Tribunal administratif de Lyon, 4ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2102832

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Lyon, 4e ch., 30 déc. 2022, n° 2102832
Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
Numéro : 2102832
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 19 avril 2021, Mme C A, représentée par Me Naïm, demande au tribunal :

1°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2012 et 2013 en droits, intérêts et pénalités ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la procédure de vérification de comptabilité visant les sociétés Chardon, Chawari et Chêne est irrégulière et méconnaît les dispositions de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales ;

— l’administration ne pouvait se fonder sur la seule réponse de la DNRED suite à son droit de communication pour fonder le redressement litigieux ;

— il appartient à l’administration de prouver la non-réalisation de l’investissement pour procéder au redressement litigieux sans recourir à une véritable vérification de comptabilité ;

— la DNRED n’est pas l’organisme en charge des déclarations douanières, et les sociétés dont elle est associée n’étaient pas en charge du transport des marchandises ;

— l’administration n’établit pas l’absence d’investissement fondant le redressement litigieux ;

— elle ne pouvait procéder à ce redressement sans adresser une demande au transitaire, seul dépositaire du document administratif unique exigé pour les déclarations douanières ;

— le bénéfice de la réduction d’impôt est seulement conditionné par la livraison de l’éolienne avant le 31 décembre de l’année d’investissement, et non par la production effective d’électricité ;

— aucune condition de raccordement ne saurait être imposée au bénéficiaire de la réduction d’impôt ;

— elle peut bénéficier de la réduction d’impôt dès lors qu’elle a souscrit au capital social d’une société ayant pour objet social un projet d’investissement dans le secteur de l’éolien, à savoir l’achat et la location d’éoliennes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2021, le directeur régional des finances publiques d’Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les autres moyens soulevés par Mme A ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Tocut, rapporteure,

— et les conclusions de Mme Lacroix, rapporteure publique,

Considérant ce qui suit :

1. Mme A a imputé sur le montant de son impôt sur le revenu dû au titre des années 2012 et 2013, sur le fondement des dispositions de l’article 199 undecies B du code général des impôts, une réduction d’impôt à raison d’investissements réalisés par les sociétés par actions simplifiée Chardon, Chawari et Chêne, dont elle était associée, consistant en l’acquisition d’éoliennes données à bail à une société établie en Guyane et chargée d’en assurer l’exploitation. À la suite d’un contrôle sur pièces de son dossier fiscal, l’administration fiscale a remis en cause cette réduction d’impôt au motif que les investissements n’avaient pas été réalisés, au sens de ces dispositions, avant le 31 décembre 2012, date du fait générateur de l’impôt. Mme A demande au tribunal de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu à laquelle elle a ainsi été assujettie au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

2. Il résulte de l’instruction que les suppléments d’impôt sur le revenu en litige procèdent de la remise en cause de la réduction d’impôt dont s’est prévalue Mme A sur le fondement de l’article 199 undecies B du code général des impôts, et non du rehaussement de sa quote-part des résultats des sociétés par actions simplifiée dont elle est associée. Dès lors, la remise en cause de cette réduction d’impôt procède exclusivement du contrôle sur pièces de sa déclaration de revenus, alors qu’en tout état de cause, il ne résulte pas de l’instruction que les trois sociétés par actions simplifiée dont Mme A est associée auraient fait l’objet d’une vérification de comptabilité. Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure de vérification de comptabilité menée à l’égard de ces sociétés serait irrégulière et aurait méconnu les prescriptions de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales est sans incidence sur la régularité de la procédure d’imposition suivie à l’encontre de Mme A.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. Aux termes du premier alinéa de l’article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige : « I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l’article 4 B peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu’ils réalisent dans les départements d’outre-mer () dans le cadre d’une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l’article 34. / () / La réduction d’impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l’année au cours de laquelle l’investissement est réalisé () ». Aux termes de l’article 95 Q de l’annexe II à ce code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige : « La réduction d’impôt prévue au I de l’article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée () au titre de l’année au cours de laquelle l’immobilisation est créée par l’entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d’un contrat de crédit-bail () ».

4. Il appartient au juge de l’impôt d’apprécier, au vu de l’instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l’objet, si le contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l’avantage fiscal institué par l’article 199 undecies B du code général des impôts. Toutefois, les contribuables bénéficiant de la réduction d’impôt prévue par ces dispositions doivent, conformément aux dispositions de l’article 95 T de l’annexe II au même code, déclarer, notamment, la nature précise de l’investissement concerné, le nom de l’entreprise qui en est propriétaire, ainsi que celui de son exploitant. Il leur appartient donc de produire les éléments qu’ils sont seuls en mesure d’apporter. Par suite, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la charge de la preuve incomberait uniquement à l’administration.

5. Il résulte de la combinaison des dispositions citées au point 3 que le fait générateur de la réduction d’impôt prévue à l’article 199 undecies B est la date de la création de l’immobilisation au titre de laquelle l’investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d’outre-mer concerné. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l’entreprise, disposant matériellement de l’investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s’agissant de l’acquisition d’éoliennes données en location à des sociétés locales en vue de leur exploitation pour la production et la vente d’énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement de ces installations au réseau public d’électricité dès lors que les éoliennes, dont la production d’électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite être productives de revenus qu’à compter de cette date.

6. En premier lieu, il résulte de l’instruction, et notamment des informations obtenues par l’administration fiscale grâce à l’exercice du droit de communication, qu’à la date du 31 décembre 2012, aucun enregistrement de flux douanier vers la Guyane n’avait été enregistré au nom ou pour le compte des sociétés Chardon, Chawari et Chêne. En outre, à cette date, la société EDF Guyane n’avait accordé aucune autorisation de raccordement au réseau de matériel éolien à l’une de ces sociétés. La société EDF Guyane, interrogée par l’administration, a précisé en 2015 que la société Chawari lui était inconnue, et que si les sociétés Chardon et Chêne avaient bien déposé des dossiers de demandes de raccordement d’éoliennes au mois de décembre 2012, ces dossiers étaient incomplets et n’avaient pas été complétés par la suite en dépit de plusieurs rappels, de sorte que leurs demandes ont été rejetées. Si Mme A critique la méthode de l’administration qui n’aurait pas interrogé le transitaire en charge des formalités douanières, elle ne produit toutefois aucun élément de nature à établir que les éoliennes achetées par les sociétés dont elle est associée auraient été livrées en Guyane et raccordées au réseau de distribution d’électricité. Il en résulte qu’au 31 décembre 2012, il n’est pas établi que les installations en litige étaient raccordées au réseau public d’électricité et que leur exploitation pouvait commencer. Mme A n’est donc pas fondée à soutenir que le défaut de livraison des éoliennes, au sens des dispositions précitées, ne serait pas établi.

7. En second lieu, en relevant ce défaut de raccordement au réseau à la date du fait générateur de l’impôt, le service vérificateur s’est borné à mettre en œuvre les conditions légales auxquelles étaient soumis les investissements effectués par les sociétés Chardon, Chawari et Chêne, dont Mme A était associée, afin de pouvoir être regardés comme ayant été réalisés au sens des dispositions précitées du I de l’article 199 undecies B du code général des impôts, et il n’a ainsi pas ajouté à la loi fiscale ni n’en a fait une interprétation inexacte. Mme A n’est donc pas fondée à soutenir que l’administration s’est trompée de fait générateur de l’imposition, ni que la réduction d’impôt lui est définitivement acquise dès lors qu’elle a souscrit au capital social d’une société ayant pour objet social un projet d’investissement dans le secteur de l’éolien, sans autre condition. Par suite, c’est à bon droit que le service a considéré que ces investissements n’étaient pas éligibles au titre de l’année 2012 à la réduction d’impôt prévue par ces dispositions, sans qu’y fasse obstacle la circonstance que les sociétés Chardon, Chawari et Chêne n’ont pas eu de rôle opérationnel dans l’importation des immobilisations et leur raccordement au réseau public d’électricité.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A n’est pas fondée à demander la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des intérêts et pénalités correspondants. Les conclusions qu’elle a présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme C A et au directeur régional des finances publiques d’Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône.

Délibéré après l’audience du 12 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Clément, président,

Mme Tocut, première conseillère,

Mme Gros, conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

La rapporteure,

C. Tocut

Le président,

M. B La greffière,

T. Zaabouri

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Un greffier,

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