Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, 1ère chambre, 1er décembre 2022, n° 2200702

  • Droit d'asile·
  • Séjour des étrangers·
  • Immigration·
  • Arménie·
  • Vie privée·
  • Pays·
  • Justice administrative·
  • Carte de séjour·
  • Système de santé·
  • Médecin

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Châlons-en-Champagne, 1re ch., 1er déc. 2022, n° 2200702
Juridiction : Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne
Numéro : 2200702
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 25 mars 2022 et 12 septembre 2022, M. A B, représenté par Me Bricout, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 20 décembre 2021 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

— l’arrêté a été pris à l’issue d’une procédure irrégulière dès lors que le préfet n’a pas recueilli l’avis du médecin inspecteur de santé publique ;

— l’arrêté méconnaît l’article L. 425-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— l’arrêté méconnaît les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Le préfet de la Marne a produit une pièce, enregistrée le 21 septembre 2022.

M. B a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par ordonnance de la présidente de la cour administrative d’appel de Nancy du 24 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de Mme Mach, présidente, a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B, ressortissant arménien né en 1978, déclare être entré en France le 22 mars 2014. L’intéressé a bénéficié d’une autorisation provisoire de séjour et de titres de séjour en qualité d’étranger malade, régulièrement renouvelés jusqu’au 28 mai 2021. M. B a sollicité le 11 juin 2021 le renouvellement de son titre de séjour à raison de son état de santé. Par un arrêté du 20 décembre 2021, dont M. B demande l’annulation, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. Aux termes de l’article L. 425-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger, résidant habituellement en France, dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d’un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « d’une durée d’un an. La condition prévue à l’article L. 412-1 n’est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l’autorité administrative après avis d’un collège de médecins du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat. () ».

3. D’une part, il ressort des pièces du dossier que l’arrêté contesté a été pris après avis du collège des médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration en date du 3 novembre 2021. Par suite, le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure doit être écarté.

4. D’autre part, il ressort des pièces du dossier que M. B souffre de la maladie de Paget associée à une dystrophie osseuse d’origine rénale dans le cadre d’une insuffisance rénale chronique avec transplantation rénale en 2017 ainsi que d’une cardiopathie hypertensive. Pour refuser à M. B le titre de séjour sollicité, le préfet de la Marne s’est notamment fondé sur l’avis du collège des médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration en date du 3 novembre 2021, lequel indique que l’état de santé de l’intéressé nécessite une prise en charge dont le défaut peut entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité et que, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d’un traitement approprié. Le requérant soutient que son état de santé n’a pas évolué depuis l’obtention des titres de séjour précédents et qu’il est indispensable de poursuivre en France les soins dont il bénéficie, dès lors que les conditions de prise en charge de ses pathologies en Arménie sont insuffisantes. Toutefois, les certificats médicaux qu’il produit se bornent à énoncer les pathologies dont il souffre sans préciser le traitement dont il bénéficie et sans se prononcer sur les possibilités et conditions de prise en charge médicale en Arménie et le courrier du 17 janvier 2022, qui a été établi par un membre de la CIMADE, se borne à faire état de ce que l’intéressé est originaire d’une région défavorisée en offre de soins. Par suite, les éléments qu’il fournit ne sont pas de nature à remettre en cause l’appréciation du collège des médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration et du préfet de la Marne. Dans ces conditions, M. B n’est pas fondé à soutenir que le préfet de la Marne a méconnu les dispositions de l’article L. 425-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

5. Aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui ». Aux termes de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger qui n’entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « d’une durée d’un an, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d’existence de l’étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d’origine ».

6. M. B invoque sa résidence en France depuis 2014 et se prévaut de la présence sur le territoire français de sa mère, de sa concubine ainsi que des trois enfants de cette dernière, nés d’une précédente relation. Il fait en outre valoir que son absence d’intégration professionnelle ne saurait lui-être reproché eu égard à sa pathologie et à sa qualité de personne souffrant de handicap. Toutefois, l’intéressé ne conteste pas que sa mère et sa concubine, qui sont de nationalité arménienne, sont en situation irrégulière sur le territoire français et n’apporte aucun élément sur la durée de son concubinage. L’intéressé n’allègue ni n’établit qu’il ne pourrait reconstituer sa cellule familiale en Arménie où il a vécu jusqu’à l’âge de 36 ans. Dans ces conditions, et en dépit de la durée de son séjour en France, l’arrêté contesté n’a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d’annulation présentées par M. B doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par le conseil de M. B au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A B, à Me Bricout et au préfet de la Marne.

Délibéré après l’audience du 17 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

— Mme Mach, présidente,

— Mme Castellani, première conseillère,

— M. Gauthier-Ameil, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2022.

L’assesseure la plus ancienne

dans l’ordre du tableau,

Signé

A-C CASTELLANILa présidente-rapporteure,

Signé

A-S MACH

La greffière,

Signé

A. DEFORGE

No 220070

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Extraits similaires à la sélection
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, 1ère chambre, 1er décembre 2022, n° 2200702