Tribunal de commerce de Versailles, 4ème chambre, 29 juin 2018, n° 2015F01023

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. com. Versailles, 4e ch., 29 juin 2018, n° 2015F01023
Juridiction : Tribunal de commerce de Versailles
Numéro(s) : 2015F01023

Sur les parties

Texte intégral

MU

TRIBUNAL DE COMMERCE DE VERSAILLES

JUGEMENT DU 29 JUIN 2018 Décision contradictoire et en premier ressort 4e chambre

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

N° RG: 2015F01023 JONCTION N° RG : 2015F01070 Me X G DE LA STE ACE SAS

contre : B AS AT AG

DEMANDEURS

Me X G DE LA STE ACE SAS […] comparant par la SELARL BVK Avocats Associés 20 ave de | Europe 78000 VERSAILLES et par Me Reinhard Dammann du Cabinet CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP 1 Place d Astorg CS 60058 75377 PARIS CEDEX 08

Me X G STE AIRWELL FRANCE SAS […] comparant par la SELARL BVK Avocats Associés 20 ave de | Europe 78000 VERSAILLES et par Me Reinhard Dammann du Cabinet CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP 1 Place d Astorg CS 60058 75377 PARIS CEDEX 08

Me X G STE AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS […] comparant par la SELARL BVK Avocats Associés 20 ave de | Europe 78000 VERSAILLES et par Me Reinhard Dammann du Cabinet CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP 1 Place d Astorg CS 60058 75377 PARIS CEDEX 08

Me X G DE LA STE WESPER INDUSTRIE FRANCE SAS […] comparant par la SELARL BVK Avocats Associés 20 ave de | Europe 78000 VERSAILLES et par Me Reinhard Dammann du Cabinet CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP 1 Place d Astorg CS 60058 75377 PARIS CEDEX 08

INTERVENANT VOLONTAIRE

ASSOCIATION ACTION AIR […] comparant par Me Emmanuel DRAI 7 Av F Delano Roosevelt 75008 PARIS

À M

DEFENDEURS

B AS AT AG MAXIMILANSTRASSE 58 ALLEMAGNE comparant par Me Florine DE LA FOREST DIVONNE 3 A rue Petigny 78000 VERSAILLES et par Me Philippe HAMEAU et Me RUBELLE 40 Rue de Courcelles 75008 PARIS

SDE I J BV 11 A Van Heuven Goedhartiaan Parktoren AMSTERDAM (PAYS BAS) comparant par Me Bertrand ROL 13 rue Colbert 78000 VERSAILLES et par Me MONTERAN Thierry et Me SIMMONOT Marine 47 rue de Monceau 75008 PARIS

SDE I LDT 98 Yigal Alon Street TEL AVIV 6789141 (ISRAEL) comparant par Me Bertrand ROL 13 rue Colbert 78000 VERSAILLES et par Me MONTERAN Thierry et Me SIMMONOT Marine 47 rue de Monceau 75008 PARIS

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats à l’audience publique du 6 avril 2018 ont siégé: M. AF AG Président de Chambre, M. AH AI Juge, Mme AJ AK, Juge assistés de Me AL AM, Greffier d’audience ; la cloture des débats a été prononcée le même jour pour décision être rendue le 29 Juin 2018

Délibéré par les mêmes juges, le jugement a été prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 juin 2018, les parties en ayant été préalablement avisées à l’issue des débats dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile.

Minute signée par M. AF AG président de chambre et Me AL AM, greffier d’audience auquel la minute de la décision a été remise par le Juge signataire

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LES FAITS

La société de droit néerlandais I J BV, filiale de la société de droit israélien I Ltd, contrôlait en France la SAS ACE.

ACE détenait, outre la société de droit allemand AIRWELL Deutschland, 3 filiales sur le territoire français, les SAS AIRWELL Industrie France, WESPER Industrie France et AIRWELL France lesquelles fournissaient des systèmes de climatisation destinés aux particuliers (branche RAC) et aux professionnels (branche CAC). I J a pris la décision de se séparer de son activité CAC.

Pour ce faire, elle mandate en mai 2011 la Banque Rothschild pour trouver un repreneur pour cette activité puis, après l’échec de la banque d’affaires, elle prend contact en mars 2012, dans le même but, avec Oneida, un consultant spécialisé.

identifiée par Oneida, comme repreneur potentiel, la société de droit allemand BERLINEREUFT se montre intéressée par le rachat de l’activité CAC le 9 juillet 2012 mais souhaite s’adjoindre la société de droit allemand B AS AT AG pour mener l’opération, laquelle retournera fin août 2012 à Oneida un engagement de confidentialité.

Parallèlement, la SAS AIRWELL Résidential est créée à l’initiative de ELECTRA CONSUMER PRODUCTS filiale de I Ltd. Les sociétés du Groupe AIRWELL lui cèdent le 30 juillet 2012 son activité RAC moyennant un prix de cession de 7 446 000 €, cette entité n’entrera pas dans le périmètre des sociétés filiales de ACE.

Une première réunion regroupant les 2 acquéreurs allemands potentiels, le cabinet de consultants, les sociétés françaises AIRWELL et AIRWELL Deutschland s’est déroulée le 5 septembre 2012, et le 4 octobre suivant, B adresse à Oneida un projet de reprise du Groupe AIRWELL (filiales de ACE) en vue d’une restructuration avant la création d’une joint- venture avec F dans le but de constituer une unité européenne de traitement de l’air.

Le 19 octobre 2012, B adresse à Oneida une lettre d’intention de reprise, par une filiale ad hoc, moyennant un prix symbolique de 1 € et la constitution, par les actionnaires de AIRWELL, d’une trésorerie évaluée entre 4 et 7 000 000 €. Le 23 novembre 2012, le fonds de pension américain AIAC envoyait également au cabinet de consultants une lettre d’intention de reprise qui, par une nouvelle lettre du 3 mai 2013, la confirmait sous réserve que AIRWELL France dispose d’une trésorerie de 13 000 000 €.

Les 6 et 7 février 2013, B et F ont visité les 2 sites de production de AIRWELL. En mars et avril 2013, B et I J entreprennent des discussions sur le périmètre et les modalités économiques du projet d’acquisition.

Le 6 mai 2013, I J et B ont régularisé une promesse d’achat aux termes de laquelle B s’engageait à appréhender, par le biais d’une structure allemande nommée FS BETEILIGUNGEN, la totalité des actions du capital de ACE sous réserve que les sociétés acquises soient dotées d’une trésorerie disponible de 8 500 000 € qui a été constituée à hauteur de 5 000 000 €, grâce à la vente en « leaseback » d’un immeuble par AIRWELL à I J.

Le 29 mai 2013, un contrat de cession a été conclu et les actions transférées le 11 juin 2013 à FS BETEILIGUNGEN qui revendait l’ensemble, le 29 du même mois à la société de droit allemand AW Industries.

Les sociétés ACE, AIRWELL Industrie France, WESPER Industrie France et AIRWELL France ont bénéficié d’un plan de redressement judiciaire le 1° avril 2014 transformé en liquidation judiciaire le 15 juillet 2014.

Estimant que les sociétés I J, I Ltd et B sont directement responsables de la déconfiture de ACE et de ses filiales Maître H X ès-qualités de G (ci-après le G) a introduit la présente instance.

LA PROCEDURE

Instance n° 2015F01023

Par acte en date du 29 octobre 2015, Maître H X ès-qualités de G des SAS ACE, SAS AIRWELL France, SAS AIRWELL Industrie France, SAS WESPER Industrie France a fait donner assignation à B AS UNTERNEHMENSBETEILIGUGEN AG d’avoir à comparaître le 15 janvier 2016 devant le tribunal de céans afin de l’entendre :

Vu les articles 1382 (ancien) et suivants du code civil, l’article 700 du code de procédure civile,

o Condamner la société B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société ACE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’ACE SAS, soit 48 492 511,70 € à parfaire, à titre de dommages-et-intérêts du préjudice causé aux créanciers d’ACE SAS,

o Condamner B AS AT AG à payer à Maitre H X en sa qualité de G de la société Airwell France SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’Airwell France SAS, soit 33 569 800 € à parfaire, à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers d’Airwell France SAS,

o Condamner B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société Airwell Industrie France SAS

la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’Airwell Industrie France SAS, soit 15 264 916,75 € à parfaire, à titre de dommages-et-intérêts du préjudice causé aux créanciers d’Airwell Industrie France SAS,

o Condamner B AS AT AG à payer à Maître H X, en sa qualité de G de la société Wesper Industrie France SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif de Wesper Industrie France SAS, soit 15 784 875,75 € à parfaire, à titre de dommages-et-intérêts du préjudice causé aux créanciers de Wesper Industrie France SAS,

o Ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 (ancien) du code civil,

o Condamner B AS AT AG à verser à Maître H X ès-qualités de G des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS les sommes engagées pour les besoins de la présente instance, soit 15 000 € à parfaire, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

o Condamner B AS AT AG aux entiers dépens,

o Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Instance n° 2015F01070

Par actes en date du 30 septembre 2015, Maître H X ès-qualités de G des SAS ACE, SAS AIRWELL France, SAS AIRWELL Industrie France, SAS WESPER Industrie France a fait donner assignation aux sociétés I Ltd et I J BV d’avoir à comparaître le 15 janvier 2016 devant le tribunal de céans afin de l’entendre :

Vu les articles 1382 (ancien) et suivants du code civil, l’article 700 du code de procédure civile,

o Condamner solidairement les sociétés I Ltd et I J BV à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société ACE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’ACE SAS, soit 48 492 511,70 € à parfaire, à titre de dommages-et-intérêts du préjudice causé aux créanciers d’ACE SAS,

o Condamner solidairement les sociétés I Ltd et I J BV à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société Airwell France SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’Airwell France SAS, soit 33 569 800 € à parfaire, à titre de dommages-et-intérêts du préjudice causé aux créanciers d’Airwell France SAS,

o Condamner solidairement les sociétés I Ltd et I J BV à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société Airwell Industrie France SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’Airwell Industrie France SAS, soit 15 264 916,75 € à parfaire, à titre de dommages-et-intérêts du préjudice causé aux créanciers d’Airwell Industrie France SAS,

o Condamner solidairement les sociétés I Ltd et I J BV à payer à Maître H X, en sa qualité de G de la société Wesper Industrie France SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif de Wesper Industrie France SAS, soit 15 784 875,75 € à parfaire, à titre de dommages-et-intérêts du préjudice causé aux

créanciers de Wesper Industrie France SAS, A PL

o Ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 (ancien) du code civil,

o Condamner solidairement les sociétés I Ltd et I J BV à verser à Maître H X ès-qualités de G des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS les sommes engagées pour les besoins de la présente instance, soit 62 183,52 € à parfaire, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

o Condamner solidairement les sociétés I Ltd et I J BV aux entiers dépens,

o Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par ordonnance du 28 octobre 2016, Monsieur le Président de la 4°" chambre a prononcé la jonction des instances n° 2015F01023 et 2015F070.

Par conclusions remises à l’audience du 9 février 2018 l’association ACTION AIR demandait au tribunal de : -_ Vules articles 329 et suivants du code de procédure civile, – __Vule principe de primauté du droit européen, – Vu les principes de droit dégagés par l’arrêt Simenthal et les pouvoirs qu’il confère à tout juge national rendu par la CJCE le 9 mars 1978, -__Vule principe de l’estoppel – Vu l’objectif constitutionnel de la bonne administration de la justice – Vu l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme et la jurisprudence rendue pour son application, – Vu l’article 1240 du code civil et la jurisprudence rendue en son application,

— Déclarer l’association ACTION AIR recevable en son intervention volontaire principale ;

— _ Se déclarer compétent pour connaître des faits et demandes portés par l’intervention volontaire principale d’ACTION AIR ;

— Juger que les agissements d’I HOLDING Ltd, d’I J B.V et B caractérisent une légèreté blâmable constitutive d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil ;

— Juger que cette faute est directement responsable de l’ouverture du redressement judiciaire ouvert le 1° avril 2014 à l’encontre des sociétés ACE SAS, AIRWELL FRANCE SAS, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS composant l’activité « professionnelle » du groupe AIRWELL et du licenciement de leurs 185 salariés,

— __ Condamner solidairement I HOLDING Ltd et I J B.V au paiement de la somme de 13 600 € par salarié requérant en dédommagement du préjudice financier et moral subi ;

k PO

— Ordonner la publication de la décision à venir aux frais avancés de I HOLDING Ltd I J B.V et B dans 4 journaux français et/ ou étrangers du choix des salariés requérants ;

— Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans constitution de garantie ;

— _Condamner solidairement I HOLDING Ltd, I J B.V et B au paiement de la somme de 100 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

Par conclusions aux fins de sursis à statuer déposées à l’audience du 9 février 2018, la société I Ltd et la société I J BV demandaient au tribunal de :

— _Vules articles 377 et suivants du code de procédure civile

— Vu la plainte déposée par les sociétés I J BV et I Ltd

— Surseoir à statuer dans l’attente de la procédure pénale

Par conclusions en demande n°4 déposées lors de l’audience du 9 février 2018 Maître H X ès-qualités de G des SAS ACE, SAS AIRWELL France, SAS AIRWELL Industrie France, SAS WESPER Industrie France demandait au tribunal de :

Vu les articles 72, 74, 122, 378, 698, et 700 du code de procédure civile, Vu le principe fraus omnia corrumpit, Vu les articles 1382 et suivants (anciens), devenus les articles 1240 et suivants du code civil,

— Atitre liminaire :

— Rejeter l’exception d’incompétence soulevée par I Ltd et I J BV à l’égard de Maître H X è qualité,

— Rejeter la demande de sursis à statuer formulée par I Ltd et I J BV,

— Rejeter la demande de sursis à statuer formulée par B AS AT AG

A titre principal, – Juger que les sociétés I LTD, I J BV et B AS AT AG ont commis des fautes délictuelles,

— Juger que les fautes délictuelles commises par les sociétés I Ltd, I J BV et B AS AT AG ont causé un préjudice aux créanciers des sociétés ACE SAS, à hauteur de 21 037 003,90 € à parfaire, AIRWELL FRANCE SAS à hauteur de W 0007 736,91 € à parfaire, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS à hauteur de 18 413 819,44 € à parfaire et WESPER industries FRANCE SAS à hauteur de 18 432 082,17 € à parfaire,

— _Condamner en conséquence in solidum les sociétés I Ltd, I J BV, B AS AT AG à payer à Maître H X en

LP

sa qualité de G de la société ACE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’ACE SAS telle qu’actualisée en juin 2016 soit 21 037 003,90 € à parfaire, à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers d’ACE SAS,

— _Condamner en conséquence in solidum les sociétés I Ltd, I J BV et B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société AIRWELL FRANCE SAS la somme correspondante à l’insuffisance d’actif d’AIRWELL FRANCE SAS telle qu’actualisée en juin 2016 soit W 007 736,91 € à parfaire à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers d’AIRWELL FRANCE SAS,

— __ Condamner en conséquence in solidum les sociétés I Ltd, I J BV, et B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS, telle qu’actualisée en juin 2016, soit 18 413 819,44 € à parfaire à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers D’AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS,

— _ Condamner en conséquence les sociétés I Ltd, I J BV, et B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif de WESPER INDUSTRIES, telle qu’actualisée en juin 2016, soit 18 432 082,17 € à parfaire à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers de WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS,

A titre subsidiaire ; – Juger que les sociétés I LTD, I J BV et B AS AT AG ont commis des fautes délictuelles,

— Juger que les fautes délictuelles commises par les sociétés I Ltd, I J BV et B AS AT AG ont causé un préjudice aux créanciers des sociétés ACE SAS, à hauteur de 2 898 502,54€ à parfaire, AIRWELL FRANCE SAS à hauteur de 17 047 440,65 € à parfaire, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS à hauteur de 14 017 360,54 € à parfaire et WESPER industries FRANCE SAS à hauteur de 8 268 269,82 € à parfaire,

— _Condamner en conséquence in solidum les sociétés I Ltd, I J BV, B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société ACE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’ACE SAS diminuée du montant de la dette intragroupe soit 2 898 502,54 € à parfaire, à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers d’ACE SAS,

— _ Condamner en conséquence in solidum les sociétés I Ltd, I J BV et B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société AIRWELL FRANCE SAS la somme correspondante à l’insuffisance d’actif d’AIRWELL FRANCE SAS diminuée du montant de la dette intragroupe soit17 047 440,65 € à parfaire à titre de dommages et intérêts

ba

10

du préjudice causé aux créanciers d’AIRWELL FRANCE SAS,

— __ Condamner en conséquence in solidum les sociétés I Ltd, I J BV, et B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif d’AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS diminuée du montant de la dette intragroupe, soit 14 017 360,54 € à parfaire à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers D’AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS,

— _Condamner en conséquence les sociétés I Ltd, I J BV, et B AS AT AG à payer à Maître H X en sa qualité de G de la société WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS la somme correspondant à l’insuffisance d’actif de WESPER INDUSTRIES diminuée du montant de la dette intragroupe, soit 8 286 269,82 € à parfaire à titre de dommages et intérêts du préjudice causé aux créanciers de WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS,

— __ Juger que les fautes délictuelles commises par les sociétés I Ltd, I J BV, et B AS AT AG ont causé un préjudice aux créanciers des sociétés ACE SAS, AIRWELL FRANCE SAS, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS et WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS,

— _ Ordonner une mesure d’expertise aux fins de déterminer l’aggravation de l’insuffisance d’actif entre le 31 juillet 2012 et le 1°' avril 2014 d’une part et entre le 11 juin 2013 et le 1° avril 2014 d’autre part,

Sur la demande reconventionnelle formée contre Maître X ès-qualités ik!

— Débouter les sociétés I Ltd et I J BV de leur demande de condamnation de Maître X ès-qualités au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— Débouter la société B AS AT AG de sa demande de condamnation de Maître X ES à lui verser des dommages et intérêts pour procédure abusive,

Sur la demande reconventionnelle formée contre Maître X à titre personnel, – Constater que Maître X n’a pas été mis en cause à titre personnel dans la présente instance, – Déclarer les sociétés I Ltd et I J BV irrecevables en leurs demandes,

En tout état de cause : – Ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil,

— _ Condamner in solidum les sociétés I Ltd, I J BV, et B AS AT AG à verser à Maître H L ès-qualités de G des sociétés ACE SAS, AIRWELL FRANCE SAS, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS, WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS les sommes engagées pour les

A Vo

11

besoins de la présente instance, soit 100 000 € à parfaire, pour chacune des sociétés AIRWELL sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— __ Condamner in solidum les sociétés I Ltd, I J BV et B AS AT AG aux entiers dépens,

— Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

Par conclusions récapitulatives en défense soutenues lors de l’audience du 6 avril 2018, les sociétés I Ltd et I J BV ont demandé au tribunal de :

Vu l’article 1382 du code civil dans rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ; Vu l’article 1240 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ; Vu les articles 9,122, et 698 du code de procédure civile ;

Vu les articles 325 et 329 du code de procédure civile ;

Vu l’article L.622-20 du code de commerce applicable par renvoi de l’article L.641-4 du code de commerce ;

Vu l’arrêt de la cour d’appel de Versailles du 28 novembre 2017,

Sur les demandes de Maître X A titre principal : – Dire et juger que Maître X ès-qualités n’agit pas pour l’intérêt collectif des créanciers,

— Déclarer Maître X ès-qualités irrecevable en ses demandes,

A titre subsidiaire : – Dire et juger que les fautes reprochées aux sociétés I J BV et I Ltd, à savoir l’obligation de déclarer la cessation des paiements et de recourir à la procédure de licenciement économique n’incombent pas aux actionnaires ;

— Dire et juger que ces fautes ne peuvent être reprochées aux sociétés I J BV et I Ltd, faute pour ces dernières d’être dirigeants de la société ACE SAS ;

— Par conséquent débouter Maître X de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd;

A titre plus subsidiaire : – Dire et juger que Maître X ne démontre pas que la société ACE SAS était en état de cessation des paiements à la date du 31 juillet 2012;

— Dire et juger par conséquent qu’il ne peut être reproché aux sociétés I Ltd et I Ltd de ne pas avoir déclaré la cessation des paiements au 31 juillet 2012 ;

— Par conséquent débouter Maître X ès-qualités de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd ;

12

A titre encore plus subsidiaire :

Dire et juger que Maître X ne démontre pas l’intention frauduleuse alléguée à l’égard des sociétés I J BV et I Ltd,

Par conséquent débouter Maître X ès-qualités de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des sociétés I J BV et I ;

A titre encore plus infiniment subsidiaire :

Dire et juger que le lien de causalité entre le préjudice invoqué et les fautes alléguées n’est pas démontré, ni avéré ;

Par conséquent débouter Maître X ès-qualités de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd ;

À titre ultimement subsidiaire

Débouter Maître X de sa demande d’expertise judiciaire ;

Dire et juger que Maître X ne rapporte pas la preuve du préjudice qu’il entend voir mis à la charge des sociétés I J BV et I Ltd ;

Débouter Maître X ès-qualités de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd ;

En tout état de cause :

Débouter Maître X ès-qualités de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd ;

Condamner Maître X ès-qualités à payer à la société I Ltd la somme de 1 000 000 € à titre de dommages et intérêts et à la société I J BV la somme de 300 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par l’introduction à leur encontre d’une procédure abusive :

Condamner Maître X, à titre personnel, à payer à la société I Ltd la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts et à la société I J BV la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la procédure abusivement introduite à leur encontre ;

Condamner solidairement Maître X ès-qualités et Maître X à titre personnel à payer à la société I Ltd la somme de 100 000 € et à la société I J BV la somme de 100 000 € au titre des frais irrépétibles ;

Le condamner aux entiers dépens ;

Sur les demandes de l’association ACTION AIR

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— Dire et juger que l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt de la cour d’appel de Versailles du 29 novembre 2017 fait obstacle aux demandes formées par l’association ACTION AIR à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd ;

— _ Dire et juger que le principe de concentration des moyens fait obstacle aux demandes formées par l’association ACTION AIR à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd;

— Déclarer irrecevable l’association ACTION AIR en ses demandes à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd ;

— Débouter l’association ACTION AIR de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des sociétés I J BV et I Ltd ;

— Condamner l’association ACTION AIR à payer aux sociétés I J BV et I Ltd la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Par conclusions en défense et reconventionnelles soutenues lors de l’audience du 6 avril 2018 la société B AS AT AG demandait au tribunal de :

— __Vules articles 9 et 146 du code de procédure civile,

— Vules articles L.631-1 et L.631-4 du code de commerce

— Vu l’article 1240 (anc. Art 1382 du code civil)

— Surseoir à statuer dans l’attente de la décision qui sera rendue dans l’instance fondée eur l’article L.651-2 du code de commerce pendante devant le Tribunal de Commerce de Versailles opposant Maître H X en sa qualité de G des sociétés ACE SAS, AIRWELL FRANCE SAS, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS, et WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS à Monsieur Z,

— Dire que l’article 146 du code de procédure civile s’oppose à ce qu’une mesure d’expertise soit ordonnée ;

— Débouter Maître H X en sa qualité de G des sociétés ACE SAS, AIRWELL FRANCE SAS, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS, et WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS de l’ensemble de ses prétentions à l’encontre de la société B AS AT GmbH

— _ Condamner reconventionnellement Maître H X en sa qualité de G des sociétés ACE SAS, AIRWELL FRANCE SAS, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS, et WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS à payer à la société B AS AT GmbH la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

— _ Condamner Maître H X en sa qualité de G des sociétés ACE SAS, AIRWELL FRANCE SAS, AIRWELL INDUSTRIE FRANCE SAS, et WESPER INDUSTRIES FRANCE SAS à payer à B AS AT

JO

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GmbH la somme de 150 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

Par conclusions récapitulatives contre ACTION AIR soutenues lors de l’audience du 6 avril 2018 la société B AS AT AG demandait au tribunal de :

— Vu que nul en FRANCE ne plaide par procureur,

— __Vules articles 31,73 et suivants et L.1471-1 du Code du travail,

Vu les arrêts rendus par la cour d’appel de Versailles les 4 juillet 2017 et 28 novembre 2017 (RG n° 17/00438),

In limine litis – Se déclarer territorialement incompétent pour entendre la demande d’intervention volontaire formée par l’Association Action Air à l’encontre de la société B AS AT GmbH et envoyer l’association Action Air à mieux se pourvoir devant les juridictions allemandes compétentes ;

— Subsidiairement se déclarer matériellement incompétent pour entendre la demande d’intervention volontaire formée par l’Association Action Air à l’encontre de la société B AS AT GmbH et renvoyer l’Association Action Air à mieux se pourvoir devant des juridictions spécialisées compétentes pour les litiges découlant des relations de travail individuelles :

— Dire nulle l’intervention volontaire de l’Association Action Air en l’absence de désignation des salariés représentés par l’intervenante ;

Sur les fins de non-recevoir, – Dire l’intervention volontaire de l’Association Action Air irrecevable pour défaut de qualité et d’intérêt à agir ; – Dire prescrites les demandes de l’Association Action Air :

Sur les demandes au fond – Prononcer la mise hors de cause de la société B AS AT GmbH ;

— _ Subsidiairement débouter l’Association Action Air de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la société B AS AT GmbH :

En tout état de cause, – Condamner l’Association Action Air à payer à la société B AS AT GmbH la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Les parties ont été régulièrement convoquées pour être entendues le 9 février 2018 devant le tribunal constitué en formation collégiale. Lors de l’audience le tribunal, au vu de la production

À pa

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tardive des conclusions de Maître X ès-qualités a renvoyé l’affaire au 6 avril, précisant que les conclusions des défendeurs était fixée au 9 mars 2018 et que tout pièce ou conclusion parvenues après le 23 mars 2018 serait écartée des débats.

Les parties se sont à nouveau présentées devant le tribunal le 6 avril pour être entendues en leurs plaidoiries. Toutes se sont présentées et ont été entendues. A l’issue de l’audience le tribunal a indiqué la date de mise à disposition du jugement au greffe du tribunal, clôturé les débats et mis l’affaire à son délibéré.

MOYENS et ARGUMENTS des PARTIES

Maître H X ès-qualités expose que :

Sur les demandes de sursis à statuer

La demande de sursis à statuer formée par B, au motif qu’une éventuelle condamnation de M. Z dans une autre instance pendante devant ce tribunal, sera rejetée dans la mesure où les condamnations qui pourraient être prononcées à son égard ne pourront combler l’insuffisance d’actif. De jurisprudence constante le sursis à statuer ne peut être accordé.

En ce qui concerne la demande de sursis à statuer formée par les sociétés I au motif d’une plainte contre X pour subornation de témoins, il ne s’agit que d’une manœuvre. Elle ne repose que sur des dénonciations calomnieuses. Cette demande doit être écartée.

Les sociétés I et B ont délibérément trompé les créanciers d’AIRWELL France en organisant une cession de son activité déficitaire dans des conditions notoirement insuffisantes pour garantir le redressement de cette entreprise.

B a fait croire qu’elle s’alliait à F dont le partenariat s’avérait essentiel pour conduire la restructuration indispensable à la poursuite des activités de AIRWELL en lui apportant, notamment, un chiffre d’affaires complémentaire, alors qu’il n’en était rien et que l’attitude postérieure de B démontre son comportement déloyal.

Après la visite des sites de fabrication de AIRWELL, F n’apparaîtra plus dans les négociations ce qui prouve qu’elle ne manifestait aucun intérêt réel à la conduite de ce projet de reprise. Or B ne disposait ni de la surface financière ni de la compétence industrielle indispensables pour poursuivre l’activité de AIRWELL.

I J, trop pressée de se séparer d’une activité lourdement déficitaire, ne s’est jamais préoccupée de vérifier la réalité de l’implication de F dans la reprise de AIRWELL.

I J a récupéré, par l’intermédiaire d’une filiale, l’activité bénéficiaire de AIRWELL alors qu’elle aurait dû encourager sa filiale AIRWELL à solliciter une procédure collective amiable à défaut d’entreprendre elle-même les actions de retournement opportunes en vue

d’une poursuite d’activité. #

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B, quant à elle, n’a jamais eu l’intention de poursuivre l’activité d’AIRWELL dans la mesure où elle l’a précipitamment revendue à des personnes physiques sans aucune surface financière dont l’unique objectif consistait à capter sa trésorerie.

I a mis en place une opération frauduleuse :

«+ I a violé ses obligations qui étaient de déposer le bilan, d’utiliser la procédure de licenciements économiques pour se délier de son personnel.

e I avait une intention frauduleuse: elle connaissait nécessairement les conséquences néfastes de la vente d’AIRWELL à B en l’absence de partenariat avec F. La documentation contractuelle ne prévoyait aucune affectation des liquidités d’AIRWELL aux opérations de restructuration. I savait nécessairement que B n’avait aucune surface financière. L’intention frauduleuse est donc parfaitement caractérisée dans la mesure où I savait que les créanciers ne seraient pas payés, que les salariés seraient licenciés dans le cadre d’une procédure collective inévitablement ouverte contre le repreneur.

B s’est associée à l’opération frauduleuse

+ La thèse relative à la démission des dirigeants ne résiste pas à la chronologie des faits. Les démissions ne sont reçues par B que le jour de la cession à M. M Y.

+ B avait envisagé de remplacer la direction d’AIRWELL

+ B confond les mandats sociaux et les rôles opérationnels. Les cadres qui ont démissionné de leurs mandats sociaux étaient toujours à leur poste opérationnel en 2014.

+ Le départ de M. C, conseiller de la direction est postérieur à la revente.

La courte durée de la participation de B ne l’exonère pas de sa responsabilité mais renforce le caractère frauduleux de l’opération.

Les sociétés I répondent que :

Les sociétés I Ltd et I J BV n’ont violé aucune de leurs obligations légales. N’étant pas dirigeantes des sociétés AIRWELL il ne leur appartenait pas de les déclarer en cessation de paiement

Maître X n’apporte aucune preuve au soutien de ses demandes. |! doit démontrer que l’actif disponible de la société ACE SAS ne lui permettait pas de faire face à son passif exigible au 31 juillet 2012.

De même il n’apporte pas la preuve que les sociétés I et I J BV ont violé leur obligation de recourir à une procédure de licenciement économique en cédant les titres de la société ACE SAS à B.

Il n’apporte pas la preuve d’une intention frauduleuse des sociétés I Ltd et I J BV. La preuve de la connaissance d’un partenariat mort-né n’est pas apportée, l’absence

M

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d’affectation de la trésorerie laissée par I J BV aux opérations de restructuration n’est pas apportée. La présentation faite par Maître X de la société B est parcellaire, celle-ci avait déjà mené de nombreuses opérations de restructuration et était parfaitement capable de restructurer AIRWELL.

Les sociétés I ne peuvent pas répondre d’un passif causé par un tiers. Le quantum du passif n’est pas justifié, s’agissant d’une part d’un passif intragroupe, de créances non admises et d’une créance CICE.

A la différence du fonds de pension, qui n’avait jamais clairement expliqué ses objectifs ni sollicité une réunion d’information, B a pris un engagement ferme construit à partir d’un schéma associant F au sein d’une structure qui regrouperait ultérieurement les 2 prétendants.

Elles n’avaient donc aucune raison de s’étonner que F ne soit pas partie au contrat de cession compte tenu de la chronologie des opérations décrites. Elles n’ont jamais eu connaissance d’un quelconque abandon du projet par F.

Quand bien même la présence de F dans le projet pouvait être rassurante, il n’en demeure pas moins qu’un associé est libre de céder ses droits sociaux au cessionnaire de son choix.

Maître X n’apporte pas la preuve des éléments de droit et de faits sur lesquels reposent ses prétentions. La reprise d’AIRWELL par B a échoué, mais elle n’a pas pour origine une faute qu’aurait commise le cédant. Maître X se contente de procéder par affirmations et n’apporte la preuve d’aucune de celles-ci.

I J BV avait entière liberté pour choisir son cessionnaire sans s’exposer à la mise en jeu de sa responsabilité. La jurisprudence apportée par Maître X ne s’applique pas en l’espèce, soit que l’action ait été intentée par des salariés, soit que les fautes reprochées ne soient pas celles alléguées par Maître X. Ses demandes ne sont pas fondées en droit.

S’agissant de I Ltd holding du groupe I Litd, tiers à la cession critiquée, elle ne peut être que mise hors de cause, puisqu’elle était tiers à l’opération.

Il n’y a aucune preuve que B ait joué le rôle d’intermédiaire. Aucune preuve n’est apportée qu’I connaissait B, ni qu’elle connaissait le repreneur final, M. D, ni que B ait été rémunéré dans son rôle d’intermédiaire.

Aucune preuve d’un montage frauduleux n’est apportée par Maître X, non plus que de la connaissance par I J BV du caractère « mort-né » de la restructuration.

Les faits invoqués sont tous extérieurs à la société I Ltd et à I J BV. A la date

de signature de l’acte de cession en mai 2013, rien ne pouvait laisser supposer à I que le projet qui avait été travaillé depuis juillet 2012 ne serait pas mené à bien.

EN

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I J BV n’a pas intentionnellement trompé les créanciers du groupe AIRWELL mais a été victime de la situation.

Aucun indice ne laissait supposer que F ne participerait pas au projet de reprise. De toute façon ces discussions entre B et BERLINERLUPFT étaient étrangères à I. Un projet sérieux existait, mené par B et F.

Les conditions financières de la cession ont été librement négociées et acceptées par B. Lors de la cession I J BV a consenti de gros efforts :

— Cession de la trésorerie pour 1 €

— __ Contrat d’assistance (faculté non utilisée)

— Réaménagement du prêt après un différé de paiement de 30 mois.

— Vente de l’immeuble de TILLIERES, avec une franchise de loyers de deux ans.

I Ltd était dans l’ignorance de la revente d''AIRWELL par B.

La thèse de Maître X repose sur des postulats erronés :

— La scission de l’activité CAC / RAC était une nécessité industrielle

— Le projet F/ B était sérieux et réfléchi

— Le choix de B / AIAC était évident : aucune offre n’était parvenue à I J BV, seulement une iettre d’intention.

— Le reproche fait de céder en se débarrassant du groupe AIRWELL est peu crédible au vu de l’ensemble des efforts consentis par I J BV.

— I J BV a soutenu AIRWELL et n’a fait preuve d’aucune déloyauté.

I J BV justifie de toutes les diligences et des efforts pour parvenir à une solution ordonnée pour AIRWELL, compte tenu de sa situation économique.

Il n’existe aucun lien de causalité entre le préjudice invoqué et la faute alléguée à l’encontre des sociétés I Ltd et I J BV.

Le quantum du préjudice allégué, dont il conviendrait de déduite les créances intragroupes et les contentieux en cours non tranchés à ce jour ne saurait dépasser 23 649 046,61 €.

Le G, ès-qualités, qui n’a aucun motif sérieux pour mener une instance à leur encontre, doit être condamné pour procédure abusive. |! doit également être personnellement condamné pour avoir réclamé des sommes grossièrement surévaluées.

B répond que :

Elle demande au tribunal de surseoir à statuer en l’attente du jugement à rendre par le présent tribunal concernant l’instance menée par Maître X ès-qualités à l’encontre de M. E et dans l’attente de l’issue de la plainte pénale déposée contre X pour subornation de témoin.

Les conditions de la responsabilité délictuelle de B ne sont pas réunies :

À ba

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A) La fraude n’est pas caractérisée : la cession d’AIRWELL n’est pas fautive. Le droit de propriété est un droit absolu. Le cédant ne doit de garantie qu’au cessionnaire et dans la stricte mesure de ce que la loi prévoit, ou des engagements qu’il a pu souscrire volontairement.

B) B n’a pas violé l’obligation de déclarer l’état de cessation des paiements, elle n’avait pas qualité pour déposer le bilan avant qu’AIRWELL lui soit cédée. La cessation des paiements de chacune des sociétés n’est pas démontrée. La date de cessation de paiement a été fixée au 10 mars 2014 dans le cadre de la procédure collective, soit bien postérieurement à la cession d’AIRWELL par B.

C) Maître X reproche ensuite à B de n’avoir procédé à aucun licenciement, cependant B n’a eu à aucun moment la qualité d’employeur.

D) L’intention frauduleuse n’existe pas. Aucune faute de gestion ne peut être reprochée à B, et il y a une absence complète de profit personnel. Le rapport des commissaires aux comptes d’I prouve qu’aucune somme n’a été versée à B.

E) L’absence de surface financière de B ne prouve aucune intention frauduleuse, jamais B ne s’est présentée comme un groupe financier.

B ne s’est associée à aucune fraude. A) Aucune collusion frauduleuse n’existe entre B et I Ltd. Maître X ne prouve rien et les faits montrent au contraire que, faute d’intérêt B n’avait aucune raison d’accepter le rôle d’intermédiaire qui lui prête le G.

B) Le projet de partenariat avec F était réel. Toutes les parties prenantes savaient que le partenariat avec F n’était qu’un projet. B n’avait pris aucun engagement sur la participation de F. L’appui de l’équipe de direction d’AIRWELL était essentiel. Leur démission rendait impossible la mise en place des mesures de restructuration et manifestait leur manque d’adhésion au projet.

C) Le projet de B a été remis en cause, car F tardait à s’engager. Ce n’est qu’après s’être engagée auprès d’I aux termes de la promesse d’achat du 6 mai 2013 que B a conçu des doutes sur la volonté de F de s’engager.

D) La revente à M. D n’est pas fautive : AIRWELL n’a pas été revendue à des hommes de paille. M. D avait l’avantage de déjà connaître AIRWELL puisque B l’avait impliqué avant la cession afin qu’il se familiarise avec le dossier. B n’a pas agi comme intermédiaire des propriétaires ultérieurs.

En ce qui concerne le préjudice allégué : A) Aucun élément produit par le G ne permet de rapporter la preuve de l’existence de l’insuffisance d’actif alléguée. Son montant est grossièrement surévalué.

FM

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Maître X fait état du passif déclaré et non du passif admis, ce qui est très différent ;

B) L’insuffisance d’actif ne peut inclure les créances nées postérieurement à l’ouverture de la procédure collective du débiteur.

Une mesure d’expertise ne peut être ordonnée : c’est au G d’apporter la preuve de ses dires et une mesure d’instruction ne peut pallier à sa carence.

Aucun lien de causalité ne peut être établi entre les fautes alléguées et le préjudice prétendu, la situation d’AIRWELL était déjà compromise et n’a pas été aggravée par B. Celle-ci n’a été actionnaire que pendant 17 jours.

La cession à B n’a pu créer aucune apparence trompeuse de solvabilité. Les éventuelles fautes de gestion commises par les dirigeants sont la cause exclusive de l’insuffisance d''actif.

Des facteurs extérieurs peuvent également expliquer la faillite d’AIRWELL.

La procédure engagée par le G est abusive, car son action est gravement infondée, le préjudice est grossièrement surévalué, et de nombreuses accusations mensongères et sans preuve ont été portées. Des pièces tronquées ont été produites, un stratagème procédural déloyal a été monté. L’octroi de dommages et intérêts s’impose.

L’ASSOCIATION AIR expose que :

Elle a pour objet la représentation et la défense des anciens salariés du groupe AIRWELL., à ce titre elle intervient volontairement à l’instance en vue d’obtenir la condamnation des sociétés I et de B en réparation du préjudice moral et financier subi par chacun de ses membres.

L’actionnaire majoritaire d’AIRWELL a commis des fautes engageant sa responsabilité dans la mesure où toutes ses décisions ont été prises dans son seul intérêt. En cédant sa filiale française à des aventuriers totalement incapables de redresser l’entreprise elle s’est totalement désintéresser du sort de l’entreprise et de ses salariés.

Dans le même temps, elle se revendait l’activité profitable privant définitivement AIRWELL de toute chance de survie.

B réplique que :

Le Tribunal de Commerce de Versailles est incompétent territorialement pour traiter des demandes de l’Association Action Air au vu des règles de compétences européennes. L’action intentée vise à détourner les règles de compétence du Règlement européen.

Le fondement de la demande de l’Association Action Air est contractuel (dans le cadre d’une relation de travail) et non délictuel, comme c’est le cas de l’action de Maître X contre B AS AT AG : la règle de compétence spéciale du Règlement européen n’est donc pas applicable et c’est la règle de droit commun qui

s’applique. Le tribunal du siège social du défendeur est donc compétent. À

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En l’absence d’une relation de travail entre les salariés de AIRWELL et B, les règles énoncées à la section 5 du règlement européen ne trouvent pas plus à s’appliquer.

Si la compétence rationae loci du Tribunal de Commerce de Versailles était retenue, lincompétence matérielle serait relevée : la cause et l’objet de l’action introduite par l’Association Action Air trouve son origine dans les contrats de travail : c’est le conseil de prud’hommes qui est compétent.

Par ailleurs, en vertu du principe « nul ne plaide par procureur », faute d’indiquer le nom des représentés, l’action de l’Association Action Air est nulle.

De surcroit les demandes de Association Action Air sont irrecevables, faute de droit à agir, en l’absence de défense d’intérêts collectifs et du fait que cette action ne s’inscrive pas dans son objet social. L’Association Action Air ne justifie d’aucun mandat spécial.

Les demandes des salariés prétendument représentés sont prescrites au vu des délais énoncés dans le code du travail.

B AS AT AG n’a pris aucune décision de gestion à l’égard d’AIRWELL et n’a tiré aucun profit de la cession du groupe. Elle n’est pas concernée par les relations entre les salariés et leur employeur.

Les préjudices invoqués ne sont pas indemnisables, l’Association Action Air n’apporte aucune preuve de la réalité des préjudices et il n’est pas possible d’indemniser un préjudice de façon forfaitaire.

I Ltd et I J BV répliquent que :

L’incompétence des juridictions de Versailles a été tranchée par une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée par l’arrêt rendu le 28 novembre 2017 par la cour d’appel de Versailles dans le litige porté devant le Tribunal de Commerce de Versailles par ACTION AIR contre les sociétés I et B. Les demandes d''ACTION AIR sont identiques aux demandes originaires dont le tribunal a déjà été saisi et qui ont été jugées.

MOTIFS du JUGEMENT

Sur l’intervention volontaire de l’Association Action Air à l’encontre de la société B

Attendu que la société B soulève in limine litis l’incompétence du tribunal de commerce de Versailles au profit des juridictions compétentes de son domicile.

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Attendu que l’Association Action Air fonde son action au visa de l’article 1240 du code civil : que néanmoins l’action introduite pour les membres de l’association est la conséquence de la rupture de la relation de travail ; que la cour d’appel de Versailles en a déduit, dans son arrêt du 28 novembre 2017, dans le litige opposant l’Association Action Air et les sociétés I Ltd et I J BV que les juridictions compétentes étaient celles où étaient domiciliées les sociétés I Ltd et I J BV ;

Attendu que pour les mêmes motifs exposés dans cet Arrêt, fondés sur la rupture de la relation de travail des salariés et non la responsabilité délictuelle et sur l’absence de preuve que les salariés ont accompli leur travail sous la direction et au profit de la société B, la juridiction compétente pour traiter des demandes d’Association Action Air formée contre la société B est la juridiction compétente du domicile de la société de droit allemand B ;

Attendu que l’article 8.2 du règlement européen n° 1215/2012, s’il offre au demandeur en garantie ou en intervention la possibilité de saisir la juridiction originaire, lui refuse cette possibilité si la demande n’a été formée que pour traduire celui qui a été appelé hors du ressort de la juridiction compétente ;

Attendu que l’Association Action Air ne peut ignorer les règles de compétences qui lui ont été opposées par l’arrêt de la cour d’appel de Versailles et en a une parfaite connaissance ; que l’intervention volontaire dans la procédure opposant Maître X ès-qualités aux sociétés I et B ne peut dans ces circonstances que viser à contourner les règles de compétences établies ;

Attendu que le tribunal dira se déclarera incompétent pour juger du litige opposant la société B et l’Association Action Air et la renverra à mieux se pourvoir, en application des dispositions de l’article 96 du code de procédure civile :

Sur la recevabilité de l’Association Action Air à l’encontre des sociétés I

Attendu que l’intervention volontaire de l’Association Action Air à l’encontre des sociétés I reposent le même fondement juridique, l’article 1382 du code civil devenu 1240 du code civil, opposent les mêmes parties et forment les mêmes demandes, visant au paiement d’une indemnité aux salariés, que l’action déjà intentée par l’Association Action Air à l’encontre des mêmes ;:

Attendu que la cour d’appel de Versailles a, par arrêt du 28 novembre 2017, renvoyé l’Association Action Air à mieux se pourvoir devant les juridictions de droit étranger compétentes ;

Attendu que constatant l’identité des parties, des fondements juridiques et des demandes l’intervention volontaire de l’Association Action Air à l’encontre des sociétés I Ltd, qu’au visa de l’article 1355 du code civil le tribunal la dira irrecevable en son intervention volontaire ;

Sur les demandes de Maître X contre I J et I Ltd

Attendu que la SAS ACE était contrôlée par I J, elle-même contrôlée par I Ltd ; que compte tenu des liens capitalistiques unissant I J à ACE, I J

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doit être considéré comme l’associé « dominant » de ÂCE : que de même I Ltd occupe une position comparable en raison de ses liens avec I J ;

Attendu que l’activité des 3 filiales de ACE consistait à : – commercialiser des équipements de climatisation (AIRWELL France) – fabriquer des équipements de climatisation (AIRWELL Industrie France) – fabriquer et commercialiser des équipements de traitement de l’air (WESPER Industrie France)

Attendu que ces équipements étaient destinés aux marchés des particuliers (branche RAC) et aux professionnels (branche CAC) ;

Attendu que I J s’est mise en recherche d’un repreneur pour la branche CAC et a, le 13 mai 2011, donné mandat à la Banque ROTHSCHILD dans ce but ; qu’après l’échec de la banque d’affaires I J a mandaté, le 23 mars 2012, ONEIDA cabinet de consultants qui devait, selon les termes mêmes de I J employés dans un courrier adressé à l’Administrateur Judiciaire le 9 mai 2014 par le conseil de I, trouver un partenaire « capable d’apporter aux sites de production de la charge supplémentaire…», le sauvetage du Groupe AIRWELL avait raisonnablement peu de chances d’aboutir sans l’appui d’une entreprise du secteur disposant, de surcroît, de la surface financière suffisante ;

Attendu que l’intérêt manifesté, le 9 juillet 2012, par F, entreprise spécialisée dans le traitement de l’air employant 700 salariés environ, pour une reprise totale ou partielle, pouvait rassurer I J sur la pérennité des sociétés du Groupe AIRWELL dans l’hypothèse de leur cession à cet opérateur allemand dans la mesure où le sauvetage du Groupe ne pouvait se réaliser, comme en conviennent les sociétés I dans leurs écritures, qu’à la condition d’augmenter la production de AIRWELL en s’adossant à un partenaire industriel ;

Attendu que I J a cédé le 30 juillet 2012 sa branche RAC à une sous-filiale de I Ltd, AIRWELL Residential ; qu’elle affirme, pour justifier cette cession, que cette branche faisait obstacle à la vente de la branche CAC ; que cependant elle ne démontre pas que cette cession ait été réalisée dans l’unique intérêt des sociétés du Groupe AIRWELL ;

Attendu qu’une fois transmis à ONEIDA, les engagements de confidentialité de B et F, une première réunion s’est tenue le 5 septembre 2012 à Paris avec les représentants de ces 3 sociétés et ceux d’AIRWELL ; qu’au cours de celle-ci B s’est présentée comme un investisseur de moyen terme avec une durée de détention des sociétés rachetées entre 5 et 7 ans ; que le 4 octobre 2012 B a transmis un document intitulé « concept de coopération par F et B » (Coopération Concept by F & B) ; que ce document présentait B et mettait en exergue les capacités industrielles et technologiques de F qui apparaissait ainsi comme l’élément moteur de la restructuration de AIRWELL ;

Mais attendu que le projet se décomposait en plusieurs phases, dont la première reposait intégralement sur l’efficacité de B, suivie, en cas de réussite de la première, de la création d’une joint-venture entre B et F voire la cession totale à F de AIRWELL, une fois restructurée (possible scenario p21) ; qu’à ce stade I ne pouvait avoir aucune certitude sur la réelle implication de F ;

Attendu que le 19 octobre 2012, B a adressé une lettre d’intention non contraignante à ONEIDA dans laquelle elle explicitait sa proposition de reprendre 100% du capital de AIRWELL et WESPER dans un premier temps puis, une fois ces sociétés réorganisées, la cession de l’ensemble à F ou à une « coentreprise » associant B et F ;

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Attendu que dans cette lettre B indiquait qu’elle serait assistée par l’équipe de direction de F (moreover the B team will be assisted by le management of F, in order to levy synergy potential….p3) : que B y évoquait comme source principal de synergie, la fermeture potentielle d’un site allemand de production de F situé à Bexbach, avec transfert de ses activités au profit de AIRWELL : que cette lettre d’intention, ne comportait aucun élément permettant d’établir la volonté de F de participer activement au « concept de coopération » visé supra :

Attendu que le prix de cession de 1 € s’entendait après injection de liquidités pour un montant estimé entre 4 et 7 000 000 €;

Attendu que début février 2013 B et F ont visité les sites industriels de AIRWELL ; que si une « data room » a été ouverte par AIRWELL le 4 avril 2013, aucune pièce ne prouve que F ait pris connaissance des documents mis à disposition des acquéreurs potentiels ; qu’il n’est pas prouvé que F avait accès à cette « data room » ; que l’implication de F dans le projet restait au stade d’hypothèse de travail et de «concept»; qu’une fois la visite des sites de production accomplie, F n’a plus participé à aucune réunion de travail avec les dirigeants du Groupe AIRWELL ; qu’elle était notamment absente lors de la présentation de l’offre de reprise aux représentants du personnel le 15 mai 2013 :

Attendu que le 3 mai 2013, le fonds de pension nord-américain AIAC a adressé à ONFIDA une lettre marquant son intention d’acquérir les sociétés du Groupe AIRWELL au prix de 1 € à la condition qu’elles disposent d’une trésorerie de 18 000 000 € : que parallèlement B exigeait que les sociétés à acquérir soient dotées d’une trésorerie de 8 500 000 € : que I J, qui affirme que l’offre de AIAC ne présentait aucun caractère sérieux, aurait dû, au vu de l’écart financier entre les deux offres et de l’absence de certitude quant au partenariat allégué avec F, s’interroger sur les capacités de B de mener à bien l’opération projetée ;

Attendu que le 29 mai 2013 I J et B ont signé une convention de cession des actions de ACE moyennant le versement de 1 € et le 13 juin suivant, l’acte définitif de cession est régularisé par les sociétés I J et AC Beteiligungen, propriété de B ; que la vente des sociétés du Groupe AIRWELL s’effectue sans qu’une quelconque convention de partenariat ultérieur entre B et F ne soit produite ni même mentionnée ;

Attendu que pour remplir son engagement d’apport, I a laissé environ 3 000 000 € de liquidités dans les comptes de ACE et acquis, au travers d’une filiale, l’immeuble de Tilliéres appartenant à ACE pour le prix de 5 600 000 €, prix qui n’a pas été fixé à dire d’expert, dans le cadre d’une opération de cessions-bails s’étalant sur 12 années avec 2 ans de différé, moyennant un loyer annuel de 900 000 € ; que cet apport de I J se traduisait par une diminution corrélative de l’actif des Sociétés du Groupe AIRWELL et n’était pas de nature à favoriser une éventuelle relance économique des sociétés du Groupe AIRWELL dès lors que son besoin de trésorerie mensuelle s’élevait à 1 000 000 € ;

Attendu qu’en procédant de la sorte, I garantissait son apport de 5 600 000 € dans l’hypothèse de la défaillance des sociétés du Groupe AIRWELL ou réalisait une opération financière lucrative en cas contraire ; que de surcroît I n’a pas abandonné son prêt d’actionnaire antérieur d’un montant de 5 000 000 € portant intérêt au taux de 7% l’an ; qu’elle a produit une créance à ce titre dans le cadre de la procédure collective concernant le Groupe

AIRWELL ;

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Attendu que I Ltd et I J ont rempli leur devoir d’actionnaire direct ou indirect en soutenant financièrement le Groupe AIRWELL ; qu’il ne peut leur être fait grief d’avoir ignoré les conséquences de l’article L631-1 du code de commerce, dès lors que la déclaration d’état de cessation de paiement d’une entreprise incombe à ses dirigeants ; que ni I Ltd ni I J n’avaient qualité légale ou de fait de dirigeant du Groupe AIRWELL ;

Attendu que I J et I Ltd soutiennent qu’elles ont cherché à vendre le Groupe AIRWELL à un acteur industriel reconnu dans le domaine du traitement de l’air capable d’apporter un chiffre d’affaires suffisant pour relancer le groupe ; que seul F répondait à ce critère dans le schéma envisagé ; que néanmoins elles n’ont jamais cherché à vérifier la réelle implication de F dans le projet de rachat soutenu par B ni à connaître le contenu du partenariat supposé exister entre ces 2 sociétés ;

Attendu que les faits exposés supra démontrent que I J et I Ltd avaient tous les éléments pour apprécier le caractère irréaliste du plan proposé par B en l’absence d’un partenariat avec F ; que, de bonne foi elles ne pouvaient que différer la cession envisagée jusqu’à l’établissement d’une certitude ; que I J et I Lid ont agi dans leur unique intérêt et fait preuve d’une légèreté blämable en ne s’assurant jamais des réelles possibilités de succès de l’opération projetée ;

Attendu que cette légèreté est constitutive d’une faute intentionnelle d’une particulière gravité, incompatible avec l’exercice normal des prérogatives attachées à la qualité d’associé, de nature à engager leur responsabilité ;

Mais attendu que Maître X ne rapporte pas la preuve que cette faute soit directement à l’origine de la déconfiture ultérieure des sociétés du Groupe AIRWELL ; qu’à défaut d’établir le lien de causalité entre ladite faute et le préjudice des créanciers, Maître X est mal fondé à réclamer la condamnation de I J et I Lid ;

Attendu que , à titre subsidiaire Maître X ès-qualités demande au tribunal d’ordonner une mesure d’expertise aux fins de déterminer l’aggravation de l’insuffisance d’actif entre le 31 juillet 2012 et le 1° avril 2014 d’une part et entre le 11 juin 2013 et 1°" avril 2014 d’autre part ; que cependant une mesure d’expertise ne pourrait être ordonnée que si Maître X ès-qualités établissait un lien de causalité entre les fautes commises et le préjudice qu’il affirme avoir subi, qu’en l’absence d’un tel lien une mesure d’expertise est sans objet ; que le tribunal déboutera Maître X de sa demande d’expertise ;

Qu’en conséquence le tribunal déboutera Maître X de sa demande de condamnation des sociétés I J et I Ltd ;

Sur les demandes Maître X ès-qualités dirigées contre B

Attendu que le G demande au tribunal de condamner B in solidum avec I J et I Ltd à lui payer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle au visa de l’article 1240 du code civil, à titre de dommages et intérêts et pour le compte des créanciers, les sommes de :

—  19 921 910,91 € pour l’insuffisance d’actif de ACE

—  39 433 671,65 € pour l’insuffisance d’actif de AIRWELL France

—  17 043 575,17 € pour l’insuffisance d’actif de AIRWELL Industrie France

—  17 791 822,20 € pour l’insuffisance d’actif de WESPER Industrie France ;

Attendu que le G soutient que B a eu une attitude fautive en participant activement au rachat du Groupe AIRWELL et sa revente immédiate à des opérateurs sans

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Surface financière ni expérience réelle du retournement d’entreprises dont la seule volonté consistait à s’approprier les liquidités des entreprises ; qu’ainsi elle a pris une large part à la cession délictueuse du Groupe ;

Attendu que B indique dans ses écritures que lors des différentes présentations de son projet elle a constamment exposé que le partenariat avec F constituait « l’élément central de la réussite du projet et qu’elle entendait s’appuyer sur l’équipe de direction existante pour conduire la restructuration de AIRWELL » ; qu’elle produit un échange de courriels entre elle et F en date du 7 mai 2013 dans lesquels cette dernière évoque les synergies envisagées; qu’elle indique également: «Nous ne pouvons malheureusement pas écrire que nous apportons les capacités de F à Pons, etc, car les gens de BL nous sauteraient dessus et le marché comprendrait…. » ; que cet échange démontre l’existence de relations entre les deux sociétés :

Attendu que si ces courriels attestent du maintien des relations entre B et F, ils ne permettent pas d’en conclure à l’existence d’un partenariat formalisé : qu’à 8 jours de la présentation au Comité Central d’Entreprise et à 16 de celle à la Délégation Unique du Personnel, auxquels ce partenariat a été présenté comme le point fort du schéma de reprise, B n’avait pas obtenu un engagement formel et définitif de F ni même une simple lettre d’intention ; qu’elle s’est obligée à l’égard de I le 29 mai sans aucune garantie de F tout en l’ayant présentée comme l’acteur clé du succès de la reprise qu’elle envisageait ;

Attendu qu’au cours de l’échange de courriels précité B écrit à BELINERLUFT : « Ci- joint quelques diapositives pour le sujet Airwell. Nous devrions les présenter au comité d’entreprise, donc prudence avec les déclarations trop précises » ; que les termes utilisés mettent en évidence un manque de sincérité dans les propos que B sera amenée à tenir aux représentants du personnel ;

Attendu que B fait valoir que la démission des mandataires sociaux du Groupe AIRWELL et les tergiversations de F l’ont contrainte à chercher un acquéreur dans l’urgence ;

Mais attendu que si les dirigeants susvisés ont renoncé à leur mandat social ils ont été maintenus dans leur rôle opérationnel aux sein des entreprises ; que B ne justifie nullement qu’elle pouvait encore supposer l’intérêt de F manifeste le 29 mai 2013 ; que la revente de ACE par la filiale de B le 29 juin 2013 à AW Industries s’est réalisée dans délai anormalement court pour une opération de ce type ; que les opérations ayant mené à la cession d’ACE par I avaient duré au moins une année ; qu’il apparaît que celle-ci était déjà envisagée avec Monsieur D dès le 10 mai 2013 lorsque celui-ci avait régularisé un accord de confidentialité avec B ;

Attendu qu’en se portant acquéreur du Groupe AIRWELL, sans avoir contractualisé un partenariat avec F, dont elle a toujours affirmé son rôle primordial dans l’opération, alors qu’elle se savait parfaitement incapable de conduire seule le projet envisagé et en le recédant à FS BETEILIGUNGEN dix-huit jours après son acquisition du Groupe AIRWELL à AWI, B a agi avec précipitation et fait preuve d’une légèreté constitutive d’une faute ;

Mais attendu qu’à défaut d’établir le lien de causalité entre ladite faute et le préjudice des créanciers, Maître X est mal fondé à réclamer la condamnation de B.

Qu’en conséquence le tribunal déboutera Maître X de ce chef de demande

(M

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Sur les demandes reconventionnelles de I Etd

Dirigée contre Maître X ès-qualités

Attendu que I Ltd demande au tribunal de condamner le G à lui payer la somme de 1 000 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive dirigée à son encontre alors qu’elle n’était pas actionnaire de ACE ; qu’elle est une société cotée au marché boursier de Tel-Aviv: qu’elle a dû l’informer de la demande de paiement de la somme de 113 000 000€; que cette information a entraîné une chute du cours de ses actions et contribue à l’instauration d’un climat néfaste ;

Attendu que I Ltd soutient qu’en tout état de cause, la passif du groupe AIRWELL n’excédera pas 23 000 000 €, ce que n’ignore pas le G, mais que celui-ci en exagérant les sommes tente de faire pression contre I Ltd pour obtenir une transaction ; que cependant, le défendeur procède ici par simple allégation sans rapporter la preuve de ses assertions, ni de la réalité de son préjudice, pas plus que de l’existence d’un lien de causalité entre l’action intentée et le préjudice allégué ;

Mais attendu que chaque justiciable jouit du droit d’ester en justice et que l’exercice de ce droit ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou lorsqu’une partie a conscience du caractère infondé de sa demande ; qu’en l’espèce Maître X ès-qualités a agi, dans le cadre d’une procédure collective dans l’intérêt des créanciers du Groupe AIRWELL ; qu’il n’a commis aucune faute en introduisant la présente instance ;

Sur les demandes reconventionnelles de I J

Dirigée contre Maître X ès-qualités Attendu que I J demande au tribunal de condamner le G à lui payer la somme de 250 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Mais attendu que chaque justiciable jouit du droit d’ester en justice et que l’exercice de ce droit ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou lorsqu’une partie a conscience du caractère infondé de sa demande ; qu’en l’espèce le comportement fautif de Maître X ès-qualités n’est nullement caractérisé ;

Dirigée contre Maître X à titre personnel

Attendu que les sociétés I Ltd et I J BV demandent au tribunal de condamner personnellement Maître X à lui payer la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive dans la mesure où il agit en dehors de son mandat de G judiciaire en réclamant au défendeur des sommes inexistantes ;

Attendu que, pour demander la condamnation de Maître X à titre personnel la société I Ltd demande au tribunal de faire application des dispositions de l’article 698 du code de procédure civile qui énonce que « les dépens afférents aux instances , actes et procédure d’exécution injustifiés sont à la charge des auxiliaires de justice qui les ont faites sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés » ; qu’en l’espèce le caractère injustifié de l’action de Maître X ès-qualités n’est pas caractérisé au vu de ce qui précède,

Qu’en conséquence le tribunal déboutera I Ltd et I J BV de leurs demandes reconventionnelles ;

=

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Sur la demande reconventionnelle de B

Attendu que B demande au tribunal de condamner le G à lui payer la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive :

Mais attendu que chaque justiciable jouit du droit d’ester en justice et que l’exercice de ce droit ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou lorsqu’une partie a conscience du caractère infondé de sa demande ; qu’en l’espèce Maître X ès-qualités a agi, dans le cadre d’une procédure collective dans l’intérêt des créanciers du Groupe AIRWELL ; qu’il n’a commis aucune faute en introduisant la présente instance ;

Qu’en conséquence le tribunal déboutera B de sa demande reconventionnelle :

Sur les demandes formées au visa de l’article 700 du code de procédure civile

Attendu qu’il ne serait pas inéquitable de laisser à chacune des parties la totalité des frais qu’elles ont dû engager en l’instance ; que le tribunal dira n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

Sur l’exécution provisoire

Attendu que, compte tenu du jugement qui sera rendu, il n’y aura lieu à l’ordonner ;

Sur les dépens

Attendu que les dépens seront mis à la charge de Maître H X ès-qualités de G judiciaire de la SAS ACE, de la SAS AIRWELL FRANCE, de la SAS AIRWELL INDUSTRIE FRANCE, et de la SAS WESPER INDUSTRIE FRANCE, qui succombera en l’instance

PAR CES MOTIFS LE TRIBUNAL

— Dit l’Association Action Air irrecevable en ses demandes formées à l’encontre de la société de droit israélien I Ltd ;

— Dit l’Association Action Air irrecevable en ses demandes formées à l’encontre de la société de droit hollandais I J BV :

— Se déclare incompétent pour traiter des demandes formées par L’ASSOCIATION ACTION AIR à l’encontre de la société de droit allemand B AS AT AG ;

— __ Renvoie l’Association Action Air à mieux se pourvoir ;

— _ Déboute Maître X ès-qualités de G des SAS ACE, SAS AIRWELL FRANCE, SAS AIRWELL INDUSTRIE FRANCE, SAS WESPER INDUSTRIE FRANCE de l’ensemble de ses demandes :

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— Déboute la société de droit israélien I Ltd, la société de droit hollandais I J BV et la société de droit allemand B AS AT AG de l’ensemble de leurs demandes reconventionnelles formées à l’encontre de Maître X ès-qualités de G des SAS ACE, SAS AIRWELL FRANCE, SAS AIRWELL INDUSTRIE FRANCE, SAS WESPER Industrie ;

— Déboute la société de droit israélien I Ltd, la société de droit hollandais I J BV de leur demande reconventionnelle dirigée contre Maître H X à titre personnel,

— Dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— _Condamne Maître H X ès-qualités de G judiciaire des SAS ACE, SAS AIRWELL FRANCE, SAS AIRWELL INDUSTRIE FRANCE, et SAS WESPER INDUSTRIE FRANCE aux dépens de l’instance dont les frais de greffe s’élèvent à la somme de 221.52 €.

LE GREFFIER, L ESIDENT,

TT

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Tribunal de commerce de Versailles, 4ème chambre, 29 juin 2018, n° 2015F01023