Tribunal administratif de Marseille, 2ème chambre, 13 décembre 2023, n° 2308117

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Marseille, 2e ch., 13 déc. 2023, n° 2308117
Juridiction : Tribunal administratif de Marseille
Numéro : 2308117
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 21 décembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 août 2023 et le 12 septembre 2023, M. A B, représenté par Me Gilbert, demande au tribunal :

1°) de l’admettre au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d’annuler l’arrêté du 21 juillet 2023 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d’éloignement ;

3°) d’enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l’État la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du

10 juillet 1991.

Il soutient que :

— l’arrêté est entaché d’un défaut de motivation ;

— il méconnaît les dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— il méconnaît les dispositions de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— il méconnaît les stipulations de l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2023, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu’aucun des moyens de la requête n’est fondé.

Par une ordonnance du 20 septembre 2023, la clôture d’instruction a été fixée au 21 octobre 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Hogedez ;

— les observations de Me Gilbert pour le requérant.

Considérant ce qui suit :

1. M. B, de nationalité gabonaise, né le 29 décembre 2002 est entré en France le 15 octobre 2020 sous couvert d’un visa D portant la mention « mineur scolarisé » valable du

6 octobre 2020 au 4 décembre 2021. L’intéressé a sollicité, le 3 novembre 2022, la délivrance d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » sur le fondement des dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par un arrêté en date du 21 juillet 2023, dont il est demandé l’annulation, le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité, l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d’être reconduit d’office.

Sur la demande d’admission provisoire à l’aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : « Dans les cas d’urgence (), l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d’aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ».

3. Par une décision du bureau d’aide juridictionnelle du 3 novembre 2023, prise en cours d’instance, M. B a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale. Dès lors, il n’y a plus lieu de statuer sur sa demande tendant à son admission au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire, devenue sans objet.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

4. Aux termes de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui () constituent une mesure de police () ». Aux termes de l’article L. 211-5 du même code : « La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ».

5. L’arrêté contesté mentionne les dispositions pertinentes du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales sur lesquelles le préfet s’est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour à l’intéressé et fait également état d’éléments relatifs à sa situation personnelle de manière suffisamment précise en rappelant notamment les conditions de son entrée sur le territoire et la circonstance que l’intéressé, qui présente un certificat de scolarité pour l’année 2021/2022 ne démontre pas une insertion sociale ou professionnelle significative sur le territoire. L’arrêté attaqué, qui n’avait pas à mentionner l’ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de M. B comporte l’énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.

6. En deuxième lieu, aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévu par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui ». Aux termes de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n’entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention »vie privée et familiale« d’une durée d’un an, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d’existence de l’étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d’origine. / L’insertion de l’étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ». Pour l’application de ces stipulations et dispositions, l’étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d’apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu’il a conservés dans son pays d’origine.

7. M. B se prévaut de sa présence sur le territoire depuis octobre 2020 et de son parcours scolaire qui témoigne de ses efforts d’intégration. Toutefois les quelques pièces versées au dossier ne permettent pas d’établir le caractère continu de sa présence sur le territoire depuis son entrée alléguée. Par ailleurs, pour estimables qu’ils soient, ses résultats scolaires et son contrat d’alternance, au demeurant non produit, ne suffisent pas à démontrer qu’il aurait fixé, en France, le centre de ses intérêts privés et familiaux. En outre, le requérant, célibataire et sans charge de famille, ne se prévaut d’aucune attache sur le territoire national et ne nie pas en conserver dans son pays d’origine dans lequel il a vécu l’essentiel de son existence. Dans ces conditions, l’arrêté en litige n’a pas porté au droit de M. B au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n’a donc méconnu ni les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

8. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger dont l’admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu’il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention » salarié « , » travailleur temporaire « ou » vie privée et familiale « , sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1. Lorsqu’elle envisage de refuser la demande d’admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l’autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l’article L. 432-14 () ».

9. Le requérant, qui n’assortit son moyen d’aucune précision permettant d’en apprécier le bien-fondé, ne se prévaut d’aucune considération humanitaire ni d’aucun motif exceptionnel au sens et pour l’application des dispositions précitées. Dans ces circonstances, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ne peut qu’être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles présentées aux fins d’injonction et celles présentées au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A B et au préfet des Bouches-du-Rhône.

Copie en sera adressée au ministre de l’intérieur.

Délibéré après l’audience du 21 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Hogedez, présidente,

Mme Busidan, première conseillère,

Mme Ridings, conseillère,

Assistées de M. Brémond, greffier.

Rendu public après mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023.

L’assesseure la plus ancienne,

signé

H. Busidan

La présidente-rapporteure,

signé

I. Hogedez

Le greffier,

signé

A. Brémond

La République mande et ordonne au préfet des Bouches-du-Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Le greffier.

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