet du 17ème arrondissement ; que donc et en vertu du contrat, au demeurant validé par le conseil de l’Ordre, qui la lie au centre Epilium, celui-ci lui fournit le local et le matériel nécessaires en échange d’une redevance ; qu’elle y a dispensé ses soins en toute indépendance sur sa seule clientèle personnelle; que si le centre Epilium perçoit les honoraires correspondants qu’il lui reverse diminués du montant de la redevance qu’elle lui doit, l’opération se fait par le biais d’un compte mandataire ; ainsi les griefs qui lui sont faits par le Dr B Y & la Selarl Dr B Y sont inexistants ou ne peuvent lui être imputés et ne concernent que la société Epilium ; le seul reproche qui peut lui être fait est en effet d’avoir négligé de déclarer cette activité secondaire dès l’origine auprès du conseil départemental de la ville de Paris de l’Ordre des médecins et de ne lui avoir transmis le

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contrat la liant à la société Epilium qu’après avoir débuté cette activité ; que la plainte du Dr B Y & la Selarl Dr B Y qui ne repose sur aucun fondement sérieux est par suite parfaitement abusive et qu’elle est donc fondée à demander à ce que ce praticien soit condamné à lui verser une indemnité de 5000 € en réparation du préjudice que lui cause cette plainte;

Vu, enregistré au greffe de la chambre disciplinaire le 6 novembre 2017, le mémoire en réplique présenté pour le Dr Y, par Me Joly, avocat, qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes motifs ; il souligne que le Dr X a attendu deux ans avant de régulariser sa situation auprès du conseil de l’Ordre; que plusieurs patientes lui ont été adressées directement par le centre Epilium ou l’ont rencontrée du fait de la publicité effectuée par ce centre sur des sites informatiques et sur lesquels le nom du Dr X apparaît; que des devis à son nom ont été établis mentionnant que les actes d’épilation seraient effectués par des techniciennes du centre; que le Dr X était présente dans les locaux quand ces techniciennes ont accompli des actes d’épilation au laser que celle-ci a donc nécessairement couverts; le Dr B Y & la Selarl Dr B Y demandent en outre la condamnation du Dr X à lui verser la somme de 4000 € en application des dispositions de l’article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991;

Vu, enregistré au greffe de la chambre disciplinaire le 8 novembre 2017, le nouveau mémoire en défense présenté pour le Dr X, par Me G-H, qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes motifs et en outre que les pièces fournies à l’appui de ses affirmations par le Dr B Y & la Selarl Dr B Y ne sont pas probantes ;

Vu, enregistré au greffe de la chambre disciplinaire le 10 novembre 2017, le nouveau mémoire présenté pour le Dr B Y & la Selarl Dr B Y, par Me Joly, avocat, qui insiste sur la responsabilité encourue par le Dr X à avoir été présente dans les locaux alors que des techniciennes non habilitées à le faire pratiquaient des épilations au laser;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de la santé publique, notamment le code de déontologie médicale figurant aux articles R. 4127-1 à R. 4127-112 ;

Vu le code de justice administrative;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, notamment son article 75;

Les membres de la chambre disciplinaire appelés à siéger avec voix consultative ayant été dûment convoqués;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 14 novembre 2017:

Le rapport du Dr I-J; M

Les observations de Me Joly pour le Dr B Y & la Selarl

-

Dr B Y et celui-ci en ses explications ; Les observations de Me K-L pour le Dr X et celle-ci en ses

-

explications ;

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Le Dr X ayant été invitée à reprendre la parole en dernier ;

Vu, enregistré au greffe de la chambre disciplinaire le 12 décembre 2017, la note en délibéré présentée par Me Joly pour le Dr B Y & la Selarl Dr B Y;

APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ,

Sur la plainte :

1- Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article R. 4127-19 du code de la santé publique : « La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce. Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité… » ; qu’aux termes des dispositions de l’article R. 4127-25 du même code : « Il est interdit aux médecins de dispenser des consultations, prescriptions ou avis médicaux dans des locaux commerciaux… » ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier et n’est au demeurant pas sérieusement contesté que le Dr X exerçait un ou deux jours par semaine dans le centre d’épilation géré par la société Epilium sis […] à Paris (8ème); que la société Epilium est une société commerciale qui gère également un autre centre de même nature rue E F dans le

1er arrondissement de Paris ; qu’elle publie sur ses sites internet et < Facebook » de nombreux encarts publicitaires vantant ses procédés d’épilation au laser; que, si selon ses dires, les patientes que recevait le Dr X étaient en grande majorité ses propres patientes venues au préalable la consulter dans son cabinet du 17ème arrondissement ou adressées directement au centre Epilium par des amies, il apparaît que très souvent, si ce n’est chaque fois, les rendez vous étaient programmés par le secrétariat commun au centre Epilium ; qu’ainsi le Dr X ne gérait pas elle-même le planning de ses interventions dans ledit centre ; qu’il s’ensuit que le Dr X exerçait son art dans le local commercial de la société Epilium dans des conditions qui ne garantissaient pas sa pleine indépendance; qu’il suit de là qu’elle n’a pas respecté les prescriptions sus-rappelées des articles R. 4127-19 et 25 du code de la santé publique ;

2- Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article R. 4127-30 du code de la santé publique : « Est interdite toute facilité accordée à quiconque se livre à l’exercice illégal de la médecine » ; qu’aux termes des dispositions de l’article R. 4127-20 dudit code: < Le médecin doit veiller à l’usage qui est fait de son nom, de sa qualité ou de ses déclarations… » ;

Considérant qu’il est établi et pas davantage sérieusement contesté que dans les centres gérés par la société Epilium, des séances d’épilation au laser étaient pratiquées par des personnes qui n’avaient pas la qualité de médecins alors que la réalisation de tels actes est réservée par la règlementation en vigueur aux seuls médecins; que si le Dr X soutient qu’elle pratiquait elle-même les actes d’épilation sur les patientes qui lui étaient adressées et ignorait ce qui se pratiquait par ailleurs, il ressort des énonciations figurant sur le site internet

d’Epilium que les actes d’épilation au laser étaient supervisés par des médecins ; que d’ailleurs des devis préétablis mentionnaient que les actes d’épilation ne seraient pas réalisés par un médecin ; que le Dr X ne saurait utilement invoquer le fait que ces devis auraient en fait été utilisés sans son aval par un autre praticien ou par des assistantes présents ces jours-là pour s’exonérer de toute responsabilité; qu’ainsi elle ne pouvait ignorer les agissements qui avaient cours dans le centre Lincoln et a, au moins tacitement, couvert les actes d’épilation au laser pratiqués par des esthéticiennes non habilitées à le faire ; que le

Dr X a dès lors effectivement contrevenu aux dispositions précitées de l’article R. 4127 30 du code de la santé publique ;

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Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article R. 4127-83 du code de la santé publique : « Conformément à l’article L. 4113-9, l’exercice de la médecine, sous quelque forme que ce soit, au sein d’une entreprise, d’une collectivité ou d’une institution ressortissant au droit privé doit, dans tous les cas, faire l’objet d’un contrat écrit… Toute convention avec un des organismes prévu au premier alinéa, en vue de l’exercice de la médecine, doit être communiqué au conseil départemental intéressé… celui-ci vérifie sa conformité avec les prescriptions du présent code de déontologie… » ; qu’aux termes des dispositions de l’article R. 4127-85 de ce code : « Le lieu habituel d’exercice d’un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du conseil départemental… u… un médecin peut exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle… la demande d’ouverture d’un lieu d’exercice distinct est adressée au conseil départemental dans le ressort duquel se situe l’activité envisagée… le conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit est informé de la demande lorsque celle-ci concerne un site situé dans un autre département… » ; qu’enfin aux termes des dispositions de l’article R. 4127-111 du code de la santé publique : « Tout médecin qui modifie ses conditions d’exercice ou cesse d’exercer est tenu d’en avertir le conseil départemental » ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le Dr X est inscrite depuis 2009 au tableau des praticiens du conseil départemental de la ville de Paris de l’Ordre des médecins ; que lorsqu’elle a commencé à intervenir dans le centre Epilium à Paris, elle n’en a pas informé le conseil départemental de la ville de Paris; que le contrat de partenariat avec la société Epilium conclu le 1er décembre 2014 n’a été transmis au conseil départemental de l’Ordre qu’en août 2016 pour une autorisation d’exercice en site distinct donnée le 19 octobre

2016; qu’ainsi le Dr X n’a pas respecté les règles posées par les articles R. 4127-83, 85 et 111 du code de la santé publique ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le Dr X a fait preuve d’un comportement contraire à la déontologie médicale et de nature à déconsidérer la profession ce qui est prohibé par l’article R. 4127-31 du code de la santé publique ;

Considérant qu’il sera fait une juste appréciation des fautes commises par le Dr X en prononçant à son encontre la sanction de l’interdiction d’exercer la médecine pendant une durée de un mois dont quinze jours avec sursis ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique :

Considérant qu’aux termes de cet article: « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du Dr X le versement au Dr B Y & la Selarl Dr B Y de la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

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Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge du Dr Y, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que le Dr X demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens;

Sur la demande de versement d’une indemnité pour procédure abusive :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner le Dr B Y & la Selarl Dr B Y à verser au Dr X une indemnité pour procédure abusive ;

PAR CES MOTIFS,

DECIDE

Article 1er : La sanction de l’interdiction d’exercer la médecine pour une durée de un mois dont quinze jours avec sursis est prononcée à l’encontre du Dr C X.

Article 2 : La sanction objet du précédent article, pour la part non assortie du sursis, prendra effet à compter du 3 avril 2018 à 0 heure, si à cette date la présente décision est devenue définitive, et cessera de produire effet le 17 avril 2018 à minuit.

Article 3: Les conclusions des parties tendant à l’application des dispositions de l’article 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique sont rejetées.

Article 4: Les conclusions du Dr X tendant à la condamnation du Dr B Y

& la Selarl Dr B Y à lui verser une indemnité pour procédure abusive sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au Dr Y & la Selarl Dr Y, à Me Joly, au Dr X, à Me G-H, au conseil départemental de la ville de Paris de l’Ordre des médecins, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, au conseil national de l’Ordre des médecins, au directeur général de l’agence régionale de santé d’Ile-de-France et à la ministre des solidarités et de la santé.

Ainsi fait et délibéré par : M. N-O, président; MM. les docteurs Batard, I

J, Kruger, Théron, Tolédano, membres titulaires, et M. le docteur A, membre suppléant.

Le président suppléant de la chambre disciplinaire

M N-O

Le greffier en chef

Copie certifiée conforme collationnée par nos soins Marion FARGE le greffier en chef de la chambre disciplinaire

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