Tribunal administratif de Paris, 8e section - mesd, 30 décembre 2022, n° 2225006

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 8e sect. - mesd, 30 déc. 2022, n° 2225006
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 2225006
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Vu la requête enregistrée le 2 décembre 2022, par laquelle M. B E, représenté par Me Kadoch, demande au tribunal :

1°) de l’admettre au bénéfice de l’aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) d’annuler l’arrêté du préfet du préfet de police du 17 novembre 2022 portant décision de transfert aux autorités italiennes aux fins d’examen de sa demande d’asile ;

3°) d’enjoindre au préfet de police de l’admettre au séjour en procédure normale ;

4°) de mettre à la charge de l’État une somme de 1 500 euros au titre de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au profit de son conseil à condition que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l’État.

Il soutient que :

— la décision est entachée d’une incompétence de son auteur ;

— la décision est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation en raison d’un défaut d’examen suffisant de sa demande ;

— il risque une peine d’emprisonnement de quatre ans en Italie.

Vu, enregistré le 15 décembre 2022, le mémoire par lequel le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu’aucun des moyens de la requête n’est fondé.

Vu :

— les autres pièces du dossier ;

Vu :

— la convention de Genève du 28 juillet 1951,

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

— le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003,

— le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013,

— le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013,

— la convention d’application de l’accord de Schengen signée le 19 juin 1990,

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,

— l’ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020,

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. G en application de l’article

R. 776-15 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. G,

— les observations de M. E,

— les observations de Mme A C, représentant le préfet de police.

Considérant ce qui suit :

1. M. B E, ressortissant soudanais né le 5 février 1995, demande au tribunal d’annuler l’arrêté du 17 novembre 2022 par lequel le préfet de police a prononcé son transfert aux autorités italiennes.

Sur les conclusions tendant au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire :

2. Aux termes du premier alinéa de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : « Dans les cas d’urgence, sous réserve de l’application des règles relatives aux commissions ou désignations d’office, l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d’aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. () ».

3. En application de ces dispositions, il y a lieu, eu égard aux circonstances de l’espèce, de prononcer l’admission provisoire de M. E au bénéfice de l’aide juridictionnelle.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

4. Par un n° 2022-01166 du 3 octobre 2022 régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture de police n° 75-2022-707 du 3 octobre 2022, le préfet de police, a donné à Mme F D attachée de l’administration de l’Etat, délégation à l’effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, dont relève la police des étrangers, en cas d’absence ou d’empêchement d’autorités dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu’elles n’ont pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l’acte attaqué. Par suite, le moyen tiré de ce que l’arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté comme manquant en fait.

5. En application de l’article L. 572-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, la décision de transfert dont fait l’objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d’asile dont l’examen relève d’un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c’est-à-dire qu’elle doit comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

6. La décision de transfert en litige vise, notamment, le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Elle indique que M. E a sollicité l’asile auprès des autorités italiennes le 30 janvier 2022, que ces autorités ont le 14 mars 2022, été saisies d’une reprise en charge en application de l’article 18 (1) (b) du règlement (UE) n° 604/2013, que M. E a fait l’objet d’une réadmission effective vers l’Italie le 28 juin 2022 puis est revenu sur le territoire français où il s’est le 19 septembre 2022, présenté de nouveau devant le guichet unique des demandeurs d’asile où il a effectué une demande de protection internationale, que, saisies de nouveau le 11 octobre 2022 d’une demande de reprise en charge sur le fondement du 1 (1) (b) du même règlement, ces autorités ont, accepté leur responsabilité implicite le 26 octobre 2022 en application du 18 (1) (b) dudit règlement. Dès lors, le moyen tiré de ce que l’arrêté ne satisferait pas à l’exigence de motivation posée à l’article L. 572-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile doit dès lors être écarté.

7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n’aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de l’intéressé et le moyen doit par suite être écarté.

8. En huitième lieu, aux termes du 2 de l’article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : « () Lorsqu’il est impossible de transférer un demandeur vers l’État membre initialement désigné comme responsable parce qu’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’État membre procédant à la détermination de l’État membre responsable poursuit l’examen des critères énoncés au chapitre III afin d’établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable ». Aux termes de l’article 17 de ce règlement : « 1. Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (). ».

9. Eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l’Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l’absence de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l’intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu’à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l’intéressé serait susceptible de faire l’objet d’une mesure d’éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations.

10. La seule circonstance qu’à la suite de l’instruction de sa demande de protection par l’Italie, l’intéressé serait susceptible de faire l’objet d’une mesure d’éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations. Par ailleurs, M. E n’avance aucune raison sérieuse de croire qu’il existerait des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs d’asile dans cet Etat membre et s’il fait valoir qu’il encourt une menace de quatre ans de prison en cas de retour en Italie après une première réadmission effective, en tout état de cause, il ne l’établit pas. Dans ces conditions, en l’absence de sérieuses raisons de croire qu’il existe en Italie des défaillances systémiques dans le traitement des demandeurs d’asile et alors que l’intéressé n’établit pas qu’il serait soumis dans ce pays à des traitements contraires à l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et à l’article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, les moyens tirés de ce que l’arrêté en litige serait contraire à ces stipulations et entaché d’erreur manifeste d’appréciation au regard des dispositions de l’article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ne peuvent qu’être écartés.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. E doit être rejetée dans toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : M. E est admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. B E et au préfet de police.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

Le magistrat désigné,

P. G La greffière,

N. DUPOUY

La République mande et ordonne au préfet de police, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

N°2225006/8

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