Tribunal correctionnel de Bordeaux, 3 juin 2020, n° 2157/2020

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. corr. Bordeaux, 3 juin 2020, n° 2157/2020
Numéro(s) : 2157/2020

Texte intégral

Cour d’Appel de Bordeaux

EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE. Tribunal judiciaire de Bordeaux DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE BORDEAUX Jugement prononcé le : 03/06/2020

5 EME CHAMBRE

2157/2020 N° minute

18093000061 No parquet

JUGEMENT CORRECTIONNEL

A l’audience publique du Tribunal Correctionnel de Bordeaux le TROIS JUIN DEUX

MILLE VINGT,

Composé de :

Président : Monsieur REYNAL Alain, vice-président,
Madame E F, vice-président, Assesseurs : Monsieur MISCHIERI Robert, magistrat à titre temporaire,

Assistés de Madame CHEVALLOT Isabelle, greffière,

en présence de Madame PISON Amélie, vice-procureur de la République,

a été appelée l’affaire

ENTRE: Monsieur le PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE, près ce tribunal, demandeur et

poursuivant

PARTIES CIVILES :

Madame G D, demeurant: c/ Maître X K […]

Grosse le: l'[…], partie civile, non comparante représentée par Maître K X, avocat au barreau de Expédition le : ROUEN, substituée par Maître KLEIN Noémie, avocat au barreau de PARIS, 28107/2010 Madame H I, demeurant: c/ Maître X K 23 rue Grosse le: de l'[…], partie civile, non comparante représentée par Maître K X, avocat au barreau de Expédition le : ROUEN, substituée par Maître KLEIN Noémie, avocat au barreau de PARIS,

28607/2020 ayant pour représentant légal : Madame G D, demeurant: c/ Maître K X […]

l'[…],

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A copie 03/09/[…]


Monsieur H J, demeurant : c/ Maître X K […], partie civile, non comparant représenté par Maître K X, avocat au barreau de ROUEN, :0

, avocat au barreau de PARIS, Expédition ituée par Maître KLEIN Noémie 28162/2 JANUSIAT UO XUAROROO 30 ayant pour représentant légal :

Madame G D, demeurant: c/ Maître X K […],

Grosse le: Madame AK-H AI, demeurant: c/Maître K

X […], partie civile, Expédition le : non comparante représentée par Maître K X, avocat au barreau de 28657/2020 ROUEN, substituée par Maître KLEIN Noémie, avocat au barreau de PARIS,

ET

Prévenu

Nom : L Q, B, C NATURE DU JUGEMENT:

D IDC CAS né le […] à […] le: de L B et de M N

Nationalité française DILIGENCES:

Casier judiciaire Situation familiale : divorcé Extrait écrou

Situation professionnelle directeur d’agence bancaire Liasse SPC (Réf 7)

RCP (06/1010 Antécédents judiciaires : déjà condamné Expertise

SME + Notif

Demeurant: c/ M. et Mme L B […]

Jour-Amende LA BREDE Exp confiscation

I.T.F.

Fijais Situation pénale: placé sous contrôle judiciaire 6ème chambre

Exp pour signification (P) Placement sous contrôle judiciaire en date du 04/04/2018 Maintien sous contrôle judiciaire en date du 13/12/2019

comparant assisté de Maître WIART Florence, avocat au barreau de BORDEAUX

,

Prévenu du chef de :

HOMICIDE INVOLONTAIRE PAR CONDUCTEUR D’UN VEHICULE

TERRESTRE A MOTEUR COMMIS AVEC AU MOINS DEUX

O P faits commis le 1er avril 2018 à Y

Intervenant :

MAAF ASSURANCE, dont le siège social est sis […]

[…], expedition. ee. non comparant représenté par Maître DASSAS Eric, avocat au barreau de

BORDEAUX, substitué par Maître LAJUNCOMME Benjamin, avocat au barreau de 201072010

Bordeaux,

DEBATS

A l’appel de la cause, le président a constaté la présence et l’identité de L Q et a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.

Le président informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

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Le président a instruit l’affaire, interrogé le prévenu présent sur les faits et reçu ses déclarations.

L’avocat de G D, H I, H J et

AK-H AI, a été entendue en sa plaidoirie.

Le ministère public a été entendu en ses réquisitions.

Maître WIART Florence, conseil de L Q, a été entendue en sa plaidoirie.

Le prévenu a eu la parole en dernier.

Le greffier a tenu note du déroulement des débats.

Le tribunal, après en avoir délibéré, a statué en ces termes :

Le prévenu a été renvoyé devant le tribunal correctionnel par ordonnance de Monsieur

COURTIAL Q, juge d’instruction, rendue le 13 décembre 2019.

L Q a comparu à l’audience assisté de son conseil ; il y a lieu de statuer contradictoirement à son égard.

Il est prévenu d’avoir à Y (33), en tout cas sur le territoire national, le ler avril 2018, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, étant conducteur

d’un véhicule terrestre à moteur, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, involontairement causé la mort de R S, avec ces O qu’il a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km par heure et qu’il a omis de s’arrêter alors qu’il venait de causer ou d’occasionner un accident et a ainsi tenté d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il pouvait avoir encourue ;, faits prévus par T-1, T U

[…] et réprimés par T-1 W, […]

SUR L’ACTION PUBLIQUE :

FAITS:

Le ler avril 2018 à 21h50, un effectif de gendarmerie se rendait au lieu-dit Migelane, sur la commune de Y (33650), suite à l’appel de Monsieur AA AB, qui signalait la présence de débris sur le bas-côté de la route, ainsi que d’un vélo dans le fossé (D2, D41).

A leur arrivée, les gendarmes procédaient à un gel des lieux et constataient la présence d’un corps inerte dans le fossé, la tête immergée dans l’eau stagnante, porteur d’un casque vert, ainsi que d’un sac à dos réfléchissant et de vêtements cyclistes (D2, D8). Ils relevaient une amputation de la jambe gauche, au niveau du genou, dont seul le tibia restait solidaire du corps et retrouvaient le reste de la jambe à plusieurs mètres de celui-ci.

Un vélo de couleur verte, type VTT, fortement endommagé, était situé à proximité immédiate du corps.

Sur la chaussée, les gendarmes trouvaient, à une distance de 11 mètres 70 du corps, plusieurs débris provenant d’un véhicule automobile et en particulier le miroir et la coque d’un rétroviseur de couleur noire, portant la marque PEUGEOT (D4, D8).

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Les documents administratifs, trouvés dans les effets personnels de la victime, permettaient de l’identifier comme étant R H, ressortissant allemand, âgé de 47 ans.

Les sapeurs-pompiers, puis le médecin du SAMU, procédaient à des tentatives de réanimation en vain.

Le décès était constaté le ler avril 2018 à 23h35 (D3, D22-1, D22-2).

Entendu le 02 avril 2018, AA AB disait s’être rendu sur les lieux, après avoir alerté la gendarmerie, suite à un appel du fils de son épouse, AC AD, le 1 er avril 2018, vers 21h30, qui lui indiquait la présence d’un vélo dans le fossé et des débris sur la chaussée, faisant présumer un accident de la route (D9).

AC AD, également entendu, confirmait les dires de son beau-père et expliquait qu’en passant, avec son véhicule, son attention avait été attirée par des lumières blanche et rouge, sur le bas-côté de la route.

Il avait constaté la présence d’un vélo dans le fossé, ainsi que de nombreux bouts de plastiques éparpillés sur la chaussée.

S’approchant du fossé, il avait cherché la présence d’une personne blessée à proximité du vélo, mais n’avait vu qu’un gros sac à dos de couleur sombre, au fond du fossé et n’avait entendu aucun bruit.

A l’aide d’un automobiliste qui l’avait rejoint, il évacuait les débris de plastique et éteignait les deux LED pour vélo et les jetait de l’autre côté du fossé. Ce n’est qu’à son retour, après l’arrivée des gendarmes et des secours qu’il voyait le corps immergé dans le fossé (D 11).

Le lendemain, sur ses indications, les gendarmes trouvaient les LED (D34).

Le 02 avril 2018 à 20h50, B L se rendait à la brigade de. gendarmerie de LEOGNAN pour signaler que son fils, Q L, avait eu un accident la veille, à une heure compatible avec celle des faits, sur la même route et que son véhicule était endommagé (D36).

Les gendarmes se rendaient alors au domicile de Q L et constataient la présence d’un véhicule de marque PEUGEOT modèle 308, de couleur noire immatriculé ET-388-ZY, comportant des traces importantes de choc, notamment le phare avant droit brisé, le rétroviseur avant droit arraché, le pare-brise brisé dans sa partie inférieure droite, ainsi que des traces de liquide rougeâtre sur le pare-brise. Le véhicule était alors saisi et placé sous scellé (D37).

Les techniciens de l’identification criminelle de la BDRIJ de Bordeaux réalisaient sur le véhicule, le 04 avril 2018, suivant des prélèvements biologiques et de peinture.

Ils relevaient, notamment, la présence de traces rougeâtres et de résidus de matière organique sur le bloc optique, plusieurs traces glissées sur la carrosserie ainsi que des reflets verts dans la peinture noire du pare choc (D78, D79).

L’historique des défauts relevés par l’ordinateur de bord du véhicule mettait en évidence l’enregistrement d’un défaut de sonde de température extérieure intégrée au rétroviseur droit du véhicule le ler avril 2018 à 21h14 minutes 49 secondes et permettait de fixer le caractère tournant du moteur lors de l’apparition du défaut avec un régime de 3650 tours par minute et une vitesse de 151 km par heure (D39).

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Le plateau d’identification véhicule de l’IRCGN, ayant procédé à une analyse des débris de véhicule trouvés sur les lieux, indiquait que le véhicule en cause était de marque PEUGEOT, modèle 308 (D40), soit le même modèle que le véhicule saisi.

B L précisait avoir été alerté la veille par son épouse, celle-ci lui indiquant que leur fils, Q L, lui avait fait part d’un accident avec un animal survenu au lieu et heure des faits.

Cette dernière, craignant que leur fils ne soit impliqué, s’était déplacée chez lui pour

l’avertir de l’accident et avait constaté que son véhicule était endommagé.

B L y était allé à son tour et, constatant l’état de panique de son fils qui refusait de se rendre à la gendarmerie, il s’y déplaçait pour exposer ses doutes sur son implication (D14).

Les déclarations de N M, la mère de Q L, concordaient avec celle de son époux (D13).

Simon DARCOS, entendu en qualité de témoin, disait avoir quitté son domicile à

GRADIGNAN, le 1er avril 2018 après 20h40 et avoir dépassé un cycliste correspondant à la description de la victime, qui circulait de façon normale, en direction de Y.

Il précisait que le vélo était doté d’un dispositif lumineux arrière, clairement visible de nuit, que le cycliste portait des équipements dotés de bandelettes réfléchissantes et que lui même roulait à une vitesse de 80 km par heure. Il ajoutait que vers 21h05, soit peu après avoir doublé le cycliste, il avait été rattrapé par un véhicule qu’il identifiait formellement comme étant une PEUGEOT 308 GTI noire, roulant à très vive allure et le doublant rapidement (D15).

AE AF, également entendu en qualité de témoin, avait reconnu le casque porté par la victime comme étant celui d’un cycliste aperçu le jour des faits, aux alentours de 20h50, au niveau de la piscine de VILLENAVE D’ORNON, porteur d’un sac avec bandes réfléchissantes, circulant tranquillement sans zigzaguer (D19).

Q L était entendu dans le cadre d’une mesure de garde à vue, la notification de ses droits ayant été différée en raison d’un taux d’alcoolémie de 0,77 mg/L d’air expiré, lors de son interpellation (D42, D43). Il expliquait que le jour des faits, après avoir bu un verre de vin avec sa compagne, à son domicile à Y, il s’était rendu à GRADIGNAN, aux alentours de 20h40, afin de récupérer une commande pour diner alors que sa compagne était restée chez lui.

Il avait pris le chemin inverse allant de LEOGNAN à Y à 21h00.

Il indiquait qu’il faisait nuit, que ses feux de conduite bénéficiaient d’un système

d’allumage automatique, qu’il écoutait vraisemblablement la radio et qu’il n’avait pas manipulé son téléphone pendant le trajet.

Il disait n’avoir pas consommé de stupéfiants et n’avoir ressenti aucun malaise. Il expliquait que, se trouvant à 400 mètres de la zone industrielle de MIGELANE, roulant à une vitesse d’environ 100 km par heure et alors qu’un véhicule arrivait en face, il avait senti un grand choc sur le côté droit de la voiture sans que celle-ci ne dévie de sa trajectoire.

Il ajoutait n’avoir pas vu de lampe LED, avoir cru percuter un sanglier et avoir ralenti sans pour autant s’arrêter.

Il avait senti un de ses pneus se dégonfler peu avant d’arriver à son domicile, où il avait constaté que sa carrosserie était cabossée.

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Il envisageait de contacter son assurance le surlendemain.

Il avait ensuite passé la soirée et la nuit avec sa compagne et il s’était aperçu, le lendemain matin, de l’ampleur des dégâts sur son véhicule et notamment la fissure du pare brise, la présence de poils roux et des traces de sang au niveau de la portière avant droite.

Il exprimait des regrets sur sa possible implication dans l’accident, ayant provoqué le décès de R H (D44).

Entendu une deuxième fois, il variait dans ses déclarations, en ce qu’il disait avoir bu deux verres de vin et non un seul, avant de quitter son domicile, mais les confirmait pour le surplus (D45).

Entendu une troisième fois, il reconnaissait avoir pu rouler à 151 km par heure, précisant qu’il ne sentait pas sa vitesse. Il disait ne pas avoir vu les traces de peinture verte sur son véhicule.

Enfin, il précisait avoir pris 4 anxiolytiques, au cours de la journée du 1er avril 2018, ainsi que des antidépresseurs et un régulateur d’humeur (D46).

L’audition de AG AH, compagne de Q L, confirmait les dires de ce dernier sur le déroulement de la soirée et précisait qu’il n’avait pas bu plus qu’un verre de vin avant de prendre le volant. (D 12). Ces déclarations étaient confirmées par la géolocalisation des téléphones de Q L et sa compagne, dont il ressort que les relais entre son domicile et

GRADIGNAN s’étaient déclenchés entre 20h49 et 21h05, puis entre GRADIGNAN et son domicile, via la route d’ARCACHON entre LEOGNAN et Y, lieu des faits, entre 21h05 et 21h20 (D103).

Le 04 avril 2018, une information était ouverte à l’encontre de Q L, du chef d’homicide involontaire par conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, commis avec au moins deux O P, délit de fuite et grand excès de vitesse.

Le placement sous contrôle judiciaire était requis. (D52).

Entendu dans le cadre de l’interrogatoire de première comparution le même jour, Q L réitérait ses déclarations, précisant ne pas s’être aperçu de la perte de son rétroviseur, en raison du stress provoqué par le choc.

Il était mis en examen du chef (D54) et placé sous contrôle judiciaire.

Le rapport d’autopsie médico-légale, réalisée par les docteurs GROSLERON et Z, le 04 avril 2018, indiquait que le décès était consécutif à un syndrome asphyxique, par noyade, associé à une hémorragie externe, sur amputation de la jambe gauche; il ne pouvait être exclu que la mort de la victime aurait pu être évitée par une intervention rapide des secours (D56).

Le rapport toxicologique, réalisé le 11 juin 2018, mettait en évidence la présence de psychotropes dans le sang de Q L, le lendemain des faits et notamment de prazepam (lysanxia, anxiolytique sédatif), nordiazepam (tranxene) et oxazepam (seresta ou métabolite du nordiazepam).

La prise de ces molécules, ayant un effet néfaste sur la conduite, est soumise au pictogramme rouge « ne pas conduire » selon arrêté du 13 mars 2017.

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La présence de Lamictal, un antiépileptique, utilisé comme antidépresseur et anxiolytique dans certains troubles bipolaires de l’adulte était également mise en évidence et soumise au pictogramme orange « soyez très prudent », concernant la conduite automobile (D68).

Le rapport d’accidentologie du cabinet ANDURAND, en date du 05 octobre 2018

(D73), concluait notamment, au fonctionnement normal du système de freinage et des feux de positions, avec allumage automatique.

Il s’agissait d’un choc tangentiel de très forte intensité, au niveau de l’avant droit du véhicule et arrière du vélo, ayant notamment engendré la rupture du moyeu arrière, la désolidarisation du dérailleur et de la chaîne, la déformation des haubans, la coupure en deux parties de la jante arrière, la rupture du frein arrière et la déformation du porte bagage. Le cycliste avait « cabré » avant de passer sur le capot du véhicule et d’être éjecté dans le fossé.

L’expert mettait en avant la correspondance entre la largeur du porte bagage du vélo et la trace constatée sur le côté droit du capot moteur du véhicule. Il précisait que le vélo avait effectué une rotation à 180° sur le véhicule et que le rétroviseur avait été projeté à 19,15 mètres en avant.

Enfin, il confirmait les constatations techniques, quant à la vitesse de celui-ci, la fixant

à 151 km/heure pour un impact ayant eu lieu à 21h14 minutes et 41 secondes. La survenance de l’accident était attribuée à une vitesse très excessive liée à une alcoolémie.

Une contre expertise, réalisée le 15 février 2019, par K AM AN (D116), expert accidentologue, confirmait que la vitesse retenue, lors du choc, était de

151 km par heure, précisant que le champ de vision du conducteur automobile était réduit de 20 à 25° eu égard à la vitesse.

Il ajoutait que le vélo étant sur la même voie et, ne traversant pas, était parfaitement visible par l’éclairage à LED et en concluait que l’automobiliste n’avait adapté ni sa vitesse, ni son comportement à la situation.

Il indiquait que le bruit sur la carrosserie n’avait pas pu être confondu avec celui d’un animal en raison de la présence de métal et que le choc sur le pare brise, équivalent à un coup de marteau était de nature à « faire sursauter tout conducteur »>.

Le pneu, éventré à deux reprises, s’était dégonflé immédiatement et avait déclenché les alarmes sonores et visuelles du véhicule.

Enfin, l’expert concluait que le choc était dû à une erreur du conducteur, qui pouvait avoir été provoquée par le traitement médical.

Interrogé sur les rapports d’expertise toxicologique et en matière d’accidentologie, Q L disait ne pas connaître l’effet de son traitement médicamenteux, précisant consulter un psychiatre qui ne l’aurait jamais alerté sur ce point, pas plus que son père qui a été son médecin traitant pendant des années.

Il contestait la survenance d’une alarme sonore, à la suite de l’éventration du pneu, mais avait bien vu le signal lumineux d’alerte sur le tableau de bord. Il confirmait ses précédentes déclarations pour le surplus (D118).

Madame D G, ex-épouse de R H, se constituait partie civile, tant en son nom personnel qu’en celui de ses enfants mineurs (D59-D62).

AI AK-H, mère de la victime faisait de même (D63).

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Le 08 avril 2019, le juge d’instruction rendait un avis de fin d’information, en application des dispositions de l’article 175 du code de procédure pénale. (D123)

MOTIVATION :

Le mis en examen a reconnu les faits d’homicide involontaire sur la personne de R S à l’occasion de la conduite d’un véhicule par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, aggravé par la circonstance d’un excès de vitesse d’au moins 50 km par heure.

Le délit de fuite est partiellement contesté.

Sur les O et la matérialité de l’accident, les aveux sont corroborés par les constatations techniques, réalisées par les enquêteurs, sur les lieux, ainsi que sur le véhicule, mais également par la géolocalisation du téléphone, qui a démontré que Q L était passé sur le lieu des faits au moment correspondant à l’accident.

Il est établi que Q L avait pris des psychotropes, le jour des faits, jour de son anniversaire, et notamment des anxiolytiques, pour lesquels il ne pouvait ignorer, même s’ils étaient prescrits par son psychiatre, qu’ils présentaient des risques de somnolence et de baisse significative de vigilance, lors de la conduite d’un véhicule automobile.

La présence de mises en garde, sur les emballages en rouge et orange, n’a pu échapper

à son attention.

Enfin, Q L a reconnu avoir consommé du vin avant de prendre le volant, accentuant ainsi sa baisse de vigilance.

Il ressort des éléments du dossier et notamment des expertises accidentologiques que

Q L a percuté le vélo, parfaitement visible de nuit, dans les O qu’il décrit, par la combinaison, a minima, de la prise médicamenteuse et de la vitesse excessive.

La vitesse a été estimée par les services techniques de la gendarmerie, mais également par les deux experts en accidentologie à 151 km par heure, sur une route limitée à 90 km par heure, soit plus de 60 km par heure au dessus de la limite autorisée.

La circonstance d’excès de vitesse d’au moins 50 km par heure est donc parfaitement caractérisée.

Concernant la circonstance aggravante de délit de fuite, Q L a maintenu n’avoir rien vu, croyant avoir percuté un animal. Il a reconnu, cependant, avoir été stressé par la puissance du choc, constatant que son pneu était crevé, sans pour autant s’arrêter, alors que le rapport d’autopsie mentionne qu’il ne peut être exclu que la mort de la victime aurait pu être évitée par une intervention rapide des secours.

Q L a engagé sa responsabilité, en s’abstenant de s’arrêter, pour constater la réalité des dégâts, alors qu’il était conscient qu’il venait de causer un accident et que le bruit métallique du choc et la hauteur de l’impact auraient dû l’alerter sur la nature de ce qu’il avait percuté.

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La circonstance aggravante que constitue le délit de fuite est donc elle aussi caractérisée.

Par voie de conséquence, Q L sera déclaré coupable du chef d’homicide involontaire par conducteur d’un véhicule terrestre à moteur aggravé par deux O : délit de fuite et grand excès de vitesse.

PERSONNALITE :

Q L est né le […] à […]). Il est le deuxième d’une fratrie de trois enfants.

Il a vécu une enfance matériellement confortable, au sein d’un foyer, partagé avec une mère aimante et d’un père médecin peu disponible, au discours dévalorisant.

Après une scolarité compliquée à l’adolescence et un échec en faculté de droit, il a obtenu un BTS en alternance.

Il exerce les fonctions de directeur d’agence bancaire.

Il a eu deux enfants avec son ex-épouse, aujourd’hui âgés de 17 et 14 ans.

A la suite de la séparation, une garde alternée a été mise en place jusqu’en 2018.

Il a des rapports conflictuels avec son fils A ainsi qu’avec son ex-épouse.

Il est en couple, depuis les faits, avec la même compagne.

Selon le rapport d’expertise psychologique, en date du 23 novembre 2018, Q L présente un vécu et un ressenti péjoratif en lien avec des rapports père fils < délégitimants », ayant marqué sa personnalité et la construction de son identité et ce, sans possibilité d’amendement futur, en dépit d’une prise en charge.

La réussite de son parcours professionnel est contrebalancée par une souffrance psychique, de plus en plus intense.

Ainsi, le sujet présente-t-il une personnalité égocentrée, voire inhibée. Ses modes de fonctionnement sont inscrits dans une certaine rigidité et des réponses inadaptées, entrainant une altération du fonctionnement interpersonnel et social. La rupture avec son épouse a entretenu un ressenti abandonnique et une instabilité émotionnelle.

L’expert conclut que le mis en examen présente une personnalité pathologique, en raison d’un trouble abandonnique de la personnalité, qui le rend immature et vulnérable.

Son intelligence est normale et les faits ne semblent pas avoir fait l’objet d’une réflexion préalable, bien que Q L admette l’existence de O particulières, qui peuvent en être à l’origine.

Il reconnaît sa responsabilité.

L’expert psychiatre décrit, quant à lui, dans un rapport en date du 23 novembre 2018, un gros fumeur qui peut avoir des épisodes excessifs et ponctuels d’alcoolisation, ainsi qu’une consommation occasionnelle de cocaïne.

Il est suivi depuis plusieurs années par un psychiatre.

Il présente une véritable culpabilité et des regrets par rapport aux faits.

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Ses capacités de raisonnement sont intactes et il ne présente aucun phénomène délirant ou hallucinatoire.

Il est relevé une hyperémotivité, en relation avec l’abandon de ses proches, consécutive aux faits.

Q L a une tendance dépressive et anxieuse régulière depuis 1991 et une mauvaise maîtrise émotionnelle, elle aussi en relation avec les faits.

Il a un niveau intellectuel supérieur et est adapté sur le plan social et professionnel.

En conclusion, il n’est relevé aucun signe clinique ou trouble, en lien avec une affection mentale aigüe.

Toutefois, le sujet est suivi sur le plan psychiatrique et psychologique dans le cadre d’une décompensation anxieuse, ayant justifié la mise en place d’un traitement psychotrope, pour laquelle un diagnostic de trouble bipolaire a été récemment posé.

Il a exprimé de la compassion quant aux conséquences des faits pour l’entourage de la victime.

Q L ne présentait aucun trouble psychique ou neuropsychique, ayant aboli ou alterné son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits.

Il n’a pas agi sous l’emprise d’une force ou d’une contrainte à laquelle il n’aurait pas pu résister.

Il est accessible à une sanction pénale et ne présente pas de dangerosité particulière.

Son casier judiciaire porte mention d’une ordonnance pénale rendue le 20 septembre 2013 par le Tribunal correctionnel de Bordeaux, pour des faits du 08 février 2013, de conduite d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique, pour lesquels obligation lui a été faite d’accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière à titre principal.

Il a été placé sous contrôle judiciaire à l’issue de sa mise en examen.

Aucun incident dans le respect des obligations fixées n’est à relever.

Attendu que L Q n’a pas été condamné au cours des cinq années précédant les faits pour crime ou délit de droit commun aux peines prévues par les articles 132-30, 132-31 et 132-33 du code pénal ; qu’il peut, en conséquence, bénéficier du sursis simple dans les conditions prévues par les articles 132-29 à 132 34 de ce même code ;

Attendu qu’il résulte des éléments du dossier et des débats qu’il n’y a pas lieu à confiscation du véhicule ayant servi à l’infraction;

SUR L’ACTION CIVILE :

Attendu qu’il y a lieu de déclarer recevable, en la forme, constitution de partie civile de G D, en son nom personnel ;

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Attendu qu’il y a lieu de déclarer recevable, en la forme, la constitution de partie civile de H J, représenté par G D es qualité de représentante légale;

Attendu qu’il y a lieu de déclarer recevable, en la forme, la constitution de partie civile de H AJ, représenté par G D es qualité de représentante légale ;

Attendu qu’il y a lieu de déclarer recevable, en la forme, la constitution de partie civile de AK-H AI ;

Attendu qu’il y a lieu de constater que les parties civiles ne demandent pas de dommages et intérêts, l’indemnisation par l’assurance MAAF ASSURANCES SA ayant déjà eu lieu ;

Attendu que la MAAF ASSURANCES SA sollicite de débouter les parties civiles de toutes leurs demandes, plus amples ou contraires, éventuellement formulées à l’encontre de L Q et de la MAAF ASSURANCES SA, en ce compris les demandes fondées sur l’article 475-1 du code de procédure pénale et les dépens, en ce que l’indemnisation a déjà eu lieu ;

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et contradictoirement à l’égard de L Q, G D, H I,

H J et AK-H AI ;

SUR L’ACTION PUBLIQUE :

Déclare L Q, B, C coupable des faits reprochés de :

HOMICIDE INVOLONTAIRE PAR CONDUCTEUR D’UN VEHICULE

TERRESTRE A MOTEUR COMMIS AVEC AU MOINS DEUX

O P commis le 1er avril 2018 à Y

Condamne L Q, B, C à un emprisonnement délictuel de TROIS ANS ;

Dit qu’il sera sursis partiellement pour une durée de DEUX ANS ;

Et aussitôt, le président, suite à cette condamnation assortie du sursis simple, a donné

l’avertissement, prévu à l’article 132-29 du code pénal, au condamné en l’avisant que si il commet une nouvelle infraction, il pourra faire l’objet d’une condamnation qui sera susceptible d’entraîner l’exécution de la première peine sans confusion avec la seconde et qu’il encourra les peines de la récidive dans les termes des articles 132-9 et

132-10 du code pénal ;

à titre de peine complémentaire

Ordonne à l’encontre de L Q, B, C l’annulation de son permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pour une durée d’ UN AN;

Ordonne l’exécution provisoire ;

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Dit n’y avoir lieu à confiscation du véhicule ayant servi à l’infraction;

En application de l’article 1018 A du code général des impôts, la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 127 euros dont est redevable L

Q ; Le condamné est informé qu’en cas de paiement du droit fixe de procédure dans le délai d’un mois à compter de la date où il a eu connaissance du jugement, il bénéficie d’une diminution de 20% de la somme à payer.

SUR L’ACTION CIVILE:

Reçoit Madame G D en sa constitution de partie civile, en son nom personnel ;

Reçoit H J, représenté par G D es qualité de représentante légale et H AJ, représenté par G D es qualité de représentante légale, en leur constitution de partie civile;

Déclare recevables, en la forme, les constitution de parties civiles de G D en son nom personnel, H J, représenté par G D es qualité de représentante légale et H AJ, représenté par G

D es qualité de représentante légale ;

Constate que les parties civiles ne demandent pas de dommages et intérêts, au regard de l’indemnisation par l’assurance du prévenu;

Reçoit Madame AK-H AI en sa constitution de partie civile et constate qu’elle ne demande pas de dommages et intérêts, au regard de l’indemnisation par l’assurance du prévenu;

Déclare recevable, en la forme, la constitution de partie civile de AK H AI ;

Constate que les demandes de la MAAF ASSURANCES SA sont sans objet ;

et le présent jugement ayant été signé par le président et la greffière.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

E IR DE BO IA IC COPIE CERTIFIEE CONFORME D U A L’ORIGINAL J L

Le Greffier en chef A

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Tribunal correctionnel de Bordeaux, 3 juin 2020, n° 2157/2020