Tribunal administratif de Lyon, 7ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2200379

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Lyon, 7e ch., 30 déc. 2022, n° 2200379
Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
Numéro : 2200379
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés, les 19 janvier et 14 septembre 2022, M. B D, représenté par Me Paturat, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler l’arrêté du 29 septembre 2021 par lequel le recteur de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes, recteur de l’académie de Lyon, chancelier des universités lui a infligé la sanction d’exclusion temporaire de fonctions de douze mois assortie d’un sursis de dix mois ;

2°) de mettre à la charge de l’institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— l’arrêté contesté est entaché d’un vice de procédure dès lors qu’il n’a pas été informé de la possibilité de se voir communiquer l’avis du conseil de discipline ;

— il est entaché d’erreurs de fait ;

— il est entaché d’une erreur de droit dès lors qu’il ne peut être sanctionné deux fois pour les mêmes faits ;

— la sanction est disproportionnée.

Par un mémoire, enregistré le 20 avril 2022, l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon conclut à l’irrecevabilité de la requête, mal dirigée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2022, le recteur de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes, recteur de l’académie de Lyon, chancelier des universités conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. D ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 15 septembre 2022, l’instruction a été rouverte puis clôturée au 7 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

— le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme A,

— les conclusions de M. Arnould, rapporteur public,

— et les observations de Me Paturat, représentant M. D.

Considérant ce qui suit :

1. Adjoint technique de recherche et formation principal de 1ère classe, M. D exerce ses fonctions au sein de l’Institut National des Sciences Appliquées (INSA) de Lyon. Après une altercation avec l’un de ses collègues dans les locaux de l’établissement, le 4 juin 2021, l’intéressé a été placé en congé de maladie, le service des urgences de Villeurbanne l’ayant déclaré « victime » d’une agression et lui ayant octroyé quatre jours d’incapacité totale de travail. Par une décision du 4 juin 2021, le directeur de l’INSA de Lyon a suspendu l’intéressé de ses fonctions, du 4 juin au 3 octobre 2021. Alors que le conseil de discipline s’est réuni, le 28 septembre 2021, par un arrêté du 29 septembre suivant, le recteur de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes, recteur de l’académie de Lyon, chancelier des universités a prononcé à l’encontre de M. D la sanction disciplinaire du troisième groupe d’exclusion temporaire de fonctions de douze mois assortie d’un sursis de dix mois. Le requérant demande au tribunal de prononcer l’annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l’article 8 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l’Etat : " La proposition [de sanction] ayant recueilli l’accord de la majorité des membres présents doit être motivée et être transmise par le président du conseil de discipline à l’autorité ayant pouvoir disciplinaire ".

3. Il ne résulte d’aucune disposition de ce texte, ni des principes généraux applicables à la procédure disciplinaire, que l’avis rendu par le conseil de discipline doive être communiqué au fonctionnaire poursuivi, préalablement à l’intervention de la décision de sanction. Ainsi, M. D n’est pas fondé à se prévaloir, pour contester la régularité de la procédure disciplinaire, de ce que l’avis du conseil de discipline ne lui aurait pas été préalablement communiqué.

4. Aux termes de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors applicable : « Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité () Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte () leur dignité () » Aux termes de l’article 27 de la même loi : « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ». Enfin, aux termes de l’article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’Etat alors applicable : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. (). Troisième groupe : () ; l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. (). L’exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d’un sursis total ou partiel. Celui-ci ne peut avoir pour effet, dans le cas de l’exclusion temporaire de fonctions du troisième groupe, de ramener la durée de cette exclusion à moins de un mois. L’intervention d’une sanction disciplinaire du deuxième ou troisième groupe pendant une période de cinq ans après le prononcé de l’exclusion temporaire entraîne la révocation du sursis. En revanche, si aucune sanction disciplinaire, autre que l’avertissement ou le blâme, n’a été prononcée durant cette même période à l’encontre de l’intéressé, ce dernier est dispensé définitivement de l’accomplissement de la partie de la sanction pour laquelle il a bénéficié du sursis. ".

5. Une altercation physique et verbale est intervenue entre M. D et l’un de ses collègues, au sein des locaux de l’INSA de Lyon, entre 12 heures et 12 heures 30, le 4 juin 2021, les coups échangés ayant été médicalement constatés. Si le requérant soutient que la décision attaquée serait entachée d’une erreur de faits, il se borne à faire état de de ce qu’il ne serait pas à l’origine de l’altercation alors qu’il ressort des pièces du dossier et notamment du compte-rendu d’intervention du service de sécurité de l’INSA de Lyon, rédigé le jour même, que M. C a fait état d’une agression par le requérant, après que ce dernier a trouvé sa tenue de travail « maculée de soude liquide ». Lors de sa déposition auprès du service de sécurité, il a pu être constaté que M. C présentait « des traces de coups sur l’ensemble du corps, plusieurs œdèmes sur le crâne et la joue gauche, douleur costale droite avec dermabrasion ainsi que le coude droit, plusieurs plaies superficielles sur le crâne ainsi qu’une importante trace de strangulation au niveau du cou ». Ainsi, alors que M. D, pour sa part, s’est contenté de quitter les lieux sans procéder à aucun signalement ni davantage prendre l’attache de ses supérieurs hiérarchiques et à déposer plainte, déclarant avoir été menacé de mort avec un marteau par son collègue, il y a lieu de considérer, alors même que le requérant ne serait pas l’initiateur des faits, que ceux-ci sont établis et qu’ainsi le moyen tiré de l’erreur de fait doit être écarté.

6. En outre, si l’autorité administrative ne saurait légalement fonder une nouvelle sanction sur des faits pour lesquels l’agent a déjà fait l’objet d’une sanction disciplinaire, elle peut néanmoins légalement les prendre en compte dans l’appréciation générale de son comportement afin, notamment, de fixer le quantum de la sanction qu’elle entend lui infliger. Dès lors, c’est sans méconnaître le principe « non bis in idem » que l’INSA de Lyon a pu prendre en considération l’entier dossier disciplinaire de M. D afin de lui infliger la sanction contestée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe « non bis in idem » doit être écarté.

7. Enfin, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport établi par la direction des ressources humaines de l’INSA de Lyon, que le comportement inadapté de M. D et notamment son incapacité manifeste à travailler en équipe et ses réactions parfois agressives ou insultantes à l’égard de ses collègues ou de sa hiérarchie, lui avaient été reprochées à plusieurs reprises depuis 2011, à l’occasion tant de ses évaluations que des procédures disciplinaires antérieures diligentées à son encontre. Par suite, dès lors que l’altercation qui a eu lieu le 4 juin 2021 fait montre d’un comportement inadéquat et inadapté aux relations de travail, que ces faits constituent un grave manquement à l’obligation de dignité et de respect qui s’impose à tout agent public en vertu des dispositions susrappelées de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983, en infligeant à M. D la sanction disciplinaire d’exclusion temporaire de fonctions de douze mois assortie de dix mois avec sursis, le recteur de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes, recteur de l’académie de Lyon, chancelier des universités n’a pas entaché la décision en litige de disproportion.

8. Ainsi, il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l’INSA de Lyon, que la requête de M. D doit être rejetée en ce comprises ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B D et au recteur de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes, recteur de l’académie de Lyon, chancelier des universités.

Copie en sera adressée à l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon.

Délibéré après l’audience du 16 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Baux, présidente,

M. Pineau, premier conseiller,

M. Gueguen, conseiller.

Rendu public par mise au disposition au greffe le 30 décembre 2022.

La présidente-rapporteure

A. A L’assesseur le plus ancien dans l’ordre du tableau,

N. Pineau

La greffière,

S. Rolland

La République mande et ordonne au ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Un greffier,

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