Tribunal administratif de Grenoble, 2ème chambre, 31 décembre 2023, n° 2202707

  • Immigration·
  • Droit d'asile·
  • Séjour des étrangers·
  • Justice administrative·
  • Demande·
  • Allemagne·
  • Bénéfice·
  • Responsable·
  • Annulation·
  • Commissaire de justice

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Grenoble, 2e ch., 31 déc. 2023, n° 2202707
Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
Numéro : 2202707
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 9 janvier 2024

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 2 mai 2022, M. C A B, représenté par Me Mathis, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 6 janvier 2022 par lequel l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) a suspendu les conditions matérielles d’accueil dont il bénéficiait ;

2°) d’enjoindre à l’Office français de l’immigration et de l’intégration de rétablir M. A B dans ses droits aux conditions matérielles d’accueil à compter du mois de janvier 2022, dans un délai de 48 heures à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Office français de l’immigration et de l’intégration au profit de son conseil une somme de 1 200 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A B soutient que la décision :

— est insuffisamment motivée ;

— est illégale faute pour l’OFII d’avoir procédé à l’entretien de vulnérabilité préalable ;

— méconnaît l’article L.551-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 octobre 2023, l’Office français de l’immigration et de l’intégration conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A B ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 13 octobre 2023, la clôture d’instruction a été fixée au 30 novembre 2023 à 12 heures.

M. A B a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la directive 2013/33/UE du 26 juin 2013,

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,

— le code des relations entre le public et l’administration,

— le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de M. Wyss a été entendu au cours de l’audience, les parties n’étant ni présentes ni représentées.

Considérant ce qui suit :

1. M. A B, ressortissant somalien né le 15 mars 1991, a présenté une demande d’asile en France le 2 mars 2020. Par un arrêté du 10 juin 2020, le préfet de police de Paris a ordonné le transfert de M. A B vers l’Allemagne, pays responsable de sa demande d’asile, décision dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Paris. Le 5 août 2020, M. A B a été déclaré en fuite en France. Le 16 décembre 2021, M. A B s’est présenté à nouveau à un guichet unique des demandeurs d’asile en France et a déposé une nouvelle demande d’asile auprès de la préfecture de l’Isère. Le même jour, M. A B accepte l’offre de prise en charge de l’OFII. Par arrêté du 6 janvier 2022 dont il demande l’annulation, l’Office lui a suspendu le bénéfice des conditions matérielles d’accueil.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. En premier lieu, la décision du 6 janvier 2022 mentionne les éléments de fait propres à la situation de M. A B et les considérations de droit sur lesquels elle se fonde. Elle précise notamment que l’intéressé n’a pas respecté les exigences des autorités en charge de l’asile en " présentant une nouvelle demande d’asile en France après avoir été transféré vers l’Etat membre responsable de l’instruction de [sa] demande " et qu’avant de prendre cette décision, l’OFII a examiné les besoins de l’intéressé et sa situation personnelle et familiale. La décision attaquée comporte ainsi de manière suffisamment précise et circonstanciée les considérations de droit, quand bien même celles-ci seraient erronées, et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation doit être écarté.

3. M. A B a bénéficié le 16 décembre 2021 lors de l’enregistrement de sa seconde demande d’asile au guichet unique des demandeurs d’asile d’un entretien au cours duquel sa vulnérabilité a été examinée, sans au demeurant qu’aucun élément particulier de vulnérabilité ne soit détecté ou signalé par l’intéressé. Le moyen tiré de ce que M. A B n’aurait pas bénéficié d’un entretien permettant d’évaluer la vulnérabilité doit par suite être écarté comme manquant en fait.

4. Aux termes de l’article L.551-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : " Il peut être mis fin, partiellement ou totalement, aux conditions matérielles d’accueil dont bénéficie le demandeur dans les cas suivants :/ () / 3°Il ne respecte pas les exigences des autorités chargées de l’asile, notamment en se rendant aux entretiens, en se présentant aux autorités et en fournissant les informations utiles afin de faciliter l’instruction des demandes ; ".

5. Comme il a été dit au point 1, par un arrêté du 10 juin 2020, le préfet de police de Paris a ordonné le transfert de M. A B vers l’Allemagne, pays responsable de l’examen de sa demande d’asile, qui a donné son accord pour sa réadmission de le 9 mars 2020. La légalité de cet arrêté de transfert a été confirmée par le tribunal administratif de Paris le 3 juillet 2020.

6. Il résulte des dispositions de l’article L. 551-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ainsi que de celles de la directive du Conseil du 27 janvier 2003 relative à des normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile dans les Etats membres qu’elles visent à transposer et qui ont notamment été interprétées par la décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 27 septembre 2012 CIMADE et GISTI, aff. C-179/11, que, lorsqu’un demandeur d’asile a été transféré vers l’Etat responsable de l’examen de sa demande, c’est à ce dernier de lui assurer les conditions matérielles d’accueil. En cas de retour de l’intéressé en France sans que la demande n’ait été examinée, et de présentation d’une nouvelle demande, l’OFII peut refuser le bénéfice de ces droits, sauf si les autorités chargées de cette nouvelle demande décident de l’examiner ou si, compte tenu du refus de l’Etat responsable d’examiner la demande précédente, il leur revient de le faire.

7. En l’espèce, il est constant que M. A B a sollicité le bénéfice de l’asile en France le 2 mars 2020, en acceptant le même jour le bénéfice des conditions matérielles d’accueil du demandeur d’asile. Les autorités allemandes ont constaté la venue en Allemagne de M. A B et 15 septembre 2020 et en ont informé la France. Revenu en France à une date indéterminée, il a de nouveau présenté une demande d’asile en France le 16 décembre 2021. M. A B soutient que les autorités allemandes ont rejeté sa demande d’asile. Il n’apporte toutefois à l’appui de cette allégation aucun élément sérieux et suffisamment circonstancié susceptible d’établir la réalité de ce rejet. Dans ces conditions, l’OFII pouvait, à la date du 6 janvier 2022, lui refuser le bénéfice des conditions matérielles d’accueil sur le fondement de l’article L. 551-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sans commettre d’erreur de droit ou d’erreur manifeste d’appréciation de sa situation.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A B n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision du 6 janvier 2022. Par suite, les conclusions à fin d’annulation doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d’injonction et d’astreinte et celles tendant à l’application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A B, à Me Mathis et à l’Office français de l’immigration et de l’intégration.

Délibéré après l’audience du 18 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Wyss, président,

Mme Letellier, première conseillère,

Mme Barriol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2023.

Le président rapporteur,

J. P. WYSS

L’assesseure la plus ancienne dans l’ordre du tableau

C. LETELLIER

La greffière,

C. JASSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Grenoble, 2ème chambre, 31 décembre 2023, n° 2202707