Tribunal administratif de Marseille, 7ème chambre, 26 avril 2024, n° 2109715

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Marseille, 7e ch., 26 avr. 2024, n° 2109715
Juridiction : Tribunal administratif de Marseille
Numéro : 2109715
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Non-lieu
Date de dernière mise à jour : 28 avril 2024

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

I. Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2021, sous le n° 2109364, Mme D A, représentée par la SCP Manuel Gros, Héloïse Hicter et associés, doit être regardée comme demandant au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 11 octobre 2021 par laquelle la directrice du centre hospitalier Edmond Garcin a refusé de lui accorder le bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi ;

2°) d’enjoindre à la directrice du centre hospitalier Edmond Garcin de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de quinze jours sous peine d’astreinte ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Edmond Garcin une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— son auteur était incompétent tout comme son signataire ;

— la directrice a commis une erreur de droit en estimant qu’elle a refusé le renouvellement de son contrat ;

— en tout état de cause, un tel refus de sa part serait légitime.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 novembre 2021 et le 17 novembre 2023, le Centre hospitalier Edmond Garcin, représenté par Me Peres, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

— à titre principal, la requête est irrecevable en tant qu’elle est dirigée contre une décision uniquement confirmative de la décision de suspension du 15 septembre 2021, devenue définitive ;

— à titre subsidiaire, les moyens soulevés ne sont pas fondés.

II. Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 novembre 2021 et le 28 janvier 2022, sous le n° 2109715, Mme D A, représentée par SCP Manuel Gros, Héloïse Hicter et associés, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 8 novembre 2021 par laquelle la directrice du centre hospitalier Edmond Garcin a retiré la décision du 11 octobre 2021 et refusé de lui accorder le bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi ;

2°) d’enjoindre à la directrice du centre hospitalier Edmond Garcin de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de quinze jours sous peine d’astreinte ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Edmond Garcin une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le signataire de la décision était incompétent pour ce faire ;

— la décision est entachée d’un vice de procédure dès lors qu’elle n’a pas été informée un mois avant le terme de son contrat de l’intention du centre hospitalier de ne pas le renouveler ;

— la directrice a commis une erreur de droit en estimant qu’elle a refusé le renouvellement de son contrat ;

— en tout état de cause, un tel refus de sa part serait légitime ;

— la décision résulte d’un détournement de procédure.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 novembre 2021 et le 17 novembre 2023, le Centre hospitalier Edmond Garcin, représenté par Me Peres conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

— à titre principal, la requête est irrecevable en tant qu’elle est dirigée contre une décision uniquement confirmative de la décision de suspension du 15 septembre 2021 devenue définitive ;

— à titre subsidiaire, les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code du travail ;

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

— la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;

— le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

— le décret n° 2020-741 du 16 juin 2020 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Derollepot, rapporteur,

— et les conclusions de Mme Lourtet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées n° 2109364 et n° 2109715, présentées pour Mme A, sont relatives à la situation d’un même agent public et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.

2. La directrice du centre hospitalier Edmond Garcin a, le 11 octobre 2021, refusé d’accorder à Mme A, titulaire d’un contrat à durée déterminée en qualité de diététicienne dont le terme était fixé au 31 octobre 2021, le bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi puis, le 8 novembre suivant, a d’une part retiré cette décision et, d’autre part, réitéré son refus de lui accorder le bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi. Mme A demande au Tribunal l’annulation de ces décisions des 11 octobre et 8 novembre 2021.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

3. Lorsque le juge est parallèlement saisi de conclusions tendant, d’une part, à l’annulation d’une décision, et d’autre part, à celle de son retrait et qu’il statue par une même décision, il lui appartient de se prononcer sur les conclusions dirigées contre le retrait puis, sauf si, par l’effet de l’annulation qu’il prononce, la décision retirée est rétablie dans l’ordonnancement juridique, de constater qu’il n’y a plus lieu pour lui de statuer sur les conclusions dirigées contre cette dernière.

En ce qui concerne la décision du 8 novembre 2021 :

4. En premier lieu, la décision attaquée a été signée par M. B C, directeur des ressources humaines et des affaires médicales, qui a reçu, par une décision 2021-585 du 28 avril 2021, régulièrement publiée, délégation à effet de signer notamment les décisions concernant les personnels non médicaux. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence du signataire de la décision doit être écarté comme manquant en fait.

5. En deuxième lieu, aux termes de l’article 41 du décret du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de la fonction publique hospitalière : " Lorsque l’agent contractuel a été recruté par un contrat à durée déterminée susceptible d’être renouvelé en application des dispositions législatives ou réglementaires qui lui sont applicables, l’autorité signataire du contrat notifie à l’intéressé son intention de renouveler ou non le contrat, au plus tard : () / 2° Un mois avant le terme de l’engagement pour l’agent recruté pour une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans ; () « . Aux termes du I de l’article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire : » Doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale, contre la covid-19 : / 1° Les personnes exerçant leur activité dans : / a) Les établissements de santé mentionnés à l’article L. 6111-1 du code de la santé publique () « . Suivant l’article 14 de la même loi : » () III. – Lorsque l’employeur constate qu’un agent public ne peut plus exercer son activité en application du I, il l’informe sans délai des conséquences qu’emporte cette interdiction d’exercer sur son emploi ainsi que des moyens de régulariser sa situation. L’agent public qui fait l’objet d’une interdiction d’exercer peut utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de congés payés. A défaut, il est suspendu de ses fonctions ou de son contrat de travail. / () Pendant cette suspension, l’agent public conserve le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit. () / Lorsque le contrat à durée déterminée d’un agent public non titulaire est suspendu en application du premier alinéa du présent III, le contrat prend fin au terme prévu si ce dernier intervient au cours de la période de suspension () ".

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme A a fait l’objet le 15 septembre 2021 d’une suspension de fonction sur le fondement de l’article 14 de la loi précitée du 5 aout 2021 au motif qu’elle n’avait pas produit un justificatif de vaccination contre la Covid-19 ou un justificatif de contre-indication médical à ladite vaccination. Par suite, son contrat ayant en application de l’article 14 de la loi du 5 aout 2021 automatiquement pris fin à son terme, le 31 octobre 2021, dès lors que l’intéressée était toujours suspendue à cette date, elle ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de l’article 41 du décret du 6 février 1991.

7. En troisième lieu, Mme A ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article 14 de la loi du 5 aout 2021 garantissant à l’agent public suspendu le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit à l’encontre du refus de lui accorder le bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi dès lors, notamment, que la suspension de l’agent prend automatiquement fin à l’expiration de son contrat.

8. En quatrième lieu, aux termes de l’article L. 5424-1 du code du travail : « Ont droit à une allocation d’assurance, lorsque leur privation d’emploi est involontaire ou assimilée à une privation involontaire () : / () 2° Les agents non titulaires () des établissements publics administratifs autres que ceux de l’Etat () ». Aux termes du I de son article L. 5422-1 : « Ont droit à l’allocation d’assurance les travailleurs aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure, et dont : / 1° Soit la privation d’emploi est involontaire () ». Aux termes de l’article 2 du décret du 16 juin 2020 relatif au régime particulier d’assurance chômage applicable à certains agents publics et salariés du secteur public : " Sont considérés comme ayant été involontairement privés d’emploi : () 2° Les personnels de droit public ou de droit privé dont le contrat est arrivé à son terme et n’est pas renouvelé à l’initiative de l’employeur ; () « . L’article 3 du décret dispose : » Sont assimilés aux personnels involontairement privés d’emploi : / () 2° Les personnels de droit public ou de droit privé ayant refusé le renouvellement de leur contrat pour un motif légitime lié à des considérations d’ordre personnel () ". A ce titre, l’agent qui refuse le renouvellement de son contrat de travail ne peut être regardé comme involontairement privé d’emploi, à moins que ce refus soit fondé sur un motif légitime, qui peut être lié notamment à des considérations d’ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle et sans justification par l’employeur.

9. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes mêmes de la décision en litige, que Mme A a refusé de se conformer aux obligations vaccinales imposées par la loi du 5 aout 2021 pour des considérations personnelles tenant notamment à la liberté individuelle et au droit de chaque individu de disposer de son corps. Toutefois, cette circonstance ne constitue pas un motif légitime au sens et pour l’application des dispositions précitées du décret du 16 juin 2020. Dès lors, la requérante ne peut être regardée comme ayant été involontairement privée d’emploi à l’issue de son contrat à durée déterminée.

10. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige constitue un détournement de procédure ayant pour seul objet de priver Mme A de son droit au chômage au motif qu’elle est réfractaire au vaccin contre la covid 19.

11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par le Centre hospitalier Edmond Garcin, que les conclusions à fin d’annulation de la décision du 8 novembre 2021 présentées par Mme A doivent être rejetées.

En ce qui concerne la décision du 11 octobre 2021 :

12. Le présent jugement rejette les conclusions présentées par Mme A contre la décision du 8 novembre 2021 par laquelle la directrice du Centre hospitalier Edmond Garcin a retiré la décision du 11 octobre 2021. Il suit de là qu’il n’y a plus de lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation de cette dernière.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

13. Le présent jugement, qui rejette les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 8 novembre 2021, n’implique aucune mesure particulière d’exécution. Par suite, les conclusions susvisées doivent être rejetées.

Sur les frais du litige :

14. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du Centre hospitalier Edmond Garcin, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme A tendant à l’annulation de la décision du 11 octobre 2021.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme D A et au Centre hospitalier Edmond Garcin.

Délibéré après l’audience du 26 mars 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Simon, présidente,

M. Derollepot, premier conseiller,

Mme Journoud, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 avril 2024.

Le rapporteur,

signé

A. Derollepot

La présidente,

signé

F. Simon

La greffière,

signé

R. Berkat

La République mande et ordonne au directeur général de l’agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d’Azur ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

La greffière,

N°s 2109364, 2109715

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