Tribunal administratif de Nantes, 3ème chambre, 29 décembre 2023, n° 2010895

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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 3e ch., 29 déc. 2023, n° 2010895
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 2010895
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 13 février 2024

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 28 octobre 2020, Mme B C, épouse A, représentée par la SCP Lalanne-Godard-Heron-Boutard-Simon-Villemont-Memin-Gibaud, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l’intérieur a rejeté son recours formé contre la décision en date du 15 janvier 2020 du préfet de la Sarthe portant rejet de sa demande de naturalisation, ainsi que cette décision préfectorale ;

2°) d’enjoindre à l’autorité compétente de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 200 euros au titre de l’article L.'761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— il n’est pas établi que la décision préfectorale ait été signée par une autorité habilitée ;

— le rejet de sa demande est entaché d’une erreur de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 juin 2021, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les conclusions tendant à l’annulation de la décision préfectorale sont irrecevables, dès lors que la décision prise sur recours administratif obligatoire s’y est substituée, et que les moyens invoqués à l’appui de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code civil ;

— le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

— le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de M. Cantié a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C, ressortissante algérienne née le 20 septembre 1968, a sollicité l’acquisition de la nationalité française par naturalisation. Par une décision du 15 janvier 2020, le préfet de la Sarthe a rejeté sa demande. Saisi par lettre du 12 mars 2020 du recours préalable obligatoire prescrit par le décret du 30 décembre 1993, le ministre de l’intérieur a gardé le silence sur ce recours, confirmant implicitement la décision préfectorale. Mme C demande au tribunal d’annuler cette décision implicite confirmant le rejet de sa demande de naturalisation ainsi que la décision préfectorale du 15 janvier 2020.

Sur la fin de non-recevoir :

2. Il résulte des dispositions de l’article 45 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française que les décisions par lesquelles le ministre en charge des naturalisations statue sur les recours préalables obligatoires se substituent à celles prises par le préfet. Il suit de là que le ministre est fondé à soutenir que les conclusions de Mme C dirigées contre la décision préfectorale du 15 janvier 2020 sont irrecevables.

Sur la légalité de la décision ministérielle :

3. Aux termes de l’article 21-15 du code civil : « () l’acquisition de la nationalité française par décision de l’autorité publique résulte d’une naturalisation accordée par décret à la demande de l’étranger ». En application de l’article 27 de ce même code, l’administration a le pouvoir de rejeter ou d’ajourner une demande de naturalisation. Aux termes de l’article 48 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : « () Si le ministre chargé des naturalisations estime qu’il n’y a pas lieu d’accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l’ajournement en imposant un délai ou des conditions. () ». En application de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l’intérêt d’accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française à l’étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d’opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d’assimilation à la société française du postulant.

4. En l’espèce, pour rejeter le recours formé par Mme C et confirmer le rejet de sa demande de naturalisation, le ministre de l’intérieur s’est approprié le motif tiré du caractère insuffisant de la connaissance par l’intéressée des valeurs, de la culture et des institutions de la République française.

5. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du compte-rendu de l’entretien d’assimilation réalisé le 16 décembre 2019 en préfecture, que Mme C n’a pas été en mesure de répondre à des questions simples portant sur l’histoire, la culture et les institutions de la République française et a fait montre d’une connaissance encore imparfaite de repères essentiels et de symboles de la République. Il n’est pas établi que les questions qui lui ont été posées auraient été imprécises ou d’un degré de difficulté inadapté au niveau d’instruction de l’intéressée, ni que l’agent chargé de l’entretien aurait eu une attitude intimidante. Mme C ne peut utilement invoquer l’absence d’information préalable sur la pondération des critères d’appréciation mobilisés par l’administration, en l’absence de tels critères. Par suite, c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que le ministre a confirmé le rejet de la demande de naturalisation de l’intéressée au motif que celle-ci ne disposait pas d’une connaissance suffisante des valeurs, de la culture et des institutions de la République française.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme C n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision en litige. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d’injonction et celles présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme B C, épouse A et au ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l’audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Cantié, président,

Mme Martel, première conseillère,

M. Delohen, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

Le président-rapporteur,

C. CANTIÉ L’assesseure la plus ancienne

dans l’ordre du tableau,

C. MARTEL

La greffière,

C. DUMONTEIL

La République mande et ordonne au ministre l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. DUMONTEIL

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