Tribunal administratif de Paris, 8e section - mesd, 31 décembre 2022, n° 2226719

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 8e sect. - mesd, 31 déc. 2022, n° 2226719
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 2226719
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance de renvoi du 23 décembre 2022, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a transmis au tribunal administratif de Paris la requête de M. C A, enregistrée le 19 décembre 2022 au greffe du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Par cette requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 et 29 décembre 2022 au greffe du tribunal administratif de Paris, M. A, retenu au centre de rétention administrative Paris-Vincennes, représenté par Me Saligari, demande au tribunal :

1°) de lui accorder le bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d’annuler l’arrêté du 18 décembre 2022 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l’a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois ;

3°) d’enjoindre au préfet territorialement compétent, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement ;

4°) de mettre à la charge de l’État la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

— l’arrêté attaqué est entaché d’incompétence de son auteur ;

— il est insuffisamment motivé ;

— il n’a pas été précédé d’un examen particulier de sa situation personnelle ;

— il a été pris en méconnaissance de son droit d’être entendu ;

— il méconnaît les dispositions du 2° de l’article L. 611-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— il méconnaît les dispositions du 5° de l’article L. 611-3 du même code ;

— il méconnaît les stipulations de l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— il méconnaît le 1 du 3 de la convention internationale des droits de l’enfant ;

— il est entaché d’une erreur dans l’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

— les décisions lui refusant le délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français sont dépourvues de base légale, en raison de l’illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. Khansari en application de l’article R. 776-15 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Khansari,

— et les observations de Me Legrand, substituant Me Saligari, représentant M. A.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Considérant ce qui suit :

1. M. A, ressortissant malien né le 2 février 1990, est actuellement retenu au centre de rétention de Paris-Vincennes. Par la présente requête, il demande l’annulation de l’arrêté du 18 décembre 2022 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l’a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.

Sur l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : « Dans les cas d’urgence (), l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d’aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ». Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l’admission provisoire de M. A au bénéfice de l’aide juridictionnelle.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Sur les moyens communs à l’ensemble des décisions attaquées :

3. En premier lieu, l’arrêté litigieux a été signé par M. B E, adjoint au chef du bureau des examens spécialisés et de l’éloignement qui avait reçu par un arrêté n° 2022-093 du 13 octobre 2022 régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de l’État dans les Hauts-de-Seine du 17 octobre 2022, une délégation, en cas d’absence ou d’empêchement de Mme D, directrice des migrations et de l’intégration, à l’effet de signer les obligations de quitter le territoire assorties ou non d’un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi, ainsi que les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’arrêté en litige doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort des termes de l’arrêté attaqué que celui-ci comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu’être écarté.

5. En troisième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de l’arrêté attaqué que le préfet n’aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle du requérant avant de prononcer à son encontre la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige. Il suit de là que le moyen doit être écarté.

6. En quatrième lieu, le droit d’être entendu préalablement à toute décision qui affecte sensiblement et défavorablement les intérêts de son destinataire constitue l’une des composantes du droit de la défense, tel qu’il est énoncé notamment au 2 de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et fait partie des principes généraux du droit de l’Union européenne ayant la même valeur que les traités. Il garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative, afin que l’autorité compétente soit mise à même de tenir compte de l’ensemble des éléments pertinents pour fonder sa décision. Ce droit n’implique pas systématiquement l’obligation, pour l’administration, d’organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l’intéressé, ni même d’inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu’une décision lui faisant grief est susceptible d’être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales. Enfin, une atteinte à ce droit n’est susceptible d’affecter la régularité de la procédure à l’issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu’il lui revient, le cas échéant, d’établir devant la juridiction saisie. En l’espèce, le requérant, qui a été mis en mesure de formuler des observations au cours d’un entretien intervenu le 18 décembre 2022, ne précise pas en quoi il disposait d’informations pertinentes tenant à sa situation personnelle qu’il aurait été empêché de porter à la connaissance de l’administration avant que ne soit pris l’arrêté attaqué et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à la décision prononçant son maintien en rétention. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté.

7. En cinquième lieu, aux termes du 2° de l’article L. 611-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Ne peuvent faire l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français : / () 2° L’étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu’il a atteint au plus l’âge de treize ans ». Il ressort des pièces du dossier que les certificats de scolarité versés au dossier par le requérant ne suffisent pas à apporter pas la preuve de sa résidence habituelle au sens des dispositions précitées du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

8. En sixième lieu, aux termes du 5° de l’article L. 611-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : " Ne peuvent faire l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français : / () 5° L’étranger qui est père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France, à condition qu’il établisse contribuer effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant dans les conditions prévues par l’article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; () ".

9. S’il ressort des pièces du dossier que l’intéressé est le père de deux enfants nés en France le 31 octobre 2015 et le 30 juillet 2017, qu’il a reconnus après leur naissance et dont la mère est de nationalité française, il ne produit aucun élément de nature à établir la réalité et l’intensité des liens qu’il entretient avec cette dernière et avec ses enfants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance du 1 du 3 de la convention internationale des droits de l’enfant doit être écarté.

10. En septième lieu, eu égard aux éléments de sa situation personnelle rappelés au point précédent et alors, en outre, qu’il ressort des pièces du dossier que le requérant a été signalé à plusieurs reprises pour des faits de viol aggravé, viol en réunion, viol sur mineur, agression sexuelle en réunion, outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique commis en réunion, violences volontaires en état d’ivresse, M. A n’est pas fondé à soutenir que la décision attaquée porte au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle de l’intéressé. Par suite, le moyen doit être écarté.

Sur la décision portant refus de délai de départ volontaire :

12. Le requérant ne démontre pas l’illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision refusant le délai de départ volontaire doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

13. Le requérant ne démontre pas l’illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination doit être écarté.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

14. Le requérant ne démontre pas l’illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 18 décembre 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d’injonction sont rejetées, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : M. A est admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C A et au préfet des Hauts-de-Seine.

Rendu en audience publique le 31 décembre 2022.

Le magistrat désigné,

A. Khansari

La greffière,

A. DEPOUSIER La République mande et ordonne au préfet des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision./8

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