Tribunal administratif d'Orléans, 30 décembre 2010, n° 0802057

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Orléans, 30 déc. 2010, n° 0802057
Juridiction : Tribunal administratif d'Orléans
Numéro : 0802057
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 21 novembre 2004

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

D’ORLÉANS

N° 0802057

___________

S.A.S. MAXDIS

___________

M. Artus

Président-rapporteur

___________

M. Jaosidy

Rapporteur public

___________

Audience du 14 décembre 2010

Lecture du 30 décembre 2010

___________

ab

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif d’Orléans

(3e chambre)

Vu la requête n° 0802057, enregistrée le 6 juin 2008, présentée pour la société par actions simplifiée MAXDIS, dont le siège est XXX, par Me Debord et Me Serpentier-Linares ; la SAS MAXDIS demande au tribunal :

1°) de prononcer la restitution de la taxe sur les achats de viande acquittée à hauteur de 275 186 euros au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, et de la somme assortissant au titre des intérêts moratoires à hauteur de 16 491 euros les dégrèvement notifiés à la requérante les 11 août et 13 septembre 2004, soit un total de 291 677 euros mis en recouvrement le 14 septembre 2007 ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat les intérêts moratoires prévus à l’article 208 du livre des procédures fiscales sur le fondement des dispositions de l’article L. 911-1 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu la décision par laquelle le directeur des services fiscaux du Loir-et-Cher a rejeté la réclamation préalable ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2008, présenté par le directeur des services fiscaux de Loir-et-Cher, qui conclut au rejet de la requête ;

Vu le mémoire en réponse, enregistré le 5 mars 2009, présenté pour la SAS MAXDIS, par Me Debord et Me Serpentier-Linares ; la SAS MAXDIS persiste dans ses conclusions ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 juin 2009, présenté par le directeur des services fiscaux de Loir-et-Cher, qui persiste dans ses conclusions ;

Vu le mémoire en réponse, enregistré le 3 juin 2010, présenté pour la SAS MAXDIS, par Me Debord et Me Serpentier-Linares ; la SAS MAXDIS persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens que ceux évoqués dans son précédent mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les articles 87 et 88 du traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le règlement n° 659/1999 du Conseil de l’Union européenne ;

Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d’harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires ;

Vu la décision de la Commission européenne n° 2005/474/CE du 14 décembre 2004 concernant la taxe sur les achats de viande (taxe d’équarrissage) mise à exécution par la France ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l’élimination des cadavres d’animaux et des déchets d’abattoirs et modifiant le code rural ;

Vu la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 portant loi de finances rectificative pour 2000, notamment son article 35 ;

Vu l’ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 14 décembre 2010 :

— le rapport de M. Artus, président-rapporteur ;

— et les conclusions de M. Jaosidy, rapporteur public ;

Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 302 bis ZD du code général des impôts, alors applicables, une taxe sur les achats de viande a été perçue, à compter du 1er janvier 1997 et jusqu’au 1er janvier 2004, sur les personnes réalisant des ventes au détail de viandes, produits carnés et aliments pour animaux ; que la société par actions simplifiée MAXDIS a acquitté la taxe sur les achats de viande prévue par l’article 302 bis ZD du code général des impôts, pour un montant total de 275 186 euros, au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 ; que la société a présenté au directeur des services fiscaux de Loir-et-Cher une réclamation tendant à la restitution de ces impositions ; que, par décisions des 11 août et 13 septembre 2004, le directeur des services fiscaux de Loir-et-Cher a prononcé un dégrèvement total des impositions contestées assorti, en application de l’article L. 208 du livre des procédures fiscales, du paiement des intérêts moratoires à hauteur de 16 491 euros, soit un total de 291 677 euros ; que, toutefois, par une nouvelle proposition de rectification du 17 décembre 2004, le directeur des services fiscaux a entendu retirer ses décisions des 11 août et 13 septembre 2004 accordant à la société requérante la restitution des droits de taxe litigieux ; que, par la présente requête, la SAS MAXDIS demande au tribunal de prononcer la restitution de la somme de 275 186 euros, représentant le montant de la taxe sur les achats de viande qu’elle a acquitté au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, assortie des intérêts moratoires ;

Sur les conclusions tendant au versement par l’Etat d’intérêts moratoires :

Considérant que les intérêts dus au contribuable en vertu de l’article L. 208 du livre des procédures fiscales, en cas de remboursements effectués en raison de dégrèvements d’impôt prononcés par un tribunal ou par l’administration des impôts à la suite d’une réclamation sont, en application de l’article R. 208-1 du même livre, « payés d’office en même temps que les sommes remboursées au contribuable par le comptable chargé du recouvrement des impôts » ; qu’il n’existe aucun litige né et actuel entre le comptable et le requérant concernant lesdits intérêts ; que, dès lors, les conclusions susanalysées ne sont pas recevables ;

Sur le moyen tiré du principe de sécurité juridique :

Considérant que le principe de sécurité juridique ne faisait pas obstacle, d’une part, à ce qu’un changement de législation intervînt à compter du 1er janvier 2001 afin de rendre le système de prélèvement de la taxe sur les achats de viandes conforme au droit communautaire et, d’autre part, à ce que l’administration, qui avait compétence liée pour établir et mettre en recouvrement les impositions prévues par la loi, puisse rétablir l’imposition dont il s’agit sur le fondement du régime légal applicable aux années 2001, 2002 et 2003 dans le respect des règles de la procédure fiscale ;

Sur le moyen tiré de ce que la taxe litigieuse constituerait une taxe d’effet équivalent à un droit de douane, prohibée par les articles 23 et 25 du traité instituant la Communauté européenne :

Considérant qu’aux termes de l’article 23 (ex-article 9) du traité instituant la Communauté européenne : « 1. La Communauté est fondée sur une union douanière qui s’étend à l’ensemble des échanges de marchandises et qui comporte l’interdiction, entre les Etats membres, des droits de douane à l’importation et à l’exportation et de toutes taxes d’effet équivalent, ainsi que l’adoption d’un tarif douanier commun dans leurs relations avec les pays tiers (…) » ; qu’aux termes de l’article 25 (ex-article 12) du même traité : « Les droits de douane à l’importation et à l’exportation ou taxes d’effet équivalent sont interdits entre les Etats membres. Cette interdiction s’applique également aux droits de douane à caractère fiscal » ; qu’en vertu de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, doit être qualifiée de taxe d’effet équivalent à un droit de douane, non seulement une taxe perçue à l’occasion ou en raison de l’importation et qui, frappant spécifiquement un produit importé à l’exclusion du produit national similaire, a pour résultat, en altérant son prix de revient, d’avoir sur la libre circulation des marchandises la même incidence restrictive qu’un droit de douane, mais aussi une taxe appliquée dans les mêmes conditions de perception aux produits nationaux et aux produits importés, dont les recettes sont affectées au profit des seuls produits nationaux, de sorte que les avantages qui en découlent compensent intégralement la charge grevant ces produits ;

Considérant que, pour qu’une taxe puisse être qualifiée de taxe d’effet équivalent à un droit de douane interdite par l’article 25 précité du traité, les recettes procurées par cette taxe doivent être affectées au profit des seuls produits nationaux ; que la taxe sur les achats de viandes, qui, d’une part, n’étant pas perçue à l’occasion de l’importation de produits, frappe tant les produits nationaux que les produits importés, et, d’autre part, ayant été, compte tenu du principe d’universalité budgétaire, affectée à compter du 1er janvier 2001 au budget général de l’Etat et non à un service qui ne bénéficierait qu’à des opérateurs situés en France, le moyen tiré de ce qu’elle constituerait une taxe d’effet équivalent à un droit de douane prohibée par les articles 23 et 25 du traité instituant la Communauté européenne ne peut qu’être écarté ;

Sur le moyen tiré de ce que la taxe sur les achats de viandes constituerait une aide d’Etat prohibée par les articles 87 et 88 du traité instituant la Communauté européenne :

Considérant qu’aux termes du paragraphe 1 de l’article 87 du traité instituant la Communauté européenne : « Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions » ; qu’aux termes de l’article 88 du même traité : « 1. La Commission procède avec les Etats membres à l’examen permanent des régimes d’aides existant dans ces Etats. (…) 2. Si (…) la Commission constate qu’une aide accordée par un Etat ou au moyen de ressources d’Etat n’est pas compatible avec le marché commun aux termes de l’article 87 (…) elle décide que l’Etat intéressé doit la supprimer ou la modifier (…) 3. La commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu’un projet n’est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l’article 87, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L’Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale » ;

Considérant qu’il résulte de ces stipulations que, s’il ressortit à la compétence exclusive de la Commission européenne de décider, sous le contrôle de la Cour de justice des Communautés européennes, si une aide de la nature de celles mentionnées à l’article 87 du traité est ou non, compte tenu des dérogations prévues par ce traité, compatible avec le marché commun, il incombe, en revanche, aux juridictions nationales de sanctionner, le cas échéant, l’invalidité de dispositions de droit national qui auraient institué ou modifié une telle aide en méconnaissance de l’obligation, qu’impose aux Etats membres le paragraphe 3 de l’article 88 du traité, d’en notifier à la Commission, préalablement à toute mise à exécution, le projet ; que l’exercice de ce contrôle implique, notamment, de rechercher si les dispositions dont l’application est contestée instituent un régime d’aide, ou si une taxe fait partie intégrante d’une telle aide ;

Considérant qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, d’une part, que les taxes n’entrent pas dans le champ d’application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d’Etat, à moins qu’elles constituent le mode de financement d’une mesure d’aide, de sorte qu’elles font partie intégrante de cette mesure, d’autre part, que, pour que l’on puisse juger qu’une taxe, ou une partie d’une taxe, fait partie intégrante d’une mesure d’aide, il doit exister un lien d’affectation contraignant entre la taxe et l’aide en vertu de la réglementation nationale pertinente, en ce sens que le produit de la taxe est nécessairement affecté au financement de l’aide ;

Considérant que, par arrêt du 20 novembre 2003, la Cour de justice des communautés européennes a dit pour droit que « l’article 92, paragraphe 1, du traité CE (devenu après modification, article 87, paragraphe 1, CE) doit être interprété en ce sens qu’un régime tel que celui en cause au principal, qui assure gratuitement pour les éleveurs et les abattoirs la collecte et l’élimination des cadavres d’animaux et des déchets d’abattoirs, doit être qualifié d’aide d’Etat » ;

Considérant que l’article 1er de la loi du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l’élimination des cadavres d’animaux et des déchets d’abattoirs et modifiant le code rural a inséré dans le code général des impôts un article 302 bis ZD instituant, à compter du 1er janvier 1997, une taxe sur les achats de viande due par les personnes qui réalisent des ventes au détail de viande, dont le produit était affecté à un fonds faisant l’objet d’une comptabilité distincte, ayant pour objet de financer la collecte et l’élimination des cadavres d’animaux et des saisies d’abattoirs reconnus impropres à la consommation humaine et animale, activités correspondant au service public de l’équarrissage défini à l’article 264 du code rural en vigueur au cours des années d’imposition en litige ; que le II de l’article 35 de la loi du 30 décembre 2000 de finances rectificative pour 2000, entré en vigueur le 1er janvier 2001, a limité à la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000 l’affectation de la taxe sur les achats de viande au fonds mentionné ci-dessus ; qu’en conséquence, à compter du 1er janvier 2001, en l’absence de dispositions prévoyant l’affectation de cette taxe, celle-ci est devenue une recette du budget général de l’Etat ; qu’à compter de cette même date, le service public de l’équarrissage a été financé au moyen d’une dotation inscrite au budget général de l’Etat ;

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 18 de l’ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, en vigueur au cours des années d’imposition en litige : « Il est fait recette du montant intégral des produits, sans contraction entre les recettes et les dépenses. L’ensemble des recettes assurant l’exécution de l’ensemble des dépenses, toutes les recettes et toutes les dépenses sont imputées à un compte unique, intitulé budget général » ; qu’en vertu du principe à valeur constitutionnelle d’universalité budgétaire résultant de ces dispositions, les recettes et les dépenses doivent figurer au budget de l’Etat pour leur montant brut, sans être contractées, et l’affectation d’une recette déterminée à la couverture d’une dépense déterminée est interdite, sous réserve des exceptions prévues au second alinéa de l’article 18 ; qu’en application de ce principe et de la législation nationale relative à la taxe sur les achats de viande, et sans qu’il soit besoin de se référer aux travaux parlementaires dont est issu l’article 35 de la loi du 30 décembre 2000, à compter du 1er janvier 2001, il n’existait juridiquement aucun lien d’affectation contraignant entre la taxe et le service public de l’équarrissage, et aucun rapport entre le produit de la taxe et le montant du financement public attribué à ce service ; qu’en exécution des règles ainsi applicables, à compter de cette même date, la taxe sur les achats de viande était une recette du budget général, dépourvue de tout lien avec le budget du ministère de l’agriculture et la dotation inscrite à ce budget servant à financer le service public de l’équarrissage ;

Considérant que l’invocation par la société requérante, d’une part, des intentions du gouvernement et du législateur exprimées à l’occasion de débats parlementaires de ne pas obérer le budget général de l’Etat des dépenses autrefois supportées par le fonds spécial géré par le CNASEA, d’autre part, d’une corrélation constatée entre le produit de la taxe et les dépenses à couvrir, n’est pas, à elle seule, suffisante pour établir un tel lien ; que la taxe sur les achats de viandes n’entrant plus, à compter du 1er janvier 2001, en l’absence de lien d’affectation contraignant entre elle et le service public de l’équarrissage, dans le champ d’application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d’Etat, la société requérante ne peut invoquer, au soutien de sa demande en restitution de l’imposition en litige, une éventuelle méconnaissance par les autorités françaises, à l’occasion de la modification du mode de financement du service public de l’équarrissage résultant des dispositions de l’article 35 de la loi du 30 décembre 2000, des obligations qu’imposent la première et la dernière phrases du paragraphe 3 de l’article 88 du traité instituant la Communauté européenne ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 87 et 88 du traité instituant la Communauté européenne est dès lors inopérant ;

Sur le moyen tiré de l’autorité de la chose jugée :

Considérant qu’il résulte de l’examen de l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon en date du 15 janvier 2004 et du jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 22 novembre 2004, lesquels ne concernent pas la requérante, que le moyen tiré de la violation de l’autorité de la chose jugée manque manifestement en fait ; que la Cour de justice des communautés européennes n’ayant pas, par son arrêt du 20 novembre 2003, tranché la question de la conformité au droit communautaire du mécanisme ici appliqué, mais de celui qui était antérieurement en vigueur, le moyen, tiré par la requérante, de la méconnaissance de l’autorité de la chose jugée par ladite Cour doit être écarté ;

Sur le moyen tiré du principe dit « pollueur-payeur » :

Considérant que, compte tenu de l’absence de lien d’affectation contraignant entre la taxe sur les achats de viandes et le service public de l’équarrissage à compter du 1er janvier 2001, est inopérant au soutien d’une demande en restitution de la taxe sur les achats de viande acquittée au titre des années 2001 à 2003, le moyen tiré de ce que la taxe sur les achats de viande méconnaîtrait le principe « pollueur-payeur » issu du droit communautaire, en ce qu’elle fait supporter, aux entreprises de distribution de viande, le coût de l’élimination des déchets relevant du service public de l’équarrissage ;

Sur le moyen tiré de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu’aux termes de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. » ; qu’aux termes de l’article L. 168 du livre des procédures fiscales : « Les omissions totales ou partielles constatées dans l’assiette de l’impôt, les insuffisances, les inexactitudes ou les erreurs d’imposition peuvent être réparées par l’administration des impôts ou par l’administration des douanes et droits indirects, selon le cas, dans les conditions et dans les délais prévus aux articles L. 169 à 189, sauf dispositions contraires du code général des impôts » ; qu’aux termes de l’article L. 176 du même livre : « Pour les taxes sur le chiffre d’affaires, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l’article 269 du code général des impôts » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que le directeur des services fiscaux du Loir-et-Cher, par décisions des 11 août et 13 septembre 2004, a fait droit à la réclamation de la SAS MAXDIS en lui accordant le « dégrèvement », d’un montant de 275 186 euros, des impositions contestées ; qu’il ressort des dispositions précitées de l’article L. 168 du livre des procédures fiscales, alors que le retrait a été effectué dans le délai de reprise prévu à l’article L. 176 du même livre, qu’en matière de taxe sur le chiffre d’affaires et, notamment, comme en l’espèce, de taxe sur les achats de viande, le directeur des services fiscaux du Loir-et-Cher pouvait revenir, comme il l’a fait par sa décision du 17 décembre 2004, sur ses précédentes décisions des 11 août et 13 septembre 2004 accordant à cette dernière la restitution des droits de taxe sur les achats de viande qu’elle avait acquittés pour l’ensemble de la période litigieuse ;

Considérant qu’eu égard à l’instauration de la nouvelle taxe sur les achats de viandes à compter du 1er janvier 2001 en remplacement de la taxe invalidée par la Cour de justice des Communautés européennes applicable à la période antérieure, et alors qu’en application de la loi, la circonstance qu’une imposition ait été dégrevée ne fait pas obstacle à ce que l’administration fasse ultérieurement usage de son droit de reprise dans la limite des délais de prescription, un assujetti ne peut se prévaloir d’une créance certaine et exigible sur l’Etat résultant d’un droit à dégrèvement, constitutive d’un bien protégé au sens des stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que la SAS MAXDIS soutient que l’absence d’exécution des décisions de dégrèvement des 11 août et 13 septembre 2004, méconnaît les dispositions précitées de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que, cependant, la société ne saurait prétendre au bénéfice de ces stipulations que si elle peut faire état de la propriété d’un bien qu’elles ont pour objet de protéger et à laquelle il aurait été porté atteinte ; qu’à défaut de créance certaine, l’espérance légitime d’obtenir la restitution d’une somme d’argent doit être regardée comme un bien au sens de ces stipulations ; que, toutefois, la décision de dégrèvement non motivée, qui ne faisait pas, par elle-même, obstacle au rétablissement de l’imposition avant l’expiration du délai de reprise ouvert à l’administration, n’a pu faire naître une espérance légitime d’obtenir la restitution d’une somme d’argent dont pourrait se prévaloir la SAS MAXDIS ; qu’ainsi, elle ne peut utilement invoquer les stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, dans le champ desquelles elle n’entre pas ;

Sur le moyen tiré de l’opposabilité de la doctrine administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales : « La garantie prévue au premier alinéa de l’article L. 80 A est applicable lorsque l’administration a formellement pris position sur l’appréciation d’une situation de fait au regard d’un texte fiscal (…) » et qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 80 A du même livre : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut néanmoins poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. » ;

Considérant que, d’une part, les décisions de dégrèvement, non motivées, prises par l’administration les 11 août et 13 septembre 2004, ne constituent pas une prise de position formelle de l’administration sur l’appréciation d’une situation de fait au regard du texte fiscal ; que, par suite, la société requérante ne peut se prévaloir de ces décisions sur le fondement de l’article L. 80 B précité du livre des procédures fiscales ; que, d’autre part, si la société requérante soutient que l’administration aurait, par sa documentation de base n° 13 L-323 donné une interprétation de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales qui conduirait en l’espèce à la décharger des impositions mises à sa charge, cette interprétation, qui ne concernerait que la mise en œuvre des articles L. 80 A et L. 80 B eux-mêmes, n’a pas pour objet d’interpréter le texte fiscal d’assiette qui constitue le fondement des droits en litige ; que, dès lors, la requérante ne peut utilement s’en prévaloir ; que, enfin, la doctrine administrative exprimée par la note du 6 janvier 2004 du service juridique de la direction générale des impôts et invoquée par la requérante n’a pas fait l’objet de publication ; que, dès lors, la requérante ne saurait utilement l’invoquer sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la S.A.S. MAXDIS n’est pas fondée à demander la restitution des droits de taxe sur les achats de viandes acquittés au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 ; que par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viandes, versée au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la requérante la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la S.A.S. MAXDIS est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la société par actions simplifiée MAXDIS et au directeur de services fiscaux de Loir-et-Cher.

Délibéré après l’audience du 14 décembre 2010, à laquelle siégeaient :

M. Artus, président,

M. Makhlouf, premier conseiller,

Mme Caruana, conseiller,

Lu en audience publique le 30 décembre 2010.

L’assesseur le plus ancien, Le président-rapporteur,

Marc MAKHLOUF Didier ARTUS

Le greffier,

X-Y Z

La République mande et ordonne au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

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