Tribunal de commerce de Paris, 13 octobre 2020, n° 2017005123

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Chronologie de l’affaire

Commentaires8

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Vogel & Vogel · 27 mars 2024

Arrêt Pizza Sprint Com. 28 févr. 2024, FS-B, n° 22-10.314 Du caractère autonome de l'action du ministre de l'Economie à l'imputabilité de la sanction de pratiques restrictives de concurrence dans un réseau de franchise Très attendu notamment pour ses enjeux pratiques, un riche arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 28 février 2024 (n° 22-10.314), publié au Bulletin, apporte un certain nombre de précisions sur le caractère autonome de l'action du ministre de l'Economie, la caractérisation de la soumission et du déséquilibre significatif et l'imputabilité de …

 

Jean-Michel Vertut · 6 avril 2023

Faits. Suite à une enquête menée en 2016 par ses services, le Ministre de l'Economie devait en avril 2017, par deux assignations, saisir le Tribunal de Commerce de Paris à l'encontre de la centrale d'achat Intermarché Casino Achat (INCAA) et de ses mandants ITM Alimentaire International (Intermarché) et Casino (EMC Distribution) pour pratiques commerciales abusives vis-à-vis de certains fournisseurs du secteur « parfumerie-hygiène » (https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/infos-presse-2017). Selon le Ministre, l'enquête menée sur le fondement de l'article L. 450-3 du Code com. tant auprès …

 
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Sur la décision

Référence :
T. com. Paris, 13 oct. 2020, n° 2017005123
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Numéro(s) : 2017005123

Texte intégral

26

REPUBLIQUE FRANCAISE Cople exécutoire : Mme X

BG N de la DIRECTION

REGIONALE DES AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS ENTREPRISES DE LA

CONCURRENCE OE LA

CONSOMMATION DU TRAVAIL

ET DE LEMPLOI TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS Copie aux demandeurs : 49

Copie aux défendeurs : 3

1 ERE CHAMBRE 89

TRESOR PUBLIC

JUGEMENT PRONONCE LE 13/10/2020

PAR SA MISE A DISPOSITION AU GREFFE

4

RG 2017005123

02/02/2017

ENTRE: Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances, dont le siège social est […], élisant domicile DGCCRF au […] demanderesse : comparant par Mme X-BG N et Mr E F Mandataire de la DIRECTION REGIONALE DES ENTREPRISES DE LA

CONCURRENCE DE LA CONSOMMATION DU TRAVAIL ET DE L’EMPLOI POLE C

- […].

Intervenants volontaires : 1) M. G H, demeurant […]

SUR-SAONE 2) Mme I J, demeurant […]

[…]) M. K L, demeurant […]

4) M. M N, demeurant […]

[…], dont le siège social est […]

BORDEAUX

[…], dont le siège social est […]

[…], dont le siège social est […]

LA BUISSIERE 8) SARL AVI dont le siège social est […], représentée par la SELAS BERNARD & O P ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL AVI, dont le siège social est […]

[…]

[…], dont le siège social est […]

10) SARL SUB REPUBLIQUE, dont le siège social est […]

[…], dont le siège social est […]

12) SARL SUB-LYON DEVELOPPEMENT, dont le siège social est […]

[…], dont le siège social est […]

GRANDE SYNTHE


27 N°RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT OU MARDI 13/10/2020 PAGE 2 1 ERE CHAMBRE

Parties demanderesses: assistées de Me Florian de SAINT-POL de la SELARLU de

SAINT-POL & Associés, et comparant par la SELARL SCHERMANN MASSELIN

Avocats Associés (R142). 14) M. Q R, demeurant […]

Partie demanderesse : assistée de Me ESTRADE Camille Avocat à PAU et comparant par Me BAYLE Philippe Avocat

15) Mme S T divorcée Y, demeurant […] demanderesse : assistée de Me RENOUX BE Avocat de Metz et comparant par Me Martine CHOLAY Avocat (B242)

[…], dont le siège social est […]

MONTELIMAR Partie demanderesse: assistée de Me POLLARD AY Avocat et comparant par la SCP MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI Avocats (P73) 17) M. U V, demeurant […]

18) SARL SUBMAX, dont le siège social est […]

[…] prise en la personne de. Me Eric SAMSON en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de la SARL SUBMAX, et. Me W AA ès qualité de liquidateur judiciaire de la ste SUBMAX par jugement du 12 septembre.

2018, dont le siège social est […]

Partie demanderesse : assistée de Me Mathieu ROUILLARD Avocat et comparant par

Me AB AC Avocat (10, […]) Mr AD AE, dont le siège social est […]

SAINT V DES EAUX 44117 Partie demanderesse : assistèe de Me Ludovic HUET Avocat et comparant par Me

AR AS Avocat à Toulouse. 21) M. AT AU, dont le siège social est […]

22) Ime Marielle AU, dont le siège social est […]

GOUESNOU 23) M. AF A, dont le siège social est résidence les rives du chateau app:

c21 […]. 24) Mme Z, AV AW AX épouse A, dont le siège social est: […]:

31120 :

25) Me Christian REY ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL JAVA, dont le siège social est 2 bis, avenue AY Rieux TOULOUSE 31500 Parties demanderesses assistées de Me AR AS Avocat: et comparant par Me Ludovic HUET Avocat:

[…], dont le siège social est […]

PROVENCE

27) SARL SUBTADEN, dont le siège social est […], […], le […].

28) SARL UNIPERSONNELLE I-FOOD en liquidation judiciaire, représentée par son liquidateur, Me AG AH de la SCP BTSG, dont le siège social est […]

29) SARL ARNAST société en liquidation judiciaire représentée par son liquidateur Me AY AZ BA, dont le siège social est […]

30) SARL MAPAG, société en liquidation judiciaire représentée par son liquidateur, Me AI AJ, dont le siège social est […]

[…], dont le siège social est […]

MEZIERES

L


28

N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 3 1 ERE CHAMBRE

Parties demanderesses: assistées de Me Florian de SAINT-POL de la SELARLU de

SAINT-POL & Associés, et comparant par la SELARL SCHERMANN MASSELIN

Avocats Associés (R142). 32) Mme AK AL, demeurant […]

33) Mr AL AM, demeurant […]

34) société B prise en la personne. de Me B és qualités de liquidateur judiciaire de la société SUBGB, dont le siège social est […]

PARIST Parties demanderesses assistées de: Me: GUIRAMND du. Cabinet ALARD

BB BC BD AARPI Grégory Avocats (G727) et comparant par la Selarl SEVELLEC DAUCHEL CRESSON Avocats (W09).

ET: 1) SARL SUBWAY INTERNATIONAL B.V., dont le siège social est […]

[…] OF BG SARL, dont le siège social est […]

BG 75013 Paris-RCS B 452808652 Parties défenderesses assistées, de Maître DANY Mireille et Maître Raphael MELLERIO de la SOCIETE D’AVOCATS ARAMIS Avocats (K0186) et comparant par

Me HERNE Pierre Avocat (B835)

APRES EN AVOIR DELIBERE

Faits – Objet du litige

Présentation du groupe Subway

L’enseigne Subway de restauration rapide s’est développée dans un premier temps aux Etats-Unis puis dans le monde entier. Depuis l’ouverture du premier restaurant en 1965, le nombre de restaurants Subway n’a cessé de croître dans le monde. En BG, le premier restaurant Subway a été ouvert en 2001 et le réseau compte aujourd’hui plus de 400.

restaurants.

Dans le document d’information remis au franchisé, la franchise Subway donne à celui-ci < le droit d’établir et d’exploiter sur un emplacement unique un établissement de vente au détail réservé à la préparation et à la vente de sandwich « foot long » ou d’autres sandwichs, ainsi que des salades et autres spécialités. Les sandwichs qui peuvent être vendus sont les sandwichs < cold cuts » (crudités, « seafood » (fruits de mer / poisson), « steak », et « meatballs» (boulette de viande). Les clients peuvent composer leur propre sandwich en choisissant entre les différents ingrédients suivants : fromage, oignons, laitu tomates, comichons, poivrons verts, olives noires, sel, poivre, huile et autres condiments. […] » Ce principe de composition « sur mesure » par le client se duplique dans les salades et les wraps vendus dans les restaurants de l’enseigne. Les restaurants SUBWAY, proposent également à la clientèle des desserts, des boissons et des petits déjeuners.

*

àLe succès du concept Subway auprès des entrepreneurs tient notamment à son originalité, ses performances et à l’investissement raisonnable nécessité pour entrer dans le réseau, en comparaison avec d’autres franchises du même secteur. En effet, outre un droit d’entrée de 10.000 € demandé aux franchisés, le concept Subway est basé sur l’absence de cuisine et la, découpe à froid. Il ne nécessite pas d’extraction et le seul équipement nécessaire est un four pouvant se positionner facilement au sein de l’établissement. Ces éléments facilitent les réaménagements au sein du lieu de vente et constituent un atout pour l’entrepreneur en facilitant son entrée et son éventuelle sortie du réseau.

h 1.


29 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017005123

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020

PAGE 4 1 ERE CHAMBRE

La marque déposée Subway appartient aujourd’hui à la société Subway IP LLC, ayant son siège social dans l’Etat de Floride aux Etats-Unis, qui détient l’ensemble des marques et signes distinctifs relatifs à la franchise Subway et tous les droits de propriété intellectuelle y afférents. A l’époque de l’enquête menée par les services du Ministre, la marque était détenue par la société Doctor’s Associates Inc. (DAI), ayant également son siège social dans l’Etat de Floride.

La société Subway IP LLC assure aujourd’hui les mêmes fonctions que celles exercées par DAI auparavant.

Afin d’ouvrir des restaurants SUBWAY en dehors des États-Unis, du Canada et de

l’Australie, DAI a confié une « licence d’utilisation non exclusive » du « Système » à la société SUBWAY SYSTEMS INTERNATIONAL ANSTALT (SSIA), immatriculée au Liechtenstein.

Cette société a elle-même accordé à SUBWAY INTERNATIONAL BV (C), société de droit néerlandais, une sous-licence non exclusive pour utiliser les marques afin d’ouvrir et exploiter des restaurants notamment en Europe. C’est dans le cadre de cette sous-licence que C conclut avec les franchisés en BG des contrats de franchise Subway, rédigés en anglais et en français, la version anglaise faisant foi. Dans le cadre de sa mission de franchiseur, C établit et met à jour l’ensemble de la documentation contractuelle nécessaire pour l’octroi de franchises en BG, en particulier le document d’information précontractuel (requis aux termes des articles L.330-3 et R.330-11 du Code de commerce) et le contrat de franchise. Ces documents et leurs mises à jour sont rédigés en langue anglaise et traduits en français à l’intention des candidats franchisés en BG.

Dans le but de promouvoir et développer la franchise Subway en BG, C a conclu le 1er janvier 2010 un contrat de de services avec la société SUBWAY REALTY OF

BG EURL (D) située à CACHAN (94230). Aux termes de ce contrat, D fournit un certain nombre de services à C et lui « prêtera son assistance pour l’exploitation et la gestion du système de franchise en BG ». Les prestations citées sont le développement de magasins, les services de marketing, de recherche et développement, la gestion des baux immobiliers. En contrepartie de l’exécution de ces services, D perçoit une rémunération de la part de C. FLI

D a également signé un contrat de services le 1er avril 2010 avec la société SUBWAY FRANCHISE ADVERTISING FUND TRUST B.V (SFAFT), société de droit néerlandais (cf. infra), au terme duquel D est chargée de gérer et administrer le fonds de publicité.

Par ailleurs, C a signé des contrats avec des entrepreneurs indépendants (sans lien capitalistique ni salarial avec les sociétés du groupe Subway) dénommés « agents de développement » ou « AD » qui, à une exception près, sont tous des franchisés et anciens franchisés. Ils ont pour mission, en qualité de prestataires de services de C, de favoriser l’ouverture de restaurants, de s’assurer de la viabilité des projets d’implantation et d’assurer le suivi opéralionnel des franchisés pendant la durée de leurs contrats. Ils participent aux opérations de promotion et de publicité de Subway auprès des candidats à la franchise, notamment dans le cadre des salons professionnels. Ils étaient 18 au moment de l’enquête du Ministre. Ils peuvent également assister les franchisés lors de la négociation des baux et des contrats de fourniture et sont présents aux côtés des franchisés lors de l’ouverture des restaurants, afin de les assister dans le lancement de leur activité sous l’enseigne Subway, puis pendant la durée du contrat de franchise. Les agents de développement, rémunérés


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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 5 1 ERE CHAMBRE

par C, perçoivent 50% du droit d’entrée de 10.000 € et un tiers des redevances de . franchise acquittés par les franchisés au sein de leur territoire.

D’autres entités du groupe proposent des services aux franchisés, notamment : Subway® International Equipement Leasing B.V., de droit néerlandais, loue du

W

matériel à l’échelle internationale; Franchisee Shipping Center Co. (FSCC), immatriculée aux Etats-Unis, propose des supports publicitaires, promotionnels et opérationnels aux franchisés Subway®; Franchise World Headquaters, également immatriculée aux Etats-Unis, fournit des services à: C concernant les ventes, la recherche et le développement, la commercialisation de franchises, la formation des franchisés, la vente de technologie, le système d’assistance des applications informatiques, la conception des points de vente magasins, les services juridiques et comptables.

Deux entités non filiales du groupe Subway jouent un rôle dans le fonctionnement du réseau de franchise : Le Subway nchisee Advertising Fund Trust (dénommé « SFAFT Foundation »), fondation de droit néerlandais dont les membres sont exclusivement des franchisés, gère et administre le fonds commun consacré à la publicité pour l’ensemble du réseau. Comme vu précédemment, cette fondation a conclu un contrat avec D, qui est chargée de gérer et administrer le fonds de publicité pour la BG ; La société IPCE (Independent Purchasing Company Europe), de droit anglais, dont le conseil d’administration est exclusivement composé de représentants des franchisés,*

a pour mission de référencer les fournisseurs du réseau et négocier les conditions d’achat des produits dans le respect des normes de qualité et de sécurité exigées par C, pour le compte des franchisés situés dans l’Union européenne. Pour certains produits (particulièrement représentatifs de la marque), le choix des foumisseurs se. fait en concertation avec le franchiseur.

Sauf lorsqu’il conviendra d’identifier l’une d’elle, les défenderesses seront ci-après. dénommées « Subway »>.

Historique de l’instance

Dans le cadre d’une enquête nationale relative aux pratiques commerciales dans le secteur de la franchise restauration rapide et à thème, au nom de Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) a effectué une enquête portant sur les relations commerciales établies entre SUBWAY et ses franchisés dans le secteur de la restauration rapide et à thème, au regard des dispositions du titre IV du livre IV du code de commerce. La demande d’enquête avait notamment pour objet d’examiner les clauses contractuelles et pratiques commerciales entre les franchisés et leurs franchiseurs, au regard des pratiques. restrictives de concurrence, notamment au regard de l’article L. 442-6 du code de commerce. relatif au déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Le 17 avril 2015, des enquêteurs de la Concurrence, de la Consommation et de la

Répression des Fraudes, affectés à la Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi (DIRECCTE) d’lle-de-BG, sont intervenus auprés de D dans ses locaux situés à CACHAN, II a été demandé à

D d’expliquer le fonctionnement de la franchise et les conditions d’exécution du contrat de franchise liant les franchisés. L’enquête s’est poursuivie le 22 juillet 2015, à nouveau dans les locaux de D, et par

ثابت 19 S


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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020

PAGE 6 1 ERE CHAMBRE

ailleurs auprès de plusieurs franchisés.

Selon le Ministre, il ressort de l’étude des contrats de franchise liant SUBWAY à ses franchisés et des déclarations de D ainsi que de celles de deux franchisés, que plusieurs clauses sont susceptibles de constituer une tentative de soumission ou une soumission à un déséquilibre significatif au regard de l’article L 442-6 I 2° du code de commerce.

Les conclusions de l’enquête relative au contrat liant SUBWAY à ses franchisés ont conduit le Ministre à introduire la présente action, sur le fondement de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce.

Les 16 et 28 novembre 2016, le Ministre a assigné C et D, sur le fondement de

l’article L. 442-6 ! 2° ancien du code de commerce: « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : […] De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » ; Dans son assignation, le Ministre soutient que C et D ont soumis ou tenté de soumettre leurs franchisés à de nombreuses obligations non justifiées et constitutives d’un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Par courrier du 14 novembre 2017, la DIRECCTE ILE DE BG a informé les franchisés sous enseigne SUBWAY de l’action initiée par le Ministre à l’encontre de C et D. A compter du 7 décembre 2017, par conclusions d’interventions, plusieurs des franchisés, anciens franchisés ou de dirigeants de sociétés anciennement franchisés du réseau SUBWAY sont volontairement intervenus à la procédure introduite par le Ministre.

Un jugement avant dire droit a été rendu par le présent tribunal le 28 mai 2019, qui : s’est déclaré compétent pour statuer sur la recevabilité des interventions volontaires

-

à l’action principale dans la présente instance;

a dit recevables toutes les interventions volontaires dans la présente instance;-

Un jugement avant dire droit a été rendu par le présent tribunal le 8 octobre 2019, qui a fixé un calendrier, réservé la demande de communication de pièces formulée par les intervenants volontaires.

Un jugement avant dire droit a été rendu par le présent tribunal le 21 janvier 2020, qui : a dit irrecevable et au surplus non fondée l’exception d’incompétence soulevée par

-

SARL SUBWAY INTERNATIONAL B.V. et SARL SUBWAY REALTY OF BG à

l’encontre de Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances ;

s’est déclaré compétent pour statuer sur les demandes de Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances ;

a dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de disjonction d’instance à l’égard des intervenants volontaires présents à l’instance ; a dit n’y avoir lieu à statuer en l’état sur la demande de disjonction d’instance à l’égard de futurs intervenants volontaires ;

a rejeté la demande de mise hors de cause de SUBWAY REALTY OF BG

SARL et dit que celle-ci a qualité à défendre dans la présente instance; a sursis à statuer sur l’exception de compétence soulevée par SARL SUBWAY INTERNATIONAL B.V. et SARL SUBWAY REALTY OF BG à l’encontre des intervenants volontaires, dans l’attente de la décision au fond sur les demandes du

Ministre ;

d


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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 7 1 ERE CHAMBRE

a fixé un calendrier pour l’audience destinée à plaider au fond sur l’action du.

Ministre ;

Procédure "

Avec leur accord, les parties sont présumées avoir abandonné les prétentions et moyens non repris dans leurs dernières écritures, par application de l’article 446-2 du code de

procédure civile.

Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances, dans ses conclusions du 31 mars 2020 en « réponse aux conclusions récapitulatives », demande au tribunal de :

Vu l’article L. 442-6 du code de commerce, s Dire et juger que l’assignation et les demandes du Ministre qui visent la société.

SUBWAY REALTY OF BG EURL sont recevables ; Dire et juger que les clauses du contrat de franchise de l’enseigne SUBWAY créent: un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au profit des sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL et contreviennent, donc, aux dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce ;

En conséquence, en vertu de l’article L. 442-6 III du code de commerce:

Constater la nullité des clauses suivantes : ÿ

a. Clause relative au paiement du droit d’entrée et des redevances (articles 17

O

1er, 2, 5.1, 5.e, 11.f) b. Clause relative à la formation (article 5.a. (ii))

c. Clause relative à l’assurance (article 5.c) O

O d. Clause relative à la gestion du point de vente (articles 5.e, 5.f, 5.h)

e. Clause relative à la Responsabilité préambule (point I) et articles 5.1, 11.c et

20

f. Clause relative à la durée du contrat (article 7) O g. Clause relative à la résiliation et d’expiration du contrat (article 8) O

O h. Clause relative à l’absence de droit territorial et notre droit illimité de vous faire concurrence (article 11.). I. Clause relative à la langue (articles 9.a, 10.b, 12 et 15)

o j. Clause relative au droit applicable (articles 10, 11.m et 13) k. Clause relative aux horaires d’ouverture (chapitre 7 du manuel

d’exploitation) Enjoindre aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY

REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner les clauses susmentionnées dans leurs contrats; SEP

Condamner in solidum les sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et

SUBWAY REALTY OF BG EURL au paiement d’une amende civile de 2 000 000 IL: d’euros; Condamner in solidum les sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et

SUBWAY REALTY OF BG EURL à publier à leurs frais, sous huit jours à compter de la signification du jugement à intervenir, le dispositif dudit jugement dans LE MONDE, LE FIGARO, LES ECHOS et sur le site Internet www.subwayfrance.fr/ pour une durée d’un mois; s Condamner in solidum les sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et

SUBWAY REALTY OF BG EURL au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile; SEP7 11 5*

Condamner in solidum les sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et

SUBWAY REALTY OF BG EURL aux enliers dépens; s

Ordonner l’exécution provisoire du jugement.

A شار


33 N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 8 1 ERE CHAMBRE

Subway International B.V. (C) et Subway Realty of BG (D), défenderesses, dans leurs conclusions récapitulatives du 28 février 2020, demandent au tribunal de : Vu les articles 9 et 122 du Code de procédure civile, Vu les articles 1, 2 et 2224 du Code civil, Vu l’article L.442-6, I, 2° (ancien) du Code de commerce,

A titre liminaire, 1) Dire et juger que les contrats de franchise conclus par la société Subway

International B.V. avant le 1er janvier 2009 ne sont pas soumis à l’article L.442-6, I, 2 ° (ancien) du Code de commerce, ces dispositions n’étant entrées en vigueur qu’à cette date;(11

En conséquence, s Déclarer irrecevables les demandes formulées par le Ministre relatives aux contrats de franchise conclus par la société Subway International B.V. avant le 1er janvier

2009; F11 Dire et juger que l’action du Ministre est prescrite s’agissant des contrats de franchise conclus par la société Subway International B.V. avant le 16 novembre 2011;FLY

T:En conséquence, Déclarer irrecevables les demandes formulées par le Ministre relatives aux contrats de franchise conclus par la société Subway International B.V. avant le 16 novembre

2011.

A titre principal, 3) Dire et juger que la société Subway Realty of BG n’est pas « un partenaire IT commercial » des franchisés au sens de l’article 442-6, 1, 2° (ancien) du Code de

commerce;

En conséquence, *SEP Débouter Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances de l’ensemble de ses demandes; fins et prétentions à l’encontre de la société Subway Realty of BG.

4) Dire et juger que la société Subway International B.V. n’a pas soumis ni tenté de soumettre les franchisés à des obligations significativement déséquilibrées au sens de l’article L.442-6, I, 2° (ancien) du Code de commerce ; !?!

5) Dire et juger que les clauses du contrat de franchise incriminées par Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances ne sont pas significativement déséquilibrées au sens de l’article L. 442-6, I, 2° (ancien) du Code de commerce;

6) Dire et juger que les contrats de franchise sont en tout état de cause rééquilibrés par les obligations très substantielles de Subway International B.V. en faveur des franchisés et par les nombreux avantages que ceux-ci tirent de leur appartenance au réseau Subway; s

En conséquence, Débouter Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de la société Subway International B.V. et de la société Subway Realty of BG.

A titre subsidiaire, 7) Dire et juger que le prononcé d’une amende civile n’est pas justifié et en tout état de cause, que le montant sollicité par Monsieur le Ministre de l’Economie et des

Finances est disproportionné par rapport aux pratiques en cause et à la situation individuelle de la société Subway International B.V. sur le marché français; si

En conséquence, IP SEP

Débouter Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances de sa demande de condamnation à une amende civile ;' 8) Dire et juger que les demandes de publication du jugement ne sont pas justifiées et, en tout état de cause, qu’elles sont disproportionnées; En conséquence, Débouter Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances de sa demande de

B


34 N° RG:2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT OU MARDI 13/10/2020 PAGE 9 1 ERE CHAMBRE

publication du dispositif du jugement; 9) Dire et juger que la demande d’exécution provisoire est incompatible avec la nature de l’affaire, compte tenu des conséquences graves et irréversibles que pourrait avoir une telle mesure sur la société Subway International B.V. et son

réseau.

FUTEn conséquence SEP Dire et juger qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire. P

En toute hypothése, 10) Condamner Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances au paiement d’une indemnité de 25.000 euros à la société Subway International B.V. et de 25.000 euros à la société Subway Realty of BG sur le fondement de l’article 700 du Code

de procédure civile. 11) Condamner Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances aux entiers:

dépens.

A l’audience du 11 mai 2020, à laquelle cette affaire est appelée pour plaidoiries, le président présente un rapport dans les conditions de l’article 870 du code de procédure civile. Après avoir entendu les parties en leurs explications et observations, le tribunal clôt les débats, met

l’affaire en délibéré et dit que le jugement sera prononcé par sa mise à disposition au greffe: le 15 septembre 2020 reporté au 13 octobre 2020 dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Après avoir pris connaissance de tous les moyens et arguments développés par les parties, le tribunal les développera en même temps qu’ils seront discutés.

Sur ce

A titre préliminaire,

C et D; défenderesses, opposent au Ministre de l’Economie des fins de non-recevoir avant toute défense au fond. Le tribunal dira donc recevables les fins de non-recevoir

opposées par C et D.

1/ Sur la communication des pièces formulée par les intervenants volontaires

Le jugement du 21 janvier 2020 a renvoyé l’examen de la demande de communication des pièces formulée par les intervenants volontaires, à l’audience du 11 mai 2020.

Cette communication n’a de sens dans son principe et ne peut être définie dans son contenu qu’au regard de la décision qui sera prise par le tribunal sur l’action au fond du Ministre contre Subway. En conséquence, le tribunal surseoira à statuer sur cette demande.

2/ Sur la recevabilité de l’action du Ministre de l’Economie relative aux contrats de franchise conclus par la société S.I.B.V. avant le 1er janvier 2009.

C et D, défenderesses, soutiennent que : Par application de l’article 1 alinéa 1 du Code civil : « Les lois et, lorsqu’ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu’ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication (…) ». Aux termes de l'article 2 du Code civil : « La loi ne dispose que pour l’avenir; elle n’a point d’effet rétroactif. » ll. est de jurisprudence constante que les contrats en cours demeurent soumis à la loi en vigueur au jour de leur conclusion, sauf rétroactivité expressément décidée par le législateur,

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La loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie qui a introduit, dans le

Code de commerce, les dispositions de l’article L.442-6, I, 2° (ancien), ne contient pas de dispositions de droit transitoire de sorte que ces demières sont entrées en vigueur à la date fixée par l’article 21, IV de la loi, soit le 1er janvier 2009. En conséquence, les dispositions de l’article L.442-6, 1, 2° (ancien) du Code de commerce ne peuvent s’appliquer qu’aux contrats conclus postérieurement à son entrée en vigueur, soit après le 1er janvier 2009, comme l’a déjà jugé la Cour de cassation.

Le fait que la présente action ait été engagée par le Ministre ne rend pas davantage les dispositions de l’article L.442-6, I, 2° (ancien) du Code de commerce, rétroactives, au regard: du principe constitutionnel de la non-rétroactivité des dispositions répressives.

Le Ministre de l’Economie, demandeur, réplique que :

Aux termes de l’article 1 du code civil « les lois (…) entrent en vigueur (…) le lendemain de leur publication » de sorte que la LME, publiée au journal officiel le 5 août 2008, est entrée en vigueur le 6 août 2008 et non le 1er janvier 2009, comme le soutiennent les défenderesses. En effet, la LME n’a prévu de mesures transitoires expresses, notamment son application seulement à compter du 1er janvier 2009, que pour les dispositions relatives aux délais de paiement ainsi que pour l’application de l’article L. 442-61 7° du code de commerce portant sur la soumission à des conditions de règlement ne respectant pas le plafond des délais de paiement ou manifestement abusives. Ces dispositions transitoires ne concement donc pas la mise en œuvre de l’article L. 442-6 l 1° et 2° du code de commerce.

Les contrats visés dans la présente assignation et sur lesquels portent ses demandes ont tous été conclus entre les années 2014 et 2015, soit plusieurs années après l’entrée en vigueur de loi LME, comme l’attestent les contrats versés à l’assignation du Ministre.

Sur ce :

· Il ressort de l’audience du 11 mai 2020 que Subway ne conteste pas les affirmations du Ministre selon lesquelles, d’une part la LME, publiée au journal officiel le 5 août 2008, est entrée en vigueur le 6 août 2008, n’ayant pas prévu de mesures transitoires expresses pour la mise en œuvre de l’article L. 442-6 | 1° et 2° du code de commerce, d’autre part les contrats visés dans la présente assignation ont été conclus entre les années 2014 et 2015 soit plusieurs années après l’entrée en vigueur de toi LME. Le Ministre rappelle que son action vise, d’une part à l’annulation des clauses incriminées dans les contrats visés par son assignation, d’autre part à la cessation des pratiques consistant à mentionner lesdites clauses dans les contrats de franchise du réseau sous enseigne Subway.

Le tribunal dira recevable l’action du Ministre relative aux contrats de franchise conclus à compter du 6 août 2008.

3/ Sur la prescription des demandes du Ministre de l’Economle portant sur des contrats de franchise conclus avant le 16 novembre 2011

Subway prétend que :

Sur la prescription de l’action en nullité ;

L’assignation du Ministre, qui a interrompu la prescription, ayant été délivrée en novembre 2016, l’action en nullité est prescrite pour tous les contrats conclus ou renouvelés antérieurement au 16 novembre 2011:1

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En effet, les actions fondées sur l’article L.442-6, 1, 2° (ancien) du Code de commerce se prescrivent par cinq ans, conformément aux dispositions de droit commun. La prescription court à compter du jour où l’action naît, à savoir, le jour de la conclusion du contrat. En effet, les deux éléments constitutifs de la cause de la nullité ont bien été consommés au moment de la conclusion du contrat :

La soumission ou la tentative de soumission a précédé la conclusion du contrat mais

s’est manifestée par la conclusion de celui-ci ; La stipulation de clauses créant un déséquilibre significatif remonte également au jour de la conclusion de celui-ci.

S’il est incontestable que l’action du Ministre est autonome, il est nécessaire de distinguer: Les « demandes partagées » faites dans l’intérêt privé des victimes, qui peuvent être formées tant par la victime que par le Ministre et pour lesquelles ce dernier n’agit que comme un représentant de la victime, à savoir les demandes d’annulation, den restitution et d’indemnisation. En l’espèce, il s’agit des demandes d’annulation des clauses du contrat de franchise Subway formulées par le Ministre ;

Les « demandes réservées » que sont la cessation des pratiques (qui est une demande régulatrice) et le prononcé d’une amende (qui est une demande punitive) et qui sont formulées pour la seule protection de l’intérêt général. Ces demandes ne peuvent être formées que par le Ministre.

Le Ministre n’étant, pour ses demandes d’annulation de certaines clauses, qu’un représentant des victimes, il ne peut avoir plus de droits qu’elles. En effet; admettre que le Ministre puisse agir alors que l’action de la victime est prescrite reviendrait à augmenter les droits de celle-ci, ce qui n’a jamais été le dessein du législateur.

Sur la prescription des demandes de cessation des pratiques et de prononcé d’une amende :

Si l’on admet que les demandes réservées du Ministre devraient bénéficier d’un régime autonome, s’agissant des textes applicables, faute de textes spéciaux, il conviendrait là encore d’appliquer les règles de la prescription, notamment les articles L. 110-4 du Code de commerce et 2224 du Code civil. Le délai de cinq ans doit donc être retenu et, l’action du

Ministre étant née le même jour que celle de la victime, le délai de prescription doit commencer à courir le même jour. En droit pénal, l’action publique se prescrit à compter de la commission de l’infraction, quelle qu’elle soit, et non à compter du jour où les éléments de l’infraction étaient connus des titulaires de l’action. Comment concevoir que l’action du Ministre se prescrive à compter de sa connaissance effective desdites pratiques, et que l’on soit ainsi plus sévére en droit des pratiques abusives qu’en droit pénal ? En l’espèce, la pratique alléguée, la soumission ou la tentative de soumission à un déséquilibre significatif, est instantanée où, à tout le moins, si elle devait être considérée comme continue, a pris fin lors de la conclusion du contrat et de l’acceptation de la victime des clauses créant un déséquilibre significatif. En effet, ce ne sont pas les clauses qui sont: elles-mêmes sanctionnables, mais le fait de les avoir imposées à l’autre..

Ainsi, le point de départ de la prescription quinquennale pour les demandes réservées au Ministre court, en toute hypothése, à compter de la conclusion du contrat et l’action est prescrite pour tous les contrats conclus avant le 16 novembre 2011.

Monsieur le Ministre de l’Economie réplique que :

Son action ne saurait être enserrée dans les mêmes limites que celles de la victime des pratiques illicites, soit cinq ans à partir de la date de conclusion des contrats de franchise.

Premièrement, l’action du Ministre est une action autonome de l’action des parties et non pas une action en substitution ni en représentation, comme l’ont confirmé le Conseil constitutionnel et la Cour Européenne des droits de l’Homme :

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Le commentaire par le Conseil constitutionnel de sa décision QPC n° 2011-126 du 13 mai

2011 est explicite : « l’action prévue par les dispositions contestées n’est pas une action de substitution, c’est-à-dire une action en justice exercée par une autorité habilitée dans l’intérêt individuel d’autrui. […]. En outre, son action ne se substitue pas aux actions particulières susceptibles d’être exercées par les personnes qui s’estimeraient lésées par les pratiques abusives. Et si le ministère public et le ministre de l’économie peuvent demander, en lieu et place de la victime, la restitution des sommes indûment versées ainsi que la réparation de son préjudice, ces prérogatives visent principalement à renforcer l’effet dissuasif des sanctions des pratiques restrictives de concurrence. L’action de l’autorité publique est, ainsi que l’a jugé la Cour de cassation, « une action autonome de protection du fonctionnement du

marché et de la concurrence » ». Cela a également été confirmé par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (Décision 1

Galec / BG du 17 janvier 2012): « La Cour observe que, dans les circonstances visées par l’article L 442-6 du code de commerce, le ministre agit avant tout en défense de l’ordre public économique qui n’est pas limité aux intérêts immédiats des foumisseurs. Le ministre, par son action, n’exclut pas les cocontractants lésés par la relation commerciale puisque ces derniers restent en droit d’engager eux-mêmes une action en justice aux fins d’obtenir l’annulation des clauses ou des contrats illicités, la répétition de l’indu et le paiement.de dommages-intérêts, ou de se joindre à l’instance initiée par le ministre. […]. Il y a donc lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel le ministre aurait agi en substitution des foumisseurs, ceux-ci disposant d’un droit de recours autonome à celui du ministre et vice

versa. […] ».. L’action du Ministre répond donc bien à une finalité propre de défense de l’intérêt économique et de l’ordre public économique, et non à un objectif de défense des intérêts

privés. Deuxièmement, il ressort du caractère quasi délictuel de l’action du Ministre que la prescription applicable en matière contractuelle ne peut lui être opposée. L’article 2224 du code civil qui prévoit que: « Les actions personnelles ou mobiliéres se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ». La prescription applicable à l’action du Ministre court ainsi à partir des premiers actes d’enquête et non à partir de la date à laquelle: les contrats ont été conclus,. Troisièmement, les contrats visés dans la présente assignation initiée les 16 et 28 novembre 2016 et sur lesquels portent ses demandes ont tous été conclus entre les années 2014 et

2015. De sorte que même si le tribunal venait à considérer que la prescription en matière: contractuelle devrait s’appliquer à l’action du Ministre de l’économie, celle-ci ne serait pas prescrite car elle a manifestement. été engagée dans les cinq: années qui ont suivi la. signature des contrats visés par le Ministre chargé de l’économie.

Sur ce :

Subway distingue dans l’action du Ministre, qu’elle reconnaît comme étant incontestablement

autonome: Les « demandes partagées » faites dans l’intérêt privé des victimes, qui peuvent être formées tant par la victime que par le Ministre et pour lesquelles ce dernier n’agit que comme un représentant de la victime, à savoir en l’espèce les demandes

.

d’annulation des clauses du contrat de franchise Subway; Les « demandes réservées » au Ministre, que sont la cessation des pratiques, demande régulatrice, et le prononcé d’une amende, demande punitive, formulées pour la seule protection de l’intérêt général. Cette distinction opérée par Subway, quand bien même elle repose sur un élément de doctrine Intéressant, n’est pas compatible avec la jurisprudence bien établie, invoquée par le

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Ministre et ci-dessus rappelée, tant du Conseil constitutionnel que de la Cour Européenne des droits de l’Homme.

Ce moyen de Subway ne saurait prospérer.

Par ailleurs, la prescription applicable en matière contractuelle ne peut être opposée à l’action du Ministre dont le fondement est quasi délictuel. La prescription applicable est dès. lors celle de l’article 2224 du code civil qui prévoit que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ». La prescription applicable à l’action du Ministre court ainsi à partir des premiers actes d’enquête et non à compter de la date à laquelle les contrats ont été conclus.

Enfin, les contrats visés dans la présente instance initiée les 16 et 28 novembre 2016 et sur lesquels portent les demandes du Ministre ont tous été conclus entre les années 2014 et: 2015, de sorte que quelle que soit la date retenue à compter de laquelle court le délai de prescription, l’action du Ministre de l’économie ne saurait être prescrite. Le tribunal déboutera Subway de sa demande de voir juger prescrites les demandes du. Ministre de l’Economie portant sur des contrats de franchise conclus avant le 16 novembre 2011.

4/ Sur la qualité de partenaire commercial de D

Subway expose que :

D n’est pas un partenaire commercial des franchisés. La première condition fixée par l’article L.442-6, 1, 2° (ancien) du Code de commerce pour son applicabilité est l’existence d’une relation entre « partenaires commerciaux ». Un partenaire commercial au sens de l’article L.442-6, 1, 2° (ancien) du Code de commerce est entendu comme : « un 7

professionnel avec lequel une entreprise commerciale entretient des relations commerciales

[…]. » Par « relations commerciales » il faut entendre des « échanges commerciaux conclus directement entre les parties ». D ne peut pas être qualifiée de « partenaire commercial

-> des franchisés puisqu’elle n’est ni le rédacteur, ni le négociateur, ni même le signataire du contrat de franchise critiqué et D n’a pas et n’a jamais eu d’échanges commerciaux

[11 directs avec les franchisés. SEP

C’est C, titulaire d’une sous-licence concemant le système de franchise Subway, qui a pour responsabilité de développer la franchise Subway dans plusieurs pays, dont la BG. C’est elle, et non D, qui (i) recherche, via des agents de développement avec qui elle contracte, des franchisés en BG ; (ii) établit le contrat type de franchise et le document d’information précontractuel; (iii) est signataire des contrats de franchise par lesquels ellest fournit aux franchisés l’enseigne et la marque, le savoir-faire et l’assistance initiale et continue incluant entre autres la formation; (iv) a le pouvoir et la capacité de mettre en demeure le franchisé en cas de manquement substantiel aux stipulations contractuelles puis, : le cas échéant, de résilier les contrats lorsque le manquement a perduré. Eu égard à la nature internationale du réseau de franchise Subway, C a besoin du soutien opérationnel local d’autres entités du groupe, en l’occurrence D pour la BG. D, prestataire de C, n’est pas un partenaire commercial. des franchisés et ne fait qu’effectuer certaines prestations de service au bénéfice soit de C, soit de SFAFT qui la rémunèrent directement: Elle fournit à C un service général de gestion quotidienne et de coordination entre les agents de développement, les franchisés et C. En qualité, de prestataire de services de SFAFT, elle s’assure de la mise en oeuvre par les prestataires tiers et les franchisés des plans marketing élaborés par le groupe Subway.PLT Le Ministre ne démontre pas que sont exercées dans les faits les activités qu’il invoque pour prétendre que D « est blen impliquée juridiquement et économiquement dans les

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services de ventes de franchise ».

Le développement, l’animation du réseau Subway et le soutien opérationnel quotidien sont réalisés par les agents de développement indépendants, dont les contrats conclus avec: C stipulent qu’ils doivent développer et assurer l’ouverture des restaurants, faire de la publicité pour les franchisés, fournir une sélection d’emplacements, assister et conseiller les franchisés, mettre en œuvre et faire respecter les principes de la franchise Subway. D ne pourrait se voir enjoindre une quelconque cessation des pratiques consistant à mentionner des clauses prétendument déséquilibrées dès lors qu’elle n’a aucun rôle dans l’élaboration ou la rédaction du contrat de franchise.

Quant à la condamnation pécuniaire que sollicite le Ministre à travers le versement d’une amende civile de 2 millions d’euros, elle serait également en contradiction avec le principe de la personnalité des poursuites et des peines, énoncé à l’article 7 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme, qui fait obstacle à la condamnation d’une société à une sanction pécuniaire pour des faits concernant une autre société, même si elles font partie du même groupe.

Le Ministre réplique que:

SUBWAY reconnaît (Page 8 de ses conclusions) que « Eu égard à la dimension internationale du réseau de franchise, C […] a donc besoin de l’appui local d’autres entités du groupe Subway, en l’occurrence D pour la BG, afin de permettre aux franchisés de bénéficier d’un système adapté localement. »

Il ressort (i) des statuts de D, (ii) du contrat de service en date du 1er avril 2010 signé. entre C et D, (iii) du contrat de services passé entre D et Subway Franchisee Advertising Found Trust (SFAFT) que D est impliquée juridiquement et économiquement dans les services de « Ventes de franchise, Développement de magasin, Marketing, et Recherche et Développement ».TT:

Le DIP présente D comme un « bureau [qui] fournit une assistance sur les services de ventes de franchises, le marketing, la coordination et les démarches administratives, et assure des formations en français. ….. » ; « propose une assistance à la gestion des baux de franchise SUBWAY, la location de locaux et la vente de franchises, le développement.et le marketing. » et énumère la qualité suivante des personnes employées par D: « Directeur Développement Régional pour la BG ; Formatrice et Spécialiste d’exploitation, pour la BG; Responsable de la rentabilité et du marketing pour la BG. »> L’enquête réalisée par les enquêteurs de la DGCCRF, plus précisément dans les < procés- verbaux de déclaration et de prise de copie de documents » (pièces 31 et 36) démontre que:

D assure la gestion des franchises SUBWAY, la prise en location de locaux en vue de l’exploitation d’une franchise SUBWAY; elle s’assure des remontées hebdomadaires des CA des restaurants franchisés par le logiciel POS (Point of Sale), qui servent de base de calcul pour les prélèvements des royalties (8% du chiffre d’affaires HT), les calculs et les prélèvements étant effectués par C; elle négocie les baux immobiliers et conclut les contrats de location, de sous-location et la gestion et le renouvellement des contrats de bail des restaurants elle contrôle et organise les différents projets des Agents de Développement, auxquels elle fournit une assistance et un soutien continu; elle établit des listes de produits agréés, alle négocia les prix avec les fournisseurs agréés relle développe un barème de prix recommandé pour les menus elle évalue les systèmes de distribution; son rôle, en tant que tête de réseau, est d’animer et développer le réseau, à travers des ouvertures, mais aussi en développant les ventes et la rentabilité des restaurants franchisés, cette coordination est assurée à CACHAN où se situe également son centre de formation. D contribue ainsi au respect de l’exécution des contrats signés entre C et les franchisés,

Le comportement visé par l’article L. 442-6, 1, 2° du code commerce consistant à soumettre

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ou tenter de soumettre un partenaire peut revêtir d’autres formes que la signature d’un contrat dont certaines clauses seraient déséquilibrées, dès lors que ce comportement a concouru au dommage causé. La soumission ou la tentative de soumission ne trouve pas uniquement son origine à l’occasion de la négociation et de la conclusion d’un contrat mais également lors de son exécution. Le Ministre sollicite le rejet des demandes adverses tendant à la mise hors de cause de D, étant entendu que le tribunal de commerce de Paris, par jugement du 21 janvier 2020, a déjà reconnu la qualité de D pour défendre aux demandes du Ministre.

Sur ce :

Pour mémoire, dans son jugement du 21 janvier 2020, le présent tribunal a rejeté la demande de mise hors de cause de SUBWAY REALTY OF BG SARL qui se fondait sur ce que celle-ci n’aurait pas la qualité de partenaire commercial. :

Subway développe à l’audience collégiale du 11 mai 2020 les mêmes moyens de droit et de fait pour présenter au tribunat la même demande que celle sur laquelle il a déjà statué par le jugement susvisé dans les termes ci-après :

< Subway fait valoir que D n’est pas le franchiseur et qu’elle n’intervient à aucun moment dans l’établissement, la signature, l’exécution ou la résiliation du contrat de franchise ; qu’en conséquence elle ne saurait avoir été en situation de pouvoir. imposer ou tenter d’imposer aux franchisés des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au sens de l’article L.442-6 du

code de commerce. Mais le partenariat économique s’étend aux sociétés quí, sans qu’elles aient elles mêmes conclu ou participé à la conclusion du contrat avec le partenaire, ici le franchisé, ont pris personnellement part aux pratiques restrictives de concurrence, concouru aux dommages causés par leur partenaire en raison de ces pratiques en fournissant les moyens et assuré l’exécution du contrat comportant des clauses manifestement déséquilibrées. Le Ministre chargé de l’économie expose à cet égard que D doit être mise en cause dans la présente instance, comme jouant un rôle essentiel et déterminant dans le développement du réseau de franchise de l’enseigne en BG, ce qui ressort notamment des statuts de D et du contrat de service du 1er avril 2010 signé entre

C et D; qu’en effet le contrat de service du 1er avril 2010 signé entre C et

D prévoit expressément que : *C engage D par le présent contrat pour foumir une Franchise de services commerciaux principaux à C, qui conféreront un aventage à C. D prêtera son assistance pour l’exploitation et la gestion du Système de franchise en BG. Ces services apportent un avantage compétitif dans le secteur de la restauration rapide et contribuent au succès ou à l’échec des activités de C. Ces tâches sont nécessaires pour maintenir le Système de franchise et remplir les obligations de C à l’égard du Systéme de franchise et de ses franchisés. On peut citer comme exemples de ces services Ventes de franchise,

Développement de magasin, Marketing, et Recherche et Développement. " Selon ses statuts (article 2), D a pour objet : * – La gestion des franchises

SUBWAY, la prise en location de locaux en vue de l’exploitation d’une franchise

SUBWAY – Et plus générelement, toutes opérations, de quelque nature qu’elles soient, juridiques, économiques et financières, civiles et commerciales, se rattachant à l’objet sus-indiqué ou à tous autres objets similaires ou connexes, de nature à favoriser, directement ou indirectement, le but poursuivi par la société, son extension

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ou son développement, dont les opérations de prises de participation, de créations de filiales ou succursales tant en BG qu’à l’étranger. Il apparaît ainsi que D est impliquée juridiquement et économiquement dans les services de Ventes de franchise, Développement de magasin, Marketing, et Recherche et Développement , que son rôle est de faire respecter le contrat de franchise et le savoir-faire de l’enseigne, d’animer et de développer le réseau, à travers des ouvertures et le développement des ventes et de la rentabilité des unités.

L’enquête menée par la DGCCRF auprès de D a démontré la participation active de cette société à la mise en œuvre des pratiques commerciales dénoncées, en contribuant de façon déterminante au respect de l’exécution des contrats signés entre

C et les franchisés. Il résulte de ce qui précède que D est, au sens de l’article L.442-6 | 2° du code de commerce, un partenaire commercial de Subway avec qui elle est associée dans une action de développement du réseau de franchise, ce qui l’a conduite à des relations avec les franchisés, et qu’elle a ainsi participé aux pratiques dénoncées par

le Ministre. Dès lors que le Ministre démontrerait que D a personnellement pris part aux pratiques commerciales dénoncées, D est susceptible d’être condamnée au titre. de ces pratiques et par conséquent a qualité à défendre dans l’instance à l’initiative

du Ministre. Le tribunal dira que D a qualité à défendre dans la présente instance et déboutera Subway de sa demande de mise hors de cause de D: »

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Le tribunal dira que D a la qualité de partenaire commercial des franchisės, dira recevable l’action du Ministre et dira le moyen de Subway à ce titre inopérant.

5/ Sur la soumission ou tentative de soumission

Le Ministre de l’Economie expose que :

La notion de « soumission », prévue à l’article L. 442 6 1 2° du code de commerce consiste à faire peser ou tenter de faire peser sur un partenaire commercial des obligations injustifiées et non réciproques, du fait du déséquilibre du rapport de force existant entre les parties, lequel peut être établi par un faisceau d’indices. L’absence de négociations constitue un facteur déterminant pour établir l’existence d’une soumission à un déséquilibre significatif. A cet égard, l’uniformité et le systématisme des clauses qui s’appliquent indifféremment à l’ensemble des partenaires commerciaux d’une même entité sont des indices accréditant l’absence de négociation possible. L’article L. 442-6 I et II du code de commerce vise « fout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers », SI les situations de déséquilibre structurel sur certains marchés favorisent l’éclosion de ces abus, cet article a vocation à

s’appliquer à toute activité, jusqu’à celles qui sont le fait de personnes publiques ou ayant un caractère non lucratif, ainsi qu’à toute obligation contractuelle, dont ne sauraient donc être exclus a priorl les contrats de franchise. Au contraire, le franchisé se trouve tributaire pour son existence ou sa survie de la relation régulière, privilégiée ou exclusive, qu’il a établie avec son cocontractant partenaire privilégié, ce qui a pour effet de le placer dans sa dépendance économique et sous sa domination; l’asymétrie dans les rapports de force explique que les franchisés peuvent être amenés à signer des contrats dans lesquels figurent des conditions qui leur sont nettement défavorables. La notion de soumission ou de tenlative de soumission ne suppose pas l’exercice de pressions irrésistibles ou de coercition, mais l’existence d’un rapport de force économique déséquilibré entre les parties dont il se déduit la soumission du partenaire influencé par de

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simples suggestions, invitations fermes ou pressions. L’apparence de négociation et d’accord de volonté n’est pas un obstacle à l’application du. déséquilibre significatif, seules les concessions véritablement réciproques entre les parties devant être prises en considération. SEP1 1.

Le Ministre rejette l’argument de Subway selon lequel « C n’est eucunement et n’a jamais été en mesure de soumettre ou tenter de soumettre ses franchisés », dans la mesure où elle

a de nombreux concurrents dans le secteur de la restauration rapide et que, compte tenu de la forte fragmentation du marché, SUBWAY ne serait pas un opérateur incontournable en capacité de soumettre ses franchisés à un déséquilibre significatif ; qu’ainsi il serait « loisible au contractant de trouver des partenaires de substitution car le marché propose une altemative réelle et sérieuse ».. Le Ministre prétend en effet que, s’il existe parmi les têtes de réseau de nombreux opérateurs, les formules et concepts qu’ils proposent sont strictement classifiés selon des profils précis parmi lesquels les restaurations « à l’anglo-saxonne », « à la française », « à l’italienne », « à l’asiatique », ainsi que les autres concepts de restauration à thème, et qu’il n’est pas possible de fondre tous ces concepts en un marché unique indistinct pour estimer l’étendue de la concurrence. Au demeurant, dans le marché pris dans sa globalité, l’enseigne SUBWAY figure à la deuxième place derrière l’enseigne Mc Donald’s et à la première place dans le secteur des spécialités françaises, où elle est seule à bénéficier d’une couverture géographique mondiate qui lui confère auprès des candidats à la franchise une notoriété significative ainsi qu’un élément d’attraction fort, comme elle te revendique sur son site internet. Dans ce segment de la restauration rapide « à la française »>, elle est seule

à donner au consommateur la possibilité de choisir parmi plusieurs ingrédients ceux qui seront utilisés dans son sandwich ou sa salade. Le faible coût du droit d’entrée cumulé avec le caractère unique de la formule proposée fait de SUBWAY une enseigne incontoumable dans le modèle de restauration rapide « à la française »>. En pratique, SUBWAY use de son pouvoir pour imposer ses conditions contractuelles sans offrir de possibilité à ses partenaires commerciaux de négocier certaines obligations. Les nombreux franchisés interrogés par les enquêteurs de la DGCCRF affirment qu’il leur était impossible de négocier avec la tête de réseau la conclusion du contrat-type directement traduit de l’américain, non négociable ni amendable. Aucune possibilité ne leur est donnée d’obtenir des réponses à des questions majeures, comme celles relatives à l’emplacement: du point de vente, alors qu’en tant que commerçant indépendant, le franchisé assumera seu! les risques financiers et commerciaux liés à son investissement. Alors que les défenderesses soutiennent que les franchisés disposent d’une réelle marge de négociation de leur contrat, elles ne donnent pour autant aucun cas concret de négociation effective, hormis l’aménagement des horaires d’ouverture des points de vente. Les « agents de développement » sont eux-mêmes impuissants face à C, par exemple pour obtenir un échéancier du paiement des redevances versées à SUBWAY en cas de difficultés rencontrées par un franchisé. La seule obligation du franchiseur est la mise à disposition du franchisé de signes de ralliement de la clientèle. Pour le reste, le contrat ne contient que des obligations à la charge des franchisés. Plusieurs pratiques commerciales mises en oeuvre par SUBWAY dénotent une totale emprise de ce demier sur la politique commerciale des franchisés et sur leur liberté entrepreneuriale.

Subway réplique que

Si le principe de la présomption d’innocence, selon lequel le doute profite à l’accusé, s’applique à la pratique de déséquilibre significatif, celle-ci relevant de la matière pénale au sens de l’article 6 de la CEDH, il appartient au juge commercial de vérifier que le Ministre

سلام


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apporte la démonstration de la caractérisation de la pratique, par des éléments suffisamment probants. Or, C n’a ni soumis ni tenté des soumettre ses franchisés et n’a jamais été en mesure de le faire. L’absence de négociation des contrats d’une part, la puissance de C, rédactrice desdits contrats, d’autre part, ne suffisent pas à caractériser la soumission ou la tentative de soumission de ses partenaires franchisés. Pour que puisse exister une pratique de déséquilibre significatif, il faut que C ait à l’égard de ses partenaires franchisés un rôle incontournable, c’est-à-dire que ces demiers soient: dans l’impossibilité de trouver des solutions alternatives leur offrant les mêmes services et prestations que ceux offerts par C. En effet, si l’offre de produits ou de services n’est pas incontournable et s’il est loisible au contractant de trouver des partenaires de substitution, car le marché propose une alternative réelle et sérieuse, alors il ne peut y avoir soumission ou tentative de soumission au sens de l’article L.442-6, 1, 2° (ancien) du Code de commerce.

Il convient donc d’analyser in concreto le contexte du marché pour déterminer si C avait le pouvoir de soumettre ou. tenter de soumettre ses futurs franchisés à des obligations significativement déséquilibrées. C intervient sur le marché des franchises de restauration rapide, en permanente évolution et sur lequel la concurrence, exacerbée, propose des altematives très sérieuses aux candidats à la franchise souhaitant se lancer dans la restauration rapide. Avec 427 restaurants en BG en 2018, C ne représentait que 7,5 % du nombre total d’unités franchisées de la restauration rapide française ; un candidat à la franchise d’une enseigne de restauration telle que Subway dispose, si les clauses du contrat qui lui est proposé ne lui conviennent pas, de nombreuses et sérieuses alternatives de substitution. La simple tentative de soumission est donc impossible pour C. Il n’est par ailleurs pas démontré que C aurait refusé toute négociation. Si, du fait de l’indispensable homogénéité pour développer une identité commune du réseau de franchise, les contrats sont tous rédigés sur le même modèle, rien n’interdit toutefois aux candidats à la franchise de négocier, comme le prouve le fait que C invite les candidats franchisés dès la communication du document d’information précontractuelle à attentivement étudier le Document d’Information », à « consulter (…) un conseil » et «< poser

(…) toutes les questions pertinentes », ce qui démontre bien qu’elle n’est pas fermée à la discussion.

Il revient au Ministre de rapporter la preuve de l’absence de négociation effective, comme le rappelle la Cour d’appel de Paris : « L’élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l’absence de négociation effective, l’usage de menace ou de mesuras de rétorsion visant à forcer

l’acceptation impliquant cette absence de négociation effectiva. » Il est de jurisprudence constante que : « L’élément de soumission ou de tentative BI soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l’absence de négociation effectiva das clauses incriminées, qui peut résulter de la circonstance que la prétandua victime a tenté, vainement, d’obtenir la suppression ou la modification des clauses litigieuses dans le cadre de négociations où qu’aucuna suite n’a été donnée aux réserves ou avenants proposés par alle. Elle peut également résulter d’une obligation de contracter, ne laissant aucune alternative à la personne soumise. » 1 La conclusion, par les franchisés, du même contrat standard ne permet en aucun cas de conclure que C a soumis ou tenté de soumettre ses franchisés au sens de l’article L.442

6, 1, 2° (ancien) du Code de commerce.

Sur ce

En vertu de l’article L442-6, dans sa version en vigueur du 11 décembre 2016 au 26 avril

2019 applicable à la présente action du Ministre : « Engaga la responsabilité de son auteur,

L


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et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : […] De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».

a

L’action du Ministre vise la pratique restrictive de concurrence prévue par l’article L. 442-61 2° du Code de commerce, prétendument exercée par Subway pour avoir soumis ses d

franchisés à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Les deux éléments constitutifs de cette pratique restrictive de concurrence sont, en premier lieu, la soumission ou ta tentative de soumission et, en second lieu, l’existence d’obligations créant un déséquilibre significatif.

Subway expose que les auteurs du quasi-délit créé par l’article L442-6 2° encourent des amendes civiles pouvant aller jusqu’à plusieurs millions d’euros et que, du fait de son caractère par conséquent pénal, ledit article doit être d’interprétation stricte. En faveur de cette interprétation stricte, Subway (i) invoque la jurisprudence dont elle prétend qu’elle mettrait comme condition, pour caractériser le délit, que la partie au contrat ayant soumis ou tenté de soumettre son partenaire commercial bénéficierait d’une position concurrentielle « incontournable », ou au moins « majeure » ; (ii) expose que son franchisé ne saurait être victime d’une soumission ou d’une tentative de soumission lorsqu’il souscrit le contrat, puisqu’il dispose d’un large choix de franchiseurs dans le secteur de la restauration rapide ; qu’en raison de ce large choix, le franchisé n’est susceptible de subir aucune contrainte de la part de Subway.

Toutefois, il ne ressort pas des dispositions de l’article L442-6 2° qu’il conditionne son application à la position dominante du co-contractant incriminé. La jurisprudence, contrairement aux conclusions que Subway en tire, considère la position dominante, non pas comme une condition sine qua non, mais comme pouvant participer au faisceau d’indices permettant de caractériser la soumission, puisque la position dominante détenue sur un marché rend plus facile à l’acteur qui en bénéficie l’éventuel refus de sa part de négocier les contrats d’adhésion qu’il propose. Si Subway est bien fondée à revendiquer une interprétation stricte de l’article L442-6 2°, ce serait non pas interpréter strictement mais ajouter au texte que d’exiger pour retenir la soumission, que le co-contractant mis en cause soit dans une position dominante.

L’insertion dans une convention type ou un contrat d’adhésion de clauses qui ne peuvent faire l’objet d’aucune négociation effective constitue la soumission ou la tentative de

soumission. Dès lors qu’il résulte de ces clauses un déséquilibre significatif, la pratique restrictive de concurrence sera constituée comme résultant de la conjonction de la soumission et de ce

déséquilibre. La caractérisation de la soumission ou tentative de soumission, visée par le Ministre, implique essentiellement la démonstration de l’absence de négociation effective des clauses incriminées, sauf à ce que cette absence de négociation soit consubstantielle et par conséquent indispensable à l’économie du contrat, ou bien rééquilibrée par d’autres clauses ou par l’économie générale du contrat.

Il est constant que le contrat liant Subway à ses franchisés est un contrat d’adhésion, ce que Subway. confirme, dans ses conclusions, en revendiquant comme suit l’absence de négociation effective des clauses incriminées : « L’homogénéité est une donnée inhérente à


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tout réseau de franchise car elle permet de développer une identité commune. Du fait de cette indispensable homogénéité dans le réseau, il est donc logique que les contrats soient tous rédigés sur le même modėle. Il en va ainsi dans absolument tous les réseaux de

franchise. » Subway, qui reconnaît donc que « les contrats [sont] tous rédigés sur le même modèle », prétend que : « Toutefois, rien n’interdit aux candidats à la franchise de négocier. Le Tribunal pourra, à cet égard, constater que C invite les candidats franchisés dès la communication du document d’information précontractuelle à « attentivement étudier le Document

d’Information », à « consulter (…) un conseil » et « poser (…) toutes les questions pertinentes

», ce qui démontre bien qu’elle n’est pas fermée à la discussion. » (page 35 – les points de suspension sont ceux des conclusions -). Subway échoue, avec cette argumentation, à démontrer la possibilité pour les franchisés de négocier des clauses du contrat, alors que la négociation ne consiste pas à permettre seulement à son co-contractant d’étudier des documents, consulter un conseil et poser des questions pertinentes. Si la suggestion faite au franchisé d’effectuer de telles diligences est à mettre au crédit du franchiseur, elle ne l’exonére pas de laisser le franchisé en tirer les conséquences en lui permettant de négocier, ce qui suppose des concessions réciproques ; seules des concessions véritablement réciproques entre les parties doivent être prises en considération, et non la seule apparence de négociation et d’accord des volontés. SEP

Subway ne concède la négociation d’aucune clause à la signature du contrat, se prévalant au contraire de la nécessaire homogénéité du réseau. Ce faisant, Subway impose notamment à ses franchisés (i) un contrat en français et en anglais, dont seule la version anglaise fait foi, (ii) la loi néerlandaise pour régir la relation contractuelle, arguant de ce qu'

< il est naturel qu’elle choisisse sa propre loi. Tous les franchiseurs, lorsqu’ils se développent

à l’international (y compris les franchiseurs français), choisissent, par souci de cohérence et d’homogénéité au sein du réseau de franchise, une loi unique qui est généralement celle de leur pays d’origine », (iii) la clause compromissoire comme seule voie de recours à ses franchisés en cas de litige, obligeant ceux-ci à recourir à un arbitrage aux Etats-Unis. Ainsi, le franchisé Subway se trouve-t-il soumis à la fois à un contrat d’adhésion dont la version faisant foi n’est pas rédigé dans sa langue nationale, à un droit étranger et à un recours devant une instance également étrangère, sans pouvoir négocier aucune de ces données imposées. . Sí, à supposer que, comme le prétend Subway, C invite les candidats franchisés dès la communication du document d’information précontractuelle (DIP) à « attentivement étudier le Document d’Information à « consulter (…) un conseil » et « poser (…) toutes les questions pertinentes », il apparaît que les échanges pré-contractuels entre C et les franchisés sont inexistants, puisque des stipulations manifestement inapplicables restent sans correction dans le DIP. Ainsi, en page 3 du document d’information précontractuel remis au candidat franchisé plus de 20 jours avant la signature du contrat, il est indiqué au franchisé que : « le déroulement d’une procédure judiciaire ou d’arbitrage avec le Franchiseur dans l’état de New

York ou du Connecticut, Etats-Unis, au lieu de votre comté d’origine, peut avoir pour conséquence d’augmenter les coûts de résolution des litiges. » Il est difficile d’admettre qu’aucun franchisé, après avoir lu le DIP et en avoir discuté avec C selon les préconisations de celle-ci, n’ait jamais «posé une question pertinente » quant à la détermination contractuelle de son ressort judiciaire sur le critère de son « comté d’origine ». Plus caractéristique encore de la situation de soumission par Subway des franchisés est la demande que celle-ci leur fait de « s’assurer que le présent Contrat et tous les autres accords ayant un lien avec la présente franchise sont valides et exécutoires dans votre juridiction ». Si comme le suggére Subway « il est évident que cette clause n’exonére aucunement C d’une éventuelle contradiction du contrat avec le droit français. », c’est la

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لمها N° RG:2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

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clause en elle-même sur laquelle le tribunal est appelé à statuer et non sur l’application qu’en fait Subway in concreto.

Or, Subway ne saurait transférer au franchisé la responsabilité de s’assurer de la validité du contrat au regard du droit français. En effet, ce faisant, Subway ne remplit pas son devoir contractuel de délivrer au franchisé un concept opérationnel, en ce compris l’ensemble contractuel juridiquement validé. Se déliant ainsi unilatéralement de son obligation, Subway signifie au franchisé son rapport. de force. Le franchisé, dès lors qu’il accepte ce rapport de force, se trouve par symétrie dans une situation de soumission.

Peu importe que le franchisé ait la possibilité de refuser cette situation de soumission, dès lors que Subway aura tenté de le soumettre, ce que vise l’article L.442-6 du code de commerce.

Subway prétend qu’il ne peut y avoir de soumission du franchisé puisque celui-ci peut choisir de ne pas contracter; que « C n’est aucunement et n’a jamais été en mesure de soumettre ou tenter de soumettre ses franchisés », dans la mesure où elle a de nombreux concurrents dans le secteur de la restauration rapide et que, compte tenu de la forte fragmentation du marché, SUBWAY ne serait pas un opérateur incontournable en capacité de soumettre ses franchisés à un déséquilibre significatif; qu’ainsi il serait « loisible au contractant de trouver des partenaires de substitution car le marché propose une alternative réelle et sérieuse ».

Le tribunal ne suivra pas Subway dans son argumentation. En effet, autre que cette: interprétation excède la bonne foi qui doit présider aux négociations pré-contractuelles, l’article L442-6, dans sa version en vigueur du 11 décembre 2016 au 26 avril 2019 applicable, ne vise pas seulement la soumission mais également la tentative de soumission d’un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, d’où il résulte que, quand bien même des candidats franchisés auraient pu renoncer à traiter avec.Subway et choisir un autre franchiseur, Subway n’en aurait pas moins tenté de les soumettre.

En pratique, les franchisés interrogés par les enquêteurs de la DGCCRF affirment qu’il leur: est impossible de négocier avec la tête de réseau la conclusion du contrat-type directement traduit de l’américain, non négociable nl amendable. Aucune possibilité ne leur est donnée d’obtenir des réponses à des questions majeures, comme celles relatives à l’emplacement du point de vente, alors qu’en tant que commerçant Indépendant, le franchisé assumera seul les risques financiers et commerciaux liés à son investissement, dont il ne peut, au moins en vertu du contrat, se dégager pendant vingt ans.

Subway expose à juste titre qu'« il ne peut […] s’inférer du seul contenu des clauses, la caractérisation de la soumission ou tentative de soumission exigée par la législation. (Piéce n° 79 – CA Paris, 29 mars 2019, n° 16/25962) ». En l’espèce, sans qu’il soit nécessaire de se référer à l’ensemble des clauses ni au contenu précis de certaines d’entre elles, il résulte des seules circonstances qui ont été précédemment décrites l’impossibilité de négocier pour les franchisés, alors qu’ils se trouvent placés dans la dépendance économique et sous la domination du franchiseur Subway.

Le tribunal dira que se trouve caractérisée la soumission ou tentative de soumission, condition exigée pour son application par l’article 442-6 2° du code de commerce.

6/ Sur l’existence d’obligations créant un déséquilibre significatif

Le Ministre de l’Economie prétend que:

Certaines clauses du contrat mises en œuvre au bénéfice exclusif du franchiseur entravent

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le libre fonctionnement des points de vente, placent le franchisé dans une situation de fragilité juridique, économique et concurrentielle, au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger le savoir-faire concédé par le franchiseur. Le juge judiciaire peut sanctionner aussi bien des clauses abusives que des pratiques commerciales restrictives de concurrence. Dans la mesure où le texte réprime la tentative, il n’est pas nécessaire que la clause soit appliquée pour la sanctionner l’abus est établi sans qu’il soit nécessaire de justifier de ses effets.

:

Subway expose que :

Il revient au Ministre de rapporter la preuve de l’absence de négociation effective, comme le rappelle la Cour d’appel de Paris L’élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l’absence de négociation effective, l’usage de menace ou de mesures de rétorsion visant à forcer

l’acceptation impliquant cette absence de négociation effective. » Il est de jurisprudence. constante que : « L’élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l’absence de négociation effective des clauses incriminées, qui peut résulter de la circonstance que la prétendue victime a tenté, vainement, d’obtenir la suppression ou la modification des clauses litigieuses dans le cadre de négociations ou qu’aucune suite n’a été donnée aux réserves ou avenants proposés par elle. Elle peut également résulter d’une obligation de contracter, ne laissant aucune alternative à la personna soumise. »

Sur ce :

L’existence d’obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d’une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d’une disproportion importante entre les obligations respectives des parties. Les clauses sont appréciées dans leur contexte, au regard de l’économie du contrat et in concreto.

La preuve d’un rééquilibrage du contrat par une autre clause incombe à l’entreprise mise en cause, sans que l’on puisse considérer qu’il y a inversion de la charge de la preuve. Les effets des pratiques n’ont pas à être pris en compte ou recherchés et il importe peu que les obligations déséquilibrées aient été mises en œuvre ou utilisées dans un sens préjudiciable au cocontractant, puisque la loi vise seulement l’obtention ou la: tentative

d’obtention d’un avantage quelconque, d’où il résulte que peu importe, pour statuer sur la: demande du Ministre, que les effets concrets du déséquilibre soient démontrés, encore: moins mesurés. C’est à la recherche de la seule existence de clauses constitutives d’un déséquilibre que le tribunal est appelé à procéder.

La clause doit être jugée abusive en elle-même et non parce qu’elle permettrait l’abus. En effet, l’abus peut a priori s’appliquer à toute clause de tout contrat ; ce n’est pas la possibilité d’abuser d’une clause qui est susceptible de rendre celle-ci abusive, mais son contenu.en lui-même abusif.

Subway, loin de contredire le déséquilibre du contrat; le confirme en croyant pouvoir prémunir le secteur de la franchise dans son ensemble de toute conséquence de cet état de soumission. Elle explique en effet comme suit (conclusions page 90) qu’en tout état de cause l’article L. 442-6 | 2° du Code de commerce ne saurait s’appliquer à la franchise :

< Une analyse globale et in concreto des contrats de franchise aboutit ainsi toujours à exclure l’existence d’un déséquilibre significatif, compte tenu des avantages et contreparties dont les franchisés bénéficient et de la nécessité pour le franchiseur, inhérente à la franchise, de faire respecter son concept et d’assurer l’homogénéité de son réseau. » Alors que l’article L. 442-6 I et II du code de commerce vise « tout producteur, commerçant,

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industriel ou personne Immatriculée au répertoire des métiers » et qu’aucune loi spécifique à la franchise ne vient exclure son application à ce secteur économique, le tribunal relève surabondamment que le franchisé se trouve au contralre particulièrement tributaire pour son existence ou sa survie de la relation régulière, privilégiée ou exclusive, qu’il a établie avec son cocontractant partenaire privilégié, ce qui a pour effet de le placer dans sa dépendance économique et sous sa domination.

Le tribunal prendra en considération le but et la raison d’être de tout réseau de franchise, à

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savoir que chaque entité franchisée réitère le savoir-faire et respecte les normes nécessaires pour préserver l’identité du réseau. Le déséquilibre d’une clause ne saurait toutefois être anéanti par le seul principe de cohérence et d’homogénéité du réseau de franchise, puisque rien n’interdit au franchiseur de donner au franchisé une compensation pour rétablir

l’équilibre de la clause, ou à défaut de la rééquilibrer dans la globalité du contrat. Le rééquilibrage pourra néanmoins, le cas échéant, résulter partiellement ou en totalité du seul avantage que le franchisé trouvera. lui-même dans la cohérence de la stratégie et l’homogénéité du réseau, gage du succès de son propre investissement financier et humain

dans ce dernier.

Le déséquilibre d’une clause sera en revanche en tout état de cause caractérisé dès lors que la clause, à la fois (i) est en faveur du franchiseur, (ii) n’apporte au franchisé aucune contrepartie, ni découlant d’une autre clause, ni induite de son caractère nécessaire à la cohérence et à l’homogénéité du réseau, gage du succès de son propre investissement, (iii)

n’est pas compensée dans un rééquilibrage global du contrat.

6-1/ Clauses relatives au paiement du droit d’entrée et à la formation articles 1 et 5.a. (ii)

Le Ministre de l’Economie prétend que:

L’article 1er du contrat prévoit le versement d’un droit d’entrée de 10 000 € à la signature du. contrat, avant l’ouverture du point de vente. Le franchisé a un délai de deux ans à compter de la signature du contrat de franchise pour signer un bail, dont la signature est soumise à l’approbation du franchiseur. En cas d’échec au pré-requis à la formation puis à l’examen de fin de stage de formation, ou bien si le restaurant n’est pas ouvert dans les deux ans qui suivent la signature du contrat de franchise, la somme de 10.000 € n’est pas restituée. La lecture combinée des clauses relatives au droit d’entrée et à la formation fait apparaître un risque assumé par le franchisé manifestement disproportionné dans la mesure où il paie: un droit d’entrée non remboursable, qui ne lui donne droit de manière certaine qu’à bénéficier de la formation, l’ouverture effective du restaurant étant soumise aux conditions de: réussite de la formation et d’agrément du local par le franchiseur.

Subway réplique que :

Le droit d’entrée très modéré demandé par C, en comparaison des droits demandés par les principaux concurrents, est justifié, d’une part par la transmisslon, dès la signature du contrat de franchise, des documents confidentiels matérialisant le savoir-faire, d’autre part par la formation à ce savoir-faire et l’assistance fournie avant l’ouverture du restaurant pour la recherche de locaux, la négociation du bail, l’aménagement intérieur ou la sélection des 1 équipements. Le risque que le restaurant n’ouvre pas n’est pas « manifestement disproportionné » puisque l’ouverture est quasiment assurée à ceux qui suivent la formation indispensable pour acquérir et reproduire le savoir-faire." – Le droit d’entrée ne constitue pas pour C une source de profit mais sert à couvrir une partie des coûts liés aux services foumis aux franchisés avant l’ouverture de leurs

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وہا N° RG:2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

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restaurants, pratique quasi systématique dans les réseaux de franchise. L’ouverture du restaurant est quasiment assurée, car tout est fait pour que le nouveau franchisé valide sa formation: S’il n’a pas un score satisfaisant à la formation théorique, il a droit à une session de rattrapage, deux si nécessaire; s’il échoue à la formation pratique,

l’agent de développement peut également lui permettre de suivre une nouvelle formation. Les cas dans lesquels C peut renvoyer un franchisé du stage de formation sont ainsi limités aux cas où le franchisé fait défaut et ne vient pas ou cesse de venir aux formations malgré des relances se montre incapable d’assimiler les notions de base nécessaires à

l’exploitation d’un restaurant Subway, ousine respecte pas le code de conduite Subway qui prohibe le harcèlement sexuel, les agressions, le vandalisme, les vols et l’abus d’alcool. l est légitime pour C, dans ces trois cas, de garder l’option de résiliation du contrat et de couvrir ses frais en conservant une partie du droit d’entrée.

Sur ce :

L’article 1 du contrat de franchise stipule que :« REDEVANCES DE FRANCHISE: A la signature du présent Contrat, vous devrez nous verser le dépôt (le « Droit d’entrée ») que vous aurez indiqué ci-dessous et qui sera non remboursable, sauf stipulation spécifique

exposée ci-aprés et à l’article 5.a. […].81": 1

a. Droit d’Entrée Standard. 10 000 €. Pour toutes les premières franchises ou toutes les franchises supplémentaires.

b. […]» La clause du contrat relative à la formation (article 5.a. (ii)) prévoit quant à elle :

< Avant f’ouverture, vous devrez participer et terminer le stage de formation. Vous pouvez être renvoyé du stage de formation et ce Contrat pourra prendre fin sans remboursement de votre Droit d’entrée, si vous ne respectez pas le Code de conduite des affaires applicable au stage de formation durant celui-ci. Vous pouvez être dans l’obligation de passer et de réussir un examen standard donné pandant le stage de formation, avec une possibilité de : rattrapage. Si vous échouez à l’examen standard, nous nous réservons le droit de vous renvoyer du stage de formation, de résilier le présent Contrat et de rembourser la moitié de votre Droit d’entrée. Dans le cas où plusieurs personnes signent le présent Contrat, toute personne échouant à l’examen standard pourra être renvoyée du stage de formation, contrainte de se retirer du présent Contrat, et n’obtiendra aucun remboursement de son Droit

d’entrée. »>

Subway fait valoir que dans la pratique, C ne renvoie un franchisé du stage de formation. que si celui-ci fait défaut ou cesse de venir aux formations malgré des relances, se montre incapable d’assimiler les notions de base nécessaires à l’exploitation d’un restaurant

Subway, ousine respecte pas le code de conduite Subway qui prohibe le harcèlement 1

sexuel, les agressions, le vandalisme, les vols et l’abus d’alcool.

#

La légitimité des motifs de renvoi énumérés au contrat suffit à démontrer l’absence de déséquilibre des clauses relatives au paiement du droit d’entrée et à la formation.

Le Ministre sera débouté de ses demandes au titre des clauses relatives au paiement du droit d’entrée et à la formation articles 1 et 5.a. (ii)

6-2/ Clauses relatives au paiement des redevances, à la gestion du point de vente et aux pénalités et intérêts de retard (articles 2, 5 et 11)

Le Ministre de l’Economie prétend que :

Le contrat prévoit deux redevances, l’une de 8% dite de royalties et l’autre de 4,5% dite de



So. N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

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publicité, assises sur le chiffre d’affaires brut, qui font l’objet d’un prélèvement hebdomadaire sur les comptes bancaires des franchisés sans possibilité d’aménagement, avec des: pénalités appliquées dès le premier jour de retard. Ces pénalités sont appliquées également pour le paiement des redevances, frais publicitaires, factures diverses, de location d’équipement ou du programme de prêt, y compris dans certaines circonstances, des sommes au titre de frais ou de versements effectués à des tiers. M. A, franchisé, affirme aux enquêteurs que : « […] Si les recettes d’exploitation ne permettent pas de verser les royalties, le franchisé doit les régler à titre personnel […] ». Ce délai trés contraint ne s’accompagnant pas d’un escompte pour paiement rapide, il en résulte une absence de réciprocité: manifeste entre les obligations des franchisés et celles du franchiseur et la création d’un lien de subordination contraire à la reconnaissance des franchisés en tant

qu’entrepreneurs indépendants. Par ailleurs, les franchisés estiment que les 4,5 % prélevés au titre de la redevance publicitaire sont en grande partie dépourvus de contrepartie. Il résulte des articles 5f et 5.h du contrat que le franchiseur peut consulter tous les documents comptables des franchisés « à tout moment », « sans préavis », et consulter leurs fournisseurs sur leurs achats, en élargissant cette faculté aux « agents de développement ». Les franchisés n’ont pas la possibilité de faire intervenir leur propre prestataire pour la réalisation des contrôles effectués sur la base des informations

recueillies. Ainsi, le franchiseur se substitue-t-il au franchisé, qui est un commerçant indépendant dans. la gestion de ses affaires. La lecture combinée des clauses relatives à l’intrusion du franchiseur dans la comptabilité du franchisé, aux délais de paiement qui lui sont Imposés et aux pénalités en cas de retard de paiement, attestent que le risque assumé par le franchisé est manifestement en sa défaveur, mettant à sa charge des obligations asymétriques, sans justification véritable.

Subway réplique que :

Les clients des restaurants paient immédiatement leurs consommations, alors que les franchisės paient leurs foumisseurs à 20 jours d’échéance, ce qui procure aux franchisés la trésorerie nécessaire au règlement hebdomadaire des redevances de C. Le but pour C n’est pas de se constituer un fonds de trésorerie mais d’éviter aux franchisés des prélèvements plus espacés donc plus lourds qui pourraient engendrer des difficultés

financières. C n’exclut pas la possibilité de négociation de la dette des franchisés, comme le montrent les exemples versés aux débats de plans de paiement convenus entre C et. des:

franchisés. L’imposition de pénalités pour retard de paiement constitue une obligation légale d’ordre public par application de l’article L.441-10 du Code de commerce. Ce texte prévoit un taux minimal de pénalités et intérêts de retard mais n’interdit pas aux parties de convenir du taux applicable. La clause de pénalités de retard figurant dans le contrat de franchise C est: donc conforme aux dispositions légales françaises. L’interrogation à distance de la comptabilité du franchisé via le « Système de point de vente » pour obtenir des informations à tout moment est un outil essentiel pour la gestion quotidienne de l’activité du franchisé. Loin d’être un outil coercitif, il permet à C de superviser l’activité des franchisés et ainsi de mieux remplir son devoir d’assistance. Ce contrôle constitue pour le franchiseur une obligation car, du fait de la synergie créée par le réseau, la défaillance du franchisé affecterait non seulement la relation en cause mais aussi

l’activité de tous les autres membres du réseau dès lors que l’échec d’un franchisé nuit à

l’image du Réseau. Ceci justifie, voire impose, l’obtention de certaines informalions. Le Code de déontologie européen de la franchise dispose, en son article 2.3 e) que le franchisé doit

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fournir au franchiseur les données opérationnelles vérifiables afin de faciliter la détermination des performances et les états financiers requis pour la direction d’une gestion efficace. » Ces outils sont utilisés par tous les réseaux. Un réseau comme celul de Subway qui compte plus de 40.000 restaurants à travers le monde doit disposer d’un système de gestion informatisé homogène. Si chaque franchisé utilisait un outil (logiciel et/ou matériel) de son choix, il en résulterait une désorganisation totale en raison des incompatibilités entre l’outil du. franchiseur et ceux des franchisés. S’agissant de la possibilité de consulter les fournisseurs des franchisés sur leurs achats, personne n’ignore que dans la restauration où de nombreuses transactions se font en espèces, il n’est pas difficile d’occulter une partie des ventes… Le contrôle auprès des fournisseurs est le seul moyen pour C de s’assurer que les franchisés déclarent bien la totalité de leur chiffre d’affaires, dont les revenus de C dépendent directement.

Sur ce :

Sur l’absence d’escompte de règlement et les pénalités de retard : L’activité de restauration rapide est génératrice d’un besoin en fonds de roulement négatif, 4 autrement dit d’une trésorerie structurellement positive. Il est par ailleurs constant que l’un des obstacles à la survie des petites entreprises nouvellement, créées est la confusion qu’opèrent spontanément trop de nouveaux entrepreneurs entre la trésorerie et le bénéfice.

Les franchisés Subway étant pour la plupart de nouveaux entrepreneurs, la pratique de Subway d’opérer un prélèvement hebdomadaire des redevances contractuelles apparaît: davantage comme une aide à la gestion que comme une contrainte, évitant aux franchisés de « boire le fonds de commerce » selon le dicton. Il ne résulte donc pas de déséquilibre du fait que ce délai ne donne lieu à aucune compensation, et notamment pas à un escompte de règlement. Les pénalités de retard sont par ailleurs légalement prévues.

Dans le cas de la franchise de restauration rapide, les contraintes de délais de paiement imposées par Subway peuvent constituer une opportune alerte d’une absence de trésorerie ésultant d’une rentabilité négative de l’exploitation, ce qui là encore constitue une aide, certes inconfortable mais utile, à la gestion du franchisé.

Sur l’absence de contrepartie de la redevance de publicité : Le Subway Franchisee Advertising Fund Trust (dénommé « SFAFT Foundation »), fondation de droit néerlandais dont les membres sont exclusivement des franchisés agissant en principe et sauf preuve du contraire dans le seul intérêt de ses membres, gère et administre le fonds commun consacré à la publicité pour l’ensemble du réseau. Cette fondation a conclu un contrat avec D, qui est chargée de gérer et administrer le fonds de publicité en

BG.

Le Ministre n’a pu, notamment au cours des débats, rapporter la preuve qui lui incombe que la redevance de publicité n’aurait pas de contrepartie ou que celle-ci serait déséquilibrée.

Sur la consultation des documents comptables des franchisés : Le Ministre prétend que subway. se substitue au franchisé, commerçant indépendant, en ayant accès permanent et illimité à tous ses documents comptables. Subway rétorque que (i) l’interrogation à distance de la comptabilité du franchisé permet de superviser l’activité et la gestion quotidienne des franchisés et ainsi de mieux remplir son devoir d’assistance; (ii) ce contrôle est nécessaire car la défaillance du franchisé affecterait, au-delà de la relation en cause, le réseau dans son entier dès lors que l’échec d’un franchisé nuit à son Image; (iii) le Code de déontologie européen de la franchise dispose, en son article 2.3 e) que le franchisé doit « fournir au franchiseur les données opérationnelles vérifiables afin de faciliter la détermination des performances et les états financiers requis pour la direction d’une gestion efficace. » ; (iv) la possibilité de consulter les fournisseurs des

سل


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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 ; PAGE 27. 1 ERE CHAMBRE

franchisés sur leurs achats est le seul moyen, dans une activité où une part importante des règlements des clients se fait en espèces, de s’assurer que les franchisés déclarent la totalité de leur chiffre d’affaires, dont les revenus de Subway dépendent directement. Les explications fournies par Subway entrent dans la logique de la franchise et confèrent aux clauses susvisées, mises en cause par le Ministre, le critère d’absence de leur négoclation mais aussl celui de leur nécessité pour la cohérence et la survie du réseau. Ainsi, leur déséquilibre apparent est consubstantiel à la franchise, les clauses trouvant dans l’essence: même de la franchise leur contrepartie. D’où il résuite que ces clauses ne répondent pas à la double condition de soumission et de déséquilibre permettant d’appliquer les dispositions de

l’article L442-6 2° du code de commerce.

Le Ministre sera débouté de ses demandes au titre des clauses relatives au paiement des redevances, à la gestion du point de vente et aux pénalités et intérêts de retard (articles 2, 5 et 11)

6-3/ Clause relative aux horaires d’ouverture des points de vente (chapitre 7 du manuel

d’exploitation)

Le Ministre de l’Economie prétend que :

Le Manuel d’exploitation (Préparation à l’ouverture 7. Rubrique « Jours: et: heures d’exploitation '>) pose l’obligation : « Tous les restaurants doivent être ouverts 7 jours par semaine, pour un minimum de 98 heures par semaine. ». Le Ministre ne conteste pas le fait que le franchisé ait des obligations à respecter en matière d’horaires d’ouverture pour tenir compte des habitudes des consommateurs en BG. Mais lui imposer des contraintes d’ouverture inhérentes au fonctionnement d’un réseau mondial fragilise le franchisé, entraînant des coûts salariaux élevés alors que pendant certaines plages horaires, il n’y a pas de consommateurs. Cette obligation constitue une immixtion excessive du franchiseur, qui ne permet pas au franchisé d’évaluer les horaires qu’il doit effectuer pour rencontrer le succès commercial escompté. En augmentant les jours et les heures d’ouverture dans son seul Intérêt, dans la mesure où le volume de vente est la base du calcul des redevances, le franchiseur ne respecte pas la relation contractuelle conclue avec une entreprise.

indépendante. Les franchisés sont tenus d’obtenir l’aval du franchiseur par le biais des agents de développement pour déroger aux horaires d’ouverture, ce qui est constitutif d’un lien de

subordination.

Subway réplique que :

L’importante amplitude horaire, justifiée par la nécessaire homogénéité du réseau, y compris au niveau mondial, caractérise le fonctionnement de tout le secteur de la restauration rapide, dont les enseignes ouvrent tôt le matin (lorsqu’il y a une offre de petit-déjeuner) et jusque très tard dans la nuit pour répondre aux attentes de leur clientèle… L’amplitude horaire, n’est qu’une préconisation de C pour maximiser le chiffre d’affaires en répondant aux attentes de la clientèle et la possibilité de dérogation est expressément prévue par le Manuel d’exploitation : « Le restaurant est ouvert 98 heures par semaine ou un nombre d’heures approuvé par l’AD ».

Sur ce :

Si les horaires sont contractuellement imposés dans le « Manuel d’exploitation », document contractuel, celui-ci prév expressément la possibilité de dérogation. (« ou un nombre

شادی


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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 28 1 ERE CHAMBRE

d’heures approuvé par l’AD »). Par note en délibéré sollicitée relative aux dérogations horaires accordées, le conseil de Subway fait valoir que: « C nous a informés qu’elle ne conservait malheureusement pas ce type de données d’une année sur l’autre. Toutefois, nous avons déjà versé aux débats deux décisions, l’une de la Cour d’appel de Pau du 26 novembre 2015, l’autre de la Cour d’appel de Metz du 5 juin 2019 qui portent sur des faits antérieurs à 2015 et dans le cadre desquelles C avait produit un tableau faisant apparaître l’amplitude des horaires

d’ouverture des restaurants Subway français en 2013. […] Comme vous pourrez le constater, près de 60% des restaurants ouvraient déjà, à cette période antérieure à l’enquête des services de Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances, moins de 98 heures par semaine,»>

L’étude des documents susvisés reçus de Subway par note en délibéré apporte la preuve que des dérogations étaient souvent négociées et accordées dans la période antérieure à

l’enquête des services du Ministre de l’Economia.

La preuve n’est pas rapportée que cette pratique courante de dérogations n’a pas perduré. Ainsi, dans son arrêt du 5 juin 2019, la cour d’appel de Pau a retenu que le franchisé Subway < fixait ses horaires d’ouverture et de fermeture du restaurant ainsi que les jours d’ouverture » P

Il convient de rappeler que la loi vise seulement l’obtention ou la tentative d’obtention d’un avantage quelconque, d’où il résulte que les effets des pratiques n’ont pas à être pris en compte ou recherchés et il importe peu que les obligations déséquilibrées aient été mises en œuvre ou utilisées dans un sens préjudiciable au cocontractant. C’est à la recherche de la seule existence de clauses constitutives d’un déséquilibre que le tribunal est appelé à procéder.

Il résulte des nombreuses dérogations à la clause relative aux horaires d’ouverture des points de vente, dont Subway apporte elle-même la preuve comme il vient d’êlre dit, que la fixation du nombre d’heures d’ouverture n’est pas indispensable à la nérence et l’homogénéité du réseau de franchise.

Or, cette obligation, non négociable à la signature du contrat, qui ne prend pas en compte les spécificités de la localisation du point de vente, constitue pour le franchisé l’une des clauses les plus contraignantes du contrat, comme le démontre aussi le niveau élevé des dérogations accordées ; elle est en faveur du franchiseur et son application est laissée à la discrétion de Subway.

Aucune contrepartie n’est apportée au franchisé, ni au sein de la clause elle-même, ni provenant d’une autre clause, ni induite d’un caractère nécessaire à la cohérence et à

l’homogénéité du réseau qui serait le gage du succès du propre investissement du franchisé. Elle constitue donc un déséquilibre significatif en défaveur du franchisé, sous réserve de l’éventuel rééquilibrage du contrat dans sa globalité, ce sur quoi il sera statué plus avant.

Le tribunal prononcera, au regard de l’article L.442-6 12° du code de commerce, la nullité de la clause relative aux horaires d’ouverture des points de vente (chapitre 7 du manuel d’exploitation) et enjoindra aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY

REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats, sous réserve de l’éventuel rééquilibrage du contrat par une autre clause, ce sur quoi il sera statué plus avant.

6-4/ Clause relative à l’assurance (article 5.c)

Le Ministre de l’Economie prétend que :



Su N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 29 1 ERE CHAMBRE

Le franchisé se voit contraint de souscrire une assurance responsabilité civile comportant un montant minimum de garantie d’environ 1.700.000 € et une couverture pour les véhicules de fonction avec une garantie minimale d’environ 850.000 € en indiquant comme assurés complémentaires le franchiseur et l’ensemble de ses représentants (sauf pour les véhicules de fonction). Les termes « Vous devez » sont sans équivoque et des sanctions financières matière sont stipulées ainsi dans l’article 5 (c): « Si vous ne satisfaites pas nos exigences d’assurance, et ne respectez donc pas le présent Contrat, vous devrez nous rembourser les frais raisonnables que nous aurons encourus pour faire appliquer cette obligation, […]. Ces frais incluent, sans que cette liste soit limitative, les frais d’arbitrage, les frais d’avocat, le temps de préparation, les frais de témoignage et de voyage engagés par nous-mêmes, nos

mandataires ou représentants. » Ainsi, la souscription des assurances n’est pas réalisée sur mesure en fonction des spécificités liées à l’activité du franchisé, mais oblige celui-ci à souscrire et des garanties (exprimées en dollars) surévaluées par une extension de l’assurance qui peut conduire à faire peser sur le franchisé la charge de l’assurance du franchiseur.

Subway réplique que :

La cotisation d’assurance annuelle moyenne du franchisé Subway est comprise entre 1.000 et 2.000 € et le montant minimum de garantie est exprimé en dollars parce qu’il est le même partout. Quant à la clause d’assuré additionnel, elle a uniquement pour objet de désigner comme bénéficiaires les créanciers de l’assuré, permettant d’opérer une subrogation dans l’hypothèse où le franchisé serait, au moment de la survenance d’un sinistre, redevable de sommes à l’égard de ses créanciers. Ainsi, à titre d’exemple, en cas de sinistre affectant le point de vente, le franchisé sera compensé de sa perte de chiffre d’affaires et C de sa perte de redevances. Une telle clause est légitime et d’ailleurs très couramment utilisée

dans les réseaux de franchise. L’article 5.c. ne stipule pas des « sanctions financières » applicables en cas de non-respect, par les franchisés, de leurs obligations d’assurance, mais uniquement le remboursement des frais engagés par C si celle-ci doit se substituer au franchisé défaillant et souscrire

l’assurance en ses lieu et place. Su

Sur ce :

Il ressort des pièces et des débats que les conditions d’assurance proposées sont, prises dans leur globalité, économiquement saines, voire favorables au franchisé, à la réserve toutefois de cette stipulation contenue dans l’article 5.c du contrat: « Si vous ne satisfaites pas nos exigences en matière d’assurance, et ne respectez donc pas le présent Contrat, vous devrez nous rembourser les frais raisonnables que nous aurons encourus pour faire appliquer cette obligation, sous réserve des dispositions de l’article 10.a. Ces frais incluent, le tem de sans que cette liste soit limitative, les frais d’arbitrage, les frais d’avoca préparation, les frais de témoignage et de voyage engagés par nous-mêmes, nos mandataires ou représentants. » Cette stipulation permet au franchiseur, notamment concernant « le temps de préparation '> ou les frais de voyage de « ses mandataires ou représentants », de prétendre à des dépenses sans limite, ce à quoi Subway objecte dans les débats que, dans la pratique, les frais de voyage sont quasiment toujours inexistants, l’arbitrage, dont il sera question plus loin, n’en nécessitant pas. Toutefois, il convient de rappeler ici qu’il n’y a pas lieu pour le tribunal de statuer sur les abus ou le risque d’abus d’une clause, mais sur le contenu lui-même en ce qu’il pourrait être

abusif.

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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 30 1 ERE CHAMBRE

En l’espèce, l’absence de plafond des dépenses engagées confère à cette clause un :

caractère potestatif. Le tribunal prononcera la nullité de l’article 5.c du contrat en ce qu’il ne stipule pas de montant maximum aux dépenses énoncées, et enjoindra aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques

.

consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats. Il déboutera le. Ministre de ses autres demandes relatives aux assurances devant être

souscrites par les franchisés.

6-5/ Clause relative à la Responsabilité – Préambule (point I) et articles 5.1, 11.c et 20

Le Ministre de l’Economie prétend que :

Le franchiseur fait supporter tous les risques contractuels aux franchisés, en stipulant: Point H du préambule : « Vous déclarez qu’aucun employé, mandataire ou représentant de notre société ou du Donneur de Licence, de DAI, de nos autres

Affiliés ou de nos AD ne vous a fait de déclaration orale ou écrite, de représentation visuelle ou de prévision concernant le chiffre d’affaires, les résultats, le bénéfice net ou brut, réel ou potentiel du Restaurant: » Point I du préambule: « Vous déclarez être averti des risques liés à l’exploitation d’un restaurant SUBWAY®, et être en mesure d’accepter ces risques. Vous comprenez que le succès du restaurant dépendra principalement de l’emplacement que vous aurez choisi, de vos efforts et de vos capacités, ainsi que de ceux de vos employés.

Le fait pour nous d’approuver l’emplacement du Restaurant ne garantit pas le succès du Restaurant à cet emplacement et le Restaurant est susceptible de perdre de l’argent ou de faire faillite. […] Vous reconnaissez que certains restaurants SUBWAY

® ont échoué et que d’autres échoueront à l’avenir. » Point M du préambule «VOUS COMPRENEZ QUE NOUS NOUS BASONS SUR

VOS DECLARATIONS FAITES DANS CE PREAMBULE » Article 16 du contrat : < ABSENCE D’AUTRES DÉCLARATIONS. Vous reconnaissez qu’aucun de nos employés, agents ou représentants ni aucun de ceux du Donneur de Licence, de DAI, de nos autres Affiliés ou de nos AD ne vous a fait de déclarations et que vous ne vous fiez à aucune déclaration autre que celles contenues au présent

Contrat, le Document d’information et notre matériel publicitaire, à l’exception de celles que vous avez indiquées ci-après ». En page de couverture, on peut lire : « LA TRADUCTION DE CE DOCUMENT EST. FOURNIE À TITRE D’INFORMATION DANS LE SEUL BUT DE FACILITER LA

COMPREHENSION DU SYSTEME SUBWAY ET N’ENGAGE PAS LES PARTIES.

SAUF DISPOSITION CONTRAIRE DE LA LEGISLATION LOCALE. »

Alors qu’il est normal que le franchiseur ne s’engage pas sur la rentabilité du point de vente ouvert, il est difficile de comprendre qu’il s’exonère totalement de la simple viabilité ou, à tout le moins de la fiabilité, du projet du franchisé, alors que ce dernier doit réitérer le succès et le

} savoir-faire du franchiseur, ce pour quoi l’examen préalable de la solidité du projet. commercial du franchisé relève de la responsabilité du franchiseur. Dans le cas où le franchisé serait autorisé à conclure lui-même un contrat de bail commercial, le franchiseur lui impose, d’une part, de le soumettre à son approbation, d’autre part, de « signer un document intitulé les Effets de la Résiliation de Bail […] sous une forme satisfaisante pour [le franchiseur] qui stipule que le propriétaire signere un accord séparé avec [le franchiseur] pour [lui] donner la possibilité, en cas de résiliation du Bail, de Idésigner un nouveau franchisé qui signera un nouveau bail contenant des clauses identiques à celles du Bail, afin de permettre la poursuite des activités du restaurant ».. En signant le contrat de bail principal, le franchiseur se réserve pour l’avenir l’emplacement

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56 N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 31 1 ERE CHAMBRE

commercial. Ce montage contractuel permet d’obtenir un effet juridique supérieur à celui d’une promesse unilatérale ou d’un pacte de préférence; il écarte toute remise en concurrence pour l’attribution du local et contribue au verrouillage juridique du franchisé, sans qu’apparaisse pour celui-ci une réelle contrepartie d’adhérer à cette clause.

Subway réplique que le Ministre n’apporte pas la preuve que les clauses relatives à la responsabilité visées par le Ministre engendreraient un déséquilibre significatif au détriment du franchisé au sens de l’article L.442-6, 1, 2° (ancien) du Code de commerce.

Sur ce :

Le Préambule est un avis général de non responsabilité, qui ne met aucun engagement à la charge du franchisé et ne saurait par conséquent caractériser en lui-même un déséquilibre. Il consiste à faire porter toute la responsabilité d’un éventuel échec économique au franchisé, mais, s’agissant d’une déclaration unilatérale, elle n’a aucune portée juridique autre que de préciser la volonté de la partie qui l’énonce. En l’acceptant, le franchisé reconnaît être un entrepreneur indépendant totalement responsable de son choix d’entreprise dans le cadre

imposé par Subway. Quant à la clause de reprise du bail par le franchiseur dans l’hypothèse ou le bail aura été résilié, cette stipulation ne porte pas préjudice au franchisé, puisque la résiliation lui aura retiré tout droit au titre de ce bail préalablement à la mise en œuvre de cette clause..

Le Ministre ne parvient pas à caractériser le déséquilibre inhérent à ce préambule et sera donc děbouté de ses demandes à ce titre.

6-6/ Clauses relatives à l’absence d’exclusivité territoriale et au droit illimité du franchiseur de

faire concurrence (article 11.1)

Le Ministre de l’Economie expose que :

L’article 11.1 prévient clairement le franchisé du droit illimité du franchiseur de lui faire concurrence : « […] Nous disposons, avec nos Affiliés, du droit illimité de vous faire concurrence et d’accorder des licences à d’autres personnes susceptibles de vous faire concurrence. […] » vous comprenez et reconnaissez que ces autres magasins ou méthodes de distribution sont susceptibles de concurrencer le Restaurant et d’avoir des répercussions négatives sur votre chiffre d’affaires.[…] » Or, les agents de développement ont des objectifs annuels de nombre d’ouverture d’établissements, ce qui les incite à un comportement de prédation notamment en implantant des restaurants en dépit de l’absence de viabilité économique du projet, comme le confirme notamment un franchisé: « En d’autres termes je ne connais pas tas autres ouvertures programmées dans la même zone de chatandise. Or après ouverture, un restaurant Subway

a ouvert à Saint Orens de Gameville, route de Revel. En fait, il y a eu beaucoup d’ouvertures sur une même zone alors que la clientèle potentielle n’était pas extensible […]. » Le fait d’imposer à son partenaire commercial une clause de non-concurrence, qui produit ses effets en cours d’exécution du contrat, en favorisant l’implantation de nouveaux franchisés sur la même zone de chalandise, constitue une obligation fortement déséquilibrée au détriment du franchisé, sans contrepartie pour celui-ci, alors que lui-même est tenu à une obligation contractuelle de non-concurrence. La confrontation de ces obligations, toutes deux négatives pour le franchisé, crée un déséquilibre significatif dans les droits et les obligations des parties, consistant à ne pas conférer au franchisé une exclusivité quant à l’usage d’un savoir-faire et d’une marque sur un territoire donné.

Subway réplique que :

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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020

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L’intérêt de C n’est pas d’agir en prédateur de son propre réseau, mais que les membres de celui-ci réalisent le chiffre d’affaires le plus élevé possible. L’expression < droit illimité de vous faire concurrence » qul figure à l’article 11. a simplement pour objet de signifier l’absence d’exclusivité territoriale. La rédaction maladroite de cette clause est due à une traduction perfectible et à des différences culturelles sans pour autant que cela soit constitutif d’un déséquilibre significatif. En tout état de cause, l’exclusivité territoriale n’a jamais été un élément caractéristique de la franchise; aucune disposition légale ou réglementaire n’impose pareille exclusivité même en présence d’une exclusivité d’approvisionnement. Si C a fait le choix de ne pas accorder d’exclusivité territoriale à ses franchisés, c’est parce qu’elle sait par expérience que cela fige les réseaux et empêche de réévaluer les opportunités au fil du temps: Il ne faut pas oublier que C accorde à ses franchisés le droit.

d’exploiter leurs points de vente pendant 20 ans. En outre, C a mis en place une politique de contrôle de la cannibalisation, qui inclut l’avis du franchisé déjà installé, pour éviter qu’une nouvelle implantation trop proche de la première n’impacte trop le premier point de vente. Quant à l’engagement de non-concurrence du franchisé, la Cour de cassation et la Cour

d’appel de Paris ont déjà jugé que la conjonction d’une obligation de non-concurrence post contractuelle et d’une absence d’exclusivité territoriale dans un contrat de franchise

n’instaurait pas de déséquilibre significatif.

Sur ce :

La combinaison des deux clauses de concurrence et de non-concurrence est en faveur du franchiseur et peut avoir des conséquences dommageables pour le franchisé, d’où il résulte a priori un déséquilibre en défaveur du franchisé. Toutefois, l’avantage ne bénéficie pas directement aux personnes morales Subway (C et D) en ce qu’il n’impacte pas directement leurs comptes de résultat ou leurs bilans. L’avantage consiste en la maîtrise du maillage du territoire et de son évolution, tant par la liberté d’implantation que s’octroie la tête de réseau que par l’option qu’elle s’accorde maintenir un point de vente nonobstant la résiliation du contrat de bail ; il s’agit là d’un élément essentiel de la stratégie commerciale, dont l’objectif et en principe le résultat sont le développement optimal du réseau, par conséquent le développement de la notoriété et, toujours par voie de conséquence, l’augmentation du chiffre d’affaires des franchisés. S’il peut être le cas échéant contesté que le résultat soit conforme à l’objectif, il n’y a pas lieu dans la présente instance d’estimer la qualité de la stratégie commerciale de Subway, laquelle n’est en tout état de cause pas de. nature à constituer un déséquilibre contractuel, étant hors champ du contrat. Ainsi, les clauses incriminées relatives à la concurrence doivent être considérées comme sinon consubstantielles, du moins cohérentes avec la nature d’un réseau de franchise, et stipulées en faveur globalement de celui-ci, dont chaque franchisé a vocation à bénéficier, ce qui exclut de retenir un déséquilibre significatif en défaveur du franchisé.

Il apparaît néanmoins que Subway, par l’entremise d’un « AD », peut organiser la cannibalisation entre deux emplacements au préjudice d’un franchisé, parce que le J

deuxième emplacement, meilleur, est devenu disponible plus tard sur le marché. S’il ne saurait être reproché à Subway d’agir ainsi en bonne stratégie commerciale, Subway ne saurait sacrifier un franchisé à cette stratégie, alors qu’elle pourrait lui donner un droit de préemption sur le deuxième emplacement et l’autoriser à rompre concomilamment son premier contrat.

Le tribunal prononcera, au regard de l’article L.442-6 1 2° du code de commerce, la nullité des clauses relatives à l’absence d’exclusivité territoriale (article 11.1) et au droit illimité du franchiseur de faire concurrence (article 11.1) en ce qu’elles ne permettent pas au franchisé

سلام


58. N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 33 1 ERE CHAMBRE

de préempter une nouvelle implantation décidée par Subway qui lui ferait territorialement concurrence et de pouvoir résilier dans une telle circonstance le contrat relatif à son actuel emplacement, et enjoindra aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY

REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation. susmentionnée dans leurs contrats, sous réserve de l’éventuel rééquilibrage du contrat dans sa globalité, ce sur quoi il sera statué plus avant.

I

Le tribunal déboutera le Ministre de ses autres demandes portant sur les clauses relatives à l’absence d’exclusivité territoriale (article 11.1) et au droit illimité du franchiseur de faire concurrence (article 11.1).

6-7/ Clauses relatives à la durée, à la résiliation, et à l’expiration du contrat (articles 7 et 8)

Durée du contrat

I

Le Ministre de l’Economie prétend que : Le contrat prévoit en son article 7: «[…] Le présent Contrat est conclu pour une durée de vingt (20) ans à compter de sa date de signature et sera automatiquement renouvelé pour des périodes supplémentaires de vingt (20) ans, à moins que l’une des parties ne décide de ne pas le renouveler et envoie un préavis écrit à l’autre partie au minimum un (1) an avant la date d’expiration de toute période de vingt (20) ans […]. » 1

Cette stipulation est contraire à l’article 330-1 du code de commerce, puisqu’un contrat contenant un engagement de fourniture exclusive (article 5.b ii) doit être límité à 10 ans.

Les défenderesses contestent l’applicabilité de l’article L. 330-1 du code de commerce parce que l’approvisionnement des franchisés se fait auprès de plusieurs sources, toutes indépendantes du franchiseur et de son groupe. Or, l’approvisionnement est réalisé par l’intermédiaire d’une centrale d’achat liée au franchiseur et avec laquelle le franchisé devra traiter directement au terme d’un contrat de coopération passé entre C et European Independant Pourchasing Company (EIPC) le 14 janvier 2011. Dans ces conditions, EIPC est partie intégrante du réseau de franchise. En sus, l’applicabilité de l’article L. 330-1 du code de commerce au contrat de franchise resterait indéniable même en l’absence de clause d’approvisionnement exclusif en ingrédients et en matières premières, dans la mesure où il ne vise pas uniquement les relations d’achat/vente, mais également les relations dans lesquelles intervient par exemple une cession, une location ou une vente de nom commercial ou de marque ou autres: DPI (droits de propriété intellectuelle) «[…] biens meubles […]». Un contrat de franchise dont la durée est de 20 ans, n’a pas d’autre conséquence: que 3. d’empêcher les franchisés de changer de réseau. pendant la durée du contrat avec les clauses restrictives de sortie de contrat, les rendant ainsi captifs, tout en diminuant leur indépendance.

Subway réplique que : Les critères de l’article L.330-1 du Code de commerce ne sont pas remplis en l’espèce puisque les franchisés s’approvisionnent en ingrédients et matières premières auprès de sources toutes indépendantes de C, à travers la société IPCE; dont les associés et administrateurs sont exclusivement des franchisés.

Quand bien même on devrait considérer que ces dispositions s’appliqueraient au contrat de franchise Subway, elles sont contraires au droit européen applicable à la franchise: Tenant compte des particularités de la franchise et de sa nature pro-concurrentielle, la Commission européenne considère ainsi, dans le prolongement de la jurisprudence Pronuptia de la Cour de justice de l’Union européenne, que les restrictions accessoires (telle qu’une exclusivité

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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 34 1 ERE CHAMBRE

d’approvisionnement) sont nécessaires à l’existence même de la franchise, et ne sont ainsi pas anti-concurrentielles au sens de l’article 101 §1 du TFUE.

De surcroît, la durée de 20 ans du contrat n’est pas défavorable au franchisé, bien au contraire, puisqu’il s’agit de lui assurer un hońzon suffisamment long. lui permettant de financer son investissement et de bénéficier du retour sur cet investissement: Le franchisé qui souhaite cesser d’exploiter son restaurant Subway avant le terme contractuel peut parfaitement le faire de deux façons : Il peut soumettre à son agent de développement un formulaire très simple de fermeture de restaurant. Ainsi, au cours de l’année 2017, 28 fermetures de restaurants franchisés sont intervenues à titre amiable en BG, toutes avant le terme contractuel. Le franchisé peut également céder son restaurant, conformément à l’article 9 du contrat de franchise; il est assisté par le franchiseur dans le cadre d’une stratégie de sortie qui lui permet de cesser l’exploitation d’un restaurant dans les meilleures conditions pour lui, que le restaurant soit rentable ou non.

Sur ce

L’approvisionnement est réalisé par l’intermédiaire d’une centrale d’achat au terme d’un contrat de coopération passé entre C et European Independant Pourchasing Company. (EIPC) le 14 janvier 2011. Il résulte de la combinaison du contrat conclu entre le franchisé et le franchiseur d’une part, du contrat de coopération susvisé d’autre part, que chaque . franchisé est tenu à l’égard du franchiseur d’une obligation d’approvisionnement auprès de EIPC, peu important que les associés et administrateurs de EIPC soient exclusivement des franchisés.

Le contrat de franchise constitue un accord « vertical » susceptible de bénéficier du règlement européen d’exemption par catégorie 330/2010 du 20 avril 2010 relatif aux accords verticaux. Au sens de ce texte, une clause d’approvisionnement exclusif constitue une obligation de non-concurrence, celle-ci étant définie notamment comme « toute obligation directe ou indirecte imposant à l’acheteur l’obligation d’acquérir auprès du foumisseur ou d’une autre entreprise désignée par le fournisseur plus de 80 % de ses achats: annuels en biens ou services contractuels ». L’exemption prévue par le règlement 330/2010. ne s’applique pas si l’obligation de non-concurrence est d’une durée indéterminée ou supérieure à cinq ans. La Commission européenne considère néanmoins qu’une obligation de non-concurrence prévue dans un contrat de franchise ne relève pas de l’article 101, 1 du. TFUE lorsqu’elle est nécessaire au maintien de l’identité commune et de la réputation du. réseau franchisé. Elle peut dès lors être d’une durée Indéterminée ou supérieure à cinq ans, à condition que sa durée n’excède pas celle de l’accord de franchise lui-même (Lignes directrices sur les restrictions verticales – art. 190-b).

L’article L. 330-1 du Code de commerce limite a dix ans la durée des « [clauses] d’exclusivité par laquelle l’acheteur, cessionnaire ou locataire de biens meubles s’engage vis-à-vis de son vendeur, cédant au bailleur, à ne pas faire usage d’objets semblables ou complémentaires en provenance d’un autre foumisseur ». En outre, l’article L. 330-2 du code de commerce précise que « lorsque le contrat comportant la clause d’exclusivité mentionnée à l’article L. 330-1 est suivi ultérieurement, entre les mêmes parties, d’autres engagements analogues portant sur le même genre de biens, les clauses d’exclusivité contenues dans ces nouvelles conventions prennent fin à la même date que celle figurant au premier contrat ». Ainsi, dès lors que le contrat de franchise prévoit une exclusivité, celle-ci doit prendre fin à la même échéance que ce contrat. La durée de l’exclusivité ne pouvant être supérieure à 10 ans, le contrat de franchise ne peut avoir lui-même une durée excédant 10 années, ce à quoi contrevient la durée de vingt ans du contrat de franchise Subway. Surabondamment, la durée de vingt ans est très largement supérieure aux durées des contrats conclus à durée déterminée dans les activités distribution au détail ( à titre

d’exemple, les contrats de prêt bancaire pour l’acquisition d’un fonds de commerce se situent généralement dans une fourchette de 7 à 10 ans).

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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 35 1 ERE CHAMBRE

Le tribunal ne suivra pas Subway dans sa prétention à voir reconnaître que la durée de vingt ans du contrat serait en faveur du franchisé, alors que cette durée n’est pas pour le franchisé une option mais une obligation qui lui est imposée. Le fait que, in concreto, des ruptures. amiables puissent être accordées ne retire pas à la clause son caractère déséquilibré en ce que, alors qu’il s’agit d’une des clauses les plus contraignantes du contrat, son application est laissée à la discrétion de Subway. Le tribunal prononcera, au regard des textes susvisés et en tout état de cause de l’article L.442-6 1 2° du code de commerce, la nullité de la stipulation de durée contenue dans.

l’article 7 du contrat en ce qu’elle est de vingt ans et enjoindra aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats, sous réserve de

l’éventuel rééquilibrage du contrat dans sa globalité, ce sur quoi il sera statué plus avant.

Résiliation du contrat

Le Ministre de l’Economie prétend que: Le franchiseur prévoit un dispositif caractérisé par une absence totale de réciprocité et une asymétrie dans les contrats entre le franchisé et le franchiseur avec l’article 9.d qui stipule : « Nous nous réservons te droit de transférer et céder le présent Contrat sans votre accord, et ce Contrat sera transmis de droit à nos successeurs et ayants droit.» La résiliation du contrat de franchise ne résulte que de la volonté unilatérale du franchiseur, qui se donne un délai de dix jours pour notifier par écrit la résiliation du contrat « à son entiére discrétion » s’il estime que le franchisé en a enfreint certaines régles, celui-ci disposant d’un délai de dix jours, à compter de la date de remise de cette notification, pour remédier à son manquement. En revanche, le franchisé ne peut transférer le restaurant avec le contrat qui le lie au franchiseur et avec l’accord préalable écrit de ce dernier, que s’il lui propose un repreneur, C ayant 30 jours pour l’accepter après examen très strict des conditions de solvabilité et

passage d’un examen. Le franchiseur fait peu de cas des droits des franchisés en stipulant que la résiliation unilatérale a un « effet immédiat dès expiration de la période de dix (10) jours »>. Par ailleurs, les franchisés disposent d’un « délai raisonnable » non défini opportunément par le franchiseur pour modifier l’apparence du Restaurant, pour qu’il ne puisse plus être identifié comme étant un restaurant SUBWAY, sous menace de se voir infliger des pénalités de 175

€ par jour de défaillance avec la possibilité pour le franchiseur de réévaluer cette somme, ce montent étent une pré-estimation raisonnable du préjudice subi par nous. ». Le contrat oblige le franchisé à engager une procédure d’arbitrage aux Etats-Unis en anglais pour obtenir l’annulation de la décision de résiliation sans avoir préalablement eu recours à une procédure amiable ou à des discussions informelles.. Le franchiseur s’est quant à lui fixé un délai de soixante jours pour remédier à un :

manquement à l’une de ses obligations et exige, en cas de non- exécution de sa part, que le franchisé lui notifie l’existence d’un litige arbitral, dont la procédure sera administrée aux

Etats-Unis. Subway s’octroie ainsi un avantage excessif, déséquilibrant les obligations respectives des parties.

Subway réplique que : L’article 8(a) n’accorde pas un droit discrétionnaire à C de résilier le contrat en donnant un préavis de 10 jours au franchisé. C’est un article classique de résiliation pour faute, qui


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n’a vocation à s’appliquer que dans des cas expressément et limitativement prévus au contrat et constitutifs de manquements sérieux du franchisé (non- paiement des redevances, abandon du restaurant, expulsion des locaux, non-respect de la réglementation fiscale, relocalisation du restaurant à un emplacement non agréé, atteinte sérieuse à l’image de marque, reporting trompeur). En outre, ce délai de 10 jours n’est pas un délai de préavis mais un délai qui permet au franchisé qui manque à ses obligations de prendre les mesures nécessaires afin de réparer sa faute. De surcroît, en pratique, la résiliation n’intervient réellement que lorsque l’ordonnance d’exequatur de la sentence arbitrale prononçant la résiliation est signifiée au franchisé. Ainsi dans les faits, les franchisés bénéficient d’un délai important (entre 12 et 18 mois) pour remédier aux manquements contractuels. L’article 8(b) qul complète l’article 8(a) précise que les cas de manquement autres que ceux limitativement énumérés à l’article 8(a) sont soumis à un préavis de 90 jours (avec une période de 60 jours pour remédier au manquement constaté). La clause litigieuse ne reçoit application qu’en cas de défaillance du franchisé, ou en raison de violation par le franchisé de l’intuitu personae qui sous-tend: les contrats de franchise. Les motifs visés par cette clause apparaissent habituels dans ce type de contrats et ne constituent pas un déséquilibre significatif au détriment du franchisé. L’article 8.e du contrat est une clause d’astreinte d’un montant raisonnable, La pénalité. prévue par de 175 € par jour de défaillance, ne s’applique qu’en cas de non-respect par l’ancien franchisé de ses obligations post-contractuelles les plus élémentaires, le droit d’utiliser les signes de ralliement de la clientèle étant un droit que le franchisé tire du contrat de franchise qui doit cesser avec le contrat, étant rappelé qu’un « délal raisonnable » pour

s’y conformer est accordé aux franchisés.

Sur ce

L’article 8 du contrat permet à Subway de résilier le contrat pour fautes diverses qui y sont énumérées ou si surviennent certaines situations pouvant justifier cette résiliation.

L’article 8.c vise des fautes graves, pour la plupart pénalement répréhensibles, ce qui donne sa légitimité à l’absence de préavis de la résiliation prévue à cet article.

L’article 8.b vise des situations dont la pérennisation ne permet pas la poursuite de la relation contractuelle dans les conditions normales convenues entre les parties. Un préavis de 90 jours et un délai de 60 jours sont donnés au franchisé, durées compatibles avec la bonne foi qui doit présider aux relations et qui ne saurait constituer un déséquilibre significatif entre les parties. Il convient toutefois d’exclure la situation ainsi exprimée : « [vous] devenez insolvable », dès lors qu’aucun élément d’appréciation n’est prévu par le contrat permettant de caractériser la situation d’insolvabilité, ce qui confère à cet élément de l’article 8(b) un

caractère potestatif. Le tribunal prononcera la nullité de la stipulation « [vous] devenez: insolvable»> contenue

dans l’article 8.b.

L’article 8.a vise différentes autres fautes, de degrés de gravité inégaux, pour lesquels n’est donné qu’un préavis de 10 jours. Mais l’article 8(d) stipule que la résiliation sera « constatée et exécutée par une procédure d’arbitrage et au moyen d’une demande de confirmation par une juridiction de la sentence arbitrale », d’où il résulte que la résiliation ne pourra intervenir que dans un délai beaucoup plus long que celui du préavis susvisé de 10 jours. Cette clause ne saurait en conséquence constituer un déséquilibre significatif entre les parties.

Une clause est insérée après le § 8.c ainsl libellée: « Aprés la seconde notification de manquement adressée conformément aux articles 8.a ou 8.b ci-dessus, tout manquement au cours des douze (12) mois suivants constituera un motif de résiliation définitive, sans


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possibilité pour vous de remédier à ce manquement ou même si vous y remédiez effectivement. »

Or, l’article 8.a stipule, parmi les causes légitimant la résiliation du contrat: < vous omettez de payer toute somme que vous nous devez ou que vous devez à nos Affiliés, au Fonds de publicité, au propriétaire des locaux du Restaurant en vertu du présent Contrat ou de tout

Contrat de Franchise conclu avec nous ou toute somme pour laquelle notre responsabilité pourrait être engagéa en raison BI vos actes ou omissions »..

La réunion de ces deux clauses permet au Franchiseur, au motif de deux retards ou omissions de paiement y compris de montants infimes ou résultant de circonstances exceptionnelles, voire indépendantes du franchisé, sur une période d’un an, de résilier le contrat, dont il convient de rappeler qu’il constitue la source de revenus du franchisé et un projet professionnel et de vie dont la rupture peut être extrêmement difficile à surmonter.

Sous réserve de l’éventuel rééquilibrage du contrat par une autre clause, ce sur quol il sera statué plus avant, le tribunal prononcera la nullité de l’ensemble constitué par les clauses: clause insérée après le § 8.c ainsi libellée : « Après la seconde notification de manquement adressée conformément aux articles 8.a ou 8.b ci-dessus, tout manquement au cours des douze (12) mois suivants constituera un motif de résiliation définitive, sans possibilité pour vous de remédier à ce manquement ou même si vous y remédiez effectivement. »>,

à l’article: 8.a, parmi les causes légitimant la résiliation du contrat : « vous omettez de payer toute somme que vous nous devez ou que vous devez à nos Affiliés, au Fonds de publicité, au propriétaire des locaux du Restaurant en vertu du présent Contrat ou de tout Contrat de Franchise conclu avec nous ou toute somme pour laquelle notre responsabilité pourrait être engagée en raison de vos actes ou omissions » ;

II enjoindra en conséquence aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant, dans leurs contrats, à faire porter la stipulation « Après la seconde notification de manquement adressée conformément ska t aux articles 8.a ou 8.b ci-dessus, tout manquement au cours des douze (12) mois suivants constituera un motif de résiliation définitive, sans possibilité pour vous de remédier à ce manquement ou même si vous y remédiez effectivement » sur la cause ci-après : « vous omettez de payer toute somme que vous nous devez ou que vous devez à nos Affiliés, au Fonds de publicité, au propriétaire des locaux du Restaurant en vertu du présent Contrat ou de tout, Contrat de Franchise conclu avec nous ou toute somme pour laquelle notre responsabilité pourrait être engagée en raison de vos actes ou omissions ».

Le Ministre fait valoir par ailleurs que les franchisés disposent d’un « délai raisonnabla » pour qu’il ne puisse plus être identifié comme étant un restaurant SUBWAY, sous menace de se voir infliger des pénalités de 175 € par jour de défaillance avec la possibilité pour le franchiseur de réévaluer cette somme.

Il est stipulé à l’article 8.d que le franchisé, en cas de résiliation ou à l’expiration du contrat, devra « modifier l’apparence du Restaurant, […] pour qu’il ne puisse plus être identifié comme étant un restaurant SUBWAY, […] cesser d’utiliser le Systéme […], annuler tous permis, licences, enregistrements, certifications […]. En cas de non-respect de la présente disposition < dans un délai raisonnable », le franchisé est redevable d’une somme de 175 € par jour, « ce montant étant une pré-estimation raisonnable du préjudica subi par nous. »

}

Le respect intégral (à 100%) des obligations du franchisé s’avère dans la pratique difficile, voire impossible, un vestige infime de la marque du franchiseur pouvant avoir été maintenu à l’insu même du franchisé. Le « délai raisonnable » présente par ailleurs un caractère potestalif. En cas de faute du franchisé, Subway, qui ne saurait se faire justice elle-même, pourra, en


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JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 38 1 ERE CHAMBRE

l’absence de la clause incriminée, obtenir auprés de la juridiction compétente, la réparation de son préjudice par l’obtention de dommages et intérêts.

Le tribunal prononcera, au regard de l’article L.442-6 | 2° du code de commerce, la nullité de la clause de redevance de 175 € dans l’article 8.d du contrat et enjoindra aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats, sous réserve de l’éventuel rééquilibrage du contrat par une autre clause, ce sur quoi il sera statué

plus avant.

6-8/ Clauses relatives aux lois et à la langue applicables au contrat

Le Ministre de l’Economie prétend que la rédaction du contrat en anglais a pour effet, voire pour but, de rendre difficile pour le franchisé la défense de ses droits.

Subway réplique que la Cour d’appel de Paris a considéré que l’emploi de l’anglais ne portait pas atteinte « aux principes de la contradiction et de l’égalité des armes dès lors qu’elle a été choisie par les parties dans une relation commerciale à caractére international […]. »

Le tribunal relève que, alors que le contrat est traduit en français, et alors qu’il n’est pas démontré que le franchisé a « choisi» cette langue ni même qu’il considère entrer avec Subway dans «< une relation commerciale à caractère international », seule fait foi sa version anglaise. Toutefois, il sera recouru à la langue anglaise en cas d’incohérence ou de contradiction avec la version française et le franchisé pourra se prévaloir du dol ou de la mauvaise foi dans l’hypothèse où la traduction aurait été faussée volontairement ou du fait

d’une négligence blåmable. Dès lors, la circonstance de ce que la version anglaise du contrat fait seule foi ne suffit pas à créer un déséquilibre significatif entre les parties. Le tribunal déboutera le Ministre de ce chef.

6-9/ Clauses relatives au droit applicable et aux juridictions compétentes en cas de litige

(articles 10, 11.m et 13)

Le Ministre de l’Economie prétend que : L’article 10 du contrat de franchise SUBWAY stipule que « tous les litiges issus du présent Contrat seront soumis exclusivement à l’arbitrage […] Si l’une ou l’autre des parties demande une procédure orale, les parties conviennent que toute audience d’arbitrage se tienne à New

York, État de New York, États-Unis. […] ». Il est prévu à l’article 13 du contrat que ce dernier est régi par le droit néerlandais: « 13. DROIT APPLICABLE. Le présent Contrat est régi par et sera interprété conformément au droit de l’État des Pays-Bas sans référence à ses conflits de lois, […] » précisant tout de même plus loin dans le même article « sauf si le droit local nous impose d’utiliser le droit.. local […]». Le contrat fait référence au droit applicable aux États-Unis et aux Pays-Bas. Certaines clauses du contrat prennent toutefois la précaution d’indiquer « … si la loi française le permet … ». De telles clauses relatives à l’obligation pour le franchisé français d’effectuer des démarches administratives et judiciaires en langue anglaise et dans le droit néerlandais applicables, à l’exonération de responsabilité du franchiseur en cas de non-respect de la lol française, à la I compétence du tribunal arbitral ou d’un juge étranger pour régler un éventuel litige, contribuent au déséquilibre dans la mesure où elles ont pour effet de rendre hypothétique la compréhension par le franchisé de l’environnement juridique du contrat et dissuasif pour lul

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de faire valoir d’éventuelles prétentions en initiant un contentieux. Si Insérer une clause compromissoire relève de la liberté contractuelle et est en droit pleinement valable, il en va autrement si l’inclusion de celle-ci révèle l’abus par le partenaire d’un rapport de forces économique déséquilibré entre les parties, au regard des nombreuses contraintes de l’arbitrage pour les parties faibles. Le franchiseur Impose aux franchisés une clause compromissoire dont le coût peut être prohibitif pour le franchisé qul, au moment du litige, se trouve très souvent dans une situation dont la trésorerie est exsangue, dans le but de le priver de son droit d’agir en justice. Le caractère inéquitable de la procédure à l’égard: du franchisé ressort également du fait que celui-ci, ne résidant pas aux Etats-Unis, doit se. faire traduire les pièces et courriers sans disposer, à l’inverse de la société SUBWAY, d’un

service juridique:

Sur la clause compromissoire : Le Ministre ne remet pas en cause la licéité des clauses compromissoires, ou relatives au. droit applicable en cas de litige, car prises isolément, ces clauses ne font qu’aménager le droit d’agir en justice, sont manifestement licites et ne sauraient engendrer un déséquilibre significatif. En revanche, c’est leur combinaison visant à éviter de recourir au juge national en cas de litige qui, dissuadant les franchisés d’agir en justice, constitue un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au sens de l’article L. 442-6 1 2° du code de commerce. L’imposition de telles clauses revêt un caractère déraisonnable notamment parce que n’est stipulé aucun autre moyen de réglement à l’amiable des conflits préalablement au déclenchement de la clause compromissoire. Ainsi, le contrat de franchise de droit néerlandais et la mise en place de la procédure d’arbitrage imposée en langue anglaise devant les tribunaux américains contribuent au déséquilibre significatif dans les droits des parties. Il est légitime de demander l’annulation

de la clause compromissoire.

Subway réplique que : S’agissant du choix de la loi néerlandaise pour régir le contrat (article 13 du contrat), celui-ci

n’est pas contraire aussi bien au principe de la liberté contractuelle, qui a rang constitutionnel, qu’à toutes les règles de droit international privé applicables en BG. Par application de l’article 3 du Règlement Rome I du. 17 juin 2008, la loi applicable à un contrat peut être librement choisie par les parties. C est une société de droit néerlandais et il est: naturel qu’elle choisisse sa propre loi. Le choix de la loi applicable est sans préjudice de l’application des lois de police françaises. Le droit néerlandais qui a été retenu est de tradition civiliste, dans lequel la bonne foi et l’équilibre contractuel sont des principes:

cardinaux. C prend en compte toutes les dispositions impératives, qu’il s’agisse de la réglementation française (par exemple la loi Doubin), américaine (« Patriot Act ») ou européenne (règlement

(UE) n° 330/2010 du 20 avril 2010 sur les restrictions verticales).. La référence au droit du Liechtenstein dans le Préambule a simplement pour vocation d’informer le franchisé que C bénéficie d’une licence sur la marque « Subway » consentie par la société Subway Systems International Anstalt qui est immatriculée au Liechtenstein.

Sur la clause compromissoire : Le coût de la procédure d’arbitrage n’est pas prohibitif pour le franchisé. Au contraire, il est bien moindre que ceux demandés par d’autres instances arbitrales en BG et la Cour

d’appel de Paris a relevé dans deux affaires des coûts respectifs de 2.860 et 9.691 USD; des sentences arbitrales rendues dans d’autres affaires ont mis respectivement à la charge du défendeur les sommes de 2.587,50 et 2.935 USD. Il est de jurisprudence constante que le coût d’une procédure arbitrale n’est pas de nature à créer un déni de justice : « le caractère manifestement inapplicable de le clause compromissoire ne saurait davantage se déduire de l’incapacité alléguée du demandeur à faire face au coût d’une telle procédure en raison de sa situation financière et au déni de justice qui en résulterait alors qu’il appartient en tout état de cause au tribunal arbitral de permettre l’accès au juge, un éventuel

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manquement de sa part sur ce point étant susceptible d’être sanctionné ultérieurement. » La clause d’arbitrage donne compétence à une institution arbitrale indépendante et. Internationalement reconnue: le Centre international de résolution des litiges qui applique les règles d’arbitrage édictées par la Commission des Nations Unies pour le droit commercial International (CNUDCI). Cette institution veille bien évidemment à l’accès à la justice, à l’impartialité des arbitres (l’arbitre étant choisi conjointement par les parties et chacune disposant de la possibilité de récuser l’arbitre) et au strict respect du contradictoire. La procédure peut < se dérouler par écrit sans déplacement de conseils, ce qui résulte du reste des propres énonciations de la sentence », comme l’a relevé la Cour d’appel de Paris dans ses décisions des 11 septembre 2018 et 21 mai 2019 concernant des anciens franchisés. Subway.

Concernant l’usage de l’anglais dans une procédure arbitrale, la Cour d’appel de Paris, avec une remarquable constance, a toujours confirmé la validité de la clause d’arbitrage des contrats Subway, ainsi que la question de la langue de l’arbitrage en analysant concrètement son impact sur le franchisé et en décidant que : « la circonstance que l’arbitrage ait eu lieu en anglais, conformément aux termes du contrat alors que ce n’était pas la langue pratiquée par les franchisés, ainsi qu’en témoigne la traduction française du contrat à l’usage de ceux cl, ne constitue pas en elle-même une atteinte au principe de la contradiction ; […] le réglement de la CNUDCI ( article 25 3) laisse à l’arbitre le soin de prendre les dispositions pour faire assurer la traduction des exposés oraux faits à l’audience et établir un procés verbal de l’audience, s’il juge que l’une ou l’autre de ces mesures s’impose eu égard aux circonstances de l’espèce […] l’arbitre a donné un délai jusqu’au 30 octobre aux franchisés pour produire à nouveau leurs documents accompagnés d’une traduction en anglais, ce qu’ils ont fait ; que les appelants ne démontrent pas qu’ils n’ont pas été mis en mesure de faire valoir leurs droits. »

C veille à Informer clairement les franchisés de l’existence de la clause d’arbitrage et de ses conséquences avant la signature du contrat en page 3 du document d’information précontractuel remis au candidat franchisé plus de 20 jours avant la signature du contrat : « Le contrat de franchise impose que put litige ou désaccord entre vous-même et Subway

International B.V. soit soumis à une procédure d’arbitrage ayant lieu à New York, état de New York, Etats-Unis d’Amérique, sauf indication contraire. Si un Tribunal déclare la clause

d’arbitrage non applicable, le contrat de franchise ne vous permet d’intenter une action contre Subway International B.V. que dans l’Etat du Connecticut, Etats Unis d’Amérique. Ce choix d’un forum arbitral non-local ou d’une juridiction étrangère peut aboutir à vous: voir imposer un réglement du litige moins favorable à vos intérêts. De même, le déroulement d’une procédure judiciaire ou d’arbitrage avec le Franchiseur dans l’état de New York ou du

Connecticut, Etats-Unis, au lieu de votre comté d’origine, peut avoir pour conséquence. d’augmenter les coûts de résolution des litiges. »

Sur ce

-

Il n’est pas contestable que sont licites, d’une part l’emploi de la langue anglaise dans un contrat: commercial français, d’autre part la référence à un droit étranger, enfin la clause compromissoire.

La question posée au tribunal est celle de la validité de la stipulation dès lors que celle-ci celui-ci ne résulterait pas de la rencontre de la volonté des parties mais d’un rapport de force imposant sans négociation possible des clauses à la partie faible, occasionnant un déséquilibre significatif du contrat.

Quand bien même l’arbitrage est un mode de conflit couramment employé dans les relations commerciales internationales, il ne saurait être prétendu que les commerçants de détail en. BG utilisent spontanément ce mode de règlement des conflits, ni même qu’ils y souscriralent dans un rapport d’égalité avec leur co-contractant. La clause compromissoire

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ERE CHAMBRE

est éloignée du champ juridique dans lequel opèrent en BG les commerçants de détail. Au surplus, il ne saurait être prétendu que, dans l’hypothèse où un commerçant français choisirait ou accepterait la clause compromissoire, il proposerait ou accepterait volontiers que la procédure d’arbitrage se déroule à New York. Il ne saurait être prétendu qu’un commerçant français, sauf rarissime exception, pourrait spontanément, voire même sur demande de son co-contractant, choisir, voire accepter, le droit néerlandais, pays que dans la plupart des cas il n’a pas visité, dont il ne connaît pas la langue et encore moins le droit. Enfin, il est tout aussi difficile de prétendre que ledit commerçant pourrait choisir la langue anglaise pour contracter ce qui sera son projet de vie professionnelle, alors qu’il est constant que le niveau moyen des Français en langue anglaise est très éloigné de la compréhension

d’un texte juridique.

Ainsi, Subway fait fi tant du bon sens que de la bonne foi dans sa tentative de convaincre le tribunal que ses candidats franchisés français, pour sécuriser juridiquement leur relation avec leur franchiseur, « choisissent » la langue anglaise, le droit néerlandais, la clause compromissoire et le déroulement de la procédure aux Etats-Unis. L’accumulation et la conjonction de ces contraintes imposées au franchisé, tant sur le plan juridique que culturel, et sans qu’il soit besoin de rechercher si le coût est ou non supérieur ou inférieur à celui d’une procédure devant les tribunaux français ou à celui d’un mode alternatif de réglement des différends en BG, caractérisent un déséquilibre significatif en défaveur du franchisé.

Le tribunal prononcera, au regard de l’article L.442-6 | 2° du code de commerce, la nullité des clauses du contrat en ce qu’elles se référent au droit néerlandais (ou du Lichtenstein), ainsi que de la clause compromissoire en ce qu’elle prévoit que la procédure se déroulera dans un autre pays que la BG, et enjoindra aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner les stipulation susmentionnées dans leurs contrats, sous réserve de l’éventuel rééquilibrage du contrat par une autre clause, ce sur quoi il sera statué plus avant.

7/ Sur le déséquilibre significatif et le rééquilibrage du contrat

Le Ministre de l’Economie expose que : Alors que l’ensemble des obligations à la charge du franchisé ne le met pas en mesure de déterminer librement les conditions d’exploitation de sa société, la course au développement amène l’enseigne SUBWAY à ouvrir sans cesse de nouveaux points de vente, partageant les succès en bénéficiant des redevances, n’assumant pas le risque en cas d’échec. Le. risque est supporté par le franchisé alors que l’ensemble des obligations mises à sa charge ne le met pas en mesure de déterminer librement les conditions d’exploitation de sa société.

Pour tenter de justifier le caractère déséquilibré de son contrat de franchise, SUBWAY évoque la nécessité de la mise en oeuvre de ces clauses pour le maintien de l’identité du réseau de franchise, de sorte que selon SUBWAY, le contrat franchise se devrait d’être significativement déséquilibré pour que le secteur de la franchise survive. Or, il ressort de

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l’objectif même du droit des pratiques restrictives de concurrence et de la notion de déséquilibre significatif qu’abuser de sa position de force pour obtenir de son partenaire commercial un contrat significativement déséquilibré n’est tolérable dans aucun secteur. Pour échapper à l’engagement de sa responsabilité, l’acteur économique qui abuse de sa force de négociation au détriment de son partenaire commercial doit prouver que d’autres clauses ou contreparties rééquilibrent, dans son ensemble, le contrat, la preuve d’un rééquilibrage du contrat par une autre clause incombant à l’entreprise mise en cause, sans que l’on puisse considérer qu’il y a inversion de la charge de la preuve. Les effets des pratiques n’ont pas à être pris en compte ou recherchés.

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JUGEMENT DU Mardi 13/10/2020 PAGE 42 1 ERE CHAMBRE

il ressort de l’analyse des contrats de franchise recueillis que les obligations du franchiseur se limitent à fournir au franchisé un accès au « systéme et marques déposées » (article 3) complétées par les obligations suivantes (article 4) accorder un stage de formation, communiquer les coordonnées d’un représentant ou agent de développement et fournir un programme d’assistance sans autre précision. Le déséquilibre résulte dès lors de l’asymétrie qui existe entre ces obligations du franchiseur et celles qui incombent au franchisé énumérées à l’article 5 (37 alinéas et paragraphes) du

contrat de franchise.

Subway réplique que : Les clauses prétendument significativement déséquilibrées doivent être appréciées dans l’économie d’ensemble du contrat, afin de déterminer si elles ne sont pas rééquilibrées par

d’autres clauses ou obligations. La franchise est un modèle juridique et économique dont l’arrêt de principe de 1986 de la Cour de Justice de l’Union Européenne a rappelé que : « Plutôt que d’un mode de distribution, il s’agit d’une manière d’exploiter financièrement, sans engager de capitaux propres, un ensemble de connaissances. Ce systéme ouvre par ailleurs à des commerçants dépourvus de l’expérience nécessaire l’accès à des méthodes qu’ils n’auraient pu acquérir qu’après de longs efforts de recherche et les fait profiter de la réputation du signe. Les contrats de franchise de distribution se différencient en cela des contrats de concession de vente ou de ceux liant des revendeurs agréés dans un système de distribution sélective qui ne comportent ni ulilisation d’une même enseigne, ni application de méthodes commerciales uniformes, ni paiement de redevances en contrepartie des avantages consentis. […] Un tel systéme, qui permet au franchiseur de tirer parti de sa réussite, ne porte pas atteinte en soi à la concurrence. Pour qu’il puisse fonctionner, une double condition doit être remplie:

[…] Premièrement, le franchiseur doit pouvoir communiquer aux franchisés son savoir-faire et leur apporter l’assistance voulue pour les mettre en mesure d’appliquer ses méthodes, sans risquer que ce savoir-faire et cette assistance profitent, ne serait-ce qu’indirectement, à des concurrents. […] Deuxièmement, le franchiseur doit pouvoir prendre les mesures propres à préserver l’identité et la réputation du réseau qui est symbolisé par l’enseigne. » La Cour d’appel de Paris a ainsi jugé que l’obligation faite au franchisé de communiquer son fichier client à des fins de développement commercial n’était pas constitutive de déséquilibre significatif. Une analyse globale et in concreto des contrats de franchise aboutit ainsi toujours à exclure l’existence d’un déséquilibre significatif, compte tenu des avantages et contreparties dont les franchisés bénéficient et de la nécessité pour le franchiseur, inhérente

à la franchise, de faire respecter son concept et d’assurer l’homogénéité de son réseau. C actualise régulièrement son savoir-faire et le fait évoluer pour maintenir l’avantage

concurrentiel du réseau. Les franchisés bénéficient enfin des recherches et innovations en matière de produits et

d’extension de gamme offertes aux consommateurs. A ce titre, il convient de rappeler que le groupe Subway a largement amélioré et développé son offre qui, à l’origine, se limitait à des sandwichs et couvre aujourd’hui une palette beaucoup plus large incluant une plus grande variété de sandwichs, wraps, salades, desserts et petits déjeuners. C foumit aux franchisés une assistance commerciale et technique avant l’exploitation du restaurant, lors de l’ouverture du restaurant avec la présence et le soutien de l’agent de développement pendant une dizaine de jours, et pendant toute la durée du contrat de franchise avec les visites au moins une fois par mois des agents de développement. C développe la notoriété de la marque et du réseau en menant d’importantes campagnes publicitaires et promotionnelles.

Sur ce :

سلام


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S

1

Le tribunal, en présence de la soumission ou tentative de soumission d’un partenaire commercial à des clauses manifestement déséquilibrées, doit vérifier que les dites clauses ne sont pas rééquilibrées par d’autres. En présence d’un contrat dont il s’avère qu’il ne donne lieu à aucune négociation, il apparaît a priori et il est en l’espèce confirmé qu’aucune clause ou disposition n’est susceptible de répondre à une demande qui serait formulée par le franchisé pour rééquilibrer les clauses stipulées à son détriment; Subway ne cherche d’ailleurs pas à prétendre le contraire, faisant seulement état de la renégociation possible, en cours d’exécution du contrat, des clauses relatives aux horaires ou à la résiliation, argument sans portée puisque le déséquilibre s’apprécie au moment de la signature du contrat.

Alors qu’incombe à la défenderesse la preuve de l’existence de clauses de nature, à rééquilibrer le contrat, Subway ne prétend pas en fournir au tribunal. Subway soutient au contraire que l’économie d’un contrat de franchise, sous réserve que le concept ait, comme celui de Subway, une valeur économique certaine, est par essence équilibré, le déséquilibre du contrat étant rééquilibré par le bénéfice que le franchisé retire de son appartenance au réseau.

Le tribunal relève toutefois que ce bénéfice procuré au franchisé trouve sa totale contrepartie dans la rémunération que Subway obtient de lui; que le contrat se trouve ainsi équilibré ; que Subway ne saurait s’octroyer une contrepartie contractuelle adventice, résidant dans la stipulation de clauses manifestement déséquilibrées en sa faveur.

Le tribunal dira que : le concours de plusieurs clauses significativement déséquilibrées, comme il a été. précédemment démontré, caractérise le déséquilibre significatif du contrat ; le contrat incriminé ne comporte pas de clauses ayant pour objet ou pour effet de rééquilibrer ses clauses manifestement déséquilibrées.

8/ Sur l’amende sollicitée par le Ministre

Le Ministre de l’Economie expose que :

Les pratiques abusives visées à l’article L. 442-6 du code de commerce sont condamnables per se, portant atteinte à la loyauté des relations commerciales. L’abus est établi in abstracto, sans qu’il y ait besoin de justifier des effets de celui-ci, dès lors que les pratiques sont contraires à l’ordre public économique en raison du préjudice qu’elles portent nécessairement à l’économie par l’élimination de partenaires commerciaux et par la nuisance à l’investissement. Le trouble porté à l’ordre public économique est manifeste et particulièrement grave au cas d’espèce, qui crée une situation incompatible avec la liberté économique que tout acteur indépendant est en droit d’attendre dès lors qu’il évolue dans le cadre d’une économie de marchés libres et concurrentiels. Or, le trouble à l’ordre public économique ne revêt pas seulement une connotation financière directe et: immédiate, il provient également et surtout de l’attitude caractérisant nettement un déséquilibre dans le libre jeu de la concurrence et justifie l’allocation d’une amende exemplaire. L’amende civile, par son montant, vise également à garantir une dissuasion efficace, en décourageant toute récidive aussi bien de l’entreprise assignée que des autres acteurs économiques.

Subway réplique que :

La condamnation pécuniaire que sollicite le Ministre à travers le versement d’une amende civile de 2 millions d’euros serait en contradiction avec le principe de la personnalité des poursuites et des peines, énoncé à l’article 7 de la Convention Européenne de Sauvegarde

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des Droits de l’Homme, qui fait obstacle à la condamnation d’une société à une sanction pécuniaire pour des faits concemant une autre société, même si elles font partie du même

groupe.

La jurisprudence exige une appréciation in concreto du contexte du litige, afin de déterminer : de manière équilibrée le montant de l’amende, prenant en compte la gravité du. comportement en cause, le dommage à l’économie en résultant et la situation individuelle de l’entreprise poursuivie, en vertu du principe d’individualisation des peines.

Le contrat de franchise étant un contrat d’intérêt commun, la réussite de ses franchisés conditionne la propre réussite de C, sa seule source de revenus étant la perception des redevances de franchise de 8% dont elle reverse 1/3 à ses agents de développement. Il a notamment été démontré que les cas de résiliation avant l’ouverture du restaurant sont rarissimes (et parfaitement justifiés) et que le droit d’entrée, remboursé pour moitié (sauf si le franchisé ne s’est jamais présenté en pratique), ne sert qu’à couvrir une partie des frais engagés par C; que la possibilité pour C d’interroger le système informatique de point de vente n’a vocation qu’à réaliser un suivl de l’activité des franchisés, à les aider à améliorer leur rentabilité et à les assister le plus tôt poss en cas de difficultés ; que les horaires d’ouverture sont conformes aux normes du secteur de la restauration rapide et sont avant tout des recommandations pour maximiser le chiffre d’affaires des franchisés, près de la moitié du réseau adoptant des horaires et amplitudes horaires différents de ceux recommandés par C; que C veille à effectuer une analyse d’impact: sur les restaurants existants en amont de toute nouvelle implantation pour ne pas cannibaliser son propre réseau ; que la durée de 20 ans du contrat de franchise permet aux franchisés L

d’investir en se projetant dans la durée et de pérenniser leur investissement, ceux qui souhaitent sortir du réseau avant, soit en cédant, soit en résiliant le contrat, le pouvant en pratique ; le choix de l’anglais a librement été fait par les parties mais, au quotidien, les échanges et l’assistance interviennent en français; l’arbitrage est une institution arbitrale reconnue, qui pratique des tarifs raisonnables: SEP

Sur le critère du dommage à l’économie, la jurisprudence prend en considération le caractère incontoumable de l’auteur des pratiques, ainsi que sa part de marché. Or, la part du marché de la restauration rapide de C est très faible (0,8 %). Il est donc possible d’affirmer que le dommage à l’économie est, en l’espèce, inexistant. Le chiffre d’affaires que C réalise auprès de franchisés français est de 14,5 millions € en 2018, soit celui d’une PME. La condamner au paiement d’une amende civile de 2 millions € (soit le maximum prévu par la loi, dans sa version applicable au moment où le Ministre a engagé sa procédure) serait ainsi totalement disproportionné.

Sur ce :

La constatation des pratiques fautives au regard des articles L. 442-6 1 2° du code de commerce justifie le principe de la demande de sanction du Ministre conformément au paragraphe Ill de l’article L. 442-6 précité dans sa version applicable à l’espèce ainsi rédigée : « Lors de cette action, le ministre chargé de l’économie et le ministère public peuvent demander à la juridiction saisie d’ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent aussi, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la répétition de l’indu.

Ils peuvent également demander le prononcé d’une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à 2 millions d’euros. Toutefois, cette amende peut être portée au triple du montant des sommes indûment versées ». P

L’amende civile, dont le Ministre demande qu’elle soit fixée à 2 millions €, a pour objet de réparer le trouble grave et manifeste porté en l’espèce à l’ordre public économique. les pratiques que le tribunal aura condamnées ont en effet pour objet ou pour effet l’élimination

7h


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potentielle de partenaires commerciaux et la nuisance à leur investissement. Ce trouble crée une situation incompatible avec la liberté économique que tout acteur indépendant est en droit d’attendre dès lors qu’il évolue dans le cadre d’une économie de marché libre et

concurrentielle. Le caractère exemplaire de l’amende civile, par son montant, vise à créer une dissuasion efficace, en décourageant toute récidive de l’entreprise assignée aussi bien que, dans le futur, des pratiques identiques ou équivalentes d’autres acteurs économiques.

Le tribunal relève que : Subway, depuis l’origine de la procédure, n’a reconnu complètement ou partiellement aucun des déséquilibres les plus évidents du contrat ; Seule une partie des clauses incriminées par le Ministre donnera lieu à

condamnation ; 1

Il a été démontré que D et C ont toutes deux contribué à la commission des infractions, d’où il résulte qu’elles seront condamnées in solidum au paiement de l’amende, sans qu’une telle condamnation heurte le principe de ta personnalité des poursuites et des

peines.

Le tribunal, usant de son pouvoir d’appréciation, fixera à 500.000 €, soit environ 3,5% du chiffre d’affaires que Subway dit avoir réalisé auprès des franchisés français en 2018, le montant de l’amende, au paiement de laquelle il condamnera in solidum D et C.

H/ Sur la demande de publication du dispositif du jugement

Le Ministre demande au tribunal de condamner in solidum les sociétés SUBWAY

INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL à publier à leurs frais, sous huit jours à compter de la signification du jugement à intervenir, le dispositif dudit jugement dans LE MONDE, LE FIGARO, LES ECHOS et sur le site internet www.subwayfrance.fr/ pour une durée d’un mois.

Subway expose qu’ordonner une telle publication serait disproportionné dans la mesure où une importante publicité de l’enquête et des diverses étapes de la procédure a déjà été effectuée, à travers des médias nationaux malheureusement très orientés comme le des avocats des magazine Capital ou encore sur les blogs – parfois outranciers intervenants volontaires, et que le Ministre publiera très probablement le dispositif du jugement accompagné d’un communiqué de presse sur le site internet du Ministère de

l’économie.

Sur ce :

L’enquête de la DGCCRF et l’action du Ministre sont suivies depuis l’origine par des media,. notamment le magazine Capital de grande diffusion; le présent jugement fera certainement également l’objet d’un communiqué de presse du Ministre qui sera vraisemblablement largement repris et commenté par les media; la DGCCRF pourra sl elle l’estime nécessaire publier le jugement sur son site; le secteur économique de la franchise, s’il n’est pas concentré et repose sur une multitude d’acteurs, est néanmoins particulièrement structuré (Fédération Française de la Franchise, Salon de la Franchise, …) et l’information y circulera facilement.

Le tribunal, tenant compte par ailleurs de l’intérêt des franchisés, auquel est susceptible de nuire une trop grande publicité défavorable donnée à la marque Subway, notamment par un

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71

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possible mouvement de retrait de la clientèle, le tribunal dira que les demandes du Ministre sont disproportionnées; en conséquence, il le déboutera de ses demandes de publication du

jugement.

1/ Sur la demande d’exécution provisoire

Le tribunal n’ordonnera pas l’exécution provisoire, qui est sollicitée, ne l’estimant pas nécessaire et de surcroît incompatible avec la nature de l’affaire en ce qu’elle risque d’entraîner des conséquences excessives et en tout état de cause irréversibles, notamment dans l’hypothèse où les défenderesse feraient appel de la décision qui sera rendue.

J/ Sur les frais irrépétibles et les dépens
Monsieur le Ministre de l’Economie a dû, pour faire reconnaître ses droits, exposer des frais non compris dans les dépens; le tribunal condamnera in solidum Subway International B.V.

(C) et Subway Realty of BG (D), à lui payer la somme de 10.000 € au titre de

l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

K/ Sur les autres demandes

Sans qu’il apparaisse nécessaire de discuter les demandes et moyens autres, plus amples ou contraires que le tribunal considère comme inopérants ou mal fondés et qu’il rejettera comme tels, il sera statué dans les termes du dispositif ci-après.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal statuant publiquement, en premier ressort, par jugement contradictoire :

Dit recevable l’assignation de Monsieur le Ministre de l’Economie ; Dit recevables les fins de non-recevoir opposée par Subway International B.V. 4

J

(C) et Subway Realty of BG (D); Dit recevable l’action de Monsieur le Ministre de l’Economie à son encontre;

Sursoit à statuer sur la demande de communication des pièces formulée par les

-

-

intervenants volontaires ; Dit recevable l’action de Monsieur le Ministre de l’Economie relative aux contrats de

-

franchise conclus à compter du 6 août 2008;

Déboute Subway International B.V. (C) et Subway Realty of BG (D) de leur demande de voir prescrites les demandes du Ministre de l’Economie portant sur des contrats de franchise conclus avant le 16 novembre 2011; Dit que se trouve caractérisée la soumission ou la tentative de soumission, condition exigée pour son application par l’article 442-6 2° du code de commerce ; Dit que le concours de plusieurs clauses significativement déséquilibrées caractérise le déséquilibre significatif du contrat incriminé; Dit que le contrat incriminé ne comporte pas de clauses permettant de rééquilibrer ses clauses manifestement déséquilibrées ;

Déboute Monsieur le Ministre de l’Economie de ses demandes au titre des clauses relatives au paiement du droit d’entrée et à la formation articles 1 et 5.a. (ii);

Déboute Monsieur le Ministre de l’Economie de ses demandes au titre des clauses relatives au paiement des redevances, à la gestion du point de vente et aux pénalités et Intérêts de retard (articles 2, 5 et 11);

Déboute Monsieur le Ministre de l’Economie de ses demandes au titre des clauses relatives à la clause relative à la Responsabilité – Préambule (point 1) et articles 5.1,

11.c et 20;


72 N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 47 1 ERE CHAMBRE

Prononce la nullité de la clause relative aux horaires d’ouverture des points de vente (chapitre 7 du manuel d’exploitation) et enjoindra aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consislant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats ;

Prononce la nullité de l’article 5.c du contrat en ce qu’il ne stipule pas de montant maximum aux dépenses énoncées, et enjoint aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats ; Prononce la nullité des clauses relatives à l’absence d’exclusivité territoriale (article

11.1) et au droit illimité du franchiseur de faire concurrence (article 11.1) en ce qu’elles ne permettent pas au franchisé de préempter une nouvelle implantation décidée par Subway qui lui ferait territorialement concurrence et de pouvoir résilier dans une telle circonstance le contrat relatif à son actuel emplacement, et enjoindra aux sociélés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs

contrats ; Prononce la nullité de la stipulation de durée contenue dans l’article 7 du contrat en ce qu’elle est de vingt ans et enjoint aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats ;

Prononce la nullité de l’ensemble constitué par les clauses :

O clause insérée après le § 8.c ainsi libellée : « Après la seconde notification de manquement adressée conformément aux articles 8.a ou 8.b ci-dessus, tout manquement au cours des douze (12) mois suivants constituera un motif de résiliation définitive, sans possibilité pour vous de remédier à ce manquement ou même si vous y ramédiez effectivement. »>, Ő à l’article 8.a, parmi les causes légitimant la résiliation du contrat : « vous omettez de payer toute somme que vous nous devez ou que vous devez å nos Affiliés, au Fonds de publicité, au propriétaire des locaux du Restaurant en vertu du présent Contrat ou de tout Contrat de Franchise conclu avec nous ou toute somme pour laquelle notre responsabilité pourrait être engagée en raison de vos actes ou omissions '> ; Enjoint en conséquence aux sociétés SUBWAY INTERNATIONAL BV et SUBWAY

REALTY OF BG EURL de cesser les pratiques consistant, dans leurs contrats, à faire porter la stipulation « Après la seconde notification de manquement adressée conformément aux articles 8.a ou 8.b ci-dessus, tout manquement au cours des douze (12) mois suivants constituera un motif de résiliation définitiva, sans possibilité pour vous de remédier à ce manquement ou même si vous y remédiez effectivement » sur la cause ci-après : « vous omettez de payer toute somme que vous nous devez ou que vous devez à nos Affiliés, au Fonds de publicité, au propriétaire des locaux du Restaurant en vertu du présent Contrat ou de tout Contrat de Franchise conclu avec nous ou toute somme pour laquelle notre responsabilité pourrait être engagée en raison de vos actes ou omissions » ; Prononce la nullité de la stipulation : « [vous] devenez insolvable » contenue dans

l’article 8 du contrat et enjoint seaux sociétés Subway International BV et Subway Realty of BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner cette stipulation dans leurs contrats ; Prononce la nullité de la clause pénale de redevance de 175 € contenue dans l’article

8.d du contrat et enjoint aux sociétés Subway International BV et Subway Realty of BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner la stipulation susmentionnée dans leurs contrats ;

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73 N° RG: 2017005123 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU MARDI 13/10/2020 PAGE 48 1 ERE CHAMBRE

Prononce la nullité des clauses du contrat en ce qu’elles se référent au droit néerlandais (ou du Lichtenstein), ainsi que de la clause compromissoire en ce qu’elle prévoit que la procédure se déroulera dans un autre pays que la BG, et enjoint aux sociétés Subway International BV et Subway Realty of BG EURL de cesser les pratiques consistant à mentionner les stipulations susmentionnées dans leurs

contrats ; Condamne in solidum les sociétés Subway International BV et Subway Realty of

BG EURL au paiement d’une amende civile de cinq cent mille (500.000) euros;

Rejette les demandes des parties autres, plus amples ou contraires ;

Dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire de la présente décision; Condamne in solidum les sociétés Subway International B.V. (C) et Subway Realty of BG (D), à payer à Monsieur le Ministre de l’Economie la somme de

10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile; Condamne in solidum les sociétés Subway International B.V. (C) et Subway aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 1125,97 € dont

187,02 € de TVA.

En application des dispositions de l’article 871 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 mai 2020, en audience de plaidoirie, devant Monsieur BE BF; Madame AN AO; Monsieur AP AQ, les représentants des

parties ne s’y étant pas opposés. Un rapport oral a été présenté par Monsieur BE BF lors de cette audience.

Délibéré le 14 septembre 2020 par les mêmes juges. Dit que le présent jugement est prononcé par sa mise à disposition au greffe de ce tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La minute du jugement est signée par Monsieur BE BF président du délibéré et par Mme Lucilia Jamois, greffier.

Le président. Le greffier.

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Tribunal de commerce de Paris, 13 octobre 2020, n° 2017005123