Tribunal administratif de Grenoble, 31 décembre 2020, n° 2001860

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Chronologie de l’affaire

Commentaires7

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blog.landot-avocats.net · 1er juin 2021

Le Conseil constitutionnel puis le Conseil d'Etat ont donné un mode d'emploi sur les cas tout à fait exceptionnels où la baisse de la participation pourrait être, à elle seule, un vice altérant la sincérité du scrutin : Un TA au moins avait plus ou moins anticipé ces formulations. Voir : Or, à l'occasion de deux jugements, antérieurs à cette décision du Conseil d'Etat mais diffusés après (😉), le TA de Nantes avait appliqué (anticipé sur ?) le mode d'emploi du Conseil d'Etat (qui lui même reprenait en gros la trame du conseil constitutionnel quelques jours avant). Jusqu'à présent, …

 

blog.landot-avocats.net · 23 mars 2021

Le Conseil constitutionnel avait estimé que l'épidémie de covid-19, avec ses conséquences en termes de faible participation au premier tour des municipales, n'entraînait pas par principe l'annulation de ces élections. Mais il avait sur ce point glissé une mention novatrice : « Il appartiendra, le cas échéant, au juge de l'élection, saisi d'un tel grief, d'apprécier si le niveau de l'abstention a pu ou non altérer, dans les circonstances de l'espèce, la sincérité du scrutin.» (C. const., décisions n°2020-849 et n° 2020-850 QPC du 17 juin 2020). Voir (pour une analyse plus large de ces …

 

Itinéraires Avocats · 7 janvier 2021

Par un jugement en date du 31 décembre 2020, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé les opérations électorales de la Commune d'Annemasse en raison du très faible écart de voix ayant permis l'obtention de la majorité absolue au 1er tour (1 voix) et de l'importance de l'abstention constatée au 1er tour des élections, lequel s'est déroulée le 15 mars 2020, en pleine période de crise sanitaire liée au Covid 19. TA Grenoble, 31 décembre 2020, n°2001860 A l'issue des opérations électorales organisées, le 15 mars 2020, dans la commune d'Annemasse (Haute-Savoie), dont la population …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Grenoble, 31 déc. 2020, n° 2001860
Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
Numéro : 2001860

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE GRENOBLE

N° 2001860 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________

[…]

ET COMMUNAUTAIRES AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS D’ANNEMASSE

___________
Mme Nadia Bardad Le tribunal administratif de Grenoble Rapporteur

(7ème chambre) ___________
M. Nathan Villard Rapporteur public ___________

Audience du 18 décembre 2020 Décision du 31 décembre 2020 ___________ 28-04-05 C

Vu la procédure suivante :

Par une protestation enregistrée le 20 mars 2020, M. X… Z…, représenté par Me AI…, demande au tribunal :

1°) à titre principal, d’annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune d’Annemasse ;

2°) à titre subsidiaire, de rectifier le résultat du premier tour des élections en prenant en considération les bulletins annulés à tort ainsi que la différence entre les émargements et les bulletins de vote du bureau n° 1.

Il soutient que :

- la protestation est recevable ;

- le taux d’abstention résultant du contexte sanitaire lié au Covid-19 a altéré la sincérité de l’élection ;

- les dispositions de l’article L. 52-1 du code électoral ont été méconnues dans la mesure où les élus du bureau communautaire d’Annemasse Agglo ont publié une déclaration appelant à voter pour les élus sortants ;

- cette publication constitue un financement prohibé au sens de l’article L. 52-8 du code électoral ;

- dans le bureau de vote n° 1, le nombre d’émargements est différent du nombre de votants ;



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- le décompte des suffrages est sujet à contestation dès lors que le nombre d’émargement diffère du nombre de votants pour le bureau de vote n° 1, que plus de trente bulletins de la liste « Génération Annemasse » ont été déclarés nuls au motif que les électeurs ont utilisé la profession de foi au lieu du bulletin de vote et qu’un bulletin présentant une trace de vernis a été déclaré nul.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 avril 2020, M. Y… A…, représentés par Me AQ…, conclut au rejet de la protestation et à ce qu’une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. Z… en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les griefs soulevés ne sont pas fondés.

Le préfet de la Haute-Savoie a présenté des observations, par un mémoire enregistré le 14 avril 2020.

Par une ordonnance du 17 novembre 2020, la clôture de l’instruction a été fixée au 1er décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code électoral ;

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;

- le décret n° 2020-242 du 13 mars 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- l’arrêté du 13 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de Mme Bardad, premier conseiller,

- les conclusions de M. Villard, rapporteur public,

- les observations de M. Z…,

- et les observations de Me AQ…, représentant M. A….

Considérant ce qui suit :

1. A l’issue des opérations électorales organisées, le 15 mars 2020, dans la commune d’Annemasse (Haute-Savoie) pour la désignation des membres du conseil municipal et du conseil communautaire, la liste « Annemasse ville d’avenirs », conduite par M. Y… A…, a obtenu 2 087 voix, soit 50,02 % des suffrages exprimés, et 30 sièges au conseil municipal et 15 sièges au conseil communautaire, tandis que la liste « Générations Annemasse », conduite par M. X… Z…, a obtenu 1 682 voix, soit 40,31 % des suffrages exprimés, et 8 sièges au conseil municipal et 4 sièges au conseil communautaire. Enfin, la liste « Annemasse renouveau », conduite par M. K… BW…, a obtenu 403 voix, soit 9,65 % des suffrages exprimés, et 1 siège au conseil municipal et 1 siège au conseil communautaire. M. Z… demande au tribunal de prononcer l’annulation de ces opérations électorales.



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Sur les conclusions aux fins d’annulation des opérations électorales :

2. L’émergence d’un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d’urgence de santé publique de portée internationale par l’Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre des solidarités et de la santé à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Dans ce contexte, le Premier ministre a adressé à l’ensemble des maires le 7 mars 2020 une lettre présentant les mesures destinées à assurer le bon déroulement des élections municipales et communautaires prévues les 15 et 22 mars 2020. Ces mesures ont été précisées par une circulaire du ministre de l’intérieur du 9 mars 2020 relative à l’organisation des élections municipales des 15 et 22 mars 2020 en situation d’épidémie de coronavirus covid-19, formulant des recommandations relatives à l’aménagement des bureaux de vote et au respect des consignes sanitaires, et par une instruction de ce ministre, du même jour, destinée à faciliter l’exercice du droit de vote par procuration. Après consultation par le Gouvernement du conseil scientifique mis en place pour lui donner les informations scientifiques utiles à l’adoption des mesures nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19, les 12 et 14 mars 2020, le premier tour des élections municipales a eu lieu comme prévu le 15 mars 2020. A l’issue du scrutin, les conseils municipaux ont été intégralement renouvelés dans 30 143 communes ou secteurs. Le taux d’abstention a atteint 55,34 % des inscrits, contre 36,45 % au premier tour des élections municipales de 2014.

3. Au vu de la situation sanitaire, l’article 19 de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 a reporté le second tour des élections, initialement fixé au 22 mars 2020, au plus tard en juin 2020 et prévu que : « Dans tous les cas, l’élection régulière des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers d’arrondissement, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 reste acquise, conformément à l’article 3 de la Constitution ». Ainsi que le Conseil constitutionnel l’a jugé dans sa décision n° 2020-849 QPC du 17 juin 2020, ces dispositions n’ont ni pour objet ni pour effet de valider rétroactivement les opérations électorales du premier tour ayant donné lieu à l’attribution de sièges et ne font ainsi pas obstacle à ce que ces opérations soient contestées devant le juge de l’élection.

4. Aux termes de l’article L. 262 du code électoral, applicable aux communes de mille habitants et plus : « Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal à la moitié du nombre des sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l’entier supérieur lorsqu’il y a plus de quatre sièges à pourvoir et à l’entier inférieur lorsqu’il y a moins de quatre sièges à pourvoir. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l’application des dispositions du troisième alinéa ci-après. / Si aucune liste n’a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un deuxième tour (…) ». Aux termes de l’article L. 273-8 du même code : « Les sièges de conseiller communautaire sont répartis entre les listes par application aux suffrages exprimés lors de cette élection des règles prévues à l’article L. 262. (…) ».

5. Ni par ces dispositions, ni par celles de la loi du 23 mars 2020 le législateur n’a subordonné à un taux de participation minimal la répartition des sièges au conseil municipal à l’issue du premier tour de scrutin dans les communes de mille habitants et plus, lorsqu’une liste a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés. Le niveau de l’abstention n’est ainsi, par lui-



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même, pas de nature à remettre en cause les résultats du scrutin, à moins qu’il n’ait altéré, dans les circonstances de l’espèce, sa sincérité.

6. Il résulte de l’instruction que le taux d’abstention dans la commune d’Annemasse, lors des opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020, s’est élevé à 72,21 %. Ce taux d’abstention est nettement supérieur à la moyenne nationale de 55,34 % enregistrée pour ce scrutin, ainsi qu’à celui des élections municipales de l’année 2014 qui était de 56,21 %. Ainsi, sur 15 527 habitants inscrits sur les listes électorales, 4 315 électeurs se sont déplacés pour participer au vote. Par ailleurs, la liste « Annemasse Ville d’Avenirs », conduite par M. A…, n’a obtenu la majorité absolue qu’avec une seule voix. Ainsi, dans les circonstances particulières de l’espèce, l’importance de l’abstention constatée ne peut pas être regardée comme ayant été sans incidence sur la sincérité du scrutin compte tenu du très faible écart de voix ayant permis l’obtention de la majorité absolue. Par suite, elle est de nature à justifier l’annulation des élections qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune d’Annemasse, quel qu’ait pu être par ailleurs l’écart ayant séparé les listes en présence à l’issue du premier tour.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, que les opérations électorales de la commune d’Annemasse du 15 mars 2020 doivent être annulées.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. Z…, qui n’est pas la partie perdante, la somme que M. A… demande au titre des frais qu’il a exposés, non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les opérations électorales du 15 mars 2020 en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires de la commune d’Annemasse sont annulées.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Me AI…, à Me AQ…, à Mme B… AF…, à M. C… AR…, à Mme D… BI…, à M. E… Q…, à Mme F… AZ…, à M. P… AD…, à Mme C… A…, à M. G… BV…, à Mme H… T…, à M. H… O…, à Mme I… J…, à M. J… BL…, à Mme V… M…, à M. B… BQ…, à Mme K… BA…, à M. Y… BK…, à Mme G… BP…, à M. L… BB…, à Mme I… D…, à M. M… BG…, à Mme K… AA…, à M. Y… BR…, à Mme N… BN…, à M. O… AW…, à Mme P… F…, à M. E… BD…, à Mme Q… AH…, à M. R… S…, à Mme U… AU…, à Mme S… N…, à M. Z… Y…, à Mme T… X…, à M. U… AS…, à Mme V…, à M. W… BS…, à Mme L… R…, à M. K… BW… et au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l’audience du 18 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. L’Hôte, président, Mme Bardad, premier conseiller,



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Mme Brenner-Adanlété, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2020.

Le rapporteur, Le président,

N. BARDAD V. L’HÔTE

Le greffier,

T. RONDAGS

La République mande et ordonne le préfet de la Haute-Savoie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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