Tribunal administratif de Nantes, Oqtf 6 semaines - 3ème chambre, 29 décembre 2023, n° 2307752

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, oqtf 6 semaines - 3e ch., 29 déc. 2023, n° 2307752
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 2307752
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 13 février 2024

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 mai et 26 novembre 2023, M. A C, représenté par Me Prelaud, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 10 mai 2023 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d’être éloigné ;

2°) d’enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui remettre, dans l’attente, une autorisation provisoire de séjour l’autorisant à occuper un emploi, dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

— elle est insuffisamment motivée ;

— elle n’a pas été prise à l’issue d’un examen particulier de sa situation ;

— son droit d’être entendu n’a pas été respecté ;

— elle est entachée d’une erreur de fait, en ce qu’elle énonce qu’il est célibataire ;

— elle est entachée d’une erreur de droit, en l’absence de saisine du collège des médecins de l’Office français pour l’immigration et l’intégration ;

— elle méconnaît l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— elle méconnaît l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 33 de la convention de Genève relative au statut des réfugiés ;

— elle est entachée d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

— elle est illégale dès lors qu’elle est fondée sur une décision entachée d’illégalité ;

— elle est insuffisamment motivée ;

— elle méconnaît l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article L. 721-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2023, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués par le requérant sont infondés.

M. C a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 27 novembre 2023

Le président du tribunal a délégué à M. B les pouvoirs qui lui sont attribués par l’article L. 614-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Au cours de l’audience publique du 28 novembre 2023, à 11 heures, M. B :

— a lu son rapport,

— a entendu les observations de Me Prelaud, représentant M. C,

— a constaté que le préfet de la Loire-Atlantique n’était ni présent, ni représenté,

— et a prononcé la clôture de l’instruction.

Considérant ce qui suit :

1. M. C, ressortissant nigérian né le 23 janvier 1989, entré en France selon ses dires le 15 mai 2021, a été définitivement débouté du droit d’asile par une décision de la Cour nationale du droit d’asile en date du 9 novembre 2022. Sa demande de réexamen a été rejetée par une décision du directeur général de l’office français de protection des réfugiés et du droit d’asile notifiée le 5 janvier 2023. Par un arrêté du 10 mai 2023, dont l’intéressé demande l’annulation, le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d’être éloigné.

Sur le fondement de l’arrêté attaqué :

2. Il résulte des dispositions de l’article L. 611-1, 4° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsque la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui a été définitivement refusé ou qu’il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2 de ce code, à moins que l’intéressé ne soit titulaire d’une autorisation de séjour. En l’espèce, M. C a vu sa demande d’asile et sa demande en réexamen rejetées, en sorte qu’il se trouve en tout état de cause dans le champ de ces dispositions.

Sur le moyen commun aux décisions attaquées :

3. L’arrêté en litige comporte les motifs utiles de droit et de fait qui constituent le fondement des décisions prises à l’encontre de M. C. Dès lors, celui-ci n’est pas fondé à soutenir que l’une ou l’autre de ces mesures serait insuffisamment motivée.

Sur les autres moyens de la requête :

En ce qui concerne l’obligation de quitter le territoire :

4. En premier lieu, il ressort des énonciations de l’arrêté contesté que le préfet de la Loire-Atlantique a procédé, avant d’édicter la mesure prise à l’encontre de M. C, à un examen particulier de sa situation, quand bien même y figurerait une mention erronée quant à sa situation. Il suit de là que le moyen tiré de ce qu’un tel examen n’aurait pas été opéré ne peut être accueilli.

5. En deuxième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne que le droit d’être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l’Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d’une procédure administrative avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts. Il n’implique toutefois pas systématiquement l’obligation pour l’administration d’organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l’intéressé, ni même d’inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu’une décision lui faisant grief est susceptible d’être prise à son encontre, l’étranger soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de demander un entretien pour faire valoir ses observations orales. Toutefois, le requérant ne fait état d’aucun élément relatif à sa situation qui, s’il avait été connu du préfet de la Loire-Atlantique, aurait fait obstacle à ce que soit décidée la mesure d’éloignement prise à son encontre ou qui aurait pu conduire le préfet à ne pas la prendre. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d’être entendu doit être écarté.

6. En troisième lieu, si le requérant soutient que l’arrêté contesté est entaché d’une erreur de fait dans la mesure où, contrairement à ce dont cet acte fait mention, il n’est pas célibataire, la circonstance que l’intéressé aurait une relation sentimentale avec une personne résidant en France n’est pas de nature à remettre en cause son état matrimonial.

7. En quatrième lieu, M. C ne fait pas état d’éléments suffisamment précis et probant attestant de ce que la prise en compte de son état de santé aurait dû amener le préfet à saisir pour avis le collège des médecins de l’Office français pour l’immigration et l’intégration avant de décider de son éloignement, en sorte que le moyen tiré de l’erreur de droit ne saurait être accueilli.

8. En cinquième lieu, M. C, qui est entré récemment en France, ne démontre pas être dépourvu d’attaches dans son pays d’origine et ne produit aucune pièce, bien qu’il se prévale d’une relation sentimentale née sur le territoire, en vue d’établir la réalité et l’ancienneté de cette relation. Par ailleurs, sa volonté d’insertion sociale n’est pas attestée par les éléments versés à l’appui de son recours. Dans ces conditions, le requérant n’est pas fondé à soutenir que la mesure d’éloignement prise à son encontre porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts d’intérêt public en vue desquels elle a été prise, en violation des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ni que la même mesure serait entachée d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

9. En dernier lieu, eu égard à l’objet de la décision en litige, les moyens tirés de la violation de l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 33 de la convention de Genève relative au statut des réfugiés sont inopérants.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. En premier lieu, compte tenu des motifs énoncés précédemment, le requérant n’est pas fondé à exciper de l’illégalité de la mesure d’éloignement prise à son encontre.

11. En deuxième lieu, l’arrêté litigieux fait mention des motifs utiles de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision fixant le pays de renvoi. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisante motivation de cette mesure manque en fait.

12. En dernier lieu, aux termes de l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ». Aux termes du dernier alinéa de l’article L. 721-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Un étranger ne peut être éloigné à destination d’un pays s’il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu’il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ».

13. Les faits dont fait état M. C en vue d’établir qu’il encourt un risque personnel en cas de retour au Nigéria ne sont pas attestés par des éléments suffisamment précis et probants. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et dispositions citées au point précédent doivent être écartés.

14. Il résulte de ce qui précède que M. C n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêté qu’il conteste. Par voie de conséquence, les conclusions de la requête aux fins d’injonction sous astreinte et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu’être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A C, à Me Prelaud et au préfet de la Loire-Atlantique.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

Le magistrat désigné,

C. BLa greffière,

C. DUMONTEIL

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. DUMONTEIL

N°2307752

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