Tribunal de commerce de Douai, 23 décembre 2019, n° 2018 002150

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. com. Douai, 23 déc. 2019, n° 2018 002150
Juridiction : Tribunal de commerce de Douai
Numéro(s) : 2018 002150

Texte intégral

TRIBUNAL DE COMMERCE DE DOUAI

JUGEMENT DU 23 DECEMBRE 2019

RG n° 2018 002150

Entre :

La SELARL N A ET JEAN-J B, représentée par Maître Jean-J

B, mandataire judiciaire ayant étude à Douai, […], […], […], agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL K L, dont le siège social se situe […], 1er étage, porte 3, […], nommé à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de DOUAI du 20 juin 2017.

Demanderesse,

D’une part,

Et:

1 – Monsieur G Z, né le […] à Condé-sur-Escaut, de nationalité française, demeurant […],

Représenté par Maître Bruno HOUSSIER, Avocat au Barreau de Lille, membre de la Selarl Alterum

Partners domiciliée […], substitué par Maître OESTERLYNCK,

Avocat au Barreau de Lille,

2- Monsieur X Y, né le […] à […], demeurant

[…],

Représenté par Maître Layla SAIDI, Avocat au Barreau de Paris, demeurant […]

à Paris (75001),

Défendeurs,

D’autre part,

En présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Jean-Baptiste MIOT, Vice-Procureur de la

République auprès du Tribunal de grande instance de Douai,

La présente instance ayant été appelée et entendue à l’audience de chambre du conseil du 18 septembre 2019 à laquelle siégeaient Monsieur Edmond Budzik, Président de chambre, Madame Cathy Caresmel et Monsieur Serge Messina, Juges, assistés lors des débats de Maître Olivier Thoquenne, Greffier associé de la SCP O. Thoquenne & Ph. Quignon, puis mise en délibéré au 18 décembre 2019, les parties en étant avisées, délibéré prorogé au 23 décembre 2019.

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1-FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

FAITS

La société O.G. L, dont le siège social se situe à […]

[…], a été constituée au mois d’avril 2014 sous la forme d’une SARL au capital de 10 000 €, intégralement libéré et réparti comme suit :

Monsieur H D 2 400 parts Madame I D 2 500 parts Monsieur X Y 100 parts La SARL M2 DEVELOPPEMENT 5 000 parts

Elle avait pour objet une activité de centre de remise en forme à L dans un local sis […], sous l’enseigne « Optimum Gym »>.

La gérance de la société était assurée conjointement par Messieurs G Z, et X

Y.

Par jugement en date du 20 juin 2017, le Tribunal de Commerce de Douai saisi par déclaration de cessation des paiements réalisée par Monsieur X Y a ouvert une procédure de Liquidation Judiciaire à l’encontre de la SARL-O.G. L. La date de cessation des paiements a été fixée au

1er juin 2016 et la Selar! A & B désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Le passif a été définitivement arrêté par le Liquidateur le 27 septembre 2017 à un montant de

182 142,99 €. L’actif se limite quant à lui au matériel d’exploitation qui a été réalisé par le commissaire priseur pour un montant de 3 300,37 €.

Dans le cadre des opérations de liquidation, le liquidateur judiciaire a relevé des faits imputables à Messieurs G Z et X Y susceptibles de constituer des fautes de gestion de nature à entraîner des sanctions, et a entendu saisir la juridiction de céans d’une instance en sanction.

PROCEDURE

Par acte d’huissier régulièrement signifié le 11 juillet 2018 par Maître Denoyelle, Huissier de justice à Douai, la SELARL N A ET JEAN-J B, représentée par Maître JEAN

J B, Mandataire Judiciaire, agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL

K L, nommé à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de DOUAI du 20 juin

2017, a assigné Monsieur Y, à l’effet d’avoir à comparaître devant le Tribunal de commerce de Douai siégeant en son audience du 5 septembre 2018 aux fins de l’entendre :

Condamner à titre principal Messieurs G Z et X Y à supporter tout ou partie de l’insuffisance d’actif, conformément aux dispositions des articles L 651-1 à L 651-4 du code de commerce ;

Prononcer à l’encontre de Messieurs G Z et X Y une mesure de faillite personnelle, conformément aux dispositions des articles L 653-1, L 653-4, 4° et L 653-5, 6° du code de commerce ;

Prononcer à titre subsidiaire à l’encontre de Messieurs G Z et X Y une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, conformément aux dispositions de l’article L

653-8 du code de commerce;

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Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir;

Condamner les dirigeants aux entiers frais et dépens de la présente instance.

Monsieur G Z, n’a pu être destinataire de cette assignation, ni joint par les convocations adressées par le Greffe à son ancienne adresse, ayant déménagé dans la région de Carpentras, et n’en

a pris connaissance qu’en mars 2019.

Par conclusions, Monsieur G Z demande au Tribunal de :

A titre principal:

Constater dire et juger que Monsieur G Z n’était plus co-gérant de la SARL K

L depuis le 19 mai 2016, soit avant la date de la cessation des paiements arrêtée dans le jugement

d’ouverture de la procédure collective à la date du 1er juin 2016.

Constater dire et juger que cette démission du 19 mai 2016 a été constatée et admise par les associés de la SARL K L aux termes d’un procès-verbal d’AGE du 23 décembre 2016.

Constater dire et juger en toutes hypothèses qu’à la date de l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, Monsieur G Z n’apparait plus sur le KBis de la société en qualité de co-gérant.

Constater dire et juger au vu des pièces justificatives versées aux débats, qu’il est démontré que Monsieur Z ne pouvait plus encourir à compter du 19 mai 2016, en fait comme en droit, une quelconque responsabilité en qualité de co-gérant de la SARL K L, compte tenu de la démission qu’il avait donnée, et du fait qu’il ne gérait plus dans les faits de cette société.

Débouter par conséquent la SELARL N A ET JEAN-J B, représentée par Maître N A, Mandataire Judiciaire, agissant es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL K

L, de toutes les demandes de condamnation dirigées à l’encontre de Monsieur G Z.

Subsidiairement :

Constater dire et juger que la SARL K L s’est trouvé confrontée depuis son ouverture en avril 2014 à de multiples difficultés, qui ont fini par la conduire irrémédiablement dans une impasse économique à compter de l’année 2017, pour des raisons totalement étrangères à Monsieur Z, de telle sorte qu’il devra être constaté en toutes hypothèses une absence de lien de causalité entre les prétendues fautes reprochées à Monsieur Z et l’insuffisance d’actif de la SARL K L.

Constater dire et juger qu’il n’est pas possible, en droit comme en fait, de reprocher à Monsieur Z, qui n’était plus co-gérant de la SARL K L depuis le 19 mai 2016, et qui ne percevait aucune rémunération dans cette société dans laquelle il n’était pas lui-même associé, une poursuite volontaire et abusive de l’activité de celle-ci dans un intérêt personnel.

Constater dire et juger que les cogérants de la SARL K L se sont bien occupés de faire tenir une comptabilité de la SARL K L pour l’année 2016, que cette comptabilité a bien été tenue par le Cabinet ARTEMINE, qui était chargé de cette mission, et a été rémunéré à ce titre tout au long de l’année

2016.

Constater dire et juger par conséquent que le Cabinet ARTEMINE aurait dû communiquer à Maître M 3

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A es qualité la comptabilité 2016 lorsque cela lui a été demandé.

Ordonner en tant que de besoin au Cabinet ARTEMINE de communiquer à Maître A es qualité la comptabilité 2016 de la SARL K L, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, en vertu des articles 138 et 139 du Code de Procédure Civile.

Constater dire et juger au regard de la date d’exigibilité réelle des créances déclarées, qu’il ne pouvait y avoir d’activité véritablement déficitaire poursuivie avant le courant de l’année 2017, et qu’à ce titre, la date de cessation des paiements fixée provisoirement par le Tribunal au 1er juin 2016 apparaît en décalage avec la réalité, cette date devant plutôt être située en janvier 2017.

Débouter par conséquent la SELARL N A ET JEAN-J B, représentée par Maître N A, Mandataire Judiciaire, agissant es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL K L, de toutes les demandes de condamnation dirigées à l’encontre de Monsieur G C.

Condamner la SELARL N A ET JEAN-J B, représentée par Maître N A,

Mandataire Judiciaire, agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL K L, à payer à Monsieur G Z une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de

Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

A titre infiniment subsidiaire :

Si par impossible Monsieur Z ne devait pas être mis hors de cause par le Tribunal de

Commerce de DOUAI,

Constater dire et juger que la démission de Monsieur G Z du 19 mai 2016 aurait dû être formalisée en mai 2016 au RCS par Monsieur X Y, seul gérant de la société qui demeurait alors.

Condamner de ce fait Monsieur X Y à le garantir et à la relever indemne de toute condamnation qui pourrait prononcée à son encontre à l’issue de la présente instance.

Quant à Monsieur X Y, il demande au Tribunal de :

PAR JUGEMENT AVANT DIRE DROIT

Faire injonction à Monsieur G Z de verser aux débats le rapport de gérance qui aurait été prétendument réalisé par l’assemblée générale qui aurait eu lieu selon ses dires le 23 décembre 2016,

SUR LE FOND

Déclarer recevable et bien fondé en ses demandes Monsieur Y.

Déclarer irrecevables et infondés en toutes ses demandes, fins et conclusions Maître N O es qualité de liquidateur de la Société K L, ainsi que Monsieur G Z,

PAR SUITE

Débouter Maître N O ès qualités de liquidateur de la Société K L, ав 4

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Débouter Monsieur G Z de ses demandes,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

Condamner Maître N O es qualité de liquidateur de la Société K L aux dépens.

Cette affaire a fait l’objet de 5 renvois pour être mise en état, a été enfin évoquée à l’audience publique du 18 septembre 2019, où elle a été retenue, plaidée et mise en délibéré au 18 décembre 2019.

MOYENS DES PARTIES

A l’appui de sa demande, Maître B expose que :

SUR LE PRONONCE DE SANCTIONS PECUNIAIRES

A titre liminaire, il convient de rappeler que selon l’article L. 651-2 du Code de commerce, la responsabilité pour insuffisance d’actif du dirigeant d’une personne morale peut être engagée à la demande du Liquidateur s’il démontre :

-l’existence d’une insuffisance d’actif ;

-'existence de fautes de gestion ;

-un lien de causalité entre la faute de gestion et l’insuffisance d’actif.

Le passif a été arrêté à la somme de 182 142,99 € alors que l’actif a été réalisé et a produit la somme de 3 300,37 €. Par conséquent, l’insuffisance d’actif atteint un total de 178 842,62 €. Dans ce contexte, il est patent que l’insuffisance d’actif est caractérisée.

L’insuffisance d’actif de la SARL O.G. L, préjudiciable aux créanciers, est la conséquence directe des fautes de gestion commises par les dirigeants qui ont poursuivi abusivement une activité déficitaire.

Une jurisprudence classique de la Cour de cassation pose le principe que la poursuite abusive d’une activité déficitaire caractérise une faute de gestion, quand bien même il n’y aurait pas d’intérêt personnel.

En l’espèce, le Tribunal a fixé la date de cessation des paiements au 1er juin 2016, dans un jugement d’ouverture du 20 juin 2017, soit largement en dehors du délai de 45 jours prévu par la loi. Qui plus est, il apparait que la poursuite abusive de l’exploitation déficitaire est caractérisée par des difficultés enregistrées peu de temps après la constitution de la société, dès 2014.

En effet, il ressort des déclarations de créances que des incidents de paiement sont intervenus dès le mois d’août 2014 et se sont ensuite accumulés en 2016 jusqu’au dépôt de bilan : 55000€ dès le 8 août 2014 avec les associés D; 65280,17€ avec la SCI L dès le 6 juillet 2016; et

JOHNSON HEALTH TECH dès juillet 2016.

Messieurs Z et Y n’ont pas déclaré la cessation des paiements dans le délai légal or selon les dispositions de l’article L. 640-4 du Code de commerce, l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire « doit être demandée par le débiteur au plus tard dans les 45 jours qui suivent la cessation des paiements ».

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La jurisprudence reconnaît fréquemment que le défaut de déclaration de cessation des paiements dans le délai imparti est une faute de gestion. En l’espèce, nous avons vu que le Tribunal a fixé la date de cessation des paiements au 1er juin 2016, dans un jugement d’ouverture du 20 juin 2017, soit bien au delà du délai de 45 jours prévu par la loi.

La société O.G. L étant constituée sous la forme d’une SARL, cette dernière est soumise aux dispositions des articles L. 123-12 à L. 123-18 du Code de commerce exigeant la tenue d’une comptabilité. A défaut, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans divers arrêts, la tenue d’une comptabilité irrégulière ou l’absence de comptabilité constituent des fautes de gestion pouvant justifier une condamnation du gérant à combler le passif.

En l’espèce, seul le compte de résultat arrêté au 31 décembre 2015 a été communiqué, et ce, malgré l’envoi de demandes de remise de comptabilité, laissant à penser qu’aucun autre document comptable n’a été établi, notamment pour l’exercice 2016. Interrogé, le cabinet comptable n’a pas donné suite au courrier qui lui a été adressé.

La poursuite abusive de l’activité déficitaire par Messieurs Y et Z et la déclaration tardive de la cessation des paiements ont contribué immanquablement à l’accroissement de l’insuffisance d’actif.

SUR LE PRONONCE DE SANCTIONS PERSONNELLES

Le liquidateur judiciaire a également relevé des fautes pouvant être sanctionnées par une mesure de faillite personnelle, ou subsidiairement, d’une interdiction de diriger, de gérer, d’administrer ou de contrôler.

En application de l’article L. 653-4 4° du Code de commerce, « le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant, de droit ou de fait, d’une personne morale » ayant « poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements de la personne morale ».

Concernant l’intérêt personnel, les dirigeants avaient tout intérêt à poursuivre l’activité déficitaire puisqu’en qualité de cogérants, ils percevaient une rémunération. En conséquence, l’intérêt personnel de Messieurs Z et Y dans la poursuite d’activité déficitaire est indéniable.

A défaut de tenue de comptabilité, l’article L. 653-5 6° du Code de commerce prévoit la possibilité pour le Tribunal, de condamner le dirigeant à une faillite personnelle s’il n’a pas « tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation… » ou s’il a « tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables '>.

Or les dirigeants n’ont produit que le compte de résultat 2015, de sorte qu’on peut légitimement penser que depuis aucun autre document n’a été établi.

L’article L. 653-8, alinéa 3 dispose que l’interdiction de gérer peut être prononcée à l’encontre du débiteur qui a «omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours '>.

En l’espèce, le Tribunal a fixé la date de cessation des paiements au 1er juin 2016, dans un jugement d’ouverture du 20 juin 2017, soit bien au-delà des 45 jours prévus par la loi.

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L’infraction prévue par l’article L. 653-8 est donc constituée, quels que soient les motifs qui ont pu conduire les dirigeants à s’abstenir de déposer une telle demande.

Le Ministère public, aux termes de ses réquisitions, s’associe pleinement à l’acte en comblement de passif comme à la demande de sanctions personnelles, rappelant le défaut de comptabilité, l’importance du passif et le fait que si certaines créances sont contestables, elles n’ont pas forcément été contestées. Il a souligné le principal grief à ses yeux: la poursuite abusive d’une activité déficitaire dans un intérêt personnel dès avant l’exercice 2016. Il ajoute que la démission du gérant n’était nullement opposable aux tiers dès lors que la formalité au RCS n’était pas accomplie. Par ailleurs plusieurs échanges de mails montrent que Monsieur C contrôlait toujours la société au cours de l’année 2016. Enfin s’agissant de Monsieur Y même si son investissement était moindre, il est rappelé qu’il avait accepté la co-gérance et qu’il lui appartenait de s’impliquer pleinement ou de refuser la co-gérance, ou bien encore de démissionner s’il lui était refusé de contrôler pleinement la société.

En réponse, Monsieur X Y expose que :

Il n’existe aucune de ces trois conditions pour reprocher une quelconque faute à Monsieur Y dans la gérance de la société K L.

Sur l’insuffisance d’actif :

L’insuffisance d’actif n’apparaît que comme superficielle. En effet, le tiers de la créance est constitué par la créance des époux D. Cette créance n’est devenue définitive qu’avec le prononcé de l’arrêt du 25 janvier 2018 de la Cour d’appel de Douai, soit plus de neuf mois après le dépôt de la demande de liquidation judiciaire.

En outre, la société Johnson Health Tech France produit une créance d’un montant de 70.074,82 euros prétendument en exécution du contrat de location achat conclu avec la Société K L. Cette créance constitue le tiers de l’insuffisance d’actif. Pourtant le matériel a été récupéré par l’entreprise ce qui ouvre toute critique à ladite créance.

Enfin, la SCI L ose déclarer au passif de la société K L une créance d’un montant de 65.280,17 euros, qui constitue le dernier tiers de l’insuffisance d’actif. Or, à nouveau le quantum de la présente créance est discutable à plusieurs titres : le décompte locatif ainsi que la déclaration de créance mettent également en exergue que les difficultés dans le règlement des loyers sont intervenues à compter du mois de janvier 2016, soit quelques temps après la survenance des premiers dégâts des eaux rendant les locaux inutilisables, entraînant ainsi d’importantes pertes d’exploitation pour le centre de la musculation, impactant sa renommée et sa réputation au point où les adhérents s’en détournèrent et que les nouveaux clients renonçaient à s’y inscrire. Ainsi, les deux rapports d’expertise qui furent établis à l’issue des sinistres des 27 mars 2015 et 30 juin 2016 démontrent très clairement l’absence totale de négligence ou d’une quelconque responsabilité de la Société K L dans leur survenance.

Sur l’absence de négligence de Monsieur Y :

Monsieur Y n’a agi qu’avec diligence pendant toute la durée de son mandat de cogérant. Dans sa déclaration de créance adressée à Maître N O, la SCI L met en exergue le fait que sur la période litigieuse, à savoir de janvier 2016 à la restitution des locaux, soit au 19 juin 2017, 18 mois, sur la somme totale à devoir de 103.054,50 euros, la somme de 38.262,44 euros avait été versée, soit un tiers de la dette.

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Sur l’inexistence du retrait de Monsieur Z

Afin de solliciter sa décharge, Monsieur Z invoque un prétendu retrait de la gérance de la Société K L dès la fin d’année 2016. Au regard de ces différents éléments, Monsieur Z ne peut donc décemment prétendre qu’il n’était plus gérant à compter du 19 mai 2016, non plus qu'« il ne figurait plus sur le K-bis » à la date d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire puisque c’est bien ladite procédure qui l’a incité à se rendre au Greffe du Tribunal de commerce afin de faire enregistrer une prétendue modification de gérance. Monsieur Z s’est comporté es qualité de gérant de la SARL K L jusqu’à l’ouverture de la liquidation judiciaire. Monsieur Y ne saurait être regardé

comme seul responsable de la gérance de la Société K L.

Quant à Monsieur G Z, il fait valoir que :

Sur la gérance de la société SARL K L
Monsieur G Z n’avait accepté de prendre les fonctions de co-gérant de la SARL K

L que pour suivre la participation financière qui avait été prise au sein du capital par la société M2 DEVELOPPEMENT, dont il était cogérant avec son frère P Z. Pour autant, ce n’est pas lui qui s’occupait de la gestion de la SARL K L, qui était assurée par Monsieur X

Y, également chargé sur place de la gestion de la salle de fitness et de musculation.

Dans les faits, Monsieur G Z et Monsieur X Y étaient en désaccord au printemps 2016, Monsieur Z reprochant à Monsieur Y à la fois un manque de transparence et d’information quant à la gestion du club, mais aussi des litiges à répétition avec des clients

de la salle.

Sur la démission de Monsieur Z de ses fonctions de co-gérant :

Compte tenu du manque de transparence et d’information quant à la gestion du club effectuée sur place par Monsieur X Y, mais aussi en raison des litiges à répétition avec des clients de la salle,
Monsieur G Z a décidé de notifier à son associé et co-gérant Monsieur X Y sa démission de ses fonctions de co-gérant de la SARL K L, dès le 19 mai 2016. Mais
Monsieur Y s’abstiendra d’accomplir les formalités consécutives à la démission de Monsieur

Z de ses fonctions de co-gérant. Il prendra au contraire l’initiative de formaliser une déclaration d’état de cessation des paiements de la SARL K L, le 15 mai 2017, sans en informer
Monsieur Z. Apprenant qu’il était convoqué en qualité de co-gérant devant le Tribunal de Commerce de DOUAI, en Chambre du Conseil, à la date du 20 juin 2017, Monsieur C

s’apercevra que le nécessaire n’avait toujours pas été fait par Monsieur Y pour formaliser sa démission au RCS, et il prendra donc lui-même l’initiative pour déposer lui-même les éléments au greffe.

Monsieur Z ne pouvait plus encourir à compter du 19 mai 2016, en fait comme en droit, une quelconque responsabilité en qualité de co-gérant de la SARL K L, compte tenu de la démission qu’il avait donnée, et du fait qu’il ne gérait plus dans les faits de cette société.

Maître A es qualité indique dans son assignation que la comptabilité de la SARL K L

n’aurait été tenue que sur la seule année 2015, et encore que sous la forme d’un compte de résultat, et pas en 2016. Cependant la comptabilité 2016 a bien été tenue, le cabinet ARTEMINE était chargé de cette mission, et a été rémunéré à ce titre tout au long de l’année 2016. Le cabinet ARTEMINE aurait donc dû répondre à Maître A ès qualités lorsque celui-ci lui a demandé communication de la comptabilité 2016.

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II-MOTIFS DE LA DECISION

Sur la responsabilité pour insuffisance d’actif

Attendu que la société O.G. L a été constituée au mois d’avril 2014 sous la forme d’une

SARL au capital de 10.000 €, intégralement libéré et réparti comme suit :

Monsieur H D 2 400 parts Madame I D 2 500 parts Monsieur X Y 100 parts La SARL M2 DEVELOPPEMENT 1

5 000 parts

Attendu que par jugement en date du 20 juin 2017, le Tribunal de Commerce de DOUAI a ouvert une procédure de Liquidation Judiciaire à l’encontre de la SARL O.G. L;

Attendu que la date de cessation des paiements a été fixée au 1er juin 2016;

Attendu que le passif a été arrêté à la somme de 182 142,99 € alors que l’actif réalisé n’a produit que la somme de 3 300,37 € et donc par conséquent, l’insuffisance d’actif atteint un total de 178 842,62 €;

Attendu que les époux D ont décidé de mettre fin à leur activité d’animation de la salle dès le mois d’août 2014;

Attendu que les dirigeants ont poursuivi l’activité déficitaire sans manifestement s’en inquiéter;

Attendu que la gérance de la société a été assurée conjointement par Messieurs G Z et X Y jusqu’au 23 décembre 2016, soit bien après la date de cessation des paiements fixée au 1er juin 2016;

Attendu que ces fautes de gestion sont avérées et imputables à chacun des dirigeants ;

Attendu que si les fautes de gestion sont avérées et ont conduit à l’insuffisance d’actif, il apparaît impossible au vu des éléments produits de déterminer à quelle hauteur ils ont contribué à constituer ladite insuffisance; qu’en conséquence le Tribunal dira ne pouvoir entrer en voie de condamnation en comblement de passif à l’égard de Messieurs Z et Y;

Sur la faillite personnelle

Attendu que le défaut de comptabilité qui est patent constitue un motif important et suffisant de sanction des dirigeants qui en avaient l’obligation par application des articles L 123-12 à 18 du Code de commerce relatifs aux SARL et se sont ainsi privés d’outils essentiels pour la conduite de l’entreprise, que ce défaut est sanctionné par l’article L 653-5, 6° du Code de commerce d’une mesure de faillite personnelle ;

Attendu que le Tribunal rejettera les arguments développés par Monsieur G Z prétendant qu’il n’était plus gérant à partir du 19 mai 2016; que les échanges de mails versés aux débats démontrent pleinement qu’il avait parfaitement conservé le contrôle de la société ; qu’en conséquence le Tribunal considérera et jugera que la responsabilité de la situation lui incombe également et pleinement ;

Attendu que le Tribunal jugera que Messieurs Z et Y sont passibles d’une mesure

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de faillite personnelle au visa des articles L 653-5, 5° et 6° du Code de commerce, mais que les sinistres successifs liés à des locaux non conformes ont fortement nuit à l’activité de la société K L et pénalisé ses résultats, le Tribunal jugera qu’il peut être fait application de l’article L 653-8 du Code de commerce et prononcera en lieu et place de la faillite personnelle une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de cinq années à l’encontre de Messieurs G Z et X Y;

Attendu que la sanction prononcée, en application des articles L. 128-1 et suivants et R. 128-1 et suivants du Code du commerce, fera l’objet d’une inscription au Fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce;

Attendu que la décision sera assortie de l’exécution provisoire ;

Attendu que le Tribunal ordonne que les dépens soient tirés en frais privilégiés de procédure.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, en ayant délibéré, statuant publiquement par un jugement contradictoire et prononcé en premier ressort,

Déboute la Selarl A & B ès qualités de sa demande de condamnation en responsabilité pour insuffisance d’actif à l’égard de Messieurs Z et Y ;

Prononce à l’encontre de Monsieur X Y, né le […] à […], demeurant […], une mesure d’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci, d’une durée de cinq années ;

Prononce à l’encontre de Monsieur G Z, né le […] à Condé-sur

Escaut, de nationalité française, demeurant […], une mesure

d’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci, d’une durée de cinq années ;

Prononce l’exécution provisoire de la décision;

Dit qu’en application des articles L. 128-1 et suivants et R. 128-1 et suivants du Code du commerce, cette sanction fera l’objet d’une inscription au Fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce;

Ditque les dépens seront repris en frais privilégiés de la procédure collective;

Liquide les dépens à la somme de 94,34 euros.

Prononcé par mise à disposition au greffe de ce Tribunal le 23 décembre 2019 et la minute signée par Monsieur Edmond BUDZIK, Président de chambre, et Maître Olivier THOQUENNE, greffier associé de la

SCP THOQUENNE & QUIGNON. DE DO UA CE L R Le Président, Le Greffier,ME

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[…]

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Pour expédition certifiée conforme à l’original expédition Page 10/10 N BELGUEDRI, commis-greffier assermente 0 (NORD) nb/27/12/2019 11:43:19

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Tribunal de commerce de Douai, 23 décembre 2019, n° 2018 002150