Tribunal administratif de Versailles, Reconduites à la frontière, 26 avril 2024, n° 2401705

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Versailles, reconduites à la frontière, 26 avr. 2024, n° 2401705
Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
Numéro : 2401705
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 28 avril 2024

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires complémentaires enregistrés les 27 février, 3 et avril 2024 au tribunal administratif de Versailles, Mme A, représentée par Me Chayé, demande au tribunal :

1°) de l’admettre à titre provisoire au bénéfice de l’aide juridictionnelle ;

2°) d’annuler l’arrêté du 31 janvier 2024 par lequel le préfet de l’Essonne l’a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée en cas d’exécution d’office ;

3°) d’enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d’un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder à un réexamen de sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d’astreinte, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans cette attente ;

4°)de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu’il renonce à percevoir la part contributive de l’Etat versée au titre de l’aide juridictionnelle, ou à défaut d’admission définitive à l’aide juridictionnelle, à lui verser directement cette somme sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— l’arrêté attaqué a été pris par une autorité dépourvue de compétence ;

— il est insuffisamment motivé en ce qu’il n’est pas fait mention des cinq ans de présence sur le territoire de sa famille, ce qui révèle un défaut d’examen complet de sa situation personnelle ;

— il méconnaît les dispositions de l’article L. 435-1 et celles de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile comme les prévisions de la circulaire dite Valls dès lors qu’elle remplit les conditions pour se voir admise au séjour en France à titre exceptionnel en qualité de parent d’enfants scolarisés et que ses attaches sur le sol français sont fortes et intenses, trois de ses quatre enfants étant nés et scolarisés sur le sol français ;

— il méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale consacré par les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et est entaché d’une erreur de droit.

— sa fille cadette s’est vu délivrer une attestation de demande d’asile en procédure normale le 19 janvier 2024 par la préfecture de l’Essonne

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 avril 2024, le préfet de l’Essonne conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par Mme A ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

— le code de justice administrative.

La présidente du tribunal administratif de Versailles a désigné Mme C pour statuer sur les requêtes relevant de la procédure prévue à l’article L. 614-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en application de l’article R. 776-13-3 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique du 3 avril 2024 , en présence de Mme Ben Hadj Messaoud, greffière d’audience ;

— le rapport de Mme C,

— les parties n’étant ni présentes ni représentées.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Une note en délibéré a été présentée le 5 avril 2024 par Me Chayé représentant Mme A.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A, ressortissante ivoirienne née le 8 mai 1989, a déclaré être entrée sur le territoire français le 20 juillet 2019 aux fins de solliciter son admission au séjour au titre de l’asile. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d’asile par une décision du 24 août 2021, confirmée par la Cour nationale du droit d’asile le 12 janvier 2022. La demande d’asile de son compagnon, M. B, de nationalité ivoirienne, a également donné lieu à une décision de rejet de l’OFPRA confirmée le 21 octobre 2021 par la CNDA. Par un arrêté du 31 janvier 2024, dont Mme A demande l’annulation, le préfet de l’Essonne l’a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée en cas d’exécution d’office.

Sur l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique : « Dans les cas d’urgence (), l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président. () ». Eu égard aux circonstances de l’espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l’admission provisoire de Mme A au bénéfice de l’aide juridictionnelle.

Sur les conclusions de la requête :

3. Il ressort des pièces du dossier que l’enfant Maimouna Soraya Cissé, née le 2 décembre 2023, postérieurement à l’examen par la CNDA de la situation de sa mère, Mme A, a été mise en possession d’une attestation de demande d’asile en procédure normale délivrée le 19 janvier 2024 par la préfecture de l’Essonne. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l’Essonne a manqué à son obligation de se livrer à un examen particulier de la situation de Mme A doit être accueilli.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que Mme A est fondée à demander l’annulation de la décision du 31 janvier 2024 du préfet de l’Essonne lui faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours ainsi que, par voie de conséquence, de la même décision fixant le pays de destination.

Sur les conclusions aux fins d’injonction et d’astreinte :

5. Le présent jugement implique nécessairement, en application de l’article L. 614-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, que le préfet de l’Essonne ou le préfet territorialement compétent réexamine la situation de Mme A et lui délivre une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de ce réexamen. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’enjoindre au préfet de procéder à ce réexamen dans le délai de deux mois, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. En l’espèce, Mme A est admise provisoirement à l’aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, sous réserve que Me Chayé, avocate de Mme A renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat et sous réserve de l’admission définitive de son client à l’aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l’Etat le versement à Me Chayé de la somme de 1 000 euros. Dans le cas où l’aide juridictionnelle ne serait pas accordée à Mme A par le bureau d’aide juridictionnelle, ladite somme sera versée à cette dernière.

D E C I D E :

Article 1er : Mme A est admise, à titre provisoire, au bénéfice de l’aide juridictionnelle.

Article 2 : L’arrêté du 31 janvier 2024 du préfet de l’Essonne est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l’Essonne ou au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de la situation de Mme A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : Sous réserve de l’admission définitive de Mme A à l’aide juridictionnelle et sous réserve que Me Chayé renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat, ce dernier versera à Me Chayé, avocate de Mme A une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Dans le cas où l’aide juridictionnelle ne serait pas accordée à Mme A par le bureau d’aide juridictionnelle, la somme de 1 000 euros sera versée à Mme A sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 6 : Le présent jugement sera notifié à Mme D A, au préfet de l’Essonne et à Me Chayé.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 avril 2024.

La magistrate désignée,

signé

M. C Le greffier,

signé

L. Ben Hadj Messaoud

La République mande et ordonne au Préfet de l’Essonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

N°2401705

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