Tribunal administratif de Limoges, 28 décembre 2017, n° 1501075

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Limoges, 28 déc. 2017, n° 1501075
Juridiction : Tribunal administratif de Limoges
Numéro : 1501075

Texte intégral

if

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE LIMOGES

N° 1501075 ____________________ REPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMUNE DE PELLEVOISIN et autres

_____________________
M. X Y AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Rapporteur

______________________


M. A-B C

Rapporteur public Le Tribunal administratif de Limoges ______________________

( 2ème chambre)

Audience du 14 décembre 2017 Lecture du 28 décembre 2017 ____________________ 29-035 44-02-02-005-02-01 C

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 19 juin 2015, le 11 mars 2016, le 9 juin 2017 et le 4 septembre 2017, la commune de Pellevoisin, l’association « Vivre au boischaut Nord », Mme G… AD…-Q…, M. et Mme L… C…, Mme Z… O…, Mme R… O…, Mme A… X…, M. et Mme Y…, M. H… AB… et Mme E… P…, M. V… AA…, M. J… I…, M. W… B… et Mme N… Z…-B…, M. V… Q…, M. F… M…, M. D… T… et la société Beaulieu International Group, représentés par Me K…, demandent au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 18 décembre 2014 par lequel le préfet de la région Centre a autorisé la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre à exploiter six installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent et un poste de livraison sur le territoire des communes d’Argy et de Sougé (Indre) ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat et de la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête est recevable dès lors que la commune de Pellevoisin, l’association « Vivre au boischaut Nord », la société Beaulieu International Group ainsi que l’ensemble des requérants personnes physiques justifient de leur intérêt à agir pour contester l’arrêté du préfet de la région Centre ;


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- l’arrêté attaqué est entaché d’incompétence dès lors que l’arrêté du 13 juillet 2012 par lequel le préfet de la région Centre a exercé son pouvoir d’évocation en matière d’éolien terrestre est illégal au motif, d’une part, qu’il ne disposait d’aucun motif pour attraire la compétence en matière de délivrance des autorisations d’exploiter relatives aux aérogénérateurs et, d’autre part, qu’il a été pris pour une durée excédant la durée « limitée » mentionnée au quatrième alinéa de l’article 2 du décret du 29 avril 2004 ;

- l’autorisation litigieuse est intervenue au terme d’une procédure irrégulière dès lors, d’une part, que les avis des maires des communes d’Argy et de Sougé, émis en application de l’article R. 512-6 du code de l’environnement, qui ont émis leurs avis que sur habilitation expresse des conseils municipaux, sont entachés d’incompétence négative et, d’autre part, que des conseillers municipaux de Sougé et respectivement propriétaires des parcelles devant accueillir les éoliennes E3, E4 et E5 ont voté en faveur du projet lors de la séance du conseil municipal du 5 décembre 2011 ; que ces irrégularités sont susceptibles d’avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise et a privé les citoyens d’une garantie, celle de voir leurs élus exercer leurs attributions en toute impartialité ; il ne ressort pas davantage de la demande d’autorisation d’exploiter que l’avis du département de l’Indre aurait été sollicité par le pétitionnaire sur les conditions de démantèlement du câble destiné à relier les éoliennes au poste de livraison ; par ailleurs, l’arrêté du 26 août 2011 méconnait les dispositions de l’article R. 553-6 du code de l’environnement en ce qu’il limite à un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs les opérations de démantèlement des câbles et en ce qu’il fixe les conditions techniques de démantèlement alors que l’article R. 553-6 précité, qui renvoi à cet arrêté, limitait son intervention pour fixer les conditions techniques de remise en état du site ;

- le dossier de demande d’autorisation ne comporte pas, en violation des dispositions de l’article R. 512-3 du code de l’environnement, des indications suffisantes sur les capacités financières de l’exploitant ; cette carence du dossier a influencé le sens de la décision et privé le public des éléments nécessaires pour qu’ils puissent évaluer les capacités techniques et financières du pétitionnaire ;

- le dossier de demande d’autorisation est également incomplet dès lors que la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre n’a pas mentionné dans sa demande la nature des garanties financières de démantèlement et que le préfet n’a pas plus indiqué dans l’arrêté quelles seraient les garanties auxquelles l’exploitant devrait avoir recours ; cette insuffisance a privé les citoyens d’une garantie et a été susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision prise ;

- l’arrêté attaqué méconnaît l’article R. 553-6 du code de l’environnement, dès lors que le préfet aurait dû écarter les dispositions illégales de l’arrêté du 26 août 2011, dans leur rédaction issue de l’arrêté du 6 novembre 2014, en ce qu’elles opèrent une distinction entre les différents éléments de l’installation de production d’énergie et n’imposent pas le démantèlement de la totalité du réseau reliant les différentes éoliennes ;

- le nombre des documents mis à la disposition par le pétitionnaire n’a pas permis au public de prendre connaissance correctement du dossier, compte tenu leur nombre trop important, de l’absence ou de la complexité de certains résumés non-techniques et du non-report de l’implantation exacte du projet éolien sur plusieurs cartes figurant dans l’étude d’impact ;

- l’étude d’impact est insuffisante au regard des exigences posées à l’article R. 512-8 du code de l’environnement dès lors que l’étude acoustique n’a pas pris en compte le hameau de Montlevrier situé à environ 670 mètres du parc éolien, et a été réalisée dans des conditions ayant pour effet de minorer l’impact sonore des éoliennes, que l’étude avifaunistique a été réalisée dans des conditions sous-estimant gravement les enjeux en la matière, que l’étude de dangers s’est bornée, en méconnaissance de l’article R. 512-9 du code de l’environnement, à examiner le risque de projection d’une pale dans un rayon de seulement 500 mètres autour des éoliennes, que l’étude paysagère, compte tenu des conditions de sa réalisation, n’a pas permis au service


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instructeur et au public de mesurer correctement les enjeux paysagers du projet, que l’étude floristique est incohérente et incomplète ;

- l’avis d’enquête publique n’a pas été publié dans des conditions conformes aux prescriptions de l’article R. 123-14 du code de l’environnement ; cette irrégularité a privé le public d’une garantie et doit entrainer l’annulation de l’autorisation d’exploiter en litige ;

- le dossier d’enquête publique est irrégulier, dès lors qu’il ne comporte pas les accords du ministre chargé de l’aviation civile et du ministre de la défense, ni les avis des maires des communes d’implantation du projet, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale limitrophes et de la commission départementale de la consommation des espaces agricoles ;

- l’avis de l’autorité environnementale a été rendu par une autorité qui ne disposait pas d’une autonomie effective, en méconnaissance des exigences découlant du 1 de l’article 6 de la directive n°2011/92/UE du 13 décembre 2011 ; cette irrégularité a privé le public de la garantie qui s’attache à l’impartialité de cet avis ;

- l’arrêté attaqué méconnaît l’article R. 553-1 du code de l’environnement, dès lors que le préfet aurait dû écarter les dispositions illégales de l’arrêté du 26 août 2011 et demander à la société pétitionnaire de constituer des garanties financières réellement propres à couvrir les frais de démantèlement et de remise en état ;

- l’arrêté attaqué méconnait les articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l’environnement dès lors que le parc éolien autorisé portera atteinte aux paysage environnant, et notamment au patrimoine historique et architectural local et induira, en outre, une saturation visuelle de l’espace compte tenu de la covisibilité du projet avec d’autres parcs éoliens.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 20 août 2015, le 23 juin 2017 et le 21 juillet 2017, le préfet de la région Centre conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que l’intérêt à agir des requérants et plus particulièrement de la société Beaulieu International Group n’est pas démontré ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par des mémoires, enregistrés le 7 septembre 2015, le 23 septembre 2016, le 21 juillet 2017 et le 19 octobre 2017, la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre conclut au rejet de la requête et à ce que chacun des requérants lui verse la somme de 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, faute pour les requérants personnes physiques et la société Beaulieu International Group de justifier de leur intérêt à agir ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Un mémoire, présenté pour la commune de Pellevoisin et autres, par Me K…, a été enregistré le 4 décembre 2017.

Par ordonnance du 15 septembre 2017, la clôture d’instruction a été fixée au 19 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :


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- la directive 2001/42/CE du Parlement et du Conseil du 27 juin 2001 ;

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l’environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Y,

- les conclusions de M. C, rapporteur public,

- et les observations de Me K…, représentant les requérants, Me S… substituant le cabinet Lpa-Cgr, représentant la centrale éolienne du nord val de l’indre Sarl et Mme U… représentant le préfet de la région Centre.

Une note en délibéré présentée par le préfet de la région Centre, a été enregistrée le 22 décembre 2017.

1. Considérant que la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre a déposé, le 21 décembre 2011, une demande d’autorisation d’exploiter six aérogénérateurs de hauteur totale de 126,25 mètres et un poste de livraison sur le territoire des communes d’Argy et de Sougé (Indre) ; qu’à l’issue de l’enquête publique qui s’est déroulée du 27 mai au 12 juillet 2013, le commissaire enquêteur a émis un avis favorable au projet assorti d’une réserve concernant l’emplacement de l’éolienne « E3 » ; que, par un arrêté du 18 décembre 2014, le préfet de la région Centre a autorisé la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre à exploiter ce parc composé de six éoliennes ; que la commune de Pellevoisin, l’association « Vivre au boischaut Nord », Mme G… AD…-Q…, M. et Mme L… C…, Mme Z… O…, Mme R… O…, Mme A… X…, M. et Mme Y…, M. H… AB… et Mme E… P…, M. V… AA…, M. J… I…, M. W… B… et Mme N… Z…-B…, M. V… Q…, M. F… M…, M. D… T… et la société Beaulieu International Group demandent au tribunal d’annuler cet arrêté ;

Sur la recevabilité des conclusions à fin d’annulation :

2. Considérant que, dans l’hypothèse où des conclusions communes sont présentées par des requérants différents dans une même requête, il suffit que l’un des requérants soit recevable à agir devant la juridiction pour que le juge puisse, au vu d’un moyen soulevé par celui-ci, faire droit à ces conclusions communes ;

3. Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. et Mme L… C…, M. et Mme Y…, M. B… et Mme Z…-B… et de M. H… AB… et Mme E… P… vivent au lieu-dit de Montlévrier situé sur le territoire de la commune d’Argy ; que ce hameau se situe à environ 670 mètres du site d’implantation de l’une des éoliennes dont l’exploitation a été autorisée par l’arrêté contesté ; qu’eu égard à la hauteur d’environ 126,25 mètres des futures éoliennes, telle que prévue à la date de l’introduction de la requête, ces requérants doivent être regardés comme justifiant de leur intérêt à agir ; qu’il résulte par ailleurs des statuts de l’association « Vivre au Boischaut Nord », dont l’intérêt à agir n’est pas contesté par le préfet de l’Indre et la société Centrale éolienne Nord Val de l’Indre, qu’elle a pour objet de défendre « la qualité des paysages, des sites et du patrimoine naturel du Boischaut Nord (…) / de lutter, notamment par toutes les actions en justice envisageables, contre le projets et installations des parcs éoliens dans le département de Boischaut Nord et de ses communes avoisinants d’Indre », cette aire géographique du Boischaut Nord comprenant notamment, au sens des statuts de l’association, la


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commune d’Argy ; que cette association justifie également, dans ces conditions, de son intérêt à agir ;

4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée aux conclusions à fin d’annulation présentées par M. et Mme L… C…, M. et Mme Y…, M. B… et Mme Z…-B… et de M. H… AB… et Mme E… P… ainsi que par l’association « Vivre au Boischaut Nord » doit être écartée ; que, par suite, le tribunal peut, au vu d’un moyen soulevé par ceux-ci, faire droit aux conclusions qui sont communes à celles présentées au nom des autres requérants ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

5. Considérant qu’il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l’environnement d’apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d’autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l’autorisation et celui des règles de fond régissant l’installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce ; que les obligations relatives à la composition du dossier de demande d’autorisation d’une installation classée relèvent des règles de procédure ; que les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant ce dossier ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d’entacher d’irrégularité l’autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative ; qu’en outre, eu égard à son office, le juge du plein contentieux des installations classées peut prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées, sous réserve qu’elles n’aient pas eu pour effet de nuire à l’information complète de la population ;

6. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement qui codifie la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985, transposée en droit interne : « 1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d’être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d’ouvrage et sur la demande d’autorisation. À cet effet, les Etats membres désignent les autorités à consulter, d’une manière générale ou cas par cas. (…) » ; que l’article L. 122-1 du code de l’environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, dispose, dans sa rédaction applicable en l’espèce, que : « I. – Les projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine sont précédés d’une étude d’impact.(…) / III.- Dans le cas d’un projet relevant des catégories d’opérations soumises à étude d’impact, le dossier présentant le projet, comprenant l’étude d’impact et la demande d’autorisation, est transmis pour avis à l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement. Dans le cas d’un projet relevant de la procédure d’examen au cas par cas, l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement est saisie par le pétitionnaire ou le maître d’ouvrage d’un dossier présentant le projet et détermine si ce dernier doit être soumis à la réalisation d’une étude d’impact. /IV. – La décision de l’autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d’ouvrage à réaliser le projet prend en considération l’étude d’impact, l’avis de l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement et le résultat de la consultation du public. (…) » ; que l’article R. 122-6 du même code de l’environnement, dans sa rédaction alors applicable, prévoyait en son I les cas de figure dans lesquels le ministre chargé de l’environnement était l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement et les cas dans


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lesquels il pouvait décider de se saisir de toute étude d’impact relevant de la compétence du préfet de région, en son II, les cas dans lesquels cette compétence était exercée par la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable et qui correspondent aux cas où le ministre prend par ailleurs une décision ; qu’en son III, l’article R. 122-6 prévoyait que : « (…) III.-Dans les cas ne relevant pas du I ou du II ci-dessus, l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement mentionnée à l’article L. 122-1 est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d’ouvrage ou d’aménagement doit être réalisé (…) » ;

7. Considérant que la directive précitée du 13 décembre 2011 a pour finalité de garantir qu’une autorité compétente et objective en matière d’environnement soit en mesure de rendre un avis sur l’évaluation environnementale sur l’étude d’impact des projets, publics ou privés, susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences ; qu’eu égard à l’interprétation des dispositions de l’article 6 de la directive du 27 juin 2001 qui imposent la réalisation d’une évaluation des incidences environnementales de la mise en œuvre de plans et programmes, donnée par la Cour de justice de l’Union européenne dans son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l’affaire C-474/10, et à la finalité identique des dispositions de cette dernière directive et de celle du 13 décembre 2011 relatives au rôle « des autorités susceptibles d’être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement », il résulte clairement des dispositions de l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l’autorité publique compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d’ouvrage soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce qu’une entité administrative, interne à celle-ci, dispose d’une autonomie réelle, impliquant notamment qu’elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné ;

8. Considérant que, par un arrêté du 13 juillet 2012, le préfet de la région Centre, exerçant son droit d’évocation, a décidé de prendre, en lieu et place notamment du préfet de l’Indre, les décisions relatives aux autorisations d’exploiter relatives aux éoliennes jusqu’à ce que l’objectif de la réalisation de 2 600 mégawatts fixé par le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie de la région Centre ait été atteint ou, au plus tard, jusqu’au 31 décembre 2016 ; qu’il a, en application de cet arrêté pris la décision contestée autorisant la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre à exploiter six aérogénérateurs et un poste de livraison sur le territoire des communes d’Argy et de Sougé ; qu’il est également constant que l’avis de l’autorité environnementale de l’Etat a, en l’espèce, été pris le 4 avril 2013 par le préfet de la région Centre ; qu’ainsi, en l’espèce, c’est bien la même autorité, à savoir le préfet de la région Centre, qui a exercé la compétence consultative en matière environnementale et la compétence visant à la délivrance de l’autorisation attaquée ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que la compétence consultative en matière environnementale aurait, en l’espèce, été exercée par une entité interne des services du préfet de la région Centre disposant d’une autonomie réelle à son égard ; que ce vice, affectant les conditions dans lesquelles a été recueilli l’avis de l’autorité environnementale, a ainsi été de nature tant à nuire à l’information complète de la population qu’à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l’arrêté attaqué est entaché d’illégalité ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens soulevés par les requérants ni de faire application des dispositions de l’article


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L. 181-18 du code de l’environnement, compte tenu de l’illégalité de l’avis de l’autorité environnementale intervenu au début de la phase d’instruction du dossier d’enquête publique, que les requérants sont fondés à demander l’annulation de l’arrêté attaqué du 18 décembre 2014 ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les requérants n’étant pas les parties perdantes dans la présente instance, les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à leur charge au titre des frais d’instance exposés par la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre de ces mêmes dispositions par les requérants et dirigées contre l’Etat et la société Centrale éolienne du Nord Val de l’Indre ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêté du préfet de la région Centre du 18 décembre 2014 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Pellevoisin et autres présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Centrale éolienne Nord Val de l’Indre sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


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Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la commune de Pellevoisin, à l’association « Vivre au boischaut Nord », à Mme G… AD…-Q…, à M. et Mme L… C…, à Mme Z… O…, à Mme R… O…, à Mme A… X…, à M. et Mme Y…, à M. H… AB… et Mme E… P…, à M. V… AA…, à M. J… I…, à M. W… B… et Mme N… Z…-B…, à M. V… Q…, à M. F… M…, à M. D… T…, à la société Beaulieu International Group, à la société Centrale éolienne Nord Val de l’Indre, au préfet de la région Centre-Val de Loire et au ministre de la transition écologique.

Délibéré après l’audience du 14 décembre 2017 où siégeaient :

- M. Gensac, président,

- M. Nury, premier conseiller,

- M. Y, conseiller,

Lu en audience publique le 28 décembre 2017

Le rapporteur, Le président,

L. Y P. GENSAC

Le greffier en chef,

C. E-F


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La République mande et ordonne

au ministre de la transition écologique et

solidaire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision Pour expédition conforme Le Greffier en Chef

C. E-F

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