Tribunal administratif de Versailles, 4ème chambre - 4/11, 26 avril 2024, n° 2402644

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Sur la décision

Référence :
TA Versailles, 4e ch. - 4/11, 26 avr. 2024, n° 2402644
Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
Numéro : 2402644
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 28 avril 2024

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 29 mars 2024, M. B C, représenté par Me Mopo Kobanda, demande au tribunal :

1°) de l’admettre au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d’annuler l’arrêté du 15 mars 2024 par lequel le préfet des Yvelines a décidé son transfert aux autorités espagnoles, responsables de l’examen de sa demande d’asile ;

3°) d’enjoindre au préfet des Yvelines d’enregistrer sa demande d’asile en procédure normale ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me Mopo Kobanda en application des dispositions combinées de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l’Etat.

Il soutient que :

— l’arrêté attaqué est entaché d’un vice de procédure au regard des dispositions de l’article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

— il est entaché d’un vice de procédure au regard des dispositions de l’article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

— il est entaché d’un vice de procédure au regard des dispositions de l’article 5 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 ;

— il méconnait les stipulations de l’article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

— il méconnait les stipulations de l’article 13 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

— il méconnait les dispositions de l’article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

La requête a été communiquée au préfet des Yvelines, qui a versé le 6 avril 2024, des pièces au dossier.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

— le code de justice administrative.

La présidente du tribunal administratif de Versailles a désigné Mme Marc pour statuer sur les requêtes relevant de la procédure prévue à l’article L. 572-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique du 23 avril 2024 qui s’est tenue en présence de M. Ileboudo, greffier :

— le rapport de Mme Marc ;

— Mme A, interprète en langue arabe étant présente ;

— M. C n’étant ni présent, ni représenté ;

— le préfet des Yvelines n’étant ni présent, ni représenté.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Le préfet des Yvelines a produit, le 23 avril 2023, un mémoire en défense, postérieurement à l’audience et à la clôture d’instruction, qui n’a pas été communiqué.

Considérant ce qui suit :

1. M. B C, ressortissant soudanais né le 9 octobre 2005, a sollicité son admission au séjour au titre du droit d’asile, le 19 octobre 2023, auprès des services de la préfecture des Yvelines. Lors de l’instruction de cette demande, la consultation des données dactyloscopiques centrales et informatisées du système Eurodac a révélé que les empreintes digitales de M. C avaient été relevées le 10 juillet 2023 par les autorités de contrôle compétentes en Espagne alors que l’intéressé avait franchi irrégulièrement la frontière de cet État en venant d’un État tiers à l’Union européenne. Le 25 octobre 2023, le préfet des Yvelines a saisi ces autorités d’une demande de prise en charge de l’intéressé, qui l’ont acceptée le 30 octobre 2023. Par un arrêté du 15 mars 2024, le préfet des Yvelines a décidé de transférer M. C aux autorités espagnoles. M. C demande au tribunal l’annulation de cet arrêté.

Sur la demande d’admission provisoire à l’aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique : « Dans les cas d’urgence, sous réserve de l’application des règles relatives aux commissions ou désignations d’office, l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée () par la juridiction compétente ou son président ».

3.Il y a lieu, eu égard à l’urgence qui s’attache à ce qu’il soit statué sur la requête de M. C, de prononcer son admission provisoire à l’aide juridictionnelle.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

4. Aux termes de l’article 5 du règlement (UE) n°604-2013 du 26 juin 2013 : « 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l’État membre responsable, l’État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l’article 4. () / 4. L’entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu’il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d’assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l’entretien individuel. / 5. L’entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L’État membre qui mène l’entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l’entretien. Ce résumé peut prendre la forme d’un rapport ou d’un formulaire type. L’État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ».

5. S’il ne résulte ni des dispositions citées au point précédent ni d’aucun principe que devrait figurer sur le compte-rendu de l’entretien individuel la mention de l’identité de l’agent qui a mené l’entretien, il appartient à l’autorité administrative, en cas de contestation sur ce point, d’établir par tous moyens que l’entretien a bien, en application des dispositions précitées de l’article 5.5 du règlement du 26 juin 2013, été « mené par une personne qualifiée en vertu du droit national ».

6. Il ressort des pièces du dossier que M. C a bénéficié d’un entretien individuel avec les services de la préfecture des Hauts-de-Seine, le 19 octobre 2023. Toutefois, alors que le compte-rendu de cet entretien est seulement revêtu d’un cachet sommaire d’un service, et ne contient aucune signature de la personne ayant mené l’entretien, aucune mention sur l’identité de cette personne, ni même de simples initiales désignant un agent de la préfecture nommément identifié ou identifiable, l’administration n’a apporté aucun élément de nature à établir la qualité de cet agent. Dans ces conditions, l’entretien ne saurait être regardé comme ayant été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national au sens de l’article 5 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013. Par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, M. C est fondé à soutenir que l’arrêté attaqué est entaché d’illégalité et à en demander, pour ce motif, l’annulation.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

7. L’exécution du présent jugement implique seulement qu’il soit enjoint au préfet des Yvelines de procéder à un nouvel examen de la demande présentée par le requérant et ce, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Sur les frais liés au litige :

8. M. C est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l’aide juridictionnelle. Par suite, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me Mopo Kobanda en application des dispositions combinées de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu’il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat et sous réserve de l’admission définitive de M. C à l’aide juridictionnelle. A défaut d’admission définitive du requérant à l’aide juridictionnelle, l’Etat versera directement cette somme à ce dernier au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : M. C est provisoirement admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle.

Article 2 : L’arrêté du 15 mars 2024 du préfet des Yvelines est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de procéder à un nouvel examen de la demande présentée par M. C dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 4 : L’Etat versera la somme de 1 000 euros, à Me Mopo Kobanda, conseil de M. C, en application des dispositions combinées de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu’il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat et sous réserve de l’admission définitive de M. C à l’aide juridictionnelle. A défaut d’admission définitive de M. C à l’aide juridictionnelle, cette somme sera directement versée à celui-ci au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C est rejeté.

Article 6 : Le présent jugement sera notifié à M. B C, au préfet des Yvelines et à Me Mopo Kobanda.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 avril 2024.

La magistrate désignée,

Signé

E. Marc Le greffier,

Signé

J. Ileboudo

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

No 2402644

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