Tribunal administratif de Lille, 23 février 2023, n° 2301463

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Lille, 23 févr. 2023, n° 2301463
Juridiction : Tribunal administratif de Lille
Numéro : 2301463
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 24 février 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2023, Mme A C et la section française de l’Observatoire international des prisons (OIP-SF), représentées par Me Quinquis, demandent au juge des référés :

1°) d’enjoindre à l’administration pénitentiaire de prendre toute mesure pour garantir et assurer la sécurité et l’intégrité physique de Mme A C, en particulier en faisant cesser les fouilles, les pressions et les actes d’intimidation et de punition dont elle fait l’objet ;

2°) d’assurer la libre disposition, par Mme C, de la revue Dedans-Dehors ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

— la section française de l’Observatoire international des prisons (SF-OIP) a intérêt à agir eu égard à son objet ;

— par son comportement, l’administration pénitentiaire porte atteinte à la liberté de communication des idées et opinions en décourageant les personnes détenues de contacter et de solliciter la section française de l’OIP ;

— les fouilles irrégulières, les pressions, les actes d’intimidation et de punition dont Mme C fait l’objet depuis plusieurs semaines portent gravement atteinte à son droit de ne pas subir de traitements inhumains et dégradants et à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

— l’urgence est caractérisée par la gravité des atteintes en cause et par la circonstance que Mme C présente une vulnérabilité particulière rendant encore plus insupportable l’ensemble des pressions, actes d’intimidation et de punition exercés sur elle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 février 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

— la situation de la requérante n’est pas constitutive d’une situation d’urgence nécessitant l’intervention du juge des référés dans un délai de quarante-huit heures ;

— ses conditions de détention au sein du centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin ne sont pas constitutives d’une atteinte portée à sa dignité humaine ni à son droit de correspondance et à sa liberté d’opinion.

Le président du tribunal a désigné M. Fabre, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code pénitentiaire ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique du 17 février 2023 à 14 heures 30:

— le rapport de M. Fabre, juge des référés ;

— les observations de Me Mycinski, substituant Me Quinquis représentant Mme C et la SF-OIP et celles de M. B, représentant le ministre de la justice.

Après avoir prononcé, à l’issue de l’audience, la clôture de l’instruction.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ».

2. Mme A C est incarcérée au centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin depuis le 3 janvier 2022. Il résulte de l’instruction que le chef d’établissement a autorisé Mme C à recevoir, en détention, la revue « Dedans-Dehors » éditée par la section française de l’Observatoire International des Prisons (SF-OIP), qui lui a été transmise par le vaguemestre et il n’est pas contesté par la requérante que toute personne détenue, dans n’importe quel établissement pénitentiaire, y compris au centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin, peut s’abonner, gratuitement si besoin, à cette revue ou recevoir un numéro en particulier. Si l’administration pénitentiaire ne conteste pas que des agents entrant dans sa cellule ont pris la revue pour aller interroger l’encadrement, il n’est pas plus contesté que cette revue lui a été très rapidement rendue après explications par l’officier. Il n’est ainsi pas établi que cette revue lui aurait été confisquée plusieurs jours sans motifs. Il ne résulte pas plus de l’instruction que la détention, par l’intéressée, de cette revue, aurait entraîné des comportements inadéquats de la part de l’établissement pénitentiaire. Au vu des seules pièces produites, Mme C a subi deux fouilles intégrales en 2022, les 4 avril 2022 et 18 juin 2022, sans aucun lien allégué avec la possession de cette revue et, en 2023, deux fouilles intégrales, les 6 janvier 2023 et 27 janvier 2023, sans qu’aucun lien, là encore, ne puisse être établi avec la détention de cette revue, Mme C ayant reçu cette revue le 17 janvier 2023. Si Mme C fait également valoir qu’elle a été traitée sans ménagement à l’occasion, notamment, d’une fouille à nue le 22 janvier 2023 alors qu’elle avait fait une tentative de suicide le 19 janvier 2023 et avait dû être hospitalisée et subir une intervention chirurgicale, aucun de ces faits allégués n’est confirmée par les pièces produites, alors que le ministre de la justice fait valoir qu’il n’a aucune trace d’une tentative de suicide le 19 janvier 2023, d’une hospitalisation, d’une intervention chirurgicale et d’une fouille à nue le 22 janvier 2023 concernant l’intéressée. Il n’est également pas plus établi par les pièces du dossier que les fouilles à nue ou les fouilles de cellule de la requérante auraient été réalisées en méconnaissance des dispositions du code pénitentiaire ou encore dans des conditions méconnaissant les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il n’est enfin pas plus établi que l’intéressée aurait été insuffisamment prise en charge médicalement au regard, notamment, de ses problèmes psychiques alors que le ministre fait valoir, sans être contesté, qu’elle est régulièrement vue par l’équipe médicale de l’unité sanitaire et peut demander à rencontrer le médecin si nécessaire.

3. Ainsi, au vu des seules pièces produites et des échanges lors de l’audience publique du 17 févier 2023, il n’est pas établi que les conditions de détention de Mme C au sein du centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin soient constitutives d’une atteinte portée à sa dignité humaine, à son droit de correspondance ou à sa liberté d’opinion. Par suite, les conditions prévues par les dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ne sont pas remplies. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par les requérantes, en ce compris les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de Mme C et de la section française de l’Observatoire international des prisons (SF-OIP) est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A C, à la section française de l’Observatoire international des prisons et au ministre de la justice.

Fait à Lille le 23 février 2023.

Le juge des référés,

signé

X. FABRE La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de justice administrative
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