Tribunal administratif de Versailles, Reconduites à la frontière, 13 décembre 2023, n° 2308588

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Versailles, reconduites à la frontière, 13 déc. 2023, n° 2308588
Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
Numéro : 2308588
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 21 décembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2023 au tribunal administratif de Versailles, M. D C, représenté par Me Zoubkova-Allieis, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 17 octobre 2023 par lequel le préfet de l’Essonne l’a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyée en cas d’exécution d’office et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d’un an, en l’informant qu’il fait l’objet d’un signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen ;

2°) d’enjoindre au préfet de l’Essonne de réexaminer sa situation en vue de la délivrance d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans le délai de 30 jours à partir de la décision à intervenir.

Il soutient que :

— l’arrêté est entaché d’incompétence ;

— il vit en France avec sa compagne, de même nationalité que lui, dont il a deux enfants ;

— il travaille en France sur des chantiers ;

— s’il a fait l’objet d’une interpellation le 16 octobre 2023 au volant d’un véhicule et placé en garde à vue pour défaut de permis de conduire et absence d’assurance, cette affaire n’a pas été jugée et il bénéficie de la présomption d’innocence ;

— il a des problèmes de santé ;

— l’administration ne peut pas le séparer de ses enfants mineurs résidant sur le territoire national sans commettre d’atteinte disproportionnée aux droits des enfants, protégés par la convention de New-York et aux droits du père protégés par l’article 8 de la CEDH.

Par un mémoire enregistré le 21 novembre 2023, le préfet de l’Essonne conclut au rejet de la requête en faisant valoir qu’aucun des moyens de la requête n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— la convention internationale relative aux droits de l’enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code de justice administrative.

La présidente du tribunal administratif de Versailles a désigné Mme Descours-Gatin pour statuer sur les requêtes relevant de la procédure prévue à l’article L. 614-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en application de l’article R. 776-13-3 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

A été entendu au cours de l’audience publique du 23 novembre 2023, qui s’est tenue en présence de Mme Ben Hadj Messaoud, greffière :

— le rapport de Mme Descours-Gatin ;

— les parties n’étant ni présentes ni représentées.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Considérant ce qui suit :

1. M. D C, ressortissant géorgien né le 5 octobre 1986 à Kutaisi (Géorgie) est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2017, selon ses déclarations. Il a sollicité l’asile le 19 février 2018 et sa demande a été rejetée par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides par une décision du 31 mai 2018, notifiée le 12 juin 2018, décision confirmée le 28 novembre 2018 par la cour nationale du droit d’asile. Il s’est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d’un titre de séjour. Par un arrêté du 17 octobre 2023, le préfet de l’Essonne l’a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé en cas d’exécution d’office et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d’un an, en l’informant qu’il fait l’objet d’un signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen. M. C demande au tribunal d’annuler cet arrêté.

2. En premier lieu, l’arrêté attaqué a été signé par M. A B, attaché principal d’administration, adjoint au chef de bureau de l’éloignement du territoire, lequel avait reçu délégation du préfet du département de l’Essonne par un arrêté n°2023-PREF-DCPPAT-BCA-163 du 7 septembre 2023, publié le même jour au recueil des actes administratifs de l’État dans le département, à l’effet de le signer. Il s’ensuit que le moyen tiré de l’incompétence du signataire de l’arrêté attaqué doit être écarté.

3. En second lieu, aux termes des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ». Aux termes de l’article 3-1 de la convention internationale des Nations Unies relative aux droits de l’enfant du 26 janvier 1990, « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ». Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir, que, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, l’autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. C, qui s’est maintenu irrégulièrement sur le territoire français après le rejet de sa demande d’asile, a été interpellé, à deux reprises, le 31 mai 2022, puis le 16 octobre 2023, par les services de police pour conduite d’un véhicule terrestre à moteur sans assurance et sans permis de conduire. L’intégration de l’intéressé à la société française n’est donc pas établie. S’il fait valoir que sa compagne, de même nationalité que lui, et leurs deux enfants vivent en France, la cellule familiale pourra se reconstituer dans leur pays d’origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que de l’article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant et de l’erreur manifeste d’appréciation ne peuvent qu’être écartés.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. C, qui ne peut utilement invoquer le bénéfice de la circulaire du ministre de l’intérieur en date du 28 novembre 2012, n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêté en date du 17 octobre 2023 par lequel le préfet de l’Essonne l’a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé en cas d’exécution d’office et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d’un an, en l’informant qu’il fait l’objet d’un signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d’injonction.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. D C et au préfet de l’Essonne.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023.

La magistrate désignée,

signé

C. Descours-Gatin La greffière,

signé

L. Ben Hadj Messaoud

La République mande et ordonne au préfet de l’Essonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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