Ordre national des chirurgiens-dentistes, Chambre disciplinaire nationale, 29 décembre 2016, n° 2410

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Les conditions de réalisation de l’enquête préalable du service médical sont sans influence sur la recevabilité de la plainte – Aucune prescription n’est applicable devant la juridiction disciplinaire – Le service médical peut recourir à des examens radiologiques par application des dispositions de l’article L.315-1 du code de la sécurité sociale par dérogation à l’article L.1333-11 du code de la santé publique – Aucun grief invoqué par l’assurance maladie ne peut être régulièrement fondé sur des données statistiques – Facturation à l’assurance maladie de 296 couronnes fictives, 279 inlays-core fictifs, 8 appareils fictifs et 51 actes de soins fictifs – 39 radiographies facturées et non fournies – Facturation à l’assurance maladie de 41 prothèses défectueuses et de 50 actes non pérennes – 15 surcotations et cotations d’actes hors nomenclature.

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Sur la décision

Référence :
ONCD, ch. disciplinaire nationale, 29 déc. 2016, n° 2410
Numéro(s) : 2410
Dispositif : Rejet de la requête (décision de 1ère instance = Interdiction d'exercer pendant dix-huit mois dont six mois avec sursis)
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Sur les parties

Texte intégral

CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS
JFV/CB/NR
Audience publique du 1er décembre 2016
Décision rendue publique par affichage le 29 décembre 2016
Affaire : Docteur F.H.
Chirurgien-dentiste
Dos. n°2410
LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES,
Vu la requête, enregistrée au greffe de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes le 5 juin 2015, présentée pour le Docteur F.H., chirurgien-dentiste, dont l’adresse est (…) et tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision, en date du 4 mai 2015, par laquelle la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de la région Basse-Normandie, statuant sur la plainte formée à son encontre par le médecin-conseil, chef de service de l’échelon local du Calvados et transmise en s’y associant par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes du Calvados, lui a infligée la sanction de l’interdiction d’exercer la profession de chirurgien-dentiste pendant dix-huit mois, dont six mois avec sursis et, à titre subsidiaire, à ce que la sanction qui serait éventuellement décidée soit en totalité assortie du sursis, par les motifs que le contrôle de l’activité du Docteur H. s’est déroulé dans des conditions contraires à l’engagement du directeur de l’UNCAMTS ; que les principes d’objectivité, de neutralité et d’impartialité n’ont pas été respectés ; que c’est un dossier à charge qui a été constitué ; que la procédure de contrôle a été en totale contradiction avec les stipulations de la charte du praticien contrôlé qui est opposable aux plaignants et avec l’article L.315-1-IV du code de la sécurité sociale qui impose le respect du débat contradictoire ; qu’aucune sanction ne peut être prononcée à partir d’anomalies exclusivement fondées sur des données statistiques ; que dès lors qu’une analyse d’activité est déclenchée, la procédure judiciaire est ouverte et les droits de la défense doivent être respectés ; que la plainte a été constituée dans des conditions irrégulières, déloyales et contraires à la jurisprudence du conseil constitutionnel ; que les contrôles des soins réalisés sur les patients doivent respecter le principe du débat contradictoire et impliquent donc la présence du praticien ;
qu’il est constant que le service médical n’a pas informé le praticien et que la procédure est donc viciée ; que c’est en toute illégalité que des radiographies irradiantes ont été prises par le contrôle dentaire ; qu’aucun patient n’a été informé de l’objectif des irradiations qu’il a subies et qu’aucun patient n’a donné son consentement ; que toutes les radiographies ainsi prises illégalement doivent être rejetées ; que tous les actes réalisés avant le 2 octobre 2011 sont prescrits ; que les explications données pour chaque dossier justifient les actes réalisés et les cotations qui ont été faites ; que le différend n’entre pas dans le cadre des fraudes, fautes ou abus prévus à l’article L.145-1 du code de la sécurité sociale mais dans celui du débat de cotations dont l’interprétation ambiguë soulève des interrogations ; qu’il ne s’agit pas de faute déontologique mais simplement de coquilles informatiques et de problèmes de saisine sans oublier les difficultés de production de documents dues à une surcharge de travail ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 juillet 2015, présenté par le médecin-conseil, chef de service de l’échelon local du Calvados et par lequel celui-ci indique qu’il maintient la totalité des griefs relevés à l’encontre du Docteur H. et se réfère aux écritures du service médical produites en première instance ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 juillet 2015, présenté par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes du Calvados, dont l’adresse est 97 boulevard Yves Guillou, 14000 Caen et par lequel celui-ci indique qu’à défaut d’éléments nouveaux, il maintient sa position et les déclarations faites en première instance ; que l’on se trouve en présence d’une litanie de fraudes et 1.

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DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS de malversations qui entachent la réputation de toute une profession ; que la majorité des fraudes du Docteur H. se sont faites sur le dos des patients couverts par la CMU, ce qui est d’autant plus grave ; qu’il convient d’infliger une sanction exemplaire afin que ce praticien n’ait plus l’occasion de récidiver ni même d’y penser et afin que cela puisse décourager d’autres praticiens qui seraient tentés de l’imiter ; que le Docteur H. a dérogé à un grand nombre d’articles du code de déontologie et du code de la santé publique ; qu’il a porté atteinte à l’honneur de sa profession dont il a renié le serment d’être au service de ses patients en toute honnêteté pour le bien-être et l’intérêt de ceux-ci et ne pas engendrer de comportements déviants, parfaitement inadmissibles de la part d’un professionnel de santé ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 novembre 2016, présenté pour le Docteur H. et tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et, en outre, par les motifs que les explications complémentaires pour chaque dossier prouvent que de nombreux griefs retenus par les premiers juges ne sont pas justifiés ; qu’il n’a jamais commis la moindre tentative de fraude au détriment de la sécurité sociale ; qu’il espère que le juge disciplinaire saura se montrer bienveillant pour les erreurs qu’il a commises de façon involontaire ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 novembre 2016, présenté par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes du Calvados, et tendant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 2007-434 du 25 mars 2007 relatif au fonctionnement et à la procédure disciplinaire des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes, des pharmaciens, des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues et modifiant le code de la santé publique (dispositions réglementaires) ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu, en audience publique, le rapport du Docteur NAUDIN, les observations du
Docteur F.H., assisté de Maître Philippe-Rudyard BESSIS, avocat ; les observations du Docteur Hervé
CALLY, Président du conseil départemental de l’Ordre du Calvados ; et celles du Docteur Gérard
SORNIN, chirurgien-dentiste conseil, dûment mandaté pour représenter le médecin-conseil, chef de service de l’échelon local du Calvados ;
- le Docteur F.H., ayant pu reprendre la parole en dernier ;
- Sur l’enquête préalable :
Considérant que les conditions dans lesquelles a été réalisée par l’assurance maladie l’enquête préalable à la saisine de la juridiction disciplinaire sont, en tout état de cause, sans influence sur la recevabilité de la plainte ; qu’il appartient au juge d’apprécier la valeur et la portée des éléments qui lui sont soumis, dans le cadre de la procédure contradictoire qui se déroule devant lui et au vu, notamment, des explications fournies par le praticien incriminé ;
Au fond :
Considérant que les dossiers soumis à l’examen de la chambre disciplinaire nationale se rapportent à des actes attestés par le Docteur H. au cours de la période du 1er mars 2010 au 2 avril 2012 ; que l’intéressé ne peut utilement soutenir que certains de ces actes seraient atteints par la prescription dès lors qu’aucune prescription n’est applicable devant la juridiction disciplinaire ; que, par ailleurs, le médecin-conseil est fondé à se prévaloir, à l’appui des griefs formulés dans sa plainte, des examens radiologiques auxquels il a décidé de recourir, comme l’y autorise par dérogation à l’article
L.1333-11 du code de la santé publique, les dispositions de l’article L.315-1 du code de la sécurité sociale dans le respect de la déontologie médicale dont le requérant n’apporte pas la preuve qu’elle 2.

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DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS ait été en l’espèce méconnue ; qu’enfin, contrairement à ce que soutient le Docteur H. aucun des griefs invoqués à son encontre par l’assurance maladie n’est fondé sur des données statistiques ;
Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de l’étude des dossiers qu’à deux cent quatre-vingt-seize reprises le Docteur H. a facturé à l’assurance maladie des couronnes qui n’ont pas été réalisées (dossiers 2 à 11, 14 à 19, 21, 22, 24, 26 à 30, 32 à 35, 37 et 38, le dossier 5 ne concernant que six couronnes fictives et non sept) ; qu’il en a été de même pour deux cent soixante-dix-neuf cas d’inlays-core non réalisés (dossiers 1, 4 à 11, 14, 15, 17 à 19, 21, 22, 26 à 30, 32 à 35, 37 et 38, le dossier 5 ne concernant aussi que six inlays-core et non sept), pour huit appareils amovibles également non réalisés (dossiers 11, 18, 24, 27 et 29), pour cinquante et un actes de soins non effectués (dossiers 6, 10, 14, 16 à 18, 23, 26 à 32 et 35 à 37) et pour trente-neuf clichés radiographiques qu’en réponse à la demande du service médical l’intéressé n’a pas été en état de produire (dossiers 1, 5, 8 à 12, 14, 15, 17, 22, 27, 28, 30, 32, 33, 35, 37 et 38) ;
Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article R.4127-233 du code de la santé publique :
« Le chirurgien-dentiste qui a accepté de donner des soins à un patient s’oblige (…) à lui assurer des soins éclairés et conformes aux données acquises de la science (…) » ; que l’examen des dossiers établit que le Docteur H. a méconnu l’obligation déontologique rappelée par ces dispositions, en réalisant, à quarante et une reprises, des prothèses défectueuses, s’agissant pour la plupart de couronnes et d’inlays-core présentant d’importants défauts d’adaptation et, à cinquante reprises, des actes non pérennes, refacturés pour certains à très court terme et des clichés flous ou radio clairs n’offrant aucune plus-value médicale (dossiers 1 à 3, 6, 9, 12, 13, 16 à 18, 22, 23, 26, 27, 30, 31, 33, 34, 37 et 38) ;
Considérant, en troisième lieu, qu’il ressort aussi de l’étude des dossiers qu’à quinze reprises le
Docteur H. n’a pas respecté les règles de cotation de la nomenclature générale des actes professionnels en procédant à des surcotations et à la cotation d’actes hors nomenclature (dossiers 3, 4, 9, 15, 17, 27, 28 et 30) ;
Considérant que compte tenu, spécialement, de l’exceptionnelle ampleur des actes fictifs facturés par le Docteur H. à l’assurance maladie et qui traduit de sa part un manque d’honnêteté profondément déshonorant et aggravé, en outre, par le fait que ces faits ont concerné majoritairement des patients bénéficiaires de la CMUc et que l’intéressé a ainsi profité, pour effectuer ses agissements équivalents à des vols, des facilités de remboursement offerts par un dispositif spécial de solidarité nationale, les premiers juges n’ont pas fait une appréciation exagérée des faits qui leur étaient soumis en infligeant au requérant la sanction contestée ; qu’il y a lieu, dès lors, de rejeter la requête ;
DECIDE :
Article 1er :

La requête Docteur F.H. est rejetée.

Article 2 :

La fraction qui n’est pas assortie du sursis de la sanction de l’interdiction d’exercer la profession de chirurgien-dentiste pendant dix-huit mois dont six mois avec sursis qui a été infligée au Docteur F.H. par la décision, en date du 4 mai 2015, de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de la région Basse-Normandie sera exécutée pendant la période du 1er mars 2017 au 28 février 2018.

Article 3 :

La présente décision sera notifiée :
- au Docteur F.H., chirurgien-dentiste,
- à Maître Philippe Rudyard BESSIS, avocat,
- au Médecin-conseil, chef de service de l’échelon local du Calvados,
- au conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes du Calvados,
- à la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre de la région Basse-Normandie, 3.

CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS
- au au au au conseil national de l’Ordre, ministre chargé de la santé, procureur de la République près le tribunal de grande instance de Caen, directeur de l’ARS de la région Basse-Normandie.

Délibéré en son audience du 1er décembre 2016, où siégeaient Monsieur de VULPILLIÈRES, conseiller d’Etat honoraire, président, les Docteurs BIAS, JOURDES, MIRISCH, MOLLA, NAUDIN et
VOLPELIÈRE, chirurgiens-dentistes, membres de la chambre disciplinaire nationale.
Décision rendue publique par affichage le 29 décembre 2016.
LE CONSEILLER D’ETAT (H)
Président de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes
LA GREFFIERE de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes
J.F. de VULPILLIERES
C. BOURGOUIN
La République mande et ordonne au ministre chargé de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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