Tribunal administratif de Toulouse, 2ème chambre, 1er décembre 2022, n° 2105199

  • Travail·
  • Recours hiérarchique·
  • Justice administrative·
  • Décision implicite·
  • Licenciement·
  • Sociétés·
  • Annulation·
  • L'etat·
  • Illégalité·
  • Compétitivité

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Toulouse, 2e ch., 1er déc. 2022, n° 2105199
Juridiction : Tribunal administratif de Toulouse
Numéro : 2105199
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 6 septembre 2021 et le 27 septembre 2021, la société Z Nautic SAS, représentée par Me Christau, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 11 janvier 2021 par laquelle l’inspectrice du travail de l’unité départementale de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi d’Occitanie a refusé d’autoriser le licenciement de M. B, ensemble la décision implicite du ministre du travail née le 9 juillet 2021 rejetant le recours hiérarchique formé contre la décision précitée du 11 janvier 2021 ;

2°) de condamner l’Etat au paiement d’une indemnité de 21 374,35 euros en réparation des préjudices qu’elle impute à la décision précitée du 11 janvier 2021 et d’assortir cette somme des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la décision de l’inspectrice du travail du 11 janvier 2021 est insuffisamment motivée ;

— la matérialité du motif économique est établie par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ;

— elle est entachée d’une erreur d’appréciation et d’une erreur de droit dès lors que le licenciement repose sur un motif économique ;

— l’inspectrice du travail a évalué l’opportunité du projet de réorganisation ;

— la responsabilité de l’Etat doit être engagée à raison de l’illégalité de la décision de l’inspectrice du travail du 11 janvier 2021 refusant d’autoriser le licenciement de M. B ;

— son préjudice doit être évalué sur la base de la rémunération brute et des cotisations patronales qu’elle a dues verser en raison de l’impossibilité de licencier M. B à la somme de 21 374,35 euros.

Par un mémoire enregistré le 27 septembre 2022, la société Z Nautic, représentée par Me Christau, demande au tribunal de déclarer sans objet ses conclusions tendant initialement à l’annulation, d’une part, de la décision du 11 janvier 2021 par laquelle l’inspectrice du travail de l’unité départementale de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi d’Occitanie a refusé d’autoriser le licenciement de M M. B et, d’autre part, de la décision implicite du ministre du travail née le 9 juillet 2021 rejetant le recours hiérarchique formé contre la décision précitée du 11 janvier 2021.

Elle soutient que, par une décision explicite du 17 septembre 2021, le ministre du travail a, d’une part, retiré sa décision implicite née le 9 juillet 2021 rejetant le recours hiérarchique formé contre la décision de l’inspectrice du travail du 11 janvier 2021 et, d’autre part, annulé cette dernière décision, ce qui rend sans objet ses conclusions tendant à l’annulation des deux décisions précitées.

Malgré une mise en demeure adressée le 3 février 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion n’a produit aucun mémoire dans la présente instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code du travail ;

— le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu, au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme A,

— les conclusions de Mme Chalbos, rapporteure publique,

— et les observations de Me Lassus représentant la société Z Nautic SAS.

Considérant ce qui suit :

1. Par courrier du 10 novembre 2020, la société Z Nautic SAS, dont le siège est situé à Ayguesvives (Haute-Garonne) a sollicité de l’inspectrice du travail l’autorisation de licencier, pour motif économique, M. B, recruté le 2 mars 1987, occupant des fonctions d’opérateur de fabrication et détenant un mandat de représentant du personnel. Le 11 janvier 2021, l’inspectrice du travail de l’unité départementale de la direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités devenue direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités Occitanie a refusé d’autoriser ce licenciement. La société a formé un recours hiérarchique auprès du ministre en charge du travail contre cette décision le 5 mars 2021, reçu le 8 mars suivant, à la suite duquel est née une décision implicite de rejet le 9 juillet 2021. Par sa requête, la société Z Nautic SAS demande au tribunal, d’une part, d’annuler la décision de l’inspectrice du travail du 11 janvier 2021, ensemble la décision implicitement opposée à son recours hiérarchique et, d’autre part, de condamner l’Etat à lui verser la somme 21 374,35 euros assortie des intérêts au taux légal, capitalisés.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. Par une décision explicite du 17 septembre 2021, intervenue en cours d’instance, le ministre du travail a retiré sa décision née le 9 juillet 2021 par laquelle il a implicitement rejeté le recours hiérarchique formé contre la décision de l’inspectrice du travail du 11 janvier 2021 et annulé cette dernière décision. Par un mémoire enregistré le 27 septembre 2022, la société Z Nautic SAS demande au tribunal, au vu de la décision ministérielle du 17 septembre 2021, de déclarer sans objet ses conclusions initiales aux fins d’annulation. Les conclusions dernièrement présentées par la requérante doivent être interprétées comme un désistement de ses seules conclusions aux fins d’annulation. Rien ne s’oppose à ce qu’il lui en soit donné acte.

Sur les conclusions à fins d’indemnisation, les intérêts et leur capitalisation :

3. En application des dispositions du code du travail, le licenciement d’un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l’autorité administrative. Dès lors, l’illégalité de la décision autorisant un tel licenciement, à supposer même qu’elle soit imputable à une erreur d’appréciation de l’autorité administrative, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique.

4. Il résulte de l’instruction que pour refuser le licenciement de M. B le 11 janvier 2021, l’inspectrice du travail a retenu que l’entreprise Z Nautic SAS n’apportait pas la preuve d’une menace sur sa compétitivité. Toutefois, ainsi que l’a estimé le ministre du travail dans sa décision du 17 septembre 2021, les charges financières importantes générées par le site vieillissant d’Ayguesvives en sus de celles liées aux remboursements de prêt effectuer pour permettre à l’entreprise d’effectuer des investissements importants à hauteur de 6,8 millions d’euros ainsi que les déficits récurrents pour la période 2016-2019 sont de nature à compromettre durablement les résultats de l’entreprise et par voie de conséquence son positionnement sur son secteur d’activités, les bateaux de plaisance semi-rigides, de sorte que l’entreprise établit la nécessité pour elle de sauvegarder sa compétitivité. Par ailleurs, il résulte de l’instruction que la réorganisation de l’entreprise implique la suppression de 28 postes relevant de la catégorie professionnelle des opérateurs de fabrication à laquelle appartient M. B et que l’employeur a pleinement satisfait à l’obligation de recherche sérieuse et loyale de reclassement de ce salarié qui lui incombait. La société Z Nautic SAS est ainsi fondée à soutenir que la décision de l’inspectrice du travail du 11 janvier 2021 était illégale et que cette illégalité est de nature à engager la responsabilité pour faute de l’Etat à raison des préjudices en résultant de manière directe et certaine.

5. La société Z Nautic SAS sollicite la réparation du préjudice résultant du coût induit par le maintien dans ses effectifs de M. B et justifie, en fournissant les bulletins de paie, du versement d’un salaire mensuel de janvier à août 2021, sans contrepartie de travail, le site d’Aiguesvives étant fermé. Par suite, le montant versé à M. B justifié par la société Z Nautic SAS pour la période du 11 janvier, date de refus d’autoriser le licenciement par l’inspectrice du travail et le 17 septembre 2021, date de la décision du ministre, après déduction des allégements employeurs, s’élève à la somme de 18 493,52 euros.

6. Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de condamner l’État à verser à la société Z Nautic SAS la somme de 18 493,52 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2021, date d’introduction de sa requête. La capitalisation des intérêts a également été demandée le 6 septembre 2021. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 6 septembre 2022, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d’intérêts ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date

Sur les frais liés au litige :

7. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l’Etat une somme de 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions aux fins d’annulation présentées par la société Z Nautic SAS.

Article 2 : L’Etat est condamné à verser à la société Z Nautic SAS la somme de 18 493,52 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2021. Les intérêts échus le 6 septembre 2022 sont capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes des intérêts.

Article 3 : L’Etat versera à la société Z Nautic SAS une somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Z Nautic SAS est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société Z Nautic SAS, à M. B et au ministre en charge du travail.

Délibéré après l’audience du 17 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Katz, président,

Mme Jorda, conseillère,

Mme Péan, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2022.

La rapporteure,

V. A

Le président,

D. KATZ

La greffière,

F. DEGLOS

La République mande et ordonne au ministre en charge du travail en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de justice administrative
Extraits similaires à la sélection
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Toulouse, 2ème chambre, 1er décembre 2022, n° 2105199