Tribunal administratif de Rennes, 13 décembre 2023, n° 2306412

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Rennes, 13 déc. 2023, n° 2306412
Juridiction : Tribunal administratif de Rennes
Numéro : 2306412
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 21 décembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 28 novembre 2023, le préfet du Morbihan demande au juge des référés, sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative :

1°) d’ordonner l’expulsion sans délai de M. B A du logement qu’il occupe au sein du centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) Coallia Monteneuf situé 26 rue du Four à Guer ;

2°) de l’autoriser à recourir à la force publique pour procéder à l’évacuation forcée des lieux et à donner toutes instructions utiles au gestionnaire du CADA afin de débarrasser les lieux des biens meubles s’y trouvant, aux frais et risques de M. A à défaut pour celui-ci de les avoir emportés.

Il soutient que :

— les dispositions de l’article L. 552-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile donnent compétence au juge des référés du tribunal administratif pour prononcer, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-3 du code de justice administrative et sur sa saisine, une injonction de quitter les lieux à l’encontre de l’occupant irrégulier d’un lieu d’hébergement mentionné à l’article L. 552-1 du même code ;

— il a qualité pour introduire la présente requête sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

— la mesure sollicitée revêt un caractère urgent et remplit la condition d’utilité requise compte tenu du nombre des demandeurs d’asile en attente d’un hébergement ;

— l’injonction sollicitée ne se heurte à aucune contestation sérieuse, M. A ayant refusé de donner suite aux propositions de logement qui lui ont été faites le 16 mai 2022 sans motif légitime.

M. A, informé de la requête et de l’audience publique, n’a pas produit d’observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné Mme Plumerault, première conseillère, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique du 12 décembre 2023 :

— le rapport de Mme Plumerault,

— les observations de M. A, qui expose les difficultés qu’il rencontre à se loger par ses propres moyens.

Le préfet du Morbihan n’était ni présent ni représenté.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 521-3 du code de justice administrative : « En cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative ».

2. Aux termes de l’article L. 552-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Les lieux d’hébergement mentionnés à l’article L. 552-1 accueillent les demandeurs d’asile pendant la durée d’instruction de leur demande d’asile ou jusqu’à leur transfert effectif vers un autre État européen ». Aux termes de l’article L. 551-12 du même code : « Les conditions dans lesquelles les personnes s’étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire et les personnes ayant fait l’objet d’une décision de rejet définitive peuvent être, à titre exceptionnel et temporaire, maintenues dans un lieu d’hébergement mentionné à l’article L. 552-1, sont déterminées par décret en Conseil d’Etat ». Aux termes de l’article L. 552-15 du même code : « Lorsqu’il est mis fin à l’hébergement dans les conditions prévues aux articles L. 551-11 à L. 551-14, l’autorité administrative compétente ou le gestionnaire du lieu d’hébergement peut demander en justice, après mise en demeure restée infructueuse, qu’il soit enjoint à cet occupant sans titre d’évacuer ce lieu. /Le premier alinéa n’est pas applicable aux personnes qui se sont vues reconnaître la qualité de réfugié ou qui ont obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire. Il est en revanche applicable aux personnes qui ont un comportement violent ou commettent des manquements graves au règlement du lieu d’hébergement. /La demande est portée devant le président du tribunal administratif, qui statue sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative et dont l’ordonnance est immédiatement exécutoire. ».

3. Aux termes de l’article R. 552-13 du code de l’entrée et du séjour et du droit d’asile : " La personne hébergée peut solliciter son maintien dans le lieu d’hébergement au-delà de la date de décision de sortie du lieu d’hébergement prise par l’Office français de l’immigration et de l’intégration en application des articles L. 551-11 ou L. 551-13, dans les conditions suivantes : / 1° Lorsqu’elle s’est vue reconnaitre la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire, elle peut demander à être maintenue dans le lieu d’hébergement jusqu’à ce qu’une solution d’hébergement ou de logement soit trouvée, dans la limite d’une durée de trois mois à compter de la date de la fin de prise en charge ; durant cette période, elle prépare les modalités de sa sortie avec le gestionnaire du lieu qui prend toutes mesures utiles pour lui faciliter l’accès à ses droits, au service intégré d’accueil et d’orientation, ainsi qu’à une offre d’hébergement ou de logement adaptée ; cette période peut être prolongée pour une durée maximale de trois mois supplémentaires avec l’accord de l’office () « . Aux termes de l’article R. 552-15 du même code : » Pour l’application du premier alinéa de l’article L. 552-15, si une personne se maintient dans le lieu d’hébergement après la date mentionnée à l’article R. 552-12 ou, le cas échéant, après l’expiration du délai prévu à l’article R. 552-13, le préfet du département dans lequel se situe ce lieu d’hébergement ou le gestionnaire du lieu d’hébergement met en demeure cette personne de quitter les lieux dans les cas suivants : / () 2° La personne bénéficie d’un titre de séjour en France et a refusé une ou plusieurs offres de logement ou d’hébergement qui lui ont été faites en vue de libérer le lieu d’hébergement occupé. / Si la mise en demeure est infructueuse, le préfet ou le gestionnaire du lieu d’hébergement peut, après une décision de rejet définitive et dans les conditions prévues à l’article L. 552-15, saisir le président du tribunal administratif afin d’enjoindre à cet occupant de quitter les lieux ".

4. Lorsque le juge des référés est saisi par l’administration, sur le fondement des dispositions précitées, d’une demande d’expulsion d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, la demande d’expulsion ne se heurte à aucune contestation sérieuse et si la libération des lieux présente un caractère d’urgence et d’utilité.

5. Il résulte de l’instruction que M. B A, ressortissant afghan né le 10 mars 1994 a, en tant que demandeur d’asile, bénéficié à compter du 21 octobre 2020, d’un hébergement au sein du centre d’accueil pour demandeurs d’asile géré par l’association « Coallia », " situé au 26, rue du Four à Guer (56). Par une décision notifiée le 19 octobre 2021, le requérant s’est vu accorder le statut de réfugié par l’Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA). Il a été autorisé à se maintenir dans son lieu d’hébergement jusqu’au 30 avril 2022 à la suite de l’acceptation de ses demandes de prolongation. Une orientation en centre provisoire d’hébergement à Lorient a été proposée à M. A, qui a refusé cette proposition le 16 mai 2022. Le préfet du Morbihan a mis en demeure M. A, par courrier du 5 octobre 2023 notifié le 11 octobre suivant, de quitter l’hébergement qui lui était jusqu’alors accordé dans un délai de quinze jours. Cette mise en demeure étant restée infructueuse, le préfet du Morbihan demande son expulsion sur le fondement des dispositions précitées.

6. D’une part, il est constant que M. A, qui a obtenu le statut de réfugié, ne bénéficie plus du droit d’être hébergé dans un lieu d’hébergement pour demandeur d’asile. L’intéressé ne se prévaut d’aucune circonstance exceptionnelle de nature à faire obstacle à son expulsion. Ainsi, la demande d’expulsion présentée par le préfet du Morbihan ne souffre d’aucune contestation sérieuse.

7. D’autre part, la libération des lieux occupés par le requérant présente, eu égard aux besoins d’accueil des demandeurs d’asile et au nombre de places disponibles dans les lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile dans le département du Morbihan, et plus généralement en Bretagne, un caractère d’urgence et d’utilité.

8. Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de faire droit aux conclusions du préfet du Morbihan tendant à ce que soit enjoint la libération par M. A du logement qu’il occupe situé 26, rue du Four à Guer. Faute pour l’intéressé et toute personne l’accompagnant ou en dépendant d’avoir libéré les lieux, l’autorité préfectorale est autorisée à faire procéder à son expulsion, au besoin avec le concours de la force publique passé un délai, qu’il y a lieu de fixer à trois semaines à compter de la notification de la présente ordonnance. Cette autorité est également autorisée à donner toutes instructions utiles au gestionnaire du CADA afin de débarrasser les lieux des biens meubles s’y trouvant, aux frais et risques de M. A, à défaut pour lui d’avoir emporté ses effets personnels.

O R D O N N E :

Article 1er : Il est enjoint à M. A de libérer le logement CADA qu’il occupe situé 26, rue du Four à Guer et d’évacuer ses biens.

Article 2 : À défaut pour M. A de déférer à l’injonction prononcée à l’article 1er, le préfet du Morbihan pourra faire procéder d’office à son expulsion et, en cas de besoin, requérir le concours de la force publique en vue d’assurer l’exécution de la présente ordonnance, passé un délai de trois semaines à compter de la notification de cette ordonnance.

Article 3 : Le préfet du Morbihan est autorisé à donner toutes instructions utiles au gestionnaire du CADA afin de débarrasser les lieux des biens meubles s’y trouvant, aux frais et risques de M. A, à défaut pour celui-ci d’avoir emporté ses effets personnels.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l’intérieur et des outre-mer et à M. B A.

Copie en sera adressée au préfet du Morbihan.

Fait à Rennes, le 13 décembre 2023.

Le juge des référés,

signé

F. Plumerault

La greffière,

signé

P. Lecompte

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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