Tribunal administratif de Nantes, 3ème chambre, 29 décembre 2023, n° 2011754

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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 3e ch., 29 déc. 2023, n° 2011754
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 2011754
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 13 février 2024

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 19 novembre 2020, M. E B, représenté par Me Eveno, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 6 mars 2020 par laquelle le ministre de l’intérieur a rejeté son recours contre la décision préfectorale en date du 12 septembre 2019 ajournant à deux ans sa demande de naturalisation ;

2°) d’enjoindre au ministre de l’intérieur de faire droit ou, à défaut, de réexaminer sa demande de naturalisation dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

— il n’est pas établi que la décision attaquée ait été signée par une autorité habilitée ;

— elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 juin 2021, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés à l’appui de la requête sont infondés.

M. B a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 24 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code civil ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

— le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de M. Cantié a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B, ressortissant malien né le 31 décembre 1976, a sollicité l’acquisition de la nationalité française par naturalisation. Par une décision du 11 septembre 2019, le préfet de la Loire-Atlantique a ajourné sa demande à deux ans. Saisi du recours préalable obligatoire prescrit par le décret du 30 décembre 1993, le ministre de l’intérieur a implicitement confirmé cette décision, puis a rejeté ce recours par une décision expresse en date du 12 juin 2020.

2. En premier lieu, en vertu de l’article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement, la directrice de l’accueil, de l’accompagnement des étrangers et de la nationalité bénéficie d’une délégation pour signer, au nom du ministre chargé des naturalisations, l’ensemble des actes, à l’exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous son autorité. En vertu de l’article 3 du même décret, cette directrice est habilitée à déléguer elle-même cette signature. En l’espèce, par une décision du 30 août 2018, régulièrement publiée au Journal officiel de la République française du 2 septembre 2018, Mme A C, directrice de l’accueil, de l’accompagnement des étrangers et de la nationalité, nommée dans ces fonctions par décret du président de la République du 28 septembre 2016, régulièrement publié, a donné à Mme D F, attachée d’administration de l’Etat, affectée au bureau des affaires juridiques, du précontentieux et du contentieux au sein de la sous-direction de l’accès à la nationalité française de la direction générale des étrangers en France, une délégation pour signer les décisions statuant sur les recours formés sur le fondement de l’article 45 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence de la signataire de la décision attaquée doit être écarté.

3. En second lieu, aux termes de l’article 21-15 du code civil : « () l’acquisition de la nationalité française par décision de l’autorité publique résulte d’une naturalisation accordée par décret à la demande de l’étranger ». Le dernier alinéa de l’article 48 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française dispose : « Si le ministre chargé des naturalisations estime qu’il n’y a pas lieu d’accorder la naturalisation () sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l’ajournement en imposant un délai (). Ce délai une fois expiré (), il appartient à l’intéressé, s’il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande ». En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l’intérêt d’accorder la nationalité française au ressortissant étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d’opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ainsi que le niveau et la stabilité de ses ressources.

4. En l’espèce, pour confirmer l’ajournement à deux ans de la demande de naturalisation présentée par M. B, le ministre de l’intérieur s’est fondé sur le motif tiré de ce que le postulant ne disposait pas de ressources suffisantes et stables et ne pouvait, de ce fait, être regardé comme ayant réalisé pleinement son insertion professionnelle en France. Il ressort des pièces du dossier qu’à la date de la décision attaquée, l’intéressé était sans emploi depuis plus de deux ans. Dans ces conditions et alors que le requérant ne peut utilement se prévaloir de circonstances postérieures, le ministre n’a pas entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation en confirmant l’ajournement à deux ans de la demande de naturalisation de M. B au motif que l’examen de l’ensemble de son parcours professionnel ne révélait pas une insertion suffisante.

5. Il résulte de ce qui précède que M. B n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision en litige. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d’injonction sous astreinte et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu’être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. E B, à Me Eveno et au ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l’audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Cantié, président,

Mme Martel, première conseillère,

M. Delohen, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

Le président-rapporteur,

C. CANTIÉ L’assesseure la plus ancienne

dans l’ordre du tableau,

C. MARTEL

La greffière,

C. DUMONTEIL

La République mande et ordonne au ministre l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. DUMONTEIL

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