Tribunal administratif de Montreuil, 10ème chambre, 21 février 2023, n° 2213642

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Montreuil, 10e ch., 21 févr. 2023, n° 2213642
Juridiction : Tribunal administratif de Montreuil
Numéro : 2213642
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 19 juin 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 5 septembre 2022, M. C, représenté par Me Masilu, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 2 août 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai indiqué comme étant de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 2 ans ;

2°) à titre principal, d’enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d’un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir ;

3°) à titre subsidiaire, d’enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour portant autorisation de travail ;

4°) d’enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de retirer le signalement aux fins de non-admission le concernant dans le système d’information Schengen ;

5°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de séjour :

— elle est insuffisamment motivée en violation des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l’administration ;

— elle méconnaît les dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ainsi que les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

— elle est insuffisamment motivée en violation des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l’administration ;

— elle est illégale en raison de l’illégalité du refus de titre de séjour ;

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

— elle a été prise par une autorité incompétente, dès lors qu’il n’est pas justifié que son signataire bénéficiait d’une délégation de signature ;

— elle méconnaît les dispositions de l’article L. 612-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n’a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience, au cours de laquelle a été entendu le rapport de Mme D.

Considérant ce qui suit :

1. M. C, ressortissant nigérian né le 26 janvier 1978, est entré en France le 2 décembre 2010 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-3 et L. 431-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par un arrêté du 2 août 2022, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 2 ans. Par la présente requête, M. C demande l’annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M. C, la décision comporte l’énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, et notamment son séjour régulier en France sous couvert de titres de séjour du 13 février 2012 au 7 décembre 2018 ainsi que des éléments relatifs à sa vie privée et familiale et à son insertion professionnelle. Par suite, cette décision est suffisamment motivée.

3. En second lieu, aux termes des dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger qui n’entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « d’une durée d’un an, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d’existence de l’étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d’origine. L’insertion de l’étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ». Aux termes des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

4. Il ressort des pièces du dossier que M. C réside en France depuis plus de dix ans, qu’il a été titulaire de titres de séjour du 13 février 2012 au 7 décembre 2018 et qu’il a travaillé à temps partiel de septembre 2016 à octobre 2018 ainsi qu’en mai et juillet 2019. Toutefois, s’il fait valoir qu’il vit en concubinage avec une ressortissante nigériane titulaire d’une carte de résident depuis mai 2020, il ne produit que peu d’éléments probants et pour la seule période de juillet 2020 à avril 2021. S’il fait également valoir que son frère a la nationalité française, ses deux enfants mineurs vivent avec leur mère en Norvège et il ne conteste pas que ses parents et une partie de sa fratrie demeurent au Nigéria. Enfin, la commission du titre de séjour saisie par le préfet indique dans son avis 7 juillet 2022 qu’il ne maîtrise pas la langue française. Dès lors, compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce, la décision attaquée n’a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation doit être écarté pour les mêmes motifs.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire comporte l’énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, cette décision est suffisamment motivée.

6. En second lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l’illégalité, par voie d’exception, de la décision de refus de séjour ne peut être accueilli.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

7. En premier lieu, par un arrêté n° 2021-1827 du 19 juillet 2021, régulièrement publié au bulletin d’informations administratives du 19 juillet 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné délégation à M. B A, sous-préfet du Raincy, à l’effet de signer les décisions prises en matière de police des étrangers, lorsqu’elles concernent des ressortissants résidant dans l’arrondissement du Raincy. Par un arrêté n° 2021-1828 du même jour publié dans les mêmes conditions, le préfet a consenti cette même délégation à M. Mame-Abdoulaye Seck, secrétaire général de la sous-préfecture du Raincy, en cas d’absence ou d’empêchement de M. A. Par suite, dès lors que la commune de Gagny, où réside M. C, est située dans l’arrondissement du Raincy et qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A n’aurait pas été absent ou empêché à la date de la décision attaquée, le moyen tiré de l’incompétence de son auteur doit être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de de l’article L. 612-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Lorsqu’aucun délai de départ volontaire n’a été accordé à l’étranger, l’autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d’une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l’autorité administrative n’édicte pas d’interdiction de retour ».

9. Si M. C réside en France depuis plus de dix ans, il ne justifie pas, contrairement à ce qu’il soutient, d’une activité professionnelle déclarée et régulière de 2012 à 2019, et ne fait pas valoir de circonstances humanitaires au sens des dispositions précitées. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n’a pas fait une inexacte application des dispositions de l’article L. 612-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en interdisant son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

10. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux point 4 et 9, l’interdiction de retour sur le territoire français ne peut être regardée comme étant entachée d’erreur d’appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. C doit être rejetée, y compris les conclusions aux fins d’injonction et celles présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. E C et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l’audience du 7 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Auvray, président,

Mme Syndique, première conseillère,

Mme Fabre, conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 février 2023.

La rapporteure,

N. D

Le président,

B. Auvray Le greffier,

S. Werkling

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

N°221364

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