Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 13 décembre 2011, n° 0802133

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Cergy-Pontoise, 13 déc. 2011, n° 0802133
Juridiction : Tribunal administratif de Cergy-Pontoise
Numéro : 0802133

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE CERGY-PONTOISE

N°0802133

___________

SOCIETE EMERSON EUROPE SA

___________

M. Charzat

Rapporteur

___________

Mme Marienstras

Rapporteur public

___________

Audience du 23 novembre 2011

Lecture du 13 décembre 2011

___________

lm

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise

(8e chambre)

PCJA : 19-04-02-01-04-082

Code Lebon : C

Vu la requête, enregistrée le 12 février 2008 au Tribunal administratif de Versailles, puis enregistrée le 25 février 2008 au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur ordonnance de renvoi du Tribunal administratif de Versailles du 14 février 2008, présentée pour la SOCIETE EMERSON EUROPE SA, dont le siège est sis XXX à XXX, par Me Rebilly, avocat ;

La SOCIETE EMERSON EUROPE SA demande au tribunal de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001 et 2002 et de mettre à la charge de l’Etat le paiement de la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— le montant des sommes mises en recouvrement au titre de l’exercice clos le 31 mars 2002 comporte une erreur, l’imposition supplémentaire de 38 euros étant injustifiée ;

— compte tenu de difficultés rencontrées par sa filiale italienne Crouzet Spa, et dans l’optique d’un désengagement, la société Emerson Appliance Controls SAS lui a consenti un prêt de 7 402 893 euros afin de lui permettre de se restructurer ; qu’à la suite, le 17 janvier 2001, la société Emerson Appliance Controls SAS a cédé l’intégralité de sa participation dans la société Crouzet Spa ainsi que le prêt consenti à cette dernière à la société italienne BVM components Srl pour 51 645 euros ; que l’opération s’est traduite par une perte sur la cession des actions de la société Crouzet Spa et de la créance détenue par la société Emerson Appliance Controls SAS ; que la société Emerson Appliance Controls SAS n’a pas détenu une créance de 7 402 893 euros à l’encontre de la société BVM components Srl et que, dès lors, il n’y a pas abandon de prêt de sa part au profit de BVM components Srl ; que l’opération est conforme aux pratiques de cession d’entreprise et ne constitue pas un acte anormal de gestion ; que la société Emerson Appliance Controls SAS était fondée à déduire de son résultat imposable la perte enregistrée sur la cession de sa filiale italienne Crouzet Spa et la créance qu’elle détenait sur cette dernière aux sociétés tierces italiennes ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2009, présenté par le chef des services fiscaux de la direction du contrôle fiscal Rhône-Alpes-Bourgogne, qui conclut au non lieu à statuer à hauteur du dégrèvement de 38 euros et au rejet du surplus de la requête ;

Il fait valoir que :

— que si la volonté de la société Emerson Appliance Controls de se désengager de sa filiale peut expliquer la sous-valorisation des titres de la filiale lors de sa cession, au demeurant non remis en cause par le service, elle ne justifie pas l’abandon sans contrepartie du prêt de 7 402 893 euros ; qu’en conséquence, la déduction fiscale de la perte résultant de cet abandon a été refusée au motif que la société Emerson Appliance Controls SAS n’a pu justifier de son intérêt dans le transfert sans contrepartie du prêt ; qu’un tel abandon de créance constitue un acte anormal de gestion ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 juillet 2009, présenté pour la SOCIETE EMERSON EUROPE SA, qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

— l’abandon de créance accordé par une mère à une date rapprochée de la cession de sa participation de sa filiale revêt le caractère de charge déductible lorsque la cession est réalisée au juste prix ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 novembre 2011, présenté par le chef des services fiscaux de la direction du contrôle fiscal Rhône-Alpes-Bourgogne, qui confirme ses conclusions tendant au rejet de la requête et pour les mêmes motifs ;

Vu la décision implicite par laquelle le délégué chargé de la direction des grandes entreprises a statué sur la réclamation préalable de la SOCIETE EMERSON EUROPE SA ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l’audience devant ces juridictions ;

Vu l’arrêté du 18 mars 2009 du vice-président du Conseil d’Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 23 novembre 2011 :

— le rapport de M. Charzat, rapporteur ;

— les observations de Me Palos, avocat de la SOCIETE EMERSON EUROPE SA ;

— et les conclusions de Mme Marienstras, rapporteur public ;

Considérant que la SOCIETE EMERSON EUROPE SA est une société mère d’un groupe fiscalement intégré au sens des articles 223 A et suivants du code général des impôts ; que sa filiale, la société Emerson Appliance Controls SAS a fait l’objet d’un contrôle fiscal ; qu’elle conteste la réintégration opérée par l’administration dans les résultats imposables de la société Emerson Appliance Controls SAS au titre de l’exercice clos en 2001 d’un montant de 7 402 893 euros et à une erreur portant sur le montant mis en recouvrement au titre de l’exercice clos en 2002 ;

Sur l’étendue du litige :

Considérant que par décision du 19 mai 2009, postérieure à l’introduction de la requête enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 25 février 2008, le chef des services fiscaux de la direction de contrôle fiscal Rhône-Alpes-Bourgogne a prononcé le dégrèvement de 38 euros de l’impôt sur les sociétés au titre de l’exercice clos en 2002 correspondant à une rectification concernant les provisions ; qu’il n’y a pas lieu à statuer sur les conclusions de la requête à hauteur de ce montant ;

Sur le bien fondé des impositions restant en litige :

Considérant qu’aux termes de l’article 39 du code général des impôts : « 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d’œuvre, le loyer des immeubles dont l’entreprise est locataire (…) » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la société Emerson Appliance Controls SAS, anciennement dénommée Crouzet Appliance Controls, a consenti à la fin de l’année 2000 à sa filiale italienne dont elle détenait 100 % des actions, la société Crouzet Spa, un prêt de 14 334 000 000 lires italiennes soit 7 402 893 euros ; qu’elle a cédé le 17 janvier 2001 la société Crouzet Spa à la société italienne BVM components Srl et qu’elle a ensuite déduit de son résultat imposable au titre de l’exercice 2001 la perte enregistrée sur la cession de sa filiale italienne Crouzet Spa et de la créance qu’elle détenait sur cette dernière ; que l’administration fiscale a considéré la déduction du prêt consenti comme un acte étranger à une gestion normale et en a réintégré le montant du prêt dans les résultats de l’exercice 2001 de la société Emerson Appliance Controls SAS ;

Considérant qu’une société peut, sans commettre d’acte anormal de gestion, prévenir les conséquences de graves difficultés financières d’une filiale en lui consentant une aide, alors même qu’elle n’entretiendrait avec elle aucune relation commerciale ; que, toutefois, sauf preuve contraire, cette aide doit être réputée augmenter la valeur de la participation détenue dans le capital de la filiale ;

Considérant que pour apporter la preuve que la valeur de sa participation dans le capital de sa filiale n’a pas augmenté, il appartient à la société qui consent une aide financière à sa filiale d’apporter tous les éléments de nature à justifier que la situation nette réelle de sa filiale est négative ; que l’administration fiscale est en droit, sans méconnaître l’autonomie juridique des personnes morales, de remettre en cause les écritures de la filiale ayant un effet sur la détermination de sa situation nette réelle ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’un accord a été conclu directement le 21 décembre 2000 entre la société Emerson Electronic Co et la société italienne BVM components Srl ; que cet accord prévoyait que la société Emerson Appliance Controls SAS devait consentir un prêt de 7 402 893 euros et céder ce dernier ainsi que 100 0000 actions de Crouzet Spa pour 100 000 000 lires, soit 51 645 euros, à la date du 12 janvier 2001 ; que le 17 janvier 2001, la société Emerson Appliances Controls a ainsi cédé et transféré le prêt consenti à Crouzet Spa à la société BVM Components Srl ; qu’ainsi, l’abandon de cette créance faisait partie d’un accord passé avec le cessionnaire repreneur auquel elle a cédé les titres de la société Crouzet Spa ; que la société Emerson Appliance Controls SAS n’a pu justifier son l’intérêt dans l’abandon et le transfert sans contrepartie du prêt de 7 402 893 euros ; qu’au demeurant, il ne résulte pas de l’instruction que la société Crouzet Spa n’ait pas été valorisée à hauteur de l’abandon de créances en cause ; que dès lors, l’administration était fondée à refuser la déduction fiscale de cet abandon de créances ; que, par suite, c’est à bon droit que le service, qui n’a pas fondé le redressement sur la théorie de l’abus de droit, a réintégré le montant du prêt déduit dans le résultat imposable de la société au titre de l’exercice clos en 2001 ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme demandée par la SOCIETE EMERSON EUROPE SA en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SOCIETE EMERSON EUROPE SA à hauteur d’un montant de 38 euros, dégrevé en cours d’instance, au titre de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés concernant l’exercice clos en 2002.

Article 2 : Le surplus de la requête de la SOCIETE EMERSON EUROPE SA est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la SOCIETE EMERSON EUROPE SA et au délégué chargé de la direction des grandes entreprises.

Délibéré après l’audience du 23 novembre 2011, à laquelle siégeaient :

M. Marcovici, président,

M. Charzat, premier conseiller,

Mme Fontaine, conseiller,

Lu en audience publique le 13 décembre 2011.

Le rapporteur, Le président,

signé signé

J.M. CHARZAT L. MARCOVICI

Le greffier,

signé

A.MOULARD

La République mande et ordonne au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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