Tribunal administratif de Marseille, 31 décembre 2020, n° 2000737

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Marseille, 31 déc. 2020, n° 2000737
Juridiction : Tribunal administratif de Marseille
Numéro : 2000737

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MARSEILLE

N°2000737 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________

S CGT A

DE LA MAIX AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS MP

Et autres

___________

Le juge des référés

Ordonnance du 31 janvier 2020 ___________

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2020, le S CGT A de la MAMP, représenté par son secrétaire général, M. X et Y, représentés par Me L, demandent au Tribunal sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :

- d’enjoindre à la MAMP de mettre fin sans délai au recours à des entreprises privées et à des agents non grévistes pour assurer la collecte et le transport des déchets ménagers et de lui ordonner de prendre toutes mesures nécessaires à la sauvegarde du droit de grève ;

- de mettre à la charge de la MAMP une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- sur l’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale que présente le droit de grève :

- le dernier préavis de grève déposé contre le projet de réforme des retraites a été reconduit du lundi 27 janvier 2020 au jeudi 27 février 2020 par le S CGT A de la MAMP ;

- depuis le 23 janvier dernier, la métropole a recours, pour effectuer le service de collecte et de transport de déchets, à des entreprises privées et à des agents non grévistes effectuant des heures supplémentaires et, depuis le 28 janvier dernier, des véhicules de la métropole M Z sont également actifs sur le territoire de la MAMP ;

- il s’agit là d’une atteinte manifestement grave et illégale au droit de grève dès lors que n’ont été pris ni des arrêtés de réquisition d’agents par le préfet seul compétent en application de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, ni d’arrêtés de désignation par l’employeur public et si de telles désignations devaient être produites en cours d’instance, ils doivent être liés au caractère indispensable du service public en cause ;

- le recours à du personnel extérieur à la métropole est illégal alors, au surplus, que le recours à des entreprises privées ainsi qu’au personnel et aux véhicules de la métropole s’effectue en dehors de toutes procédures de passation de marchés publics ;



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- le recours à du personnel extérieur à la métropole ou à des agents non grévistes effectuant des heures supplémentaires a pour effet de faire obstacle à l’exercice du droit de grève et crée ainsi une situation d’urgence au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2020, la MAMP, représentée par la Selarl S, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme globale de 2 000 euros soit mise à la charge des requérants.

Elle soutient que :

- la condition d’urgence n’est pas satisfaite dès lors qu’il y a urgence pour la métropole à poursuivre l’exécution du service public pour assurer le maintien de la sécurité et de la salubrité publique, 2 600 tonnes de déchets étant en souffrance sur le seul territoire de la commune de Marseille et les deux centres de transfert et les deux garages de la métropole étant régulièrement bloqués depuis les 23 et 27 janvier 2020 empêchant l’exécution d’un service minimum ce qui l’autorise à recourir à des mesures exceptionnelles ;

- la métropole n’a porté aucune atteinte grave et manifestement illégale au droit de grève dès lors :

- d’une part, qu’aucune disposition législative ni aucune prescription réglementaire n’interdit aux personnes morales de droit public d’adopter, en dehors des cas de réquisitions prévues par le code général des collectivités territoriales, des mesures propres pour assurer la continuité du service public en présence d’un mouvement de grève compromettant le maintien de l’ordre public ;

- d’autre part, que la métropole n’a pas réquisitionné des salariés de droit privé, ni recruté des agents sous contrat à durée déterminée mais a fait appel à des entreprises privées qui assurent, avec leurs moyens, un certain nombre de missions limitées, lorsque la continuité du service public est gravement menacée par le blocage des garages et des centres de transfert et les prestataires privés n’ayant depuis le 24 janvier collecté que 1 000 tonnes de déchets en vue d’assurer un service public minimum, qui est particulièrement sensible, l’accumulation de déchets sur la voie publique faisant naître un risque important sur la sécurité publique en raison d’un certain nombre d’incendies d’ordures en souffrance sur la voie publique.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution et notamment, son préambule ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ;

- le code de justice administrative ;

Vu la décision par laquelle la présidente du Tribunal a désigné Mme M, vice-présidente, pour statuer sur les demandes de référé en application de l’article L.511-2 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Au cours de l’audience publique tenue le vendredi 31 janvier à 14 heures en présence de Mme S, greffière d’audience, Mme M a lu son rapport et entendu :

- les observations de Me L pour le S CGT A de la MAMP et MM. L et G,



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- et de Me V, agissant pour les cabinets S et V.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ».

2. Dans le cadre du mouvement de contestation du projet de réforme des retraites, le S CGT A de la MAMP a déposé, le 27 novembre 2019, un premier préavis de grève pour la période du 5 décembre 2019 au 5 janvier 2020 puis, le 19 janvier 2020, un second préavis de grève pour la période courant du 27 janvier 2020 au 27 février 2020. Le S CGT A de la MAMP et MM. L et G soutiennent que la MAMP a recours depuis le 23 janvier 2020 à des prestataires privés et à des agents non grévistes en heures supplémentaires ainsi qu’à la métropole M Z pour assurer la collecte des déchets ménagers sur son territoire et demandent, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, qu’il soit enjoint à la MAMP de faire cesser ces agissements.

3. Il résulte de l’instruction, et il n’est pas contesté, que compte tenu du blocage des garages et des centres de transfert de la MAMP par les agents grévistes depuis le 23 janvier 2020, la continuité du service public de ramassage des ordures ménagères ne peut être assurée par des agents non grévistes, alors que la MAMP fait valoir, sans être contredite, que la production journalière d’ordures ménagères sur la voie publique s’élève à environ 1 000 tonnes et que 2 600 tonnes de déchets ménagers sont actuellement entassées sur les voies publiques de la ville de Marseille. Eu égard aux impératifs liés à la nécessaire continuité du service public de collecte et de traitement des déchets des ménages, cette situation est de nature à porter atteinte à l’ordre public et à la salubrité publique, des déchets ayant d’ailleurs été incendiés. Dès lors qu’il incombe à l’autorité administrative de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la continuité de ce service public, notamment en cas d’interruption du service due à la grève des agents assurant ce service public, la MAMP a pu, compte tenu des circonstances exceptionnelles, faire concourir à cette exécution du service public un personnel approprié d’entreprises privées, précisant, lors de l’audience, que compte tenu des blocages, elle ne peut plus recourir aux agents non grévistes et l’intervention de services de la métropole M Z n’étant à cet égard pas avérée par les seules photographies produites par les requérants. Dans ces conditions, en recourant à une solution temporaire et limitée pour mettre fin aux graves inconvénients de tous ordres qui résultent du non ramassage des ordures ménagères et dans le respect des impératifs d’ordre public et de salubrité publique, la MAMP n’a pas porté une atteinte manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit de grève pour les requérants. Dès lors, et sans qu’il soit besoin de statuer sur l’urgence de prendre une mesure dans les 48 heures, la requête doit être rejetée.

4. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la MAMP qui n’est pas la partie perdante, le versement d’une somme au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la



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MAMP au même titre.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête du S CGT A de la MAMP et de MM. L et G est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la MAMP sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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