Tribunal administratif de Rennes, 4ème chambre, 29 décembre 2023, n° 2105656

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Rennes, 4e ch., 29 déc. 2023, n° 2105656
Juridiction : Tribunal administratif de Rennes
Numéro : 2105656
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 30 décembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 5 novembre 2021, 8 novembre 2021 et 27 novembre 2023, le syndicat Sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine et M. C D, représentés par Me Bon-Julien, demandent au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 7 septembre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier Guillaume Régnier de Rennes a refusé d’accorder une autorisation spéciale d’absence pour l’exercice du droit syndical à M. D, représentant du syndicat Sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine, pour la journée du 9 septembre 2021 ;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier Guillaume Régnier le versement de la somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— la décision attaquée est entachée d’un vice d’incompétence ;

— elle est entachée d’une insuffisance de motivation en fait et d’un défaut de motivation en droit ;

— elle est entachée d’un vice de procédure en l’absence de mise en œuvre de la procédure préalable contradictoire prévue par l’article L. 121-2 du code des relations entre le public et l’administration ;

— elle est entachée d’une erreur de droit dès lors qu’une situation de sous-effectif n’est pas de nature à justifier un refus ou un retrait d’autorisation d’absence sollicitée par un représentant syndical au titre de sa décharge syndicale et en tant que membre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ;

— elle porte atteinte à la liberté syndicale ;

— elle est entachée d’une erreur d’appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2023, le centre hospitalier Guillaume Régnier, représenté par la SELARL Houdart et associés, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu’aucun des moyens soulevés par les requérants n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code du travail ;

— la loi 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme René,

— les conclusions de M. Met, rapporteur public,

— et les observations de Me Le Rouge de Guerdavid, substituant Me Bon-Julien, représentant M. D, présent.

Considérant ce qui suit :

1. M. D, infirmier en soins généraux titulaire, est employé par le centre hospitalier Guillaume Régnier de Rennes et affecté au pôle hospitalo-universitaire de psychiatrie G08 de l’établissement. Adhérent au syndicat Sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine, il a été élu représentant du personnel et est membre titulaire du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Par courrier du 2 septembre 2021, il a été convoqué par la direction du centre hospitalier Guillaume Régnier pour assister à une réunion extraordinaire du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail prévue le 9 septembre suivant entre 16 et 17 heures afin d’évoquer le « manque d’effectifs récurrent des professionnels soignants au sein du CHGR ». Par décision du 7 septembre 2021 dont le syndicat Sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine et M. D demandent l’annulation, le directeur du centre hospitalier Guillaume Régnier a finalement refusé de lui accorder une autorisation spéciale d’absence pour la journée du 9 septembre 2021 et l’a informé qu’il serait affecté à l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Chateaugiron pour concourir à l’organisation du travail du géronto-pôle, cette affectation engendrant une modification de son planning pour le 9 septembre 2021, à savoir une prise de poste à 14 heures et une fin de poste à 21 heures 30.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l’article L. 221-2 du code des relations entre le public et l’administration : « L’entrée en vigueur d’un acte réglementaire est subordonnée à l’accomplissement de formalités adéquates de publicité, notamment par la voie, selon les cas, d’une publication ou d’un affichage, sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires ou instituant d’autres formalités préalables. / Un acte réglementaire entre en vigueur le lendemain du jour de l’accomplissement des formalités prévues au premier alinéa, sauf à ce qu’il en soit disposé autrement par la loi, par l’acte réglementaire lui-même ou par un autre règlement () ».

3. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée est signée par M. A B, directeur des affaires médicales et des ressources humaines du centre hospitalier Guillaume Régnier. Pour justifier de sa compétence, le centre hospitalier Guillaume Régnier produit une décision du 28 juin 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier Guillaume Régnier a donné délégation de signature à M. B pour signer les décisions portant sur toutes les affaires courantes afférentes à ses attributions fonctionnelles, notamment, en matière de « gestion des personnels soumis au titre IV de la fonction hospitalière », les décisions relatives aux « contentieux en ressources humaines, organisation du travail, congés, autorisations d’absence, droit de grève et exercice syndical ». Toutefois, si cette décision prévoit sa publication au recueil des actes administratifs de la préfecture d’Ille-et-Vilaine et son affichage au sein de l’établissement, le centre hospitalier Guillaume Régnier n’établit pas, en dépit d’une mesure d’instruction en ce sens, l’accomplissement de ces mesures de publicité ou de toutes autres formalités adéquates de publicité subordonnant son entrée en vigueur. Il s’ensuit que le moyen tiré de l’incompétence du signataire de la décision attaquée doit être accueilli.

4. En second lieu, la décision attaquée, fondée sur les nécessités de service, mentionne la situation de sous-effectif qu’induirait la délivrance de l’autorisation spéciale d’absence sollicitée par M. D. Le centre hospitalier Guillaume Régnier fait valoir que pour assurer la continuité du service au sein de l’EHPAD de Chateaugiron l’effectif minimum est d’un infirmier diplômé d’État et que le 9 septembre 2021, du fait de l’absentéisme et du manque d’infirmiers au sein de cet établissement, aucun infirmier diplômé d’État n’était présent sur le site, ce qui justifiait selon lui la présence indispensable de M. D. Toutefois, si les pièces du dossier, notamment le « projet de mise en œuvre de mesures d’ajustement du tableau des effectifs et de l’organisation du travail à l’EHPAD du CHGR » de février 2021 produit en défense, tendent à démontrer la nécessité d’avoir au minimum un infirmier diplômé d’État sur le site chaque jour de la semaine, l’absence de tout infirmier à cette date n’est pas établie. Il ressort au contraire du planning des effectifs produit par les requérants qu’une infirmière affectée à l’EHPAD de Chateaugiron était présente le 9 septembre 2021 entre 7h30 et 19h30. Les mentions figurant dans ce planning ne sont pas contestées par le centre hospitalier Guillaume Régnier. Alors que la réunion du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 9 septembre 2021 avait pour objet le manque d’effectifs récurrent des professionnels soignants au sein du centre hospitalier Guillaume Régnier, il n’est en outre pas contesté que M. D occupait à cet égard des fonctions spécifiques parmi les représentants du syndicat sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine membres du même comité, dont le traitement des feuilles d’évènements indésirables et d’accident de travail, et qu’il participaient notamment à un groupe de travail issu de ce comité dédié à une veille relative aux risques psycho-sociaux. Il s’ensuit qu’en refusant d’octroyer à M. D une autorisation spéciale d’absence pour le 9 septembre 2021, le directeur du centre hospitalier Guillaume Régnier a entaché sa décision d’une erreur d’appréciation et a, dans ces circonstances, porté atteinte à la liberté syndicale.

5. Il résulte de ce qui précède et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que la décision du 7 septembre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier Guillaume Régnier de Rennes a refusé d’accorder à M. D une autorisation spéciale d’absence pour la journée du 9 septembre suivant doit être annulée.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier Guillaume Régnier le versement au syndicat Sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine et à M. D de la somme globale de 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 7 septembre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier Guillaume Régnier de Rennes a refusé d’accorder à M. D une autorisation spéciale d’absence pour l’exercice du droit syndical pour la journée du 9 septembre 2021 est annulée.

Article 2 : Le centre hospitalier Guillaume Régnier versera la somme globale de 500 euros au syndicat Sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine et à M. D en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié au syndicat Sud santé sociaux d’Ille-et-Vilaine et à M. C D, ainsi qu’au centre hospitalier Guillaume Régnier.

Délibéré après l’audience du 22 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Tronel, président,

Mme Pottier, première conseillère,

Mme René, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

La rapporteure,

signé

C. René

Le président,

signé

N. Tronel

La greffière,

signé

C. Salladain

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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