Tribunal administratif de Paris, 22 décembre 2014, n° 1315684

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 22 déc. 2014, n° 1315684
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 1315684

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

N° 1315684 / 7-2

__________

Syndicat des copropriétaires

du XXX

__________

M. X

Rapporteur

__________

Mme Barrois

Rapporteur Public

__________

Audience du 10 décembre 2014

Jugement du 22 décembre 2014

__________

68-03

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Paris,

(7e section, 2e chambre)

Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 2013, présentée pour le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis XXX à XXX, représenté par son syndic, le cabinet E. & J. Gries, dont le siège est sis XXX à XXX, par Me Boris-Lipszyc ; le syndicat des copropriétaires précité demande au tribunal :

— d’annuler le permis de construire n° PC 075 118 12 V 1066 du 17 mai 2013 par lequel le maire de Paris a autorisé la SCCV 44 Caulaincourt à édifier un immeuble d’habitation sur six niveaux au XXX à XXX ;

— de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 3 000 euros au titre de l’article L 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens ;

Le syndicat soutient :

— que le permis de construire n’a pas été correctement affiché ; qu’il ne mentionne pas l’adresse de la mairie ; qu’il n’est pas suffisamment lisible depuis la rue ; que les délais de recours contentieux ne leur sont pas opposables ; que les vices dont est entaché l’affichage rendent le permis de construire irrégulier ;

— que le pétitionnaire n’a pas sollicité de permis de démolir ; que l’immeuble litigieux se trouvant dans le champ de visibilité d’un immeuble historique, cette absence de permis de démolir entache la régularité du permis de construire ;

— que la façade de l’immeuble projeté, par le choix des matériaux, ses volumes et le niveau de ses ouvertures, porte atteinte au caractère et à l’intérêt des lieux avoisinants, au sens des dispositions des articles R. 111-21 du code de l’urbanisme et UG.11 du règlement du plan local d’urbanisme de Paris ; que la reconstruction implique la destruction d’un fronton et d’un oculus dignes d’intérêt ; qu’en accordant le permis de construire, le maire a entaché son appréciation d’erreur manifeste ;

— que la construction attaquée a pour conséquence d’obstruer les fenêtres sur le mur- pignon du XXX en cause une servitude de vue acquise au bénéfice des propriétaires ;

— qu’elle entraîne la création de vues sur le fonds de la copropriété du 46, rue Caulaincourt, et entrainera une perte d’ensoleillement ;

— que la construction projetée risque d’ébranler les constructions avoisinantes, l’importante carrière de gypse présente en sous-sol n’ayant pas été prise en compte ;

— que les travaux risquent d’altérer l’harmonie de la rue Caulaincourt et de détruire les XXX

— qu’aucune solution de stationnement n’étant prévue, la création de logements aggrave la situation du quartier en la matière ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 janvier 2014, présenté pour la société SCCV 44 Caulaincourt, par Me Martin-Chabat, qui conclut, à titre principal, à l’irrecevabilité de la requête et, à titre subsidiaire, à son rejet sur le fond ; la société SCCV demande en outre que le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du 46, rue Caulaincourt soit condamné au paiement d’une indemnité de 1 000 euros au titre de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme et que soit mise à sa charge la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société SCCV soutient :

— que la requête est tardive, le recours gracieux n’ayant pas eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux, faute d’être intervenu dans le délai prévu à l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme ;

— que le syndicat des copropriétaires, qui n’est pas affecté directement par la construction, ne justifie pas d’un intérêt suffisant à agir aux termes de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2013-638 du 18 juillet 2013 ;

— que les insuffisances alléguées dans l’affichage du permis de construire, à les supposer établies, auraient seulement pour effet de retarder le point de départ du délai de recours contentieux ; qu’elles sont sans incidence sur la légalité du permis ;

— que la demande de permis de construire indique clairement que la réalisation du projet implique la démolition de la toiture ; que cette démolition a été accordée par le permis de construire ; que l’article L. 451-1 du code de l’urbanisme n’a pas été méconnu ;

— que le projet architectural s’inscrit dans son environnement, conformément aux dispositions de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme et UG.11 du règlement du plan local d’urbanisme de Paris ; que l’architecture est sobre ; que l’architecte des bâtiments de France a émis des prescriptions adéquates ;

— que le moyen tiré de ce que le projet ne respecterait pas le gabarit-enveloppe et les cotes fixées par le plan des hauteurs et les fuseaux de protection est dépourvu de toute explication ;

— que le moyen tiré de ce que le projet remettrait en cause les servitudes de vues acquises aux bénéfices des copropriétaires du 46, rue de Caulaincourt est, à supposer que de telles servitudes existent, sans incidence sur la légalité du permis de construire, lequel est délivré sous réserve des droits des tiers ;

— que pour les mêmes raisons, le moyen tiré de ce que le projet entraînerait la création de vues illicites, à le supposer établi, est inopérant ;

— que le moyen tiré de ce que la construction projetée présenterait un défaut de solidité et un risque de fragilisation des constructions avoisinantes n’est pas fondé, les services des carrières ayant été consultés lors de l’instruction du permis de construire, et le permis étant assorti des prescriptions adéquates ;

— que le moyen tiré de ce que les travaux mettraient en danger les acacias bordant la rue Caulaincourt n’est assorti d’aucun argument de fait ou de droit ;

— qu’il en va de même du moyen tiré de ce que le projet ne comporte aucune solution de stationnement ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2014, présenté par la ville de Paris, qui conclut au rejet de la requête ;

La ville de Paris soutient :

— que le moyen tiré de l’irrégularité de l’affichage, à le supposer établi, est sans incidence sur la légalité du permis, cette formalité étant postérieure à la décision attaquée ;

— que le formulaire de demande de permis et la notice descriptive précisent les démolitions envisagées ; que la demande comporte un volet démolition assorti de plans ; que l’article L. 451-1 du code de l’urbanisme n’a pas été méconnu ;

— que la rue Caulaincourt, de caractère haussmannien, n’est pas caractéristique du vieux Montmartre ; que l’immeuble démoli est un bâtiment industriel sans caractère ; que le projet, par ses formes et matériaux, s’insère dans l’existant ;

— la volumétrie du bâtiment s’insère parfaitement dans le gabarit-enveloppe ; que la hauteur n’excède pas les 21,5 mètres permis ;

— que le moyen tiré de ce que la construction entraînerait la condamnation de fenêtres de l’immeuble du 46, rue de Caulaincourt manque en fait, la façade du mur pignon au droit du projet ne comportant que des jours de souffrance ;

— que le moyen tiré de ce que la construction projetée entraînerait la création de vues n’est pas fondé ; que les seules vues directes créées donnent non sur le fond voisin mais sur le bâtiment conservé en fond de parcelle du 44, rue de Caulaincourt ; que la mise en place de balcons n’emporte pas création de vues au sens du code de l’urbanisme ; que la perte d’ensoleillement, qui n’affecte que des avantages de droit privé, est sans incidence sur la légalité du permis de construire ;

— que, s’agissant de la présence de carrières, l’inspection générale des carrières a été saisie et a émis un avis favorable le 30 novembre 2012, assorti de prescriptions pour la bonne réalisation des travaux ;

— que la surélévation de l’immeuble est insusceptible de porter atteinte aux arbres de la rue Caulaincourt ;

— que le projet ne constitue pas une opération d’aménagement ; que l’article UG.12 n’imposant la création de place de stationnement que pour les constructions à usage d’habitation créant une surface hors œuvre nette supérieure à 2 000 m² ; que la création de neuf logements n’implique pas la réalisation d’infrastructures nouvelles ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 mai 2014, présenté pour le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du 46, rue Caulaincourt, par Me Boris-Lipszyc, qui demande au tribunal :

— d’annuler le permis de construire n° PC 075 118 12 V 1066 du 17 mai 2013 ;

— d’annuler la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 22 juillet 2013 ;

— de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761 du code de justice administrative et les entiers dépens ;

Le syndicat de copropriétaires soutient :

— s’agissant de son intérêt à agir, un syndicat de copropriétaires a toujours qualité et intérêt à contester la légalité d’une permis de construire d’un immeuble voisin ; qu’en outre l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme ne s’applique qu’aux recours formés contre les décisions intervenues après son entrée en vigueur, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;

— que le caractère incomplet de l’affichage et son manque de lisibilité affectent la régularité du permis ; qu’en outre, ils font obstacle à ce que lui soit opposé une tardiveté ;

— que la demande de démolition, qui ne concerne pas le fronton et l’oculus, est incomplète ;

— que la démolition de l’oculus et du fronton et leur remplacement par une construction sans caractère dénaturent une rue pittoresque ;

— que le gabarit-enveloppe, les cotes du plan des hauteurs et les cotes des fuseaux de protection ne sont pas respectées ; que la hauteur est supérieure à celle des immeubles voisins ;

— que la construction va obturer les fenêtres du mur pignon droit du XXX, et remet en cause une servitude de vue ; qu’elle va créer des vues sur cour et priver les résidents du 46 de leur ensoleillement ;

— que le sol fragile va davantage être ébranlé par la construction nouvelle ;

— que la survie des acacias est menacée ;

— que le projet en comporte pas d’infrastructure de stationnement ;

Vu la lettre en date du 4 juin 2014 par laquelle le tribunal a informé les parties, en application de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, qu’il était envisagé d’inscrire le dossier à une audience qui pourrait avoir lieu en octobre-novembre 2014 et que l’instruction était susceptible d’être close par une ordonnance de clôture ou un avis d’audience à partir du 17 juin 2014 sans qu’elles en soient préalablement informées et l’avis de réception de cette lettre ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juillet 2014, présenté pour le syndicat des copropriétaires du XXX qui conclut aux m^mes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Le syndicat soutient :

— qu’il a intérêt donnant qualité à contester le permis de construire d’un immeuble voisin ; qu’il représente la collectivité des copropriétaires ; que l’article 5 de l’ordonnance du 18 juillet 2013 entré en vigueur le 20 aout 2013 n’est pas applicable au cas d’espèce ;

— que le panneau d’affichage ne mentionnait pas l’adresse de la mairie où le dossier de permis de construire pouvait être consulté ; que l’affichage était difficilement lisible depuis la rue ; que les délais de recours contentieux ne lui sont pas opposables ;

— que le permis de construire, qui ne spécifie pas que le fronton et l’oculus seront démolis, est incomplet ;

— que la construction nouvelle dépare le paysage urbain environnant en méconnaissance des dispositions de l’article UG11 du plan local d’urbanisme ; que le gabarit-enveloppe n’est pas respecté ; que l’immeuble est d’une hauteur supérieure à celle des immeubles voisins ;

— que les fenêtres des appartements situées du 3e au 5e étage seront totalement obstruées ; que l’immeuble nouveau limitera l’ensoleillement du 46 ; que les futurs habitants bénéficieront de vues directes droites et obliques sur le fonds voisin ;

— qu’en raison de la présence de carrières, le sous-sol fragilisé risque d’être ébranlé par les travaux ; que l’immeuble du 42 se fissure ;

— que les fondations du nouvel immeuble vont endommager les racines des acacias de la rue Caulaincourt ;

— que l’immeuble nouveau ne comporte pas de solution de stationnement ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 septembre 2014, présenté pour la société SCCV 44 Caulaincourt, par Me Martin-Chabat, qui persiste dans ces précédentes écritures ; elle demande à titre subsidiaire l’application de l’article L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ;

La société SCCV 44 Caulaincourt soutient :

— que le syndicat des copropriétaires qui administre les parties communes et qui s’inquiète essentiellement de la perte de vues et de luminosité ne justifie pas d’un intérêt suffisant à agir ;

— que les conclusions tendant à l’annulation du rejet implicite du recours gracieux, présentées pour la première fois le 17 mai 2014 sont tardives ;

— que les insuffisances de l’affichage sont sans incidence sur la légalité du permis de construire ;

— que la démolition de la toiture implique la démolition du fronton ; que les démolitions sollicitées ont été précisément décrites dans le dossier graphique et photographique de la demande ;

— que la rue Caulaincourt ne présente aucune cohérence architecturale ; que l’immeuble existant détonnait ; que son remplacement par une construction sobre est bienvenu ;

— que s’il est exact que la construction nouvelle dépassera le niveau actuel des voisins, les limites de hauteur ne sont pas dépassées ;

— que les moyens tirés de ce que la construction porterait atteinte à une servitude de vue et créerait des vues illicites ne sont pas justifiés et sont inopérants s’agissant de litiges de droit privé ;

— que le service des carrières a pris les dispositions nécessaires pour que soit assurée la stabilité du nouvel immeuble qui confortera celui des requérants ;

— que les moyens tirés de l’atteinte portée aux arbres et de l’absence de création de places de stationnement ne sont pas justifiés en droit ou en fait ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 octobre 2014, présenté pour le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du 46, rue Caulaincourt, par Me Boris-Lipszyc, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Le syndicat des copropriétaires soutient en outre que la demande formulée sur le fondement de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme ne saurait être accueillie dès lors, d’une part, que de telles conclusions doivent être présentées, à peine d’irrecevabilité, dans un mémoire distinct, d’autre part, qu’il n’a pas excédé la défense de ses intérêts légitimes, et enfin, que la SCCV ne justifie pas d’un préjudice excessif lié à la présente requête ;

Vu l’ordonnance du 13 novembre 2014 portant clôture immédiate de l’instruction ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le plan local d’urbanisme de la ville de Paris ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 10 décembre 2014 :

— le rapport de M. X ;

— les conclusions de Mme Barrois, rapporteur public ;

— et les observations de Me Boris-Lipszyc, pour le syndicat des copropriétaires du XXX ;

Les défendeurs n’étant ni présents ni représentés ;

1. Considérant que la société SCCV 44 Caulaincourt a déposé le 20 novembre 2012 une demande de permis de construire prévoyant la surélévation de quatre niveaux et de combles d’un bâtiment à usage commercial de deux étages sis XXX en vue de l’extension de l’habitation par création de neuf logements, après démolition de la toiture et comportant le changement partiel de destination de locaux commerciaux en habitation au rez-de-chaussée et au premier étage, la création d’un escalier et d’un ascenseur au rez-de-chaussée et la pose de fenêtres de toit ; que le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis XXX demande l’annulation de l’arrêté en date du 17 mai 2013 par lequel le maire de Paris a délivré le permis de construire, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux présenté le 22 juillet 2013 ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par la société SCCV 44 Caulaincourt et par la ville de Paris :

Sur la légalité du permis de construire :

Sur la légalité externe :

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 424-15 du code de l’urbanisme : « Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l’arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier … » ; que l’article A 424-16 dispose que : « Le panneau prévu à l’article A. 424-1 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l’adresse de la mairie où le dossier peut être consulté » ;

3. Considérant que, si le syndicat des copropriétaires soutient que le panneau aurait été difficilement lisible depuis la rue et que l’adresse de la mairie n’y figurerait pas en méconnaissance des dispositions précitées du code de l’urbanisme, les irrégularités alléguées, postérieures au permis de construire attaqué et qui n’affectent que la formalité d’affichage, sont sans incidence sur la légalité du permis lui-même ;

4. Considérant qu’aux termes de l’article R. 421-26 du code de l’urbanisme : « Les démolitions mentionnées aux articles R. 421-27 et R. 421-28 sont soumises à permis de démolir à l’exception de celles qui entrent dans les cas visés à l’article R. 421-29 » ; que l’article R. 421-28 dispose : « Doivent en outre être précédés d’un permis de démolir les travaux ayant pour objet de démolir ou de rendre inutilisable tout ou partie d’une construction : (…) / c) située dans le champ de visibilité d’un monument historique défini à l’article L. 621-30-1 du code du patrimoine dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ou dans une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine ; / d) Située dans un site inscrit ou classé en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l’environnement (…) » ; que toutefois, aux termes de l’article L.451-1 du code de l’urbanisme : « Lorsque la démolition est nécessaire à une opération de construction ou d’aménagement, la demande de permis de construire ou d’aménager peut porter à la fois sur la démolition et sur la construction ou l’aménagement. Dans ce cas, le permis de construire ou le permis d’aménager autorise la démolition » ;

5. Considérant que la demande présentée le 20 novembre 2012 par la société SCVV 44 Caulaincourt portait, ainsi qu’il a été dit précédemment, sur la surélévation d’un immeuble « après démolition de la toiture » ; que la notice descriptive précisait que « les planchers du premier et du deuxième étage ainsi que la toiture côté rue seraient démolis » et renvoyait aux plans de démolition joints ; que le plan des démolitions permettait d’identifier clairement les éléments concernés ; que par ailleurs, il ressort de la comparaison entre les plans de l’existant et ceux de la construction projetée que le fronton et l’oculus de la façade à hauteur du toit devaient être démolis avec la toiture, du fait de la surélévation du bâtiment ; que le dossier du pétitionnaire, clair et complet, a permis aux services de statuer sur la demande de démolition en connaissance de cause ; que l’arrêté du 17 mai 2013 ayant accordé le permis de construire sollicité « après démolition de la toiture », le moyen tiré de ce que les démolitions qu’impliquait la surélévation du bâtiment n’auraient pas été autorisées manque en fait ;

Sur la légalité interne :

6. Considérant qu’aux termes de l’article UG.11.1 du règlement du plan local d’urbanisme : « (…) L’autorisation de travaux peut être refusée ou n’être accordée que sous réserve de prescriptions si la construction, l’installation ou l’ouvrage, par sa situation, son volume, son aspect, son rythme ou sa coloration, est de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales (…) » ; qu’aux termes de l’article UG.11.1.3 du même règlement : « Les constructions nouvelles doivent s’intégrer au tissu existant, en prenant en compte les particularités morphologiques et typologiques des quartiers (rythmes verticaux, largeurs des parcelles en façade sur voies, reliefs…) ainsi que celles des façades existantes (rythmes, échelles, ornementations, matériaux, couleurs…) et des couvertures (toitures, terrasses, retraits…)…» ; que par ailleurs aux termes de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales » ;

7. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le bâtiment existant situé au

XXX est un immeuble industriel de deux étages surplombé par des immeubles de la fin du dix-neuvième siècle de cinq ou six étages ; que l’immeuble surélevé autorisé par le permis de construire est d’architecture sobre ; qu’il assure une continuité dans la ligne de hauteur des immeubles voisins et qu’il s’insère par ses lignes et matériaux dans le bâti existant ; qu’en outre, l’architecte des bâtiments de France a émis plusieurs prescriptions relatives à l’aspect de la toiture, de la façade et des modénatures du futur immeuble ; que, par suite, le syndicat des copropriétaires n’est pas fondé à soutenir qu’en accordant le permis de construire contesté, le maire de Paris aurait commis une erreur d’appréciation ;

8. Considérant qu’aux termes de l’article 10.2.4 du plan local d’urbanisme, dans sa partie applicable au secteur Montmartre : « Le gabarit-enveloppe en bordure de voie s’applique aux terrains bordant la voie et à l’intérieur d’une bande de 20 mètres mesurés à partir du plan de la façade représentée sur les planches d’îlots de l’Atlas des plans de détail. / Il se compose successivement : /a – d’une verticale comprise entre le sol et la cote rattachée au nivellement orthométrique indiquée sur les planches d’îlot ; / b – le cas échéant, de 1 ou 2 niveaux en retrait. Aucun des retraits ne peut dépasser 3,00 m de hauteur et 0,40 m de profondeur, excepté s’il affecte un couronnement de pente nulle ; dans ce dernier cas, sa profondeur n’est pas limitée ; / c – d’un couronnement de pente P (le cas échéant, de pentes P et P') défini ci-après selon la couleur du symbole inscrit sur les planches d’îlot (filet ou rectangle), limité par une horizontale située à une hauteur h au-dessus du sommet de la verticale : (…) / 2- 0 < P ≤ 30° ; h = 2,50 mètres ; rectangle rose (…) » ;

9. Considérant que si le syndicat des copropriétaires requérant fait valoir que la hauteur de l’immeuble du XXX, après surélévation, dépassera celle des immeubles du

46 et du 42, il n’établit pas que cet immeuble ne s’inscrirait pas dans le gabarit-enveloppe prescrit à l’article 10.2.4 précité du plan local d’urbanisme dans sa partie applicable au secteur Montmartre ; que s’il soutient que les cotes fixées par le plan des hauteurs et les fuseaux de protection ne seraient pas respectées, cette allégation n’est pas assortie de précisions suffisantes pour que le tribunal puisse se prononcer sur son bien-fondé ;

10. Considérant que si le syndicat des copropriétaires soutient que la construction projetée condamnerait des fenêtres ouvertes sur le mur pignon de l’immeuble du

XXX et priverait ainsi certaines pièces de lumière et d’un moyen de ventilation naturelle, il ne précise pas quelle règle d’urbanisme aurait été méconnue ;

11. Considérant que si le syndicat requérant soutient que la création d’appartements qui bénéficieront de fenêtres et de balcons côté cour, d’une part altérera la luminosité des logements du XXX, d’autre part créera des vues directes droites et obliques selon les étages sur le fond voisin, ce moyen est insusceptible de prospérer pour les mêmes raisons que le moyen précédent ; qu’en tout état de cause, les autorisations d’urbanisme étant délivrées sous réserve des droits des tiers, un tel grief est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

12. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations » ; que s’agissant des zones d’anciennes carrières de Paris, l’article UG 2.1 b) dispose : « Dans les zones d’anciennes carrières souterraines, dans les zones comportant des poches de gypse antéludien et dans la Zone de risque de dissolution du gypse antéludien, la réalisation de constructions ou d’installations et la surélévation, l’extension ou la modification de bâtiments existants sont, le cas échéant, subordonnées aux conditions spéciales imposées par l’Inspection générale des carrières en vue d’assurer la stabilité des constructions projetées et de prévenir tout risque d’éboulement ou d’affaissement (la Zone de risque de dissolution du gypse antéludien est délimitée sur le Plan des secteurs de risques figurant dans l’atlas général ; le plan délimitant les zones d’anciennes carrières souterraines et les zones comportant des poches de gypse antéludien, ainsi que les prescriptions qui s’y appliquent, figurent dans les annexes du PLU, servitudes d’utilité publique, § IV, B : servitudes relatives à la sécurité publique) » ;

13. Considérant que si le syndicat requérant soutient que la construction nouvelle serait susceptible d’ébranler les immeubles voisins, le sous-sol étant fragilisé par d’anciennes carrières de gypse, il ressort des pièces du dossier que l’inspection générale des carrières qui, par un avis en date du 30 novembre 2012, a subordonné la réalisation du projet de construction à la consolidation de la partie du sous-sol minée et au renforcement des fondations existantes, a pris en compte ce risque ; que le syndicat requérant n’établissant pas, et ne soutenant d’ailleurs pas, que les prescriptions de l’inspection générale des carrières dont est assorti le permis de construire seraient manifestement insuffisantes, le moyen tiré de la fragilité du sous-sol doit être écarté ;

14. Considérant que si le syndicat des copropriétaires soutient que le projet de construction risquerait de porter atteinte aux racines des acacias qui bordent la rue Caulaincourt et ainsi d’altérer cette voie, d’une part il ne précise pas quelles règles d’urbanisme auraient été méconnues, d’autre part il n’explique pas en quoi la surélévation de l’immeuble pourrait affecter les racines d’un arbre voisin ;

15. Considérant que l’article UG 12 du plan local d’urbanisme fait obligation de créer des places de stationnement en cas de construction nouvelle qui créent une surface hors œuvre nette (SHON) d’habitation supérieure à 2 000 m2 ; qu’en l’espèce, la réalisation du projet implique une création de surface de 625 m2, dont une partie résulte d’un changement de destination, pour neuf logements ; que si le syndicat requérant se plaint de ce que « le projet ne comporte aucune solution de stationnement alors même que le secteur est déjà totalement obéré », les prescriptions du plan local d’urbanisme n’ont pas été en l’espèce méconnues ;

16. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la requête du syndicat des copropriétaires du XXX doit être rejetée ;

Sur les conclusions reconventionnelles de la société SCCV 44 Caulaincourt tendant à la condamnation du syndicat des copropriétaires au paiement de 1 000 euros au titre de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme :

17. Considérant qu’aux termes de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme : « Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager est mis en œuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l’auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel (…) » ;

18. Considérant que la société SCCV 44 Caulaincourt n’a pas présenté sa demande de dommages et intérêts dans un mémoire distinct ; qu’au surplus elle ne démontre pas que le syndicat des copropriétaires aurait exercé le présent recours dans des conditions qui excèdent la défense de ses intérêts légitimes et qu’elle supporterait un préjudice excessif y résultant ; que, par suite, ces conclusions ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

20. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la ville de Paris et la société SCCV 44 Caulaincourt, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, versent au syndicat des copropriétaires requérant la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’en revanche, il y a lieu dans les circonstances de l’espèce de condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis XXX à verser à ce titre la somme de 1 500 euros à la société SCCV 44 Caulaincourt ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis XXX est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société SCCV 44 Caulaincourt tendant à ce que le syndicat requérant soit condamné à l’indemniser au titre de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme sont rejetées.

Article 3 : Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis XXX versera à la société SCCV 44 Caulaincourt la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4: Le présent jugement sera notifié au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis XXX, à la ville de Paris et à la société SCCV 44 Caulaincourt.

Délibéré après l’audience du 10 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

Mme Doumergue, président,

M. X, premier conseiller,

Mme Guilloteau, premier conseiller,

Lu en audience publique le 22 décembre 2014.

Le rapporteur, La présidente,

Ch. X M. Doumergue

La greffière,

S. Abdoulaye

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile de France, préfet de Paris, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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Tribunal administratif de Paris, 22 décembre 2014, n° 1315684