Tribunal administratif de Toulon, 23 décembre 2008, n° 043195

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Toulon, 23 déc. 2008, n° 043195
Juridiction : Tribunal administratif de Toulon
Numéro : 043195
Décision précédente : Tribunal administratif de Nice, 19 octobre 2008

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE TOULON

N°043195 et 046192


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

SARL RIO PORT TONIC

___________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

M Duchon-Doris

Rapporteur

___________

Le Tribunal administratif de Toulon

M. B

Commissaire du gouvernement (2e Chambre)

___________

Audience du 27 novembre 2008

Lecture du 23 décembre 2008

___________

CNIJ 39-04-02

I/ Vu l’ordonnance en date du 20 octobre 2008 par laquelle le président du Tribunal administratif de Nice transmet la requête n° 043195 au Tribunal administratif de Toulon ;

Vu la requête, enregistrée au greffe du Tribunal le 18 juin 2004, présentée par la SCP d’avocats C X, pour la SARL RIO PORT TONIC dont le siège social est sis XXX, à Roquebrune-sur-Argens (83520) ;

La SARL RIO PORT TONIC demande au tribunal d’annuler la décision expresse du 19 avril 2004 refusant de faire droit à son recours gracieux contre une délibération du conseil municipal de Roquebrune-sur-Argens du 23 septembre 2003 constatant la déchéance de sa concession portuaire, ensemble ladite délibération ;

Elle soutient :

— que le maire était incompétent pour refuser de venir sur la décision de déchéance du 23 septembre 2003 ;

— que la déchéance est illégale, les deux mises en demeure la précédant étant irrégulières, celle du 10 juillet 2003 étant trop imprécise et assortie d’un délai anormalement bref, celle du 11 février 2004 ne lui laissant en fait, compte tenu de la notification de la décision de déchéance en date du 26 février 2004, qu’un délai de 15 jours ;

— que la déchéance du 23 septembre 2003 est motivée par des circonstances devenues caduques le 26 février 2004 ;

— que la résiliation est une sanction disproportionnée par rapport aux éventuels manquements reprochés au concessionnaire ;

— que le rejet du recours gracieux est lui-même mal fondé et illégal dès lors qu’il se fonde sur des motifs autres que ceux retenus dans la délibération du 23 septembre 2003 et qui ne sont pas de nature à justifier la résiliation de al concession ;

— que la commune a commis en l’espèce un détournement de pouvoir ;

Vu les décisions attaquées ;

Vu la lettre par laquelle le président du Tribunal de Nice, par application des dispositions de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, met en demeure la commune de Roquebrune-sur-Argens de produire sa défense ;

Vu, enregistré au greffe du tribunal le 17 juin 2005, le mémoire en défense présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens tendant à ce que les requêtes n° 043195 et 046192 soient jointes et que l’Etat soit mis en cause dans le litige ;

Vu, enregistré au greffe du tribunal le 6 octobre 2006, le mémoire en défense présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens tendant à ce qu’il soit prononcé un non-lieu dans la requête n° 043195, que les requêtes n° 043195 et 046192 soient jointes et rejetées et que la SARL RIO PORT TONIC soit condamnée à lui verser la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir :

— que la décision expresse du maire en date du 19 avril 2004 a implicitement été rapportée par la délibération du Conseil municipal de la commune du 22 octobre 2004 qui s’y est substituée ;

— que l’illégalité de la décision du 19 avril 2004 serait sans incidence sur la légalité de la délibération du 23 septembre 2003 ;

— que le moyen tiré de l’imprécision de la mise en demeure du 10 juillet 2003 manque en fait ;

— que le délai fixé par cette mise en demeure est conforme à l’article 51 du cahier des charges et à l’urgence de la situation ;

— que la société a, de fait, bénéficié d’un délai supérieur à deux mois ;

— que la tentative faite par la commune d’obtenir de la société concessionnaire qu’elle remette les fieux en l’état d’origine ne saurait constituer des pourparlers mais représente seulement la manifestation de la volonté de la commune de voir le domaine public restaurer dans son intégrité par le concessionnaire fautif en dehors de tout contentieux relatif à l’atteinte audit domaine ;

— qu’en prononçant la déchéance du concessionnaire le 23 septembre 2003, elle ne peut être regardée comme ayant renoncé aux effets de la mise en demeure du 10 juillet 2003 ;

— que la légalité de la délibération du 23 septembre 2003 doit s’apprécier à la date de son édiction et qu’au surplus, les circonstances de fait alors constatées ne sont pas devenues caduques et les circonstances nouvelles ne sont pas de nature à remettre en cause la déchéance ;

— qu’au vu des différents rapports d’expertise judiciaire, la déchéance ne constitue pas une sanction disproportionnée ;

— que le moyen tiré du détournement de pouvoir est laissé à l’appréciation du tribunal ;

Vu, enregistré au greffe le 26 décembre 2006, le nouveau mémoire présenté pour la SARL RIO PORT TONIC faisant état de contradictions existant entre les conclusions et les méthodes des deux collèges d’expert étant intervenus dans cette affaire et sollicitant une visite des lieux ;

Vu, enregistré au greffe le 3 janvier 2007, le nouveau mémoire présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens rejetant la demande de visite des lieux sollicité aux motifs que les rapports d’expertise judiciaire menés au contradictoire des parties sont suffisants et contestant le caractère d’expertises des rapports présentés par la SARL ;

Vu, enregistré au greffe le 5 janvier 2007, le nouveau mémoire présenté pour la SARL RIO PORT TONIC confirmant ses précédentes écritures ;

Vu, enregistré le 17 novembre 2008, le nouveau mémoire présenté pour la SARL RIO PORT TONIC confirmant ses précédentes écritures par les mêmes moyens et en outre par le moyen tiré de ce que la commune ne peut demander une substitution de motifs en se fondant sur les opérations d’expertise ;

Vu, enregistré le 20 novembre 2008, le nouveau mémoire présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens confirmant ses précédentes écritures ;

II/ Vu l’ordonnance en date du 20 octobre 2008 par laquelle le président du Tribunal administratif de Nice transmet la requête n° 046192 au Tribunal administratif de Toulon ;

Vu la requête, enregistrée au greffe du tribunal par télécopie le 21 décembre 2004, présentée par la SCP d’avocats C X, pour la SARL RIO PORT TONIC dont le siège social est sis XXX, à Roquebrune-sur-Argens (83520) ;

La SARL RIO PORT TONIC demande au tribunal d’annuler la délibération du conseil municipal de Roquebrune-sur-Argens du 22 octobre 2004 refusant de faire droit à son recours gracieux contre une délibération du conseil municipal de Roquebrune-sur-Argens du 23 septembre 2003 constatant la déchéance de sa concession portuaire, ensemble la décision du maire du 19 avril 2004 et la délibération précitée du 23 septembre 2003 ;

Elle soutient :

— que le délai de convocation du conseil municipal prévu par les dispositions de l’article L. 2121-12 alinéa 3 du code général des collectivités territoriales semble n’avoir pas été respecté ;

— que l’information des conseillers municipaux a été insuffisante en l’absence notamment de note de synthèse ;

— que la déchéance est illégale, les deux mises en demeure la précédant étant irrégulières, celle du 10 juillet 2003 étant trop imprécise et assortie d’un délai anormalement bref, celle du 11 février 2004 ne lui laissant en fait, compte tenu de la notification de la décision de déchéance en date du 26 février 2004, qu’un délai de 15 jours ;

— que la déchéance est confirmée alors que les travaux réalisés par le concessionnaire ont eu pour conséquence de faire disparaître toute cause de déchéance ;

— que la résiliation est une sanction disproportionnée par rapport aux manquements reprochés au concessionnaire ;

— que le rejet du recours gracieux est lui-même mal fondé et illégal dès lors qu’il se fonde sur des motifs autres que ceux retenus dans la délibération du 23 septembre 2003 et qui ne sont pas de nature à justifier la résiliation de al concession ;

— que la commune a commis en l’espèce un détournement de pouvoir ;

Vu les décisions attaquées ;

Vu, enregistré au greffe du tribunal le 17 juin 2005, le mémoire en défense présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens tendant à ce que les requêtes n° 043195 et 046192 soient jointes et que l’Etat soit mis en cause dans le litige ;

Vu, enregistré au greffe du tribunal le 21 décembre 2005, le mémoire en défense présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens tendant au rejet de la requête et à ce que la SARL RIO PORT TONIC soit condamnée à lui verser la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir :

— que le délai de convocation du conseil municipal a été respecté ;

— que la note explicative de synthèse présentée aux conseillers municipaux atteste que ceux-ci ont été suffisamment informés ;

— que le moyen tiré de l’imprécision de la mise en demeure du 10 juillet 2003 manque en fait ;

— que le délai fixé par cette mise en demeure est conforme à l’article 51 du cahier des charges et à l’urgence de la situation ;

— que la société a, de fait, bénéficié d’un délai supérieur à deux mois ;

— que la tentative faite par la commune d’obtenir de la société concessionnaire qu’elle remette les fieux en l’état d’origine ne saurait constituer des pourparlers mais représente seulement la manifestation de la volonté de la commune de voir le domaine public restaurer dans son intégrité par le concessionnaire fautif en dehors de tout contentieux relatif à l’atteinte audit domaine ;

— qu’en prononçant la déchéance du concessionnaire le 23 septembre 2003, elle ne peut être regardée comme ayant renoncé aux effets de la mise en demeure du 10 juillet 2003 ;

— que la légalité de la délibération du 23 septembre 2003 doit s’apprécier à la date de son édiction et qu’au surplus, les circonstances de fait alors constatées ne sont pas devenues caduques et les circonstances nouvelles ne sont pas de nature à remettre en cause la déchéance ;

— qu’au vu des différents rapports d’expertise judiciaire, la déchéance ne constitue pas une sanction disproportionnée ;

— que le moyen tiré du détournement de pouvoir est laissé à l’appréciation du tribunal ;

Vu, enregistré au greffe le 12 octobre 2006, le nouveau mémoire présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens confirmant ses précédentes écritures par les mêmes moyens et se référant en outre au rapport d’expertise judiciaire déposé le 9 février 2006 ;

Vu, enregistré au greffe le 26 décembre 2006, le nouveau mémoire présenté pour la SARL RIO PORT TONIC faisant état de contradictions existant entre les conclusions et les méthodes des deux collèges d’expert étant intervenus dans cette affaire et sollicitant une visite des lieux ;

Vu, enregistré au greffe le 3 janvier 2007, le nouveau mémoire présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens rejetant la demande de visite des lieux sollicité aux motifs que les rapports d’expertise judiciaire menés au contradictoire des parties sont suffisants et contestant le caractère d’expertises des rapports présentés par la SARL ;

Vu, enregistré au greffe le 5 janvier 2007, le nouveau mémoire présenté pour la SARL RIO PORT TONIC confirmant ses précédentes écritures ;

Vu, enregistré au greffe le 22 mars 2008, le nouveau mémoire présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens confirmant ses précédentes écritures tout en portant sa demande fondée sur l’article L. 761-1 du code de justice administrative à la somme de 6.000 euros, par les mêmes moyens et en outre par le moyen que le comportement de la SARL RIO PORT TONIC est irresponsable compte tenu des conclusions du rapport d’expertise judiciaire ;

Vu, enregistré le 17 novembre 2008, le nouveau mémoire présenté pour la SARL RIO PORT TONIC confirmant ses précédentes écritures par les mêmes moyens et en outre par le moyen tiré de ce que la commune ne peut demander une substitution de motifs en se fondant sur les opérations d’expertise ;

Vu, enregistré le 20 novembre 2008, le nouveau mémoire présenté pour la commune de Roquebrune-sur-Argens confirmant ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 27 novembre 2008 :

— le rapport de M. Duchon-Doris, rapporteur ;

— les observations de Me X pour la SARL RIO PORT TONIC et de Me A pour la commune de Roquebrune-sur-Argens ;

— et les conclusions de M. B, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées n° 043195et n°046192, présentées pour la SARL RIO PORT TONIC, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul jugement ;

Considérant que, par une convention signée le 7 juin 1989, la commune de Roquebrune-sur-Argens a donné en concession, pour une durée de vingt-cinq ans, à la SARL RIO PORT TONIC, l’aménagement, l’entretien et l’exploitation du port de plaisance situé calanque du Petit Ferréol à Roquebrune-sur-Argens ; qu’au motif tiré d’un manquement de la société concessionnaire à ses obligations contractuelles, la commune a notifié le 10 juillet 2003 à la SARL RIO PORT TONIC une mise en demeure de procéder à divers travaux puis, par une délibération en date du 23 septembre 2003, notifiée par voie d’huissier de justice le 20 février 2004, a prononcé la déchéance de la concession ; que, par une nouvelle mise en demeure du 11 février 2004, la commune a demandé au concessionnaire de remettre en l’état les installations portuaires ; que, par un courrier en date du 18 mars 2004, la société RIO PORT TONIC a sollicité, dans le cadre d’un recours gracieux, le retrait de la délibération du 23 septembre 2003 ; que, par une lettre en date du 19 avril 2004, le maire de la commune a rejeté cette demande avant de la présenter au conseil municipal, lequel a décidé, par délibération en date du 22 octobre 2004, de prononcer le rejet du recours gracieux ; que, par la requête n° 043195, la SARL RIO PORT TONIC demande l’annulation de la décision du maire en date du 19 avril 2004 et, par la requête n°046192 celle de la délibération du 22 octobre 2004, ensemble la délibération du 23 septembre 2003 ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du maire en date du 19 avril 2004 :

Considérant que la décision du maire de Roquebrune-sur-Argens en date du 19 avril 2004 refusant de faire droit au recours gracieux présenté par la SARL RIO PORT TONIC contre la délibération du conseil municipal de Roquebrune-sur-Argens du 23 septembre 2003 doit être regardée comme ayant été implicitement rapportée par la décision du maire de saisir le conseil municipal de la commune et par la délibération adoptée par celui-ci le 22 octobre 2004 qui s’y est substituée ; que, par suite, il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la SARL RIO PORT TONIC tendant à l’annulation de cette décision ;

Sur les conclusions dirigées contre la délibération en date du 22 octobre 2004 :

En ce qui concerne le moyen tiré du délai de convocation du conseil municipal :

Considérant qu’aux termes de l’article L2121-12 alinéa 3 du code général des collectivités territoriales : « Dans les communes de 3 500 habitants et plus, … le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d’urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. Le maire en rend compte dès l’ouverture de la séance au conseil municipal qui se prononce sur l’urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l’ordre du jour d’une séance ultérieure. » ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, nonobstant la mention erronée portée sur la délibération en litige selon laquelle la date de convocation est le 18 octobre 2004, les convocations à la séance du conseil municipal au cours de laquelle a été adoptée la délibération litigieuse ont été adressées aux conseillers municipaux par la police municipale de la commune le 15 octobre 2004, soit au moins cinq jours francs avant cette séance ; qu’ainsi la commune a respecté les prescriptions qui résultent en la matière des dispositions de l’article L. 2121-12, alinéa 3, du code général des collectivités territoriales ; que par suite, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut d’information des conseiller municipaux :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 2121-12, alinéa 1, du code général des collectivités territoriales : « Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal… » ;

Considérant que la SARL RIO PORT TONIC fait valoir que les éléments figurant dans le rapport de présentation établi par la commune sont manifestement insuffisants pour justifier une correcte information des élus ; qu’il résulte toutefois de la lecture du document que celui-ci vise les délibérations adoptées précédemment sur le sujet, rappelle la chronologie des évènements et expose le contenu du recours gracieux présenté par la SARL RIO PORT TONIC ainsi que les raisons de le rejeter, permettant ainsi aux conseillers municipaux d’être suffisamment informés sur l’affaire soumise à leur délibération ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que la déchéance aurait été prononcée au terme d’une procédure irrégulière :

Considérant qu’aux termes de l’article 51, alinéa 2, du cahier des charges de la concession, la déchéance : « … est prononcée, après mise en demeure et expiration d’un délai fixé qui ne peut être inférieur à un mois selon la même procédure que pour l’octroi de la concession, le concessionnaire entendu » ;

Considérant que, si la SARL RIO PORT TONIC soutient, en premier lieu, que la mise en demeure qui lui a été adressée le 10 juillet 2003 est trop imprécise, il ressort de la lecture de ladite mise en demeure que celle-ci cite l’ensemble des dispositions du cahier des charges applicables, indique expressément les griefs formulés par la commune à l’encontre de la société, notamment la suppression d’un ouvrage public portuaire et l’installation sans autorisation d’un autre équipement et l’état de délabrement de la digue, précise enfin que la société est mise en demeure notamment de « remettre les lieux en l’état d’origine » et de « justifier de la réparation de la digue » ; qu’elle apparaît ainsi comme suffisamment précise ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la SARL RIO PORT TONIC soutient que le délai fixé par la mise en demeure du 10 juillet 2003 est anormalement bref, ledit délai est conforme aux stipulations précitées de l’article 51 du cahier des charges ; qu’au surplus, la déchéance de la concession n’étant intervenue que le 23 septembre 2003, la société a, de fait, bénéficié d’un délai supérieur à deux mois ; que le moyen doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que la SARL RIO PORT TONIC fait valoir que la mise en demeure en date du 10 juillet 2003 ayant été suivie de pourparlers, la commune doit être regardée comme ayant renoncé à ses effets ; que, si une nouvelle mise en demeure lui a été adressée le 11 février 2004 lui accordant un délai supplémentaire de deux mois pour « procéder aux travaux de remise en conformité du site », la déchéance lui a été notifiée le 26 février 2004, si bien que le délai qui lui a été laissé n’a été que de quinze jours en méconnaissance des stipulations précitées de l’article 51, alinéa 2, du cahier des charges; qu’il résulte toutefois de la lecture de la lettre adressée par le maire de Roquebrune-sur-Argens le 11 février 2004 à la SARL RIO PORT TONIC que, si celle-ci fait état d’une entrevue entre les parties, postérieure à la délibération du 23 septembre 2003, au cours de laquelle la SARL aurait pris certains engagements et met la société en demeure de procéder, dans les deux mois, aux travaux de remise en conformité du site sous menace de recourir à la procédure de contravention de grande voirie, elle rappelle par ailleurs expressément que « par délibération en date du 23 septembre 2003, le conseil municipal … a prononcé la déchéance du traité de concession suite aux manquements constatés » et informe qu’un huissier de justice a été chargé de signifier à la société ladite délibération ; que, dans ces circonstances, la commune de Roquebrune-sur-Argens ne peut être regardée comme ayant renoncé aux effets de la mise en demeure du 10 juillet 2003 ni entendu adresser, le 11 février 2004, une nouvelle mise en demeure à la société avant le prononcé de la déchéance; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce qu’à la date de la notification de la déchéance, les motifs en seraient devenus caducs :

Considérant que si la SARL RIO PORT TONIC fait valoir qu’une année s’étant écoulée entre la délibération du 23 septembre 2003 et la confirmation de sa déchéance par la délibération du 22 octobre 2004, les travaux réalisés ont eu pour conséquence de faire disparaître toute cause de déchéance, elle n’en justifie pas ; qu’il résulte par ailleurs de la lecture de la délibération attaquée que le conseil municipal s’est déterminé après prise en compte des engagements de la société formulés en dernier lieu le 18 mars 2004 ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l’irrégularité de la demande de substitution de motifs :

Considérant que la commune de Roquebrune-sur-Argens ne demande pas au tribunal de substituer aux motifs initiaux sur lesquels s’est fondée sa décision de prononcer la déchéance de la concession des motifs nouveaux tirés de l’expertise ; que, par suite et en tout état de cause, le moyen ne peut être qu’écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction et sans qu’il soit besoin d’ordonner la visite des lieux sollicitée :

Considérant en premier lieu qu’aux termes de l’article 1er du cahier des charges annexé à la convention de concession signée le 7 juin 1989 entre la commune de Roquebrune-sur-Argens et la SARL RIO PORT TONIC : « 1.1 – La présente concession a pour objet l’aménagement, l’entretien et l’exploitation du port de plaisance situé calanque du Petit Ferréol à Roquebrune-sur-Argens…1.3 – Le concessionnaire doit assurer l’installation et/ou l’exploitation des équipements et installations nécessaires au fonctionnement du port décrit aux paragraphes 1.1 et 1.2, à savoir : … ouvrage de protection, chenaux, plans d’eau ; ouvrages de mise à terre et de mise à l’eau des bateaux… Les ouvrages et outillages ci-dessus énumérés font partie du domaine public de l’Etat mis à la disposition de la commune de Roquebrune-sur-Argens » ; qu’aux termes de l’article 3 du même document : « Le concessionnaire est tenu de soumettre à l’autorité concédante, avant tout commencement de réalisation, les projets d’exécution, de modifications d’ouvrages ou d’outillages publics ; ces projets doivent comprendre tous les plans, dessins et mémoires explicatifs et justificatifs décrivant des constructions à édifier ainsi que les dispositifs des outillages. L’autorité concédante a le droit de prescrire les modifications qu’elle juge convenables pour assurer la bonne marche des installations concédées et de tous les services » ; qu’aux termes de l’article 5 : « Les ouvrages et outillages concédés ainsi que leurs abords doivent être entretenus en bon état de fonctionnement et de propreté par les soins du concessionnaire, de façon à toujours convenir parfaitement à l’usage auquel ils sont destinés » ; qu’aux termes enfin de l’article 51, alinéa 2, du même cahier : « Faute pour le concessionnaire de pourvoir à la reprise des services interrompus, faute aussi par lui de remplir les obligations qui lui sont imposées par le cahier des charges, il encourt la déchéance… La déchéance n’est pas encourue dans le cas où le concessionnaire a été mis dans l’impossibilité de remplir ses engagements par des circonstances de force majeure dûment constatées. Cette déchéance peut également être prononcée par suite de refus du concessionnaire de réaliser les ouvrages prévus à l’article 1 et de mettre en place en cours de concession les ouvrages et outillages nouveaux qu’il a l’obligation de réaliser » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction et notamment des courriers échangés entre la SARL RIO PORT TONIC et le concessionnaire et du rapport de l’expertise judiciaire ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Nice le 3 septembre 2004 et déposé le 6 février 2006, que la SARL RIO PORT TONIC a procédé à la suppression d’une cale de mise à l’eau et à l’installation d’une grue dans la fosse de cette cale sans en demander l’autorisation et sans en soumettre préalablement le plan d’installation au concessionnaire, en violation des stipulations précitées de l’article 3 du cahier des charges de la concession ; qu’elle ne conteste pas, par ailleurs, qu’à l’exception d’une réparation effectuée à son extrémité à la suite d’un accident météo, elle n’avait pas procédé à l’entretien de la digue au moins jusqu’ au « début de la saison estivale 2004 », date à laquelle elle prétend avoir réalisé les travaux nécessaires, et ce en méconnaissance des stipulations précitées de l’article 5 du même cahier des charges ; que si la société fait valoir sur ce point que les travaux n’ont pu être immédiatement engagés en raison notamment de mauvaises conditions météorologiques et par manque de moyens financiers, ces circonstances, à les supposer établies, ne peuvent être regardées comme des « circonstances de force majeure » au sens des stipulations précitées de l’article 51 du cahier des charges ; qu’il résulte par ailleurs du rapport d’expertise qui n’est sur ce point, entaché d’aucune contradiction, que le port est actuellement en mauvais état et « qu’aucune des obligations mises à la charge [de la société ] n’a reçu un début d’application, ni en ce qui concerne la construction d’éléments d’exploitation, ni en ce qui concerne les prévisions financières, ni en ce qui concerne les périodicités et programmation de certaines maintenances ; que le non-respect par la SARL RIO PORT TONIC de ces obligations contractuelles constitue un manquement de nature à justifier la déchéance de la concession ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l’instruction que le comportement de la commune soit de nature à atténuer la responsabilité du concessionnaire ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré du détournement de pouvoir :

Considérant que si la SARL RIO PORT TONIC soutient que la délibération attaquée est entachée d’un détournement de pouvoir, la commune tirant prétexte de prétendus manquements pour justifier une déchéance lui permettant de récupérer les outillages portuaires sans avoir à verser d’indemnités, elle ne l’établit pas ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la SARL RIO PORT TONIC n’est pas fondée à demander l’annulation de la délibération du 22 octobre 2004 et, en conséquence de celle-ci, l’annulation de celle du 23 septembre 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la SARL RIO PORT TONIC, par application des dispositions précitées, une somme de 1500 euros au titre des frais exposés par la commune de Roquebrune-sur-Argens et non compris dans les dépens ;

Par ces motifs,

DÉCIDE :

Article 1er : Il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la SARL RIO PORT TONIC tendant à l’annulation de la décision du maire de Roquebrune-sur-Argens en date du 19 avril 2004.

Article 2 : Le surplus des conclusions présentées pour la SARL RIO PORT TONIC est rejeté.

Article 3 : La SARL RIO PORT TONIC est condamnée à verser à la commune de Roquebrune-sur-Argens une somme de 1500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la SARL RIO PORT TONIC et à la commune de Roquebrune-sur-Argens. Copie sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l’audience du 27 novembre 2008, où siégeaient :

— M. Duchon-Doris président

— M. Z et Mme Y, premiers conseillers,

Lu en audience publique, le 23 décembre 2008.

Le président rapporteur

L’assesseur le plus ancien

Signé

Signé

J.C. Duchon-Doris

J.M. Z

Le greffier

Signé

P. Bérenger

La République mande et ordonne au préfet du Var en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit

commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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Tribunal administratif de Toulon, 23 décembre 2008, n° 043195